« Je juge des gens qui me ressemblent, je juge des gens qui ont la même tête que moi »
🚨 Bonjour, Salam, Azul, nous sommes très très heureux de vous présenter notre tout dernier format, un entretien long, sans filtre et sans montage ou presque, disponible dès maintenant sur notre chaine YouTube. 👨⚖ Pour le premier épisode, nous avons eu l’immense plaisir de recevoir le juge Youssef Badr qui est venu nous parler sans détour et avec une sincérité rare. 🎯 Cette honnêteté vous pouvez la retrouver dans son livre: « Pour un justice aux 1000 visages » aux Editions de l’Aube. Et également, dans son association La Courte Echelle, qui est l’émanation de son propos: une justice représentée par plus de Youssef et également par plus de monde issu du milieu rural. Avec cette idée au fond que la France des banlieues et la France des villages ont bien plus de choses en commun que ce que certains médias leur opposent.
00:00Je juge des gens qui ont la même tête que moi, je juge des gens qui ont grandi dans des immeubles comme moi,
00:05je juge des gens qui sont issus d'immigration comme moi, je juge des gens qui écoutent du rap comme moi,
00:10je juge des gens qui s'habillent comme moi, je m'habille le week-end.
00:13J'adore les airmacs, j'adore les TN, j'adore les survêtes, des gamins que je juge, ils me ressemblent en fait.
00:18L'égalité des chances c'est fondamental parce que ça fait des dizaines et des dizaines d'années qu'on en parle et que rien ne bouge.
00:23Tu m'as dit, ah je sais pas comment venir m'habiller demain, est-ce que je viens en costume ou est-ce que je viens des contracts ?
00:29Visiblement t'as fait ton choix, pourquoi t'hésitais d'ailleurs ?
00:32Parce qu'en fait je suis juge et c'est vrai que la figure du juge, je suis très attaché à l'image qu'on renvoie tous
00:37et comme j'ai une haute conception, très haute conception de mon métier, j'ai pas envie qu'on puisse se dire, il est habillé n'importe comment et tout.
00:44Et de l'autre côté je me suis dit que pour s'adresser à un jeune public aussi et leur donner envie, c'est de leur dire qu'on est aussi des gens comme les autres.
00:50Tu es né en France, tes parents arrivent du Maroc dans les années 70, tu grandis dans le Val d'Oise, elle ressemble à quoi ta jeunesse ?
00:59Franchement ma jeunesse elle ressemble à quelqu'un qui passe sa vie dehors, passe sa vie à courir, je pense que c'est de là l'endurance que j'ai vraiment, je pense qu'elle vient vraiment de là.
01:11Passe ma vie à courir, je pouvais faire des matchs de foot qui duraient 8 heures, tu vois on faisait des matchs, il n'y avait aucune règle, 20 contre 20,
01:18avec des règles que nous-mêmes on inventait, c'était vraiment sortir le matin et ensuite attendre que ma mère elle hurle par la fenêtre.
01:24Quand tu retournes au quartier que tu échanges avec tes potes d'enfance, c'est quoi votre discussion sur la justice ?
01:31Est-ce que tu leur dis que la justice est la même si tu t'appelles François que si tu t'appelles Youssef ?
01:37Je ne veux pas te faire un long monologue, c'est résumer en une phrase, c'est qu'en fait ils me disent toujours que c'est une justice de blanc,
01:45c'est toujours les mêmes quand tu rentres dans un tribunal.
01:47L'idée de ton livre pour une justice aux mille visages, c'est qu'il n'y en ait pas un seul des Youssef Badr, mais qu'il y en ait plein d'autres.
01:55Ces gamins des quartiers, des provinces, tu vois ils sont modestes, qui n'ont pas forcément la tête de l'emploi,
02:01ce que j'ai envie de leur dire aujourd'hui c'est qu'en fait on a besoin d'eux avec nous, avec nous, pas face à nous, avec nous tu vois.
02:08Et ça je pense que c'est hyper important de leur dire.
02:10Et que le tribunal, le commissariat, ce n'est pas des lieux hostiles en fait, ce n'est pas des lieux où ils doivent se sentir en insécurité,
02:16c'est des lieux où ils doivent se projeter, où ils doivent pouvoir s'identifier et ils doivent pouvoir emmener aussi des membres de leur famille
02:22en se disant tu vois plus tard j'exercerai un poste à responsabilité là-dedans.
02:26Et je pense que c'est hyper important, en fait c'est hyper important pour la jeune génération et pour l'avenir et la société tu vois qu'on va bâtir tous ensemble.
02:34Je n'ai pas envie tu vois de regarder la classe de mes enfants et de me dire dans la classe de mes enfants,
02:39il y a un tiers qui va s'en sortir parce qu'ils ont des parents, qui ont du réseau, qui ont ça.
02:42Eux ils vont être sacrifiés, ça va être au petit bonheur la chance.
Écris le tout premier commentaire