- il y a 9 heures
Joan Baez, 84 ans, radieuse, drôle, généreuse, carnassière quand elle évoque Donald Trump. Elle a été de toutes les luttes politiques en Amérique, de tous les concerts mythiques des 60's et des 70's. Aujourd'hui, elle publie un éblouissant recueil de poésies rédigé dans les années 1990. À cette époque, Joan Baez connaît un grand effondrement intime, psychique, une crise qui l'oblige à affronter ses démons. La chanteuse n'est pas toute seule dans sa tête, ils sont plusieurs. Forcée de l'admettre, elle doit faire la paix avec les créatures et les voix qui l'habitent, tout ce petit monde intérieur a d'ailleurs participé à l'écriture des poèmes, du moins c'est ce qu'elle affirme. Elle parle de la maladie mentale avec beaucoup de simplicité et tant de douceur.
Retrouvez « Le Grand portrait par Sonia Devillers » L'interview de 9h20 avec Léa Salamé sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20
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00:00Bonjour John Bez, Dona, Dona, c'est la dernière chanson que vous avez chantée lors de vos adieux à Paris, à l'Olympia, devant une salle.
00:12Bon choix.
00:14Oui, c'était un bon choix. Qu'est-ce que vous avez ressenti ce soir-là ?
00:20J'étais excitée après toute cette belle soirée à l'Olympia.
00:30C'était vraiment très spécial d'être là, dans cette salle historique, et de savoir que je faisais maintenant partie de cette histoire.
00:37Oui, parce que l'Olympia, la première fois que vous êtes venue à l'Olympia, c'était en 1964, et vos indieux, c'était en 2019.
00:45C'était aussi un moment de soulagement, une forme de libération, de dire la scène, c'est fini, la chanson, c'est fini.
00:52Oui, en fait.
00:53C'était la fin de la tournée, oui.
00:56Après ça, la vie est différente.
01:04Aujourd'hui, ma voix est un désastre, mais en général, j'ai une voix un petit peu moins puissante aujourd'hui, mais en fait, ça me plaît.
01:12En tout cas, c'est une vie qui est différente des tours.
01:14C'est ça qui est épuisant.
01:15Parce que là, vous souffrez d'une larguite aujourd'hui, mais ça veut dire que c'est un soulagement de ne plus avoir cette angoisse de perdre la voix pour pouvoir chanter le soir même.
01:25Et je n'ai plus à me trimballer ma guitare.
01:27Oui, je n'ai plus à me trimballer ma guitare.
01:30Je n'ai plus à faire mes exercices vocaux.
01:32Je n'ai plus à faire attention à mon régime.
01:34Et puis, je tombe malade quand même.
01:37John Bez, vous aviez commencé à en parler dans un documentaire qui s'intitule « I'm a noise » l'année dernière, sur la souffrance et les maladies mentales que vous avez traversées, sur les états que vous avez traversés en 1990.
01:51Vous êtes diagnostiquée d'un trouble dissociatif de l'identité.
01:57Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que ça signifie ?
02:00C'est difficile à comprendre, pour n'importe qui, moi compris.
02:07Mais ce qui se passe, c'est que quand on est petit et qu'on subit des violences, quelqu'un d'autre prend ces violences sur lui.
02:16Quand c'est trop pour un enfant, c'est comme si on s'inventait d'autres personnages.
02:21Ils s'inventaient eux-mêmes pour prendre différents rôles.
02:25Certains assumeront la colère, d'autres la peur.
02:27Ce sont des personnages qui me protègent.
02:30Dans mon cas, tout ce que je fais est extrême.
02:33Donc il y avait beaucoup, beaucoup de personnages, beaucoup de personnes.
02:36J'ai appris à les connaître, c'est comme ça que je suis allée mieux.
02:39Combien de personnes ?
02:40Et donc je leur dois des remerciements.
02:41Plus que 50 ?
02:42Plus que 50 ?
02:43Qui ont cohabité en vous.
02:45Une cinquantaine de voix et une cinquantaine de personnages.
02:48Oui.
02:49Et pourtant je suis toute petite.
02:52Quand vous dites qu'il y a différentes voix en moi, il y a presque différents personnages qui ont coexisté en vous.
03:00Ces personnages, ils étaient bienveillants ?
03:02Oui, parfois, mais il arrive qu'il y en ait un désagréable.
03:09Mais il y avait toujours une raison pour qu'un personnage soit désagréable.
03:14C'était pour me protéger.
03:14Ces autres personnalités, ces autres personnes faisaient ce qu'elles avaient à faire.
03:23Quand elles étaient en colère, elles étaient en colère contre d'autres.
03:27Quand elles étaient tendres, c'était pour m'aider à moins souffrir.
03:32C'est comme dans n'importe quelle pièce remplie de gens.
03:36C'était mes guides.
03:37Et quand vous dites que ces personnages, d'une certaine manière, ils entouraient, ils protégeaient la petite fille que vous avez été et qui a tant souffert,
03:45de quoi elle a tant souffert cette petite fille qui était toute au fond de vous, toute cachée au fond de vous ?
03:52Eh bien, mon enfance a été difficile, elle a connu des violences que je n'ai pas envie de détailler ici.
04:01Mais ce qui est certain, c'est que toute personne qui a subi ce genre d'abus doit soit s'y confronter, ce qui est difficile et effrayant,
04:11soit en subir les conséquences tout au long de sa vie.
04:14J'ai décidé de m'y attaquer. C'est ce que j'ai fait.
04:17Et il y a des très très beaux poèmes sur la phobie, sur la façon dont vous êtes accompagnée par les phobies,
04:24parce que vous aviez différentes phobies.
04:27Et notamment, vous racontez comment vous affrontiez la peur.
04:30La peur en comptant.
04:32Pourquoi est-ce que compter, ça aide à surmonter la peur ?
04:35Je ne sais pas.
04:39Je crois que ça m'occupe l'esprit.
04:44Et je crois que quand je compte, un, deux, trois, ça me permet d'aller d'un point A à un point B,
04:51et d'y arriver en sécurité pendant que je parle.
04:53Vous comptez encore ?
04:55Oui.
04:55Et ces personnages, en vous, ils vous ont quittés, ils vous ont abandonnés, ils se sont tus, ils se sont endormis, ou ils sont toujours là ?
05:08Pour la plupart, il y a des gens encore là, mais pas très présents.
05:13C'est surtout moi, maintenant, qui suis ici.
05:17Ils se cachent, ils vont bien, ils ont l'air en tout cas heureux, chacun a suivi son chemin.
05:27Il y en a qui sont partis vers les nuages, d'autres font des océans, et ils ont disparu.
05:34Mais je sais que si je veux vraiment les recontacter, c'est possible.
05:39Ce recueil de poésie se feuillette comme un album de famille, aussi.
05:43Le titre, il est pour votre mère.
05:47Quand tu verras ma mère, invite-la à danser.
05:50Ce titre, il est pour votre mère et pour Youssef Bjorling, qui est un grand chanteur d'opéra, qu'on va entendre.
05:58Et vous l'appelez ma superbe jeune maman.
06:04En fait, vous faites revivre votre mère jeune.
06:07Vous dites aussi qu'elle est morte à 100 ans, mais vous faites revivre votre mère jeune.
06:11Pourquoi c'est important de lui redonner vie jeune, quand elle était d'une jeune femme ?
06:17Je ne sais pas pourquoi.
06:19Mais ce que j'ai appris, en tout cas c'est quelque chose qui m'est venu en tête hier, en réalité, alors que je dansais,
06:28c'est que le titre parle de danse, justement, de proposer à ma mère de danser.
06:35La danse est une part très importante de ma vie.
06:37Et donc, quand j'ai réalisé que j'avais écrit cela, quand tu verras ma mère, invite-la danser, il y a un lien.
06:46Je crois que je prends vie quand je danse.
06:48Et alors, ce chanteur d'opéra, vous pouvez nous en dire quelques mots de ce chanteur d'opéra,
06:53qui était si important, parce qu'il revient à plusieurs reprises dans le recueil de poèmes ?
06:57Ma mère aurait dit de lui qu'il avait des larmes, des sanglots dans la voix.
07:06J'ai compris que c'était vrai.
07:09Et j'ai découvert que son impresario disait ça, justement, de lui, qu'il avait ses sanglots dans la voix.
07:16Ce n'est pas un très bon comédien sur scène, il n'a pas non plus la puissance d'un Pavarotti.
07:25Mais c'est une voix qui est effectivement larmoyante, mais qui est magnifique.
07:29Et qui vous rappelle votre enfance, qui vous ramène à l'enfance ?
07:33Quand je l'entends ?
07:35Oui, parce qu'il a, en quelque sorte, sauvé ma mère, qui était femme au foyer,
07:44qui s'occupait de passer l'aspirateur, de faire le ménage.
07:46Et quand elle entendait cette voix, elle s'interrompait.
07:49Et j'ai appris, je crois, à faire la même chose, à m'arrêter et à entendre les voix.
07:54Je le fais toujours.
07:55Et puis, il y a des très beaux textes sur vos sœurs, Pauline et Mimi,
07:59notamment sur la mort de vos sœurs.
08:04Vraiment des textes absolument bouleversants.
08:08Merci, merci.
08:10De Pauline, vous dites qu'elle était la sœur de l'ombre,
08:14là-bas dans les collines poudrées, qui faisaient jaillir des fleurs sauvages,
08:17du sol pleinement épanouie, juste en chantant doucement sur l'herbe des pâturages.
08:22Elle était la sœur silencieuse.
08:24Pourquoi est-ce que Pauline était la sœur silencieuse ?
08:26Parce qu'elle ne voulait pas entrer en concurrence avec Mimi, avec moi.
08:36Elle le dit dans le documentaire.
08:39Ma façon de gérer la célébrité de ma sœur a été de disparaître et de devenir silencieuse.
08:44Ce qui a rendu les relations compliquées avec elle.
08:48Très compliquées.
08:49Très compliquées.
08:49Oui, nous trois.
08:51Vous trois ? Parce que Mimi était chanteuse.
08:53Oui, plus compliquée.
08:55Plus compliquée.
08:56C'était encore plus compliqué avec Mimi ?
08:58Oui, parce que c'était les compétitions, là.
09:00C'est une autre raison pour Pauline.
09:03Je n'ai pas envie de faire any of that.
09:07Elle ne voulait pas prendre part à tout ça.
09:09Pauline avait énormément de talent.
09:15Elle était couturière.
09:17Mais elle crée vraiment des choses.
09:19Tous les vêtements qu'on portait, nos écharpes, nos foulards.
09:22Personne n'aurait pu imaginer ce qu'elle était capable de créer.
09:26Et puis ensuite, elle a construit des maisons.
09:28Elle a construit une maison dans un flanc de montagne,
09:32en n'utilisant que des matériaux naturels.
09:34Mimi est morte très jeune, d'un cancer très rare.
09:39Et c'est très fort, la façon dont vous racontez la mort de vos sœurs.
09:44Ce moment où vous les accompagnez vers la mort.
09:46C'est quelque chose...
09:49C'était très important d'être là.
09:54Ce sont deux morts très différentes.
09:58Mimi s'est battue en soldat.
10:00Courage, Pauline a dit, bon, 77 ans, je m'en fous.
10:06Elle a lâché.
10:07Bon, tant pis.
10:10J'arrête de pouvoir, j'arrête de manger, c'est fini.
10:12Ce recueil de poèmes, c'est aussi l'album d'immenses figures
10:17de la pop, de la folk et du rock américain
10:21qui ont été vos compagnons de route.
10:22Donc c'est un autre album de famille,
10:24au-delà de Pauline, Mimi et de vos parents.
10:27Par exemple, on rencontre Jimi Hendrix
10:30en 1970,
10:33le concert mythique
10:35à l'île de White.
10:37Et dans un très bref poème,
10:39vous dites,
10:40« Jimi, tu as joué juste avant moi
10:43sur l'île de White.
10:45Et on ne sait comment,
10:46tu as mis le feu à la scène. »
10:49Il a mis le feu à la scène.
10:51En tout cas, quelqu'un l'a fait,
10:53puisqu'il y a eu effectivement des flammes
10:55qui ont goufflé la flamme.
10:56Alors qu'est-ce que ça signifie
10:58de jouer juste derrière Jimi Hendrix
11:00en 1970 sur la scène de l'île de White ?
11:04Je voulais chanter avant lui
11:09parce que le public était très chaotique.
11:15On m'a raconté tout un tas de bêtises
11:18au niveau de l'organisation.
11:19Moi, j'ai dit que je voulais chanter d'abord
11:21parce que ça serait plus tranquille,
11:23plus doux.
11:24Et il voulait chanter en premier.
11:26Et donc, il a effectivement fait sauter la scène,
11:28littéralement.
11:29Et donc, moi, je me suis retrouvée
11:30au milieu des cendres.
11:32Les cendres pleuvaient sur moi
11:33pendant que je chantais.
11:34Il s'en moquait.
11:37C'est pour ça que dans le poème,
11:38vous dites « tu t'es fait entendre
11:40comme une magnifique catastrophe naturelle,
11:42comme un putain de volcan ».
11:43C'est pour ça.
11:44C'est parce que...
11:44Oui, c'est exactement ça.
11:47Que c'était au sens propre du terme.
11:50Il y a aussi un étrange poème
11:53sur Bob Dylan
11:54qui a été un des hommes de votre vie.
11:58Et vous dites « Robert Zimmerman »,
12:00c'était son nom,
12:02Bob Dylan étant un pseudonyme,
12:04« avait l'habitude de griffonner
12:06des rêves pensés.
12:07Une, deux, trois, quatre, cinq chansons
12:09juste comme ça.
12:10Vraiment génial.
12:11C'était un gamin génial.
12:13Est-ce que je veux savoir
12:15c'est qui écrit ce genre de choses,
12:18Monsieur le Créateur ?
12:19À qui vous vous adressez
12:21quand vous dites Monsieur le Créateur ?
12:22Vous vous adressez à Dieu.
12:24Oui.
12:24Et donc, vous demandez à Dieu
12:26qui aujourd'hui écrit
12:28comme écrivait Bob Dylan.
12:30Eh bien, jusqu'à il y a encore
12:35quelques jours, une semaine,
12:37j'aurais répondu
12:39que personne ne l'osait.
12:40Et puis, il y a un jeune homme
12:41qui s'est mis à chanter
12:43dans le style de Bob Dylan
12:44et a chanté aussi directement
12:48contre le gouvernement Trump.
12:50Et il le fait magnifiquement.
12:52C'est une chanson qui s'appelle
12:53« No Kings »
12:54et les gens chantent en chœur avec lui.
12:57Il s'appelle Jesse.
12:57Jesse Wells.
12:58Jesse Wells.
12:59Jesse Wells.
13:00Et vous mettez Jesse Wells...
13:01Vous entendrez sa chanson ?
13:02Alors, avec plaisir.
13:03D'ailleurs, on va la faire écouter
13:04aux auditeurs,
13:05mais vous mettez Jesse Wells
13:06à la hauteur de Bob Dylan ?
13:08Parce que, attention,
13:10« Breaking News ».
13:11Non, je n'ai pas de « Breaking News ».
13:17Mais vous savez,
13:20« Breaking News »,
13:21c'est l'intelligence artificielle.
13:26Dans mon téléphone,
13:27je reçois des actualités
13:28qui disent que Bob Dylan
13:29et John Bayes se marient enfin
13:31et que Paul McCartney
13:33joue du piano avec Céline Dion.
13:36Ils ont vécu...
13:38Ils se sont aimés,
13:40toute leur ville se marient enfin.
13:41Il y a des photos de moi
13:42en robe blanche.
13:44Et on a l'air absolument horrible.
13:47Et il y a Paul McCartney
13:47qui joue du piano à notre mariage.
13:49Tout ça, c'est l'intelligence artificielle
13:51qui rebidouille des photos d'archives.
13:54Mais ce que je veux dire,
13:55c'est que dans ce petit poème,
13:57vous dites non seulement
13:58qu'il écrivait de manière
14:00absolument géniale, Bob Dylan,
14:02mais vous dites aussi
14:02qu'il avait une manière d'écrire
14:04presque en rêvant,
14:06que ses chansons,
14:07c'était des rêves pensés.
14:08Je ne sais pas comment il écrivait.
14:13Mais je connais cette expression
14:15de l'idée d'être un canal.
14:17d'être une sorte de conducteur.
14:21C'était comme si ça passait
14:22dans la manche de sa veste
14:23quand il écrivait
14:24et que ça se traduisait
14:25dans sa main.
14:26Et moi, quand j'écris,
14:27c'est la même chose.
14:27Quand j'écris le mieux,
14:31je ne sais pas d'où ça vient.
14:33Vraiment ?
14:33Vous ne savez pas d'où ça vient ?
14:34Directement from God ?
14:36Oui, j'espère.
14:37C'est vrai ?
14:38Ça traverse le bras,
14:39ça descend dans le stylo
14:40et ça arrive sur lui.
14:41Ça paraît très dramatique
14:44de le dire comme ça,
14:45alors j'espère que c'est vrai.
14:46J'ai ma chanson,
14:48vraiment j'ai une chanson
14:48adorée
14:49qui fait partie
14:51de votre répertoire
14:52qui s'appelle
14:53Love is a four-letter's word.
14:56Vous voulez me raconter
14:56d'où elle vient cette chanson ?
14:58Je crois que c'est
14:59ma chanson préférée.
14:59C'est une histoire intéressante.
15:03Bob était chez moi
15:06et il tapait la machine.
15:11Quand je voulais qu'il mange,
15:12il fallait que je vienne
15:13le lui glisser directement
15:14dans la bouche
15:14parce qu'il n'arrêtait pas
15:15de taper la machine.
15:17Et c'est une chanson
15:17qui a fini par terre
15:19dans ma cuisine.
15:20Il ne se souvenait même plus.
15:21J'ai ramassé cette chanson.
15:22Je l'ai prise
15:23et je l'ai chanté.
15:23Donc il a écrit les paroles.
15:27Vous les avez ramassées
15:28par terre.
15:29Vous les avez complétées.
15:31Vous les avez réécrites.
15:32Vous les avez corrigées.
15:33Non, non, non.
15:33Rien.
15:33Corrigées, non.
15:34Telles quelles.
15:35Direct from God
15:36par le bras
15:37et par les mains
15:38de Bob Dylan
15:39sur la machine
15:40tombée sur le sol
15:41de votre cuisine.
15:43Et il a aimé
15:44ce que vous en aviez fait.
15:45J'espère.
15:47Et ce film
15:49qui a eu tant de succès
15:50l'année dernière
15:51où Timothée Chalamet
15:53interprète Bob Dylan
15:54et Barbara Macarro
15:55qui vous interprète vous
15:57au moment où vous vous êtes rencontrée.
15:59Vous vous êtes tombée amoureuse.
16:00Vous vous êtes retrouvée
16:00presque aussi
16:01en compétition artistique.
16:03Vous l'avez aimé ce film ?
16:04C'était un bon film.
16:05Oui, c'était un bon film.
16:06C'était un bon film.
16:07Oui, oui.
16:08C'était un joli film.
16:09J'encourage les gens
16:09à ne pas vérifier les faits.
16:13Parce que c'est bourré de...
16:15C'est bourré de fantaisie.
16:17C'est très bien comme ça.
16:19Alors dans cet album
16:20de famille musicale
16:23il y a aussi
16:23un texte
16:25très puissant
16:26très étrange
16:27sur Léonard Cohen.
16:31Vous dites
16:32que quand vous écoutez
16:33sa musique
16:34vous êtes envahi
16:36par la vision
16:37d'un petit garçon
16:38qui fuit
16:40les ruines fumantes
16:42de la seconde guerre mondiale.
16:44Que ce petit garçon
16:45sa famille
16:46a été décimée
16:47par la Shoah.
16:49Évidemment
16:50ce petit garçon
16:51ça n'est pas
16:51Léonard Cohen
16:52qui était juif
16:54mais qui vivait au Canada
16:57donc loin
16:58des ruines fumantes
17:01de l'Europe.
17:02Alors ce petit garçon
17:03c'est qui ?
17:05Yasha
17:05c'est un de ces personnages
17:09qui m'arrive
17:11sous différentes formes
17:12ça peut être assez
17:13dramatique.
17:16L'une des chansons
17:17de Léonard Cohen
17:18était un instrumental
17:19qui parlait de ce personnage
17:20il parlait de
17:21regarder par la fenêtre
17:23et de voir très clairement
17:25un petit garçon
17:25dans la neige.
17:26et pour moi
17:29le ramener
17:30dans cette conversation
17:32c'est quelque chose
17:34qui s'est imposé
17:34très clairement
17:35il me dit
17:36je suis Yasha
17:36mon nom complet
17:38c'est Yasha
17:39et je viens
17:41de l'Holocauste.
17:42Quand j'entends
17:44ce genre de voix
17:45je dois écouter.
17:46Et comment vous expliquez
17:47John Bess
17:47que parmi les personnages
17:49qui vous ont habité
17:49il y a un petit enfant juif ?
17:52Comment vous l'expliquez ?
17:53Je ne l'explique pas.
17:58Je ne peux pas
18:00parce que je ne sais pas
18:01d'où ça vient.
18:04C'est vraiment
18:05très emblématique
18:06de ma façon d'écrire.
18:08Parfois quand je regarde
18:09une page
18:09ça ne me paraît pas familier.
18:12Et puis je regarde en bas
18:13et c'est signé Yasha.
18:14Ça a été mon meilleur auteur.
18:18Et quand il prend
18:20dans sa retraite
18:21je ne pourrai jamais
18:21plus écrire aussi bien.
18:23J'écris différemment
18:25aujourd'hui.
18:27Yasha est toujours là ?
18:28En vous ?
18:29Non.
18:30Il n'est plus là
18:30pour l'écrire.
18:31Il refuse d'écrire
18:33donc sa retraite est prise.
18:34Mais toutes ces voix
18:35tous ces personnages
18:36qui vous ont habité
18:36ils ont écrit des chansons
18:39avec vous ou jamais.
18:40Ils n'ont écrit
18:41que des textes
18:41que des poèmes.
18:42Non que des poèmes.
18:44Que des poèmes.
18:47Ils n'étaient pas là
18:48quand j'écrivais des chansons.
18:51Ça signifie quoi ?
18:53Ça signifie que
18:54quand vous écriviez
18:55des chansons
18:56ça apaisait
18:58les angoisses
18:58ça apaisait les voix
18:59ça apaisait les conflits
19:01qui étaient à l'intérieur de vous ?
19:03J'ai arrêté de chanter
19:08en tout cas
19:09plutôt d'écrire des chansons
19:11il y a plus de 30 ans
19:12pas de chanter.
19:13Donc je ne sais pas très bien
19:16ce qui s'est passé
19:18à ce moment-là
19:20mais en tout cas
19:21quand c'était terminé
19:22c'était terminé.
19:24Parfois j'avais du mal
19:26à écrire une chanson
19:27et je lâchais
19:29soit ça venait
19:29soit ça ne venait pas.
19:33Il y a sans doute
19:36un croisement
19:37entre le poème
19:38et la chanson.
19:39Alors c'est un recueil
19:40de poésie intime
19:41il est complètement
19:43en dehors du monde
19:43complètement en dehors du temps
19:45vous qui au contraire
19:46avez toujours été
19:47une femme
19:48très engagée
19:49et une artiste
19:50très militante
19:51très politique
19:52toujours inscrite
19:53dans le temps
19:54et dans l'espace.
19:55Alors on va citer
19:57ce poème très politique
19:58qui a fait bondir
19:59la Maison Blanche
20:00qui vous a même répondu
20:03d'un très méprisant
20:05mais qui est John Bez
20:06ce poème très politique
20:08c'est
20:09The Little Green War
20:10I love that
20:13c'est vrai
20:13en français
20:15c'est le petit ver
20:16c'est le titre
20:17et j'adore le prononcer
20:17en français
20:18comme ça
20:19c'est le petit ver
20:20ver
20:20ver
20:21oui
20:22parce qu'un ver
20:24comme un ver de terre
20:25et la couleur verte
20:26en français
20:27c'est le même mot
20:27donc c'est un petit ver
20:28vert
20:29donc c'est un poème
20:30qui imagine un ver
20:31qui ronge le cerveau
20:33de Donald Trump
20:33et qui le prive
20:35d'empathie
20:36et qui
20:37ça vous fait mourir
20:38de rire
20:39oui de son cerveau
20:43c'est ce qu'il mange
20:44différentes parties
20:45de son cerveau
20:46et en particulier
20:48celle qui
20:51accepte
20:52de dire des choses
20:53dégoûtantes en public
20:54il détruit
20:56en fait
20:57tout ce qui
20:58tout ce qui est
20:59de l'ordre de l'inhibition
21:00justement
21:00il libère
21:01cette part de lui
21:02qui lui permet
21:02de dire absolument
21:03tout ce qu'il veut
21:03et puis il arrive
21:04à un moment donné
21:05à la partie du cerveau
21:06qui concerne l'intelligence
21:07et le petit ver
21:08vert dit
21:09mais il n'y a rien là
21:09il n'y a plus rien
21:12il n'y a plus rien
21:13dans le cerveau
21:14de Donald Trump
21:14mais ça dit quand même
21:16quelque chose
21:16de très important
21:17ça dit d'abord
21:19que avoir de l'empathie
21:20c'est quelque chose
21:21de
21:22comment dire
21:23de fondamentale
21:25en politique
21:26l'empathie
21:27dans le monde
21:32maga
21:33le monde de Trump
21:34c'est quelque chose
21:35qui disparaît
21:35mais pas seulement
21:36c'est quelque chose
21:37qui devient un gros mot
21:38pour eux
21:38parce que ça veut dire
21:39qu'on est faible
21:39la bienveillance
21:41ça veut dire
21:41qu'on est faible
21:42l'amour
21:43veut dire qu'on est faible
21:45alors ils sont en train
21:47de changer
21:48complètement
21:49le paysage
21:51des mots
21:51même
21:52ils changent tout
21:53et l'un des problèmes
21:55c'est que
21:57l'extrême droite
21:58a étudié
21:59a travaillé
22:00pendant 50 ans
22:01pour faire aboutir
22:03ce projet
22:04Trump c'est un coup de chance
22:07pour eux
22:07et tout ça
22:11s'est construit
22:11autour de lui
22:12et maintenant plus personne
22:13ne peut l'arrêter
22:13mais dans une situation
22:16comme ça
22:20ce que je dis
22:21c'est qu'on ne peut peut-être
22:22pas renverser la marée
22:23mais qu'on peut sauver
22:24quelques poissons
22:24ça veut dire
22:29prenez soin
22:33de votre jardin
22:34et de vos employés
22:35allez vous porter volontaire
22:36auprès des services
22:37de l'immigration
22:37pour aider ces enfants
22:38les gens ont l'impression
22:40que ce qu'ils pourraient faire
22:41n'est pas suffisant
22:41ça ne l'est peut-être pas
22:43à leur échelle
22:44mais ça peut être tout
22:46pour la personne
22:47qu'ils vont essayer de sauver
22:47en réalité
22:48aujourd'hui
22:50militer
22:51c'est presque
22:52redonner de l'empathie
22:53aux américains
22:54c'est presque ça
22:55en réalité
22:56je crois qu'il y a
23:00beaucoup de façons
23:01de militer
23:01je suis fière
23:03que 8 millions
23:05de personnes
23:05aient participé
23:06à la manifestation
23:07de No Kings
23:08ça ne suffit pas
23:09rien ne suffit
23:10aujourd'hui
23:11No Kings
23:12c'était un mouvement
23:12d'opposition
23:13à Donald Trump
23:14on ne veut pas
23:15d'un roi
23:15on ne veut pas
23:15d'un monarque
23:16et c'est la chanson
23:18avec cet jeune homme
23:19No Kings
23:20No Kings
23:21No Kings
23:22c'est une chanson
23:24dont je parlais
23:25tout à l'heure
23:25qui se répète
23:26c'est impératif
23:28qu'on ait ce type
23:31de grande manifestation
23:32pour que les gens
23:33voient
23:33pour que ce soit visible
23:34parce que depuis l'Europe
23:36on ne voit pas
23:37on s'attend à voir
23:38le même type de mouvement
23:39que dans les années 60
23:40l'époque est différente
23:42c'est plus effrayant
23:43c'est énorme
23:44on n'aurait jamais imaginé ça
23:45vous savez
23:46on n'aurait jamais imaginé
23:47ce genre de choses
23:48John Bez
23:48en 2014
23:49je vous ai vu
23:49sur scène
23:50à l'Olympia
23:51et vous êtes monté
23:52sur scène
23:53avec une affreuse
23:53paire de baskets
23:54et vous avez dit
23:56je sais
23:57ça ne se fait pas
23:57donner un concert
23:58avec des baskets
23:59mais dans ma vie
24:00j'ai tellement marché
24:01que j'ai mal au pied
24:02vous continuez à marcher
24:06même si vous avez
24:07mal au pied
24:07oui
24:08il y a différents moyens
24:12la poésie
24:13la peinture
24:14c'est aussi
24:14un moyen de militer
24:16je suis contente
24:18de ne pas avoir
24:19à jouer de la guitare
24:20parce que ça
24:20ça faisait mal à l'épaule
24:21et puis il y a
24:23des centaines
24:23de super guitaristes
24:24John Bez
24:26je vous remercie
24:27d'être venu
24:27à France Inter
24:28ce matin
24:29et puis vous
24:31vous remerciez
24:31à la fin de ce recueil
24:33de poèmes
24:33vos co-auteurs
24:34donc tous ces personnages
24:35qui ont cohabité
24:36en vous
24:37qui ont été votre voix
24:38et votre inspiration
24:40donc il y a Bébé
24:40il y a Yasha
24:41dont on a parlé
24:42le petit enfant juif
24:43il y a Etoile
24:44il y a The Raj
24:46il y a Franck
24:47bref
24:48on ne va pas tous les citer
24:49mais merci à vous tous
24:50d'être venus ensemble
24:52c'est la première fois
24:54qu'on vous remercie
24:55collectivement
24:56je vous remercie
24:58collectivement
24:58John Bez
24:59et tous les personnages
25:00et toutes les voix
25:01qu'il habite
25:01quand tu verras ma mère
25:03invite-la à danser
25:04c'est donc un recueil bilingue
25:07qui paraît
25:08en point poésie
25:09merci John Bez
25:10merci beaucoup
25:11mille fois
25:11merci à vous
25:12merci à vous
25:13merci à vous
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