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00:00– Avec Christophe Boisbouvier, journaliste au service Afrique de RFI.
00:04Bonsoir Christophe. – Bonsoir Stéphanie.
00:06– Merci d'être là ce soir. Alors que s'est-il passé, Christophe, avec le recul ?
00:09Peut-on dire que c'était vraiment un putsch militaire hier ?
00:12– Oui, et il n'était pas que huit.
00:16En effet, il n'y en avait que huit sur l'écran de la télévision béninoise hier matin.
00:21Mais en fait, ils étaient beaucoup plus nombreux.
00:24Alors le chef de l'État dit un groupuscule, ils étaient certainement plus qu'un groupuscule.
00:31Le lieutenant-colonel Tigris, le chef de ces putschistes, c'est un officier des forces spéciales.
00:37Ce n'est pas n'importe qui.
00:40Le coup, visiblement, il a commencé par l'arrestation d'un certain nombre d'officiers supérieurs,
00:49de la hiérarchie militaire, notamment le chef d'état-major de l'armée
00:52et le chef d'état-major de la garde nationale.
00:54Ils ont essayé aussi de capturer le directeur du cabinet militaire.
00:58Et c'est peut-être ça qui a donné l'alerte et qui a permis au président,
01:06qui était peut-être encore à son domicile, de se mettre à l'abri quand les putschistes ont attaqué son domicile.
01:12– Quelle était leur motivation ?
01:13– Alors, officiellement, c'est parce qu'au nord, il y a de plus en plus d'attaques djihadistes,
01:23une mauvaise prise en compte des familles des soldats tombés au front
01:28et parce qu'il y a une mauvaise gouvernance démocratique,
01:31c'est-à-dire le fait que, notamment, le principal parti d'opposition,
01:37les démocrates, ne puissent pas présenter de candidats à la présidentielle du mois d'avril prochain.
01:42Est-ce que c'est vraiment les vraies revendications ?
01:46Est-ce que ce n'est pas opportuniste ?
01:48Est-ce que ce n'est pas tout simplement des militaires qui veulent faire comme leurs frères d'armes
01:52du Burkina, du Niger, du Mali ?
01:53– Est-ce qu'on peut rapprocher un coup comme celui-ci des coups, justement, des autres ?
01:59– L'Afrique de l'Ouest est énormément déstabilisée depuis cinq ans,
02:05depuis le premier coup d'août 2020 à Bamako, donc les trois pays du Sahel,
02:12la Guinée-Bissau il y a trois semaines.
02:15Ça inspire évidemment d'autres militaires, notamment…
02:18– Il y a un effet domino.
02:19– Il y a un effet domino, il y a un effet de contagion.
02:22– Que sont-ils devenus ?
02:24Alors si on comprend bien, le lieutenant-colonel Pascal Tigré est en fuite.
02:28Est-ce qu'il y a encore des mutins retranchés ?
02:30– Alors, ils se sont retranchés quand leur coup a échoué devant la résidence du chef de l'État
02:38et qu'ils ont quitté la télévision.
02:41Ils se sont retranchés dans un camp militaire, dans un quartier populaire de l'ouest de la capitale,
02:47qui s'appelle Toc-Bain, et là ils sont restés plusieurs heures.
02:51Donc il y a eu un face-à-face entre les loyalistes et les mutins poutchistes,
02:56qui a duré plusieurs heures, et c'est là que le Nigeria a joué un rôle décisif.
03:01On l'a dit dans le sujet que vous venez de passer,
03:04il y a certainement eu un coup de fil du président Talon au président Tinoubu.
03:09Les deux hommes sont très proches depuis au moins deux ans et demi.
03:11Pourquoi ? Parce qu'en juillet 2023, quand le général Tiani a renversé le président Bazoum au Niger,
03:19il y a eu une très forte entente entre ces deux chefs d'État du Bénin et du Nigeria
03:23pour envisager une riposte militaire, qui finalement n'a jamais eu lieu.
03:28Mais c'est ça qui est intéressant, c'est qu'elle n'a pas eu lieu au Niger et elle a lieu à Cotonou,
03:33elle a lieu au Bénin. Pourquoi ?
03:35Parce qu'il y a eu du flottement à Cotonou, parce que les poutchistes n'ont pas réussi leur coup dès hier matin
03:42et parce que les loyalistes étaient plus nombreux que les poutchistes
03:46et que pendant toute la journée de dimanche, il y a eu ce face-à-face entre les uns et les autres
03:53et qu'à ce moment-là, Bola Tinoubu a dit « Ok, j'envoie deux chasseurs-bombardiers
04:00pour frapper le camp militaire où se trouvent retranchés les poutchistes. »
04:05Donc les circonstances étaient plus favorables à une intervention militaire ?
04:09Oui.
04:10Avec l'aval de la CDAO ?
04:11Oui, alors ça c'est très important aussi politiquement,
04:14parce que ce n'est pas qu'une entente entre Cotonou et Abuja.
04:18Il y a eu ensuite des coups de fil à trois autres chefs d'État très importants dans la région,
04:22qui sont le ghanéen Dramani Mahama, l'ivoirien Alassane Ouattara et le sierra-léonais Madabio
04:32qui préside actuellement la CDAO, si bien que vous avez depuis hier soir la couverture de ces quatre pays,
04:39de la CDAO, pour déployer une force en attente.
04:41Moi, ce qui m'a le plus frappé dans ce coup d'État, ce coup d'État raté,
04:46c'est la célérité, la rapidité avec laquelle ces quatre pays ont réagi,
04:52et notamment le Nigeria.
04:53Dès hier, 17h, deux chasseurs-bombardiers nigérians frappent la base des mutins.
05:00Ça, c'est un peu inédit.
05:01Ah, c'est inédit, oui, oui.
05:02Et vous avez, dès aujourd'hui, vous avez 200...
05:05Notre correspondant RFI Cotonou nous le confirmait ce soir,
05:09vous avez 200 militaires nigérians actuellement au sol, à Cotonou,
05:14à peine 36 heures après le début de cette opération de poutchiste.
05:19Qu'est-ce que ça dit, finalement, sur la CDAO ?
05:20Que parfois, ça peut être efficace.
05:22Et voilà, on croyait que la CDAO, c'était fini,
05:25que depuis que les trois pays du Sahel s'en étaient retirés ces dernières années,
05:30depuis que le coup de Bissau avait réussi il y a trois semaines,
05:34on se disait, bon, la CDAO, maintenant, c'est juste pour la galerie.
05:40Eh bien, non.
05:40Il y a un sursaut, je pense.
05:41Il y a un vrai sursaut de la CDAO, du moins de quatre États solidaires du Bénin dans cette affaire.
05:49Vous remarquez qu'il n'y a pas les huit autres.
05:52Actuellement, la CDAO, c'est 12 pays,
05:54et la force en attente qui est déployée aujourd'hui, c'est 4 pays.
05:57Est-ce à dire qu'on va vers une CDAO à deux vitesses ?
06:00C'est aussi une question.
06:01Un mot sur, justement, Patrice Talon, qui va passer la main en avril 2026,
06:05après deux mandats à la tête du Bénin.
06:08Donc, c'est son dauphin, a priori, le ministre des Finances, Romuald Ouadani,
06:14qui est l'ultra-favori.
06:17Est-ce que les conditions sont réunies pour cette présidentielle ?
06:20Le grand hic vis-à-vis de cette présidentielle,
06:24c'est l'absence du parti Les Démocrates,
06:26de l'ancien président Boniaï.
06:29Il n'y aura pas de vraie compétition en avril.
06:32Et les mutins ont joué là-dessus.
06:33Les mutins se sont dit, peut-être qu'il y a un fort mécontentement de la population
06:36et qu'on va pouvoir en profiter.
06:38Simplement, le Bénin, c'est un pays fier de sa démocratie,
06:43de sa conférence nationale souveraine de février 1990,
06:47qui a ouvert une grande vague de libération et de multipartisme
06:51dans toute l'Afrique de l'Ouest et centrale, francophone.
06:55Et le Bénin tient à sa démocratie.
06:58Il y a une dérive aujourd'hui autoritaire ?
06:59Il y a une dérive autoritaire de la part, en effet, du président Talon,
07:03qui a mis un certain nombre de personnes en prison,
07:08notamment deux figures de l'opposition.
07:12C'était lors de la dernière présidentielle.
07:15Et du fait que le principal parti d'opposition
07:18ne puisse pas présenter de candidats en avril prochain.
07:22Mais il y a, dans la population béninoise,
07:24un fort attachement à la démocratie.
07:26Donc ça n'est pas irréversible, Christophe ?
07:28Et le parti des Démocrates lui-même,
07:29qui est la première victime de cette dérive autoritaire,
07:32a condamné le coup d'État en termes tout à fait sans ambiguïté.
07:35Donc il pourrait renaître d'une façon ou d'une autre,
07:37ce parti d'opposition, avant les élections ou pas ?
07:40Il y a un Conseil des ministres extraordinaire
07:43qui est en train de se dérouler, là, en ce moment,
07:45à Cotonou, élargi d'ailleurs à la hiérarchie militaire et policière.
07:51On va voir ce qui va sortir de ce Conseil des ministres.
07:53Un dernier mot sur le djihadisme.
07:54Est-ce que cette menace est de plus en plus présente dans le nord du Bénin ?
07:57Oui, oui, oui, oui.
08:00Notamment dans la zone des trois frontières avec le Niger et le Burkina,
08:06qui est une zone où il y a eu longtemps un parc touristique
08:10et où vous avez donc moins d'habitation,
08:13plus de pénétration pour les djihadistes,
08:15qui font du recrutement à tous les niveaux,
08:21une mobilette contre une adhésion, du carburant, etc.
08:26Oui, oui, oui, il y a des attaques.
08:28Il y a eu au début de cette année une attaque meurtrière contre l'armée béninoise.
08:32C'est l'une des causes de la tentative de putsch d'hier matin.
08:35Merci beaucoup, Christophe Bouvier, journaliste au service Afrique de RFI,
08:39ancien patron d'ailleurs du service Afrique de RFI.
08:42Merci.
08:42Voilà ce qu'on pouvait dire sur ce coup d'État avorté au Bénin.
08:45Merci à vous tous de nous avoir suivis.
08:47Merci.
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