- il y a 21 heures
Alors que dans certains territoires la défense de l’environnement est parfois vue comme un propos élitiste venu des grandes villes, des initiatives citoyennes cherchent des solutions pour transmettre ses idées sans se renier dans les territoires ruraux. On en discute avec Lumir Lapray, activiste écologiste, et Lucie Alexandre, journaliste politique à Libération.
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00:00Je vais tout de suite vous présenter un petit peu les thématiques et les invités de ce soir
00:05avec une première partie consacrée à la lutte finalement contre l'extrême droite et le rassemblement national dans la ruralité.
00:12On va en parler avec notamment Lumière Lappré. Bonsoir Lumière, comment vas-tu ?
00:16Salut, ça va et toi ?
00:17Très bien, très bien. Merci d'être avec nous.
00:20Alors pour te présenter en quelques mots, même si au fil de nos échanges on aura l'occasion de te présenter plus pleinement
00:24parce que tu fais beaucoup de choses, tu es activiste écologiste, tu es originaire de Lens et ça a son importance.
00:31Pris beau département de France.
00:33Ça reste à débattre, on représente le 88.
00:38Mais on va en tout cas parler de ces régions et de ces départements où déjà le rassemblement national est assez puissant
00:46ou en tout cas récolte pas mal de voix lors des différentes dernières élections.
00:51On aura l'occasion d'en parler avec toi pour essayer de comprendre aussi, et c'est toi l'objet de ton travail,
00:55comment est-ce qu'on peut combattre ce rassemblement national et comment est-ce qu'on peut faire en sorte
00:58que ces personnes issues de la ruralité se tournent plutôt vers la gauche et les parties de gauche.
01:05Et d'ailleurs tu détailles un petit peu ce travail avec tes conseils et tes pistes de réflexion dans ce livre.
01:11Ces gens-là qui est sorti il y a quelques semaines, plongé dans cette France qui pourrait tout faire basculer,
01:16que tu as sorti donc il y a quelques semaines et que je vous conseille vivement,
01:19qui a lu et sur lequel a travaillé Lucie Alexandre, journaliste politique à Libération.
01:23Salut Lucie, comment ça va ?
01:25Ça va très bien.
01:26Et toi tu as aussi écrit récemment justement à ce propos, en t'intéressant à la question de comment est-ce que l'écologie
01:33pouvait être plus audible en ruralité.
01:35On aura l'occasion d'en parler aussi avec toi car tu as rencontré tout un tas d'acteurs et d'actrices de terrain
01:39pour faire ce travail.
01:41Je vais tout de suite commencer avec une première question pour toi Lumir,
01:44parce que je disais donc tu es activiste écologiste mais tu fais aussi tout un tas d'autres choses
01:50et tu t'es notamment présenté en 2022 pour les élections législatives avec la NUPES dans la deuxième circonscription de l'Ain.
01:57Tu n'as pas gagné ces élections mais je voulais mentionner cela pour justement savoir pour toi ce que ça signifie
02:06de l'implantation des idées de gauche dans ton coin à toi, le fait que justement tu aies été battue toi au moment où tu t'es présentée aux législatives.
02:15Alors déjà je pense qu'il y a une vraie différence entre les idées, les valeurs de gauche et les parties de gauche.
02:21Je crois que nos idées sont assez majoritaires.
02:25Il y a un parfum de gauche même en ce moment, enfin je veux dire la taxe Zuckman, la lutte contre la loi Duplomb,
02:29la réforme des retraites, c'est des thématiques qui ont vraiment résonné dans la France rurale et périurbaine.
02:38Après se pose la question de comment elles sont transcrits ces valeurs dans un vote.
02:43Et c'est vrai qu'aujourd'hui on le voit peu, par exemple si on prend le mouvement des Gilets jaunes,
02:47c'est un mouvement qui est profondément, qui souscrit à des valeurs de gauche,
02:52l'égalité, la justice, la solidarité entre les territoires et l'idée que ceux qui ont plus paient plus que ceux qui ont moins.
02:59Pour autant, avant les Gilets jaunes, les personnes qui ont participé au mouvement votaient environ à 30% pour le RN et elles sont aujourd'hui 44%.
03:07Donc il y a une augmentation du vote RN chez les Gilets jaunes et c'est pas surprenant parce qu'il y a une augmentation du vote RN
03:13chez les classes populaires et les petites classes moyennes qui habitent en ruralité.
03:18Là où je pense qu'il y a encore beaucoup de choses à faire, c'est que quand on fait une campagne dynamique,
03:25ce qui a été notre cas, on est parti avec trois bénévoles, on a fini avec 250,
03:29on a perdu mais au deuxième tour avec le meilleur score progressiste de l'histoire de la Circo.
03:36Ça montre bien qu'il y a de l'engouement, qu'il y a de l'intérêt.
03:41Il y a beaucoup de gens qui avaient voté pour le RN, pour Marine Le Pen en l'occurrence à la présidentielle en 2022
03:46et qui après ont choisi de voter pour nous.
03:49Moi, ce que je vois, c'est quand même qu'on est capable, si on a un message adapté au contexte,
03:56qu'on a une personne issue du cru et qu'on parle le langage de tous les jours,
04:02qu'on explique des concepts qui peuvent être parfois un peu abstraits comme le capitalisme,
04:07le néolibéralisme, le racisme, avec des mots et en prenant appui sur des expériences du quotidien,
04:13on peut complètement convaincre. Donc bien sûr, une fois, ça ne suffit pas.
04:18Mais il y a vraiment, et c'est pour ça que moi, je pense qu'il y a un sujet de long terme.
04:22C'est une reconquête des cœurs et des esprits qui va prendre du temps.
04:25Mais je pense qu'on en est tout à fait capable.
04:27Toi, tu parles notamment de la nécessité d'une campagne permanente.
04:30Oui, complètement. Pour reprendre mon exemple de la taxe Zuckmann ou de la loi du plomb.
04:36Les classes populaires, a fortiori quand elles sont rurales et qu'elles sont donc exposées plus majoritairement aux pesticides,
04:42sont contre la loi du plomb et sont pour la taxation des plus riches.
04:48Alors après, il y a des débats sur... Il y a eu des phénomènes d'identification des petites classes moyennes à les riches,
04:54les patrons, qui sont quand même largement orchestrés par les classes dominantes,
04:58parce que je rappelle qu'ils sont trois. Donc en fait, dans une démocratie, on ne gagne pas à trois.
05:02Donc il faut arriver à créer des alliances complètement tordues avec d'autres gens.
05:06Mais malgré ça, malgré le pognon monstrueux que les classes dominantes mettent dans cette espèce de propagande,
05:14en fait, pour créer des alliances qui n'ont aucun sens et détourner les classes populaires rurales de leurs vrais alliés,
05:20qui sont les autres classes populaires, il y a quand même une conviction que ce n'est pas normal que ce soit,
05:25je cite, toujours au même de payer. Par contre, ce que je constate, c'est que alors même qu'il y a une opposition profonde
05:33à des projets de fermeture de services publics, d'austérité, de pollution industrielle,
05:41il n'y a pas aujourd'hui, à gauche, une infrastructure militante capable de capitaliser sur à la fois la colère et l'espoir.
05:49Parce que je pense qu'il faut qu'on arrête de toujours faire de la réaction à « Ah, ils ne sont pas d'accord avec ça,
05:52donc on va essayer d'aller en parler ». Moi, mon rêve, c'est que demain, le jour où il y a à nouveau une alliance morbide
05:59et mortifère entre l'ERN, les macronistes et la droite, c'est eux qui ont voté contre la loi Duplomb,
06:05c'est encore eux derrière le refus de la taxe de Zuckmann, nous n'avons pas aujourd'hui les forces militantes
06:10pour aller toquer chez toutes les personnes qui habitent dans des villes ou des villages qui ont placé l'ERN,
06:16la droite ou les macronistes en tête des élections. Pour faire ce travail d'information, au-delà d'éducation et de politisation,
06:25c'est de l'information. Je peux vous confirmer que sur CNews ou sur BFM, ça n'a pas été traité sous cet angle,
06:30l'alliance de la macronie, du RN et de la droite pour priver les services publics de 20 milliards d'euros.
06:35Ça n'a pas été traité comme ça. Il n'y a que nous qui pouvons traiter ça comme ça.
06:38Et nous, on ne contrôle pas les médias, pas encore.
06:40Tout ce qu'on peut contrôler, c'est le terrain. Et aujourd'hui, on n'y est pas assez. Les forces ne sont pas là.
06:47Une thématique centrale pour le camp progressiste et qui a du mal, en tout cas en apparence, à passer dans la ruralité,
06:54c'est la thématique écologiste. Les questions écologistes, on a parfois du mal à les rendre audibles.
07:00Lucie, toi, dans l'un des articles de Libé, tu relèves notamment cette phrase de François Ruffin,
07:04qui pose la question « Comment a-t-on fait pour que l'écologiste soit un des mots les plus détestés du pays ? »
07:09Est-ce qu'on en est à là déjà ?
07:11C'est sûr, là, tu parlais des médias. Il y a les médias de Bolloré, mais aussi l'extrême droite,
07:18qui a beaucoup caricaturé le discours écolo pour appuyer sur certaines difficultés,
07:26notamment autour de la voiture, et de concilier un discours écolo
07:31qui soit compatible avec les préoccupations du quotidien des classes populaires.
07:35Et c'est vrai que moi, dans mon article, j'interroge pas mal d'élus écolos en ruralité.
07:44Il n'y en a pas beaucoup, mais il y en a quand même quelques-uns dans des ruralités particulières.
07:48Et c'est vrai que ce qui ressort beaucoup, c'est que cet objet de la voiture,
07:52dont tu parles dans ton livre, comme étant que le mouvement des gilets jaunes,
07:57c'était le mouvement de la voiture, en fait.
08:00Ne serait-ce que dans le fait de porter un gilet jaune, tout ça, d'être sur un rond-point.
08:04Enfin, c'est l'objet culturel voiture.
08:07Et il y a d'autres sujets, mais c'est vrai qu'on voit bien que pour la gauche,
08:11et en particulier l'écologie, ça peut être aussi le cas sur le logement,
08:15tu en parles aussi dans ton livre,
08:16ça peut être difficile de porter un discours écolo en ruralité.
08:20Oui, alors que, là encore, la propagande fait son effet,
08:24parce qu'en réalité, malgré tout ça, malgré la déformation des gènes,
08:30des médias d'extrême droite et de l'extrême droite,
08:34et à côté de ça, au-delà de la démonisation du mot et du concept même d'écologie,
08:40l'espèce de machin complètement individualiste et ridicule,
08:45des petits gestes poussés par les néolibéraux,
08:46malgré tout ça, il y a une majorité de Français,
08:50y compris dans les classes populaires, y compris dans la ruralité.
08:52La dernière étude de Destin commun, c'est 56% des Français
08:56qui habitent à la campagne, qui sont persuadés qu'il est important
08:59de faire rapidement quelque chose, de faire plus sur l'écologie.
09:03Donc en fait, les gens ne sont pas idiots,
09:07ils sont bien capables de voir que les saisons ont changé,
09:11on est quand même en majorité exposés à des espaces agricoles,
09:15même si je rappelle que la majorité des gens qui habitent en ruralité
09:19ne sont pas agriculteurs, c'est que 3%.
09:20Mais on voit les impacts du dérèglement climatique
09:25sur la nature autour de nous, peut-être plus qu'en ville.
09:28Le nœud, il se fait à un endroit différent.
09:30Il est qu'il y a une conviction qu'il faut faire quelque chose
09:33et en même temps, il y a une peur très forte
09:35que ce quelque chose les fasse perdre en confort,
09:39les fasse perdre en autonomie.
09:41Et c'est là que cette tension, elle se noue.
09:43Et je pense que là, nous, on a encore des cartes à jouer
09:45parce qu'il faut qu'on arrive à avoir beaucoup de discipline
09:47sur la manière dont on parle d'écologie.
09:49Je pense qu'il faut qu'on arrête de parler de choses qui sont vraies,
09:53par exemple l'impact de la viande.
09:54C'est vrai que manger de la viande, ça pollue,
09:57que les hommes mangent plus de viande, notamment de viande de bœuf.
09:59Bon, mais en fait, ça devient un problème
10:01quand ça devient ça, l'écologie politique,
10:04parce qu'il faut absolument qu'on arrive à associer écologie politique
10:07avec gain de confort, d'autonomie, de pouvoir d'achat
10:11pour les classes populaires, par exemple la rénovation thermique.
10:14Aujourd'hui, les gens...
10:15Juste par exemple, c'est ton petit exemple,
10:16parce que ça veut dire que, selon toi,
10:18il faut éviter d'aller sur certains sujets.
10:20Ouais, ouais.
10:21Et a fortiori quand on fait de l'écologie politique.
10:24Pour moi, les militants, c'est différent.
10:25Si tu as une campagne dont l'objectif,
10:27c'est qu'il y ait moins de viande à la cantine,
10:29il faut faire sa campagne.
10:30Je ne dis pas le contraire.
10:31Moi, ma question, c'est la prise de parole politique.
10:33En tant qu'élu politique,
10:35tu crées donc ce qu'est l'écologie politique.
10:37Et pour moi, il faut absolument que l'écologie politique,
10:39dans la tête des gens,
10:40ça soit lutte contre les pollutions industrielles,
10:44la loi du plomb par exemple,
10:45que ça soit lutte pour plus de bien-être et de pouvoir d'achat,
10:48donc par exemple la rénovation thermique,
10:50la rénovation des modes de chauffage,
10:53et pas, oh là là, je vais perdre en autonomie
10:55parce que je n'aurai plus de bagnole,
10:56je vais perdre en confort parce que je n'aurai plus de piscine.
10:59Il y a vraiment cette tension,
11:01a fortiori quand on parle de classes populaires
11:02et de petites classes moyennes
11:03qui ont peu d'autonomie au travail.
11:05Je rappelle quand même que chez nous,
11:06les dépenses contraintes, elles sont très fortes.
11:08Pour une majorité de ruraux,
11:10tu peux avoir jusqu'à 30% de ton budget
11:12qui sont des dépenses liées à la voiture, par exemple,
11:16au mode de déplacement.
11:17C'est 5% à Paris.
11:18Donc les dépenses contraintes,
11:20elles sont très fortes.
11:21Et la pensée même qu'on va t'empêcher
11:23de faire un truc en plus,
11:25c'est un espèce de trigger
11:26où les gens se disent,
11:28oh là là, mais comment on va s'en sortir ?
11:29Si on n'a plus de piscine,
11:30qu'est-ce qu'on va faire des gosses
11:31pendant que nous, on va être au boulot
11:33et qu'ils seront en vacances sans moyen de se déplacer
11:35et coincés à la maison.
11:36Si on n'a plus de voiture,
11:37mais comment on va aller au boulot ?
11:38Si on n'a plus de boulot,
11:38comment est-ce qu'on va rembourser le crédit ?
11:40En fait, tu pars dans des espèces de stress
11:42qui font que tu ne vois que les obstacles.
11:45Alors que si on met en avant des choses
11:47comme la rénovation thermique des bâtiments,
11:49on rénove à peu près 2500 passoires thermiques
11:51chaque année.
11:53Donc c'est super.
11:53À ce rythme-là, il faut 2000 ans
11:55pour rénover le parc de logement.
11:57Tout le monde est d'accord
11:57que c'est plus agréable
11:59de vivre dans une maison rénovée.
12:00et se pose la question
12:02de comment est-ce qu'on rend ça populaire ?
12:04Comment est-ce qu'on donne accès à ça ?
12:06Comment est-ce que les dispositifs,
12:08je pense à ma prime rénove,
12:09ils sont fiables parce que la prime rénove
12:11en ce moment, ça va, ça vient,
12:12on l'a, on l'a plus,
12:13c'est vraiment très aléatoire.
12:15Et puis, elle n'est pas toujours adaptée.
12:17La plupart des gens chez moi,
12:18ils font des travaux avec des potes,
12:20ils font des travaux sur leur temps perso,
12:22donc il n'y a pas forcément
12:22d'entreprise agréée, etc.
12:24Mais la rénovation thermique,
12:26moi je le pense fondamentalement,
12:27la réindustrialisation,
12:29c'est l'avenir des classes populaires.
12:30Qui est-ce qui va se mettre
12:31à faire du BTP ?
12:32Ce n'est pas moi avec mon bac plus 5.
12:34C'est en majorité les classes populaires.
12:36Donc ça va donner de l'emploi
12:37et ça va donner du confort.
12:38Et c'est ça qu'il faut
12:39qu'on arrive à porter.
12:41Dans ton livre,
12:42il y a une autre dimension
12:44qui est intéressante,
12:47c'est que tu assumes
12:48en tant que militante de gauche,
12:49et on a eu jusqu'ici
12:51assez peu de paroles publiques là-dessus,
12:53d'être entouré de proches
12:56qui sont séduits par le RN,
12:59par la droite,
12:59et qui, quand toi,
13:00tu leur parles de tes idées de gauche,
13:02ne sont pas du tout convaincus.
13:05Il y a un grand débat en ce moment
13:06à gauche sur
13:08est-ce que les électeurs RN,
13:10notamment en ruralité,
13:12il faut essayer,
13:13continuer à leur parler ?
13:16Est-ce que,
13:16j'ai posé une question très bête,
13:17mais est-ce que quand on a un ami
13:19qui vote à l'extrême droite,
13:21il faut continuer de lui parler ?
13:23Et comment lui parler ?
13:25C'est ça que tu mets en scène
13:25dans ton livre,
13:26c'est comment tu parles
13:27à tes amis d'extrême droite
13:29dans la ruralité ?
13:30Alors, déjà,
13:31je pense qu'il n'y a pas de binarité
13:34entre il y a des fachos
13:35et il y a des pas fachos.
13:37Ça dépend de c'est quoi
13:38le type de vote d'extrême droite.
13:40Enfin, moi,
13:41même si j'ai des gens
13:42avec qui j'ai grandi,
13:42qui sont des personnes fascistes,
13:46dont l'objectif,
13:47c'est la mise en place
13:48d'un régime autoritaire,
13:50pour qui le racisme
13:51est le prisme structurel
13:53du rapport au monde.
13:55Ces gens-là,
13:55je ne leur parle pas.
13:57Je peux leur parler
13:58parce que je suis au bar
13:58et qu'on est au PMU,
14:00on se dit deux, trois trucs,
14:01on se raconte notre journée.
14:03Mais je ne cherche pas
14:03à les convaincre.
14:04Tu considères qu'ils sont perdus ?
14:05Oui.
14:05Moi, je ne parle pas.
14:07Alors, il y a différents trucs aussi.
14:09Il y a un rapport intime,
14:10en fait, si ces gens,
14:10c'est vos amis très, très proches.
14:12Moi, je ne suis personne
14:13pour dire aux gens
14:14d'arrêter de voir les autres.
14:16Je suis assez sûre
14:17que parmi les gens
14:18qui nous écoutent,
14:18ils ont dans leur famille
14:19des anciens
14:20ou des plus jeunes, d'ailleurs,
14:23qui sont homophobes,
14:24qui considèrent que
14:25des relations entre personnes
14:26du même genre
14:27sont une amobination,
14:29qui pensent que, bon,
14:30finalement, les meufs,
14:30si jamais elles travaillent,
14:31ne passent pas la fin du monde.
14:33En fait, le test de pureté,
14:35il ne passe pas tout le monde.
14:36Donc, moi, ma question,
14:37c'est comment est-ce qu'on fait
14:39pour appréhender
14:40la complexité des gens ?
14:41Ce que je constate
14:42chez beaucoup de mes potes,
14:43c'est qu'il n'y avait pas
14:44de vote RN avant
14:45et il y a un vote RN maintenant.
14:46D'ailleurs, c'est comme ça
14:47que le RN passe
14:48d'un parti minoritaire
14:49à un quasi-parti de masse
14:51aujourd'hui.
14:51c'est bien qu'il y a,
14:53moi, j'ai 33 ans,
14:54donc, sur ma vie,
14:57ma génération,
14:58un shift massif
14:59qui s'est opéré,
15:01qu'il y a donc des gens
15:02qui votaient pour la gauche,
15:03qui votaient communiste,
15:04quand même,
15:04dans une grande partie
15:05du bassin minier
15:06et industriel du Nord
15:07et de l'Est
15:08et qui se sont mis
15:08à voter pour l'extrême droite.
15:10Donc, moi, la question
15:10que je pose, c'est
15:11est-ce que ces gens,
15:11ils étaient super avant
15:12et maintenant,
15:12c'est des monstres ?
15:13Non, je pense que ces gens
15:14n'ont pas trop changé.
15:16Par contre,
15:17et ça, je l'assume,
15:18il y a une bataille du sens
15:20à mener pour le cœur
15:22et l'esprit de ces personnes.
15:24Je le dis,
15:25je pense que l'analyse
15:28selon laquelle
15:28les gens qui disent
15:29oui, il y a un peu
15:30de bien à droite,
15:31il y a un peu de bien à gauche,
15:32parce que la plupart des gens,
15:33c'est ça qu'ils disent,
15:34on est loin d'une vision fasciste,
15:36radicalisée
15:36et complètement cohérente
15:38et hégémonique du monde.
15:39C'est pas du tout ça.
15:40Les gens ne discutent pas
15:41grand remplacement au petit-déj.
15:43C'est pas ça qui se passe,
15:43même quand ils votent
15:44pour l'ERN.
15:44Moi, j'ai des potes
15:45qui votent pour l'ERN,
15:46ils ne se rappellent même plus
15:47qu'ils ont voté pour l'ERN.
15:48Donc, c'est pas un acte
15:49fondateur pour eux.
15:50Mais ces gens-là,
15:51moi, je pense qu'ils ne sont pas.
15:52C'est pas qu'ils sont centristes,
15:54qu'ils veulent eux-mêmes dire
15:54moi, j'aime bien un peu tout.
15:56Non, t'es perdu.
15:58Donc, en toi,
15:59dans ton cœur
16:00et dans ton esprit,
16:01se livre une bataille
16:01entre une interprétation fasciste,
16:04une interprétation néolibérale
16:05et notre interprétation
16:07qui part du principe
16:08que la solidarité,
16:11la fraternité,
16:12la liberté et l'égalité
16:13peuvent gagner
16:14et que le gâteau
16:15est assez gros
16:15pour qu'on partage tous.
16:16Moi, ma question,
16:17c'est est-ce qu'on peut encore
16:18convaincre ces personnes-là
16:19d'adopter cette vision du monde ?
16:21Ma réponse est oui.
16:23Tu voulais ajouter quelque chose ici ?
16:25Non, vas-y.
16:26Parce que moi,
16:27je voulais juste rebondir
16:27sur ce que tu disais,
16:28sur le fait que,
16:29oui, des électeurs
16:30du Rassemblement National,
16:31par exemple,
16:31ne se lèvent pas le matin
16:32en ayant tout de suite à l'esprit
16:33la théorie, par exemple,
16:35du grand remplacement.
16:36Non.
16:37Enfin, il y en a,
16:37mais eux, je ne leur parle pas.
16:39Moi, j'ai juste l'impression
16:40parfois qu'il y a des personnes
16:42qui peuvent être attirées
16:43par le vote du Rassemblement National,
16:45ou même pas forcément,
16:46mais qui, en tout cas,
16:47sont potentiellement
16:47de plus en plus
16:48à avoir des biais racistes
16:50et qui peuvent l'exprimer.
16:52Est-ce que tu ne penses pas
16:52que ça peut aussi être
16:53un danger, quand même,
16:55de se détourner de ce truc-là
16:56en se disant que,
16:58par exemple,
16:59il ne faut,
16:59mais évidemment,
17:00qu'il ne faut pas le faire,
17:00mais ne pas considérer
17:01que tous les électeurs
17:02du Rassemblement National
17:02sont racistes,
17:03mais qu'il faut peut-être
17:04s'attaquer quand même
17:05plus directement au fait
17:06que, oui,
17:07il y a peut-être
17:07une part grandissante
17:09de la population
17:10qui a de plus en plus
17:11des biais racistes
17:12et qui l'exprime
17:13de plus en plus librement aussi.
17:15Et ça peut venir
17:15de tout un tas de choses,
17:16notamment de la propagande médiatique.
17:17Bien sûr, bien sûr.
17:18Alors, je suis un peu gênée
17:20par cette question,
17:21parce que, bon,
17:22quand on regarde, par exemple,
17:23les études de Vincent Tibéry,
17:24qui travaille sur l'indice
17:25de tolérance,
17:26il dit très clairement
17:27que les électeurs cocos
17:29des années 70,
17:30ils étaient plus intolérants
17:30que les électeurs du RN
17:33aujourd'hui.
17:35Par contre,
17:36il y a clairement
17:37un débridement
17:40de la parole raciste.
17:41Moi, je le vois.
17:42C'est sûr,
17:43tu es au PMU,
17:43tu entends des trucs
17:44que tu n'entendais pas
17:45il y a 15 ans.
17:46Par contre,
17:47moi, j'ai l'impression
17:48que c'est déjà des gens
17:49qui le pensaient avant
17:50qui aujourd'hui
17:51se sont autorisés
17:52à le dire,
17:53plutôt qu'un espèce
17:54de truc massif
17:55où les gens se mettent
17:57massivement
17:57à dire des choses racistes.
17:59Pour autant,
18:00je pense qu'il faut absolument
18:01qu'on parle du racisme
18:03des classes populaires rurales,
18:04à la fois pour expliquer
18:05les conséquences dramatiques
18:08que l'extrême droite
18:10et ses politiques racistes
18:11auront le jour
18:12où elles seront au pouvoir
18:13si on participe
18:14à les mettre au pouvoir
18:14et en plus pour expliquer
18:16l'arnaque absolue du racisme
18:18qui est un piège
18:19qui est tendu
18:20par les fachos
18:21à nous.
18:22Et moi,
18:23c'est vraiment ce que je dis
18:23à mes potes
18:24et c'est pour ça que je pense
18:25et je le dis dans mon livre,
18:26il faut qu'on parle du racisme.
18:27Mais par contre,
18:28je ne pense pas
18:29pour faire le tri
18:29entre qui est raciste,
18:30qui n'est pas raciste,
18:31à qui on parle,
18:31à qui on ne parle pas.
18:32Je pense qu'il faut montrer
18:33à quel point le racisme
18:35est un outil utilisé
18:36par les fachos
18:38et de plus en plus
18:38par les néolibéraux
18:39pour diviser
18:41les classes populaires
18:42entre elles.
18:43Et que quand mes potes
18:45adhèrent à
18:47la raison pour laquelle
18:49j'ai des problèmes
18:49dans la vie,
18:50c'est à cause des migrants,
18:51c'est à cause des immigrés,
18:52c'est à cause de mon voisin arabe,
18:54ils tombent dans un piège
18:55qui n'a pour objectif
18:57que de les garder appauvris.
18:58Donc non seulement
18:59ça a des conséquences
19:00extrêmement problématiques
19:01pour toute une quantité
19:03non négligeable de personnes
19:04qui sont déjà
19:04bien plus vulnérables
19:05et ça,
19:05il ne faut pas le cacher.
19:07Et en plus,
19:08ça a des conséquences
19:08nocives pour eux
19:10parce qu'il ne faut pas
19:11se leurrer.
19:12L'extrême droite,
19:13quand elle sera au pouvoir,
19:14l'objectif,
19:14on l'a vu avec Trump,
19:15on l'a vu avec Milley,
19:16c'est toujours le profit.
19:19La méthode,
19:19c'est aussi toujours le racisme.
19:21Mais ce racisme,
19:22c'est une méthode
19:23pour nous diviser
19:24bien plus qu'un fond.
19:26Il y a des gens
19:26pour qui,
19:27bien évidemment,
19:28l'objectif absolu,
19:28c'est de créer une société
19:31basée sur une hiérarchie
19:32des races.
19:33Mais en réalité,
19:34quand tu regardes Trump,
19:36ce n'est pas le projet.
19:37Le projet,
19:38c'est doubler sa fortune.
19:39Ce qu'il a réalisé
19:39en moins d'un an,
19:40c'est rendre ses copains
19:41milliardaires
19:41toujours plus riches.
19:43Donc moi,
19:43la question que je pose
19:43à mes potes,
19:44c'est est-ce que tu penses
19:45sincèrement que demain,
19:47l'extrême droite au pouvoir,
19:48tu gagnes mieux d'argent,
19:49l'école,
19:50elle rouvre
19:50et ton patron,
19:51il arrête de te casser la tête ?
19:52Je ne crois pas.
19:53Là-dessus,
19:56justement,
19:56toi,
19:57tu es activiste,
19:58tu es aussi formatrice.
19:59Tout à fait.
20:00Parce que,
20:01pas forcément précédent
20:03à l'introduction,
20:03mais du coup,
20:04tu travailles à Victoire Populaire,
20:07qui est du coup
20:07une organisation
20:08qui, en gros,
20:09fait des campagnes,
20:10c'est ça ?
20:11Oui,
20:11c'est un mouvement citoyen
20:12de gauche
20:12qui n'est pas un parti politique.
20:14L'objectif,
20:14c'est de faire gagner
20:15la gauche
20:16aux différentes élections.
20:18Et du coup,
20:18tu essayes
20:20de former des militants
20:21à partir de ce que tu viens de dire.
20:25En fait,
20:25comment on fait
20:26quand on discute
20:28justement sur le terrain,
20:29quand on fait du porte-à-porte,
20:30quand on est militant
20:31en ruralité
20:32pour tenir ce discours-là ?
20:34Parce que ce discours-là,
20:35bon,
20:35il y a pas mal de gens
20:36qui le développent,
20:37dénoncer l'arnaque
20:38de l'extrême droite.
20:39Mais le problème,
20:40c'est que parfois,
20:40en étant de gauche,
20:41on est vu comme un peu
20:42moralisateur,
20:43comme étant un peu
20:44en surplomb.
20:46Et parfois,
20:46ce discours-là,
20:47on n'est pas écouté,
20:49on n'est pas cru.
20:50Donc toi,
20:50qu'est-ce que tu indiques
20:52aux militants ?
20:52Comment tu leur donnes quoi ?
20:54Moi,
20:54c'est pour ça que je forme
20:55des gens qui habitent
20:56là où on est.
20:57Parce qu'en fait,
20:58c'est comme dans
20:58toutes les relations.
20:59Par exemple,
21:00mettez-vous,
21:01je sais pas,
21:01vous êtes en couple,
21:02vous avez quelqu'un
21:03que vous aimez beaucoup
21:04autour de vous,
21:04je sais pas,
21:04votre frère,
21:05votre soeur,
21:05votre meilleur pote,
21:06qui vous dit,
21:08franchement,
21:08là,
21:08sur ce truc,
21:09je t'ai trouvé assez égoïste.
21:10Ou quelqu'un
21:11que vous aimez pas trop
21:12qui débarque,
21:12qui dit,
21:12ouais,
21:13franchement,
21:13là,
21:13t'as été hyper égoïste.
21:15Vous réagissez pas du tout
21:16de la même manière.
21:18Pourquoi ?
21:18Parce que le postulat de départ,
21:20il est cette personne même
21:21et veut mon bien.
21:22Oui ou non ?
21:23Si c'est quelqu'un
21:24dont vous savez
21:24que son seul objectif
21:25dans la vie,
21:26c'est de vous enfoncer,
21:26genre,
21:26votre tata que vous aimez pas,
21:28donc vous vous dites,
21:29ah ouais,
21:29ok,
21:29on a encore pas raté une.
21:31Ou quelqu'un
21:32à qui vous faites confiance,
21:33vous vous dites,
21:34ok,
21:34là,
21:34je vais peut-être
21:35me remettre un peu en question.
21:36Et ça,
21:36je pense que c'est très important
21:37parce qu'en fait,
21:38la politique,
21:38il y a des gens
21:40pour qui la chose politique
21:41est quelque chose
21:42de l'ordre des idées.
21:44Pour la majeure partie des gens,
21:46c'est de l'ordre de l'intime,
21:47de l'émotionnel,
21:48des valeurs.
21:49Et ça,
21:50il faut vraiment
21:51le prendre en compte
21:52et on le prend assez peu en compte.
21:53Donc,
21:53il y a une recette
21:54que moi,
21:55j'applique quand j'ai des conversations
21:56qui n'est pas une recette magique
21:57mais qui permet quand même
21:58d'éviter de trois trucs.
21:59Alors déjà,
22:00on a un truc qui s'appelle
22:00la règle des 80-20.
22:02Quand vous avez
22:02ce qu'on appelle
22:02une conversation intentionnelle,
22:04donc une conversation
22:04dont l'intention
22:05est de faire changer
22:06la personne d'avis,
22:07elle parle 80% du temps
22:08et vous parlez 20%.
22:09Ce qui n'est pas du tout
22:10la manière dont on voit
22:12habituellement
22:12la conversation politique
22:13où on se dit
22:14je vais t'expliquer.
22:15Mais ça ne marche pas comme ça.
22:17Encore une fois,
22:18si jamais vous avez des enfants
22:19ou vous avez des potes
22:20qui ont des enfants,
22:20regardez comment ils les élèvent.
22:21Est-ce qu'ils passent leur vie
22:22à leur expliquer des trucs ?
22:23Non.
22:24Ils donnent deux, trois indiques
22:26et puis après,
22:26les gens font leurs propres expériences
22:27et après, ils disent
22:28tu vois, ça, ça a marché,
22:29ça, ça n'a pas marché.
22:30Donc, concrètement,
22:31un, il faut toujours creuser.
22:33Quand les gens vous disent
22:34quelque chose
22:35et que vous avez décidé
22:36d'avoir une conversation
22:37avec eux,
22:37même si c'est une dinguerie,
22:39ne levez pas les yeux au ciel,
22:40ne dites pas tout de suite
22:41non mais tu ne peux pas dire ça,
22:42non mais ça, c'est n'importe quoi.
22:44Posez-vous la question
22:45pourquoi c'est important
22:46pour cette personne
22:47de penser ça ?
22:48Par exemple,
22:49Mel, ma meilleure pote,
22:50il y a deux semaines,
22:51on allait à un concert,
22:51elle me dit
22:52non mais la seule raison
22:53pour laquelle Sarko
22:54a été mis en taule,
22:55c'est parce qu'il est de droite.
22:56Bon, alors j'ai mal réagi,
22:58c'est vrai, j'ai dit
22:58non mais tu ne peux pas dire ça
22:59et là j'ai expliqué
23:00pourquoi en fait Sarko
23:00il méritait d'être en taule.
23:03Si je n'avais pas bu de pinte,
23:05j'aurais dit
23:05Mel, pourquoi tu penses ça ?
23:09Parce qu'en fait
23:10moi je la connais
23:10donc c'est plus facile
23:11pour moi de voir le...
23:12Mais en fait la raison
23:13pour laquelle elle pense ça
23:14c'est que
23:14elle, elle se met
23:16dans l'équipe droite
23:17et donc elle se met
23:18dans l'équipe
23:19c'est toujours nous
23:20à qui on demande le plus
23:21et ce n'est pas faux
23:22parce qu'elle
23:23avec son conjoint,
23:24ils ont un garage de mécanique
23:25et eux, c'est vrai
23:27que s'ils ont un problème
23:28avec l'URSSAF
23:29si jamais ils oublient quelque chose
23:30s'ils ont un accident du travail
23:31eux, ils vont être emmerdés.
23:33Ça c'est vrai.
23:34Ils sont des citoyens normaux.
23:36Mais c'est là
23:36où ce phénomène
23:37d'identification
23:37il ne marche pas du tout.
23:38Et en fait
23:39elle, quand elle défend Sarko
23:40elle se défend elle-même.
23:41C'est parce qu'elle s'est mise
23:42dans le même paquet que Sarko.
23:44Mais ça vous ne pouvez pas le savoir.
23:45Si elle n'a pas elle-même
23:46déroulé le fil de sa pelote
23:48où elle arrive au truc de
23:49bah moi par exemple
23:50voilà, toi par exemple
23:52ok bah raconte-moi toi.
23:54Donc là on creuse
23:55mais pourquoi
23:56et pourquoi
23:56et pourquoi
23:57ah bon mais raconte
23:58la dernière fois
23:59où ça s'est passé
23:59ah oui ça
24:00après on valide les émotions
24:02ah oui j'avoue
24:03ça a dû être chiant
24:03quand c'est un truc
24:04avec lequel vous êtes d'accord
24:05si quelqu'un vous dit
24:06une dinguerie
24:06moi je ne dis jamais
24:07ah oui je comprends
24:08si quelqu'un me dit
24:09un truc fou
24:09que je ne comprends pas.
24:11Parce que j'allais dire
24:12juste avec cette technique
24:13certains pourraient
24:14te reprocher entre guillemets
24:15de dire qu'on peut être
24:18trop tolérant
24:19avec des trucs
24:20trop problématiques.
24:21Mais c'est là où je dis
24:22moi je ne dis pas
24:23par exemple
24:23il y a trop d'immigration.
24:25Ça c'est un truc
24:25que j'ai entendu plein de fois.
24:27Je ne dis jamais
24:27ouais je suis d'accord
24:29vas-y dis-moi pourquoi
24:30non je dis juste
24:31pourquoi tu dis ça ?
24:32J'ai pas dit
24:33que j'étais d'accord
24:34mais j'ai juste pas
24:35sauté à la gorge
24:36de la personne.
24:37Très souvent
24:37sur cette question
24:38quand on déroule la pelote
24:40on arrive à
24:41de toute manière
24:42si eux ils ont un truc
24:42c'est que nous
24:43on a moins de trucs.
24:44C'est ça que ça veut dire
24:45en fait.
24:46C'est avoir accepté
24:47l'idée selon laquelle
24:48plus il y a de gens
24:49qui veulent manger le gâteau
24:51moins il y a de gâteau
24:52pour moi.
24:53Or la réalité
24:54elle ne dit pas ça.
24:55Elle dit que tu as
24:56trois miettes
24:56il en a deux
24:57et t'as l'impression
24:58qu'il va t'en prendre une autre.
24:59A côté de nous
24:59il y a un gâteau entier
25:01qui s'appelle
25:01les ultra riches
25:02et les multinationales.
25:03Je rappelle
25:03le premier poste de dépense
25:05de l'État
25:06on le sait grâce à Fabien Guay
25:07du PC
25:09211 milliards
25:10pour les aides publiques
25:11aux entreprises
25:12sans aucune contrepartie.
25:14Ça
25:14on ne peut pas arriver
25:16au cœur du cœur
25:17de cette réflexion
25:19sur l'immigration
25:19tant qu'on n'a pas
25:20déroulé la pelote
25:21et que la personne
25:22ne nous a pas dit
25:22bah en fait
25:24si lui il gagne
25:25ça veut dire que moi je perds.
25:27C'est ça le cœur du truc.
25:28Et là vous pouvez dire
25:29bah j'avoue
25:30ça doit être stressant
25:30mais du coup
25:31t'as peur de quoi ?
25:32T'as peur de perdre ton taf ?
25:33Bah ouais ça doit être stressant.
25:34Bah en fait
25:34si l'autre il travaille en intérim
25:35il n'arrive pas à avoir un CDI
25:37et qu'il a un crédit
25:38moi je comprends
25:39qu'il soit stressé
25:39par le truc de perdre son taf.
25:41Et après on partage
25:42sa propre expérience.
25:43Ça c'est la troisième étape.
25:44Donc on creuse
25:45on valide des émotions
25:45on partage sa propre expérience
25:47en disant
25:48bah ouais j'avoue
25:49moi ça m'est déjà arrivé
25:50d'être hyper stressé.
25:51Les classes populaires
25:52et les petites classes moyennes rurales
25:53elles sont en hyper vigilance constante.
25:55Déjà
25:55elles sont dans des situations
25:57conditions matérielles concrètes
25:58de stress
25:59parce que les dépenses contraintes
26:00dont on parlait
26:01avec des choses
26:01qui sont complètement incontrôlables
26:02comme le prix de l'essence
26:03avec le crédit
26:05qu'on doit rembourser quand même
26:06tout ce qui augmente
26:08je vous rappelle
26:08l'inflation etc.
26:09et donc elles ont un sentiment
26:11d'être sur le fil.
26:12C'est ça le coeur du truc.
26:14Et une fois qu'on a partagé
26:15j'avoue moi ça m'est déjà arrivé
26:16c'était dur
26:17on crée de l'empathie
26:18on crée de la confiance
26:18et là on redirige la colère.
26:21Mais tu penses pas en vrai
26:22que le gros problème
26:24c'est pas plutôt
26:25nanani nanana
26:26donc les riches
26:27Sarko
26:28les gens à qui
26:28on demande jamais de compte.
26:31Là souvent les gens disent oui
26:32en fait.
26:34Mais c'est là
26:35qu'il faut vraiment entendre
26:37que l'objectif de cette interaction
26:38elle est pas d'écraser l'autre
26:40elle est pas de gagner un débat
26:41elle est d'avoir une conversation
26:43et une conversation
26:45encore une fois
26:45je prends des exemples
26:46de la vie quotidienne
26:47mais si vous vous embrouillez
26:47dans votre couple
26:48ou avec votre daronne
26:50ou je sais pas quoi
26:50vous voyez bien
26:52ce genre de conversation
26:53ping pong
26:53où l'objectif c'est juste
26:55de marquer des points
26:55est-ce que vous avancez
26:57quand il y a un conflit ?
26:58La réponse est non.
26:59On avance beaucoup plus
27:00quand on dit
27:01bon en vrai
27:01là ça va pas
27:03et encore une fois
27:04mettez-vous vous-même
27:06à la place de ces personnes
27:07admettre qu'on a eu tort
27:09admettre qu'on s'est fait duper
27:11qu'on nous a menti
27:12et qu'on s'est fait avoir
27:13c'est dur
27:14de dire
27:16putain j'avoue là
27:17je crois que je me suis plantée
27:18et on admet pas
27:20qu'on a eu tort
27:20si on sent pas
27:21que l'autre est prêt
27:21à nous accueillir quand même
27:22et c'est pour ça
27:24que bien sûr
27:24que ces conversations
27:25elles sont difficiles
27:26bien sûr que c'est une ligne de crête
27:27d'ailleurs moi je le dis
27:28je le répète
27:29si vous êtes une personne racisée
27:30si vous êtes une personne
27:31concernée par le racisme
27:32par la transphobie
27:33mais personne ne vous demande
27:34d'avoir ces conversations
27:35enfin je veux dire
27:36c'est déjà suffisamment dur
27:37de vivre dans la France
27:38à Macron là
27:39faites votre vie
27:40vraiment
27:41gérez vos propres communautés
27:43où il y a aussi des sujets
27:44enfin moi je parle
27:46aux gens
27:46qui sont comme moi
27:47c'est à dire
27:47qui sont de gauche
27:48à la campagne
27:49et qui se posent la question
27:50de comment est-ce qu'on rattrape
27:51les nôtres
27:51parce qu'on les aime
27:52et qu'on n'a pas envie
27:53de leur dire au revoir
27:54et qu'on n'a pas envie
27:55de les regarder dans 4 ans
27:56quand ils auront mis au pouvoir
27:57des fous
27:57qui vont avoir fait
27:59des trucs
27:59mais impardonnables
28:01et là on devra vraiment
28:02se poser la question
28:03si on n'a rien fait
28:03de qu'est-ce que je fais
28:04de cette amitié maintenant
28:05et juste pour rebondir
28:06là-dessus
28:07dans ton livre
28:08à un moment donné
28:08j'ai l'impression
28:09justement que tu adresses
28:10en partie
28:11aux gens
28:12qui comme toi
28:14viennent ou vivent
28:15encore dans ces territoires
28:17et côtoient
28:17donc des gens
28:18qui vauterraines
28:18tu les interpelles
28:22un peu
28:23sur le mode
28:23il ne faut pas se taire
28:26et il ne faut pas
28:27lâcher l'affaire
28:28parce que c'est vrai
28:29que c'est devenu compliqué
28:30c'est Benoît Coquard
28:32mais pas seulement
28:32quand on parle
28:33du fait qu'aujourd'hui
28:35en fait la norme
28:36a changé un peu
28:37de camp
28:37donc c'est le
28:38Rassemblement National
28:40qui est devenu
28:40un peu la norme majoritaire
28:41et que même des gens
28:42qui ne votent pas RN
28:43ne le disent pas
28:46enfin les gens
28:47qui ne votent pas RN
28:47ne le disent pas
28:48les gens qui ont des idées
28:49de gauche ne le disent pas
28:50pour ne pas être marginalisés
28:51et les gens vont défendre
28:53les idées du RN
28:54juste pour appartenir
28:55un peu à un groupe
28:56à la communauté
28:57du coup toi
28:58tu t'adresses
28:58à ces gens-là
28:59qui potentiellement
29:00aujourd'hui se taisent
29:01parce qu'ils n'ont pas envie
29:02d'avoir de problèmes
29:03ou s'engueuler
29:04avec leurs proches
29:04en disant
29:05c'est important
29:06que vous défendez
29:07si vous êtes de gauche
29:08de défendre des idées de gauche
29:09et d'aller au combat
29:10même si c'est difficile
29:11ben je crois que là
29:12on est à l'heure
29:13de la prise de position
29:14c'est fini d'être neutre
29:15enfin on est quand même
29:16à deux doigts
29:17d'avoir un parti fasciste
29:18et autoritaire
29:18qui risque de prendre le pouvoir
29:19et s'ils prennent le pouvoir
29:20ce sera grâce aux nôtres
29:21aussi
29:22pas que
29:23on n'est pas responsable de tout
29:24on n'a pas créé cette situation
29:25il faut quand même le rappeler
29:26c'est les classes dominantes
29:27qui ont créé
29:27une situation de division
29:29telle
29:29que Mel
29:30elle pense qu'elle a plus
29:32elle est ensemble
29:32avec Sarko
29:33que avec d'autres gens
29:35c'est zinzin
29:36c'est pas nous
29:37qui avons créé ça
29:38mais c'est le monde
29:39dans lequel on vit
29:40donc
29:40moi je pense que
29:42toute personne
29:42qui a un intérêt intime
29:44à ce que
29:45les gens qu'on aime
29:46nos cousins
29:46nos voisins
29:47ne participent pas
29:49à faire
29:50advenir
29:51l'extrême droite
29:52en France
29:52il faut maintenant
29:53accepter que la neutralité
29:55c'est plus possible
29:56là en fait
29:56et c'est dur
29:57je sais que c'est dur
29:59donc je dis ça
30:00avec plein d'empathie
30:01si vous nous écoutez
30:03vraiment
30:03je sais que c'est dur
30:04mais rappelez-vous
30:06chez nous
30:06le pouvoir de la vanne
30:08le pouvoir de
30:09en fait
30:09on peut aussi
30:10on n'est pas obligé
30:11de dramatiser tout
30:12de péter des plombs
30:13sur chaque truc
30:14on a le droit
30:15de laisser filer des choses
30:16quand on pense
30:16qu'on va gagner
30:17une bataille plus tard
30:18on a le droit
30:19d'avoir un repas
30:20où on parle pas de politique
30:21parce que machin
30:22vient d'accoucher
30:23et on a envie
30:23de voir son bébé
30:24parce qu'en fait
30:24on l'aime
30:25on a le droit
30:26ça peut nous arriver
30:27mais
30:28si on ne prend pas position
30:31y compris sur des petits trucs
30:32bah ce sera trop tard après
30:35et il faut se rappeler aussi
30:36que les gens chez nous aussi
30:37ils ont changé
30:38rappelez-vous
30:38enfin moi quand j'étais gamine
30:40un couple de meufs
30:42un couple mixte
30:43c'était pas ok
30:45aujourd'hui beaucoup plus
30:46donc en fait
30:47les gens chez nous aussi
30:48ils sont transpercés
30:50par les évolutions
30:51de la société
30:52on n'est pas
30:53la France éternelle
30:55que les fachos
30:55veulent absolument
30:56nous faire
30:57nous faire de nous
30:58c'est pas vrai
30:58on n'est pas cette espèce
30:59de refuge à réac
31:00chez nous aussi
31:01il y a des personnes racisées
31:03dans mon département originaire
31:06l'un
31:07plus beau département de France
31:08encore
31:08il y a quasi autant
31:11d'immigration
31:11que dans les bouches du Rhône
31:12ou dans le Rhône
31:13qui ont deux métropoles
31:14qui sont pleines de diversité
31:17qui sont Lyon et Marseille
31:18donc chez nous aussi
31:19il y a des personnes
31:19des gens qu'on aime
31:20qui vont être concernés
31:21si jamais ces gens
31:22ils passent au pouvoir
31:23donc posez-vous la question
31:24de tous vos potes racisés
31:25en fait ils ont besoin de vous
31:27c'est plus difficile
31:28pour eux d'avoir ces conversations
31:29pensez à vos potes gays
31:31qui vivent dans des villages
31:32de 200 habitants
31:33pensez à vous
31:34dans quelle France rurale
31:36vous avez envie de vivre
31:37dans quel village
31:38vous avez envie de vivre
31:39vous avez envie de pouvoir
31:40envoyer vos gamins à l'école
31:41avec les parents
31:42qui traînent autour
31:43en vous disant quoi
31:44franchement
31:45encore une fois
31:46je sais que c'est dur
31:47et parfois on se prend des portes
31:49et parfois on se gueule dessus
31:50parce qu'on oublie
31:51qu'on est là
31:51pour avoir des conversations
31:52moi aussi ça m'arrive
31:53et parfois on chiale
31:54et je sais que c'est dur
31:56mais je crois assez sincèrement
31:58qu'il n'y a plus de neutralité là
32:00il faut qu'on choisisse un camp
32:02et il faut
32:03et il faut que
32:04quand on a déjà choisi
32:06on soit à l'aise
32:08avec qui on est
32:08parce que ce qu'on défend
32:09je suis désolée
32:10mais en fait c'est la fraternité
32:11c'est la solidarité
32:12c'est le fait de frères ensemble
32:12donc en fait on n'a pas à avoir honte
32:14de qui on est
32:15et qu'on n'est pas obligé
32:15d'être des caricatures
32:16de nous-mêmes
32:17moi j'ai une bagnole
32:18je mange du cochon
32:19je bois des coups
32:20tu vois
32:20on n'est pas obligé
32:22d'être pur et parfait
32:23ouais j'ai un iphone
32:24et ouais parfois je prends l'avion
32:25tu vois
32:26en fait ça m'empêche pas
32:27de dire à mes potes
32:29quand ils râlent
32:30sur les migrants
32:31les machins
32:31de leur dire
32:32c'est quand la dernière fois
32:33que t'as eu un problème
32:33raconte moi
32:34c'était en vrai
32:35soit avec l'état
32:36parce que les services publics
32:37ont fermé
32:37soit avec ton patron
32:38donc de quoi tu me parles en fait
32:40j'ai une question aussi
32:41à te poser Lumir
32:42par rapport à quelque chose
32:43dont tu parles aussi pas mal
32:44dans ton livre
32:44c'est autour de la valeur travail
32:45qui est assez centrale
32:47notamment par les électeurs
32:48issus de la ruralité
32:49qui voit un petit peu
32:51les parties de gauche
32:52et le camp progressiste
32:52comme le camp allié
32:54de l'assistana
32:55et qui voit
32:56en le rassemblement national
32:58et l'extrême droite
32:58le parti
32:59des vrais travailleurs
33:01et des gens plus respectables
33:02comment est-ce que tu fais toi
33:03pour combattre ce cliché
33:04et ces discours là
33:05bah déjà je dois dire
33:06à quel point ça me troue le coeur
33:08enfin franchement
33:10je le dis dans le livre parfois
33:12franchement
33:12mais moi aussi j'ai des moments
33:13où genre je chiale
33:14où je m'énerve
33:14et je me dis
33:15je pense à Ambrasse Croisa
33:16je pense au front populaire
33:18et je me dis
33:18mais putain
33:18mais
33:19je pense à Jordan Bardella
33:22qui nous explique
33:23que Bernard Arnault
33:24a plus de mérite
33:25que ses ouvriers
33:26et j'ai vraiment envie
33:28de nous mettre une baffe
33:28collective
33:29d'être tombée dans ce panneau
33:30quand même
33:30mais bon
33:31j'essaye une fois
33:32de
33:33voilà
33:33déjà je pense que
33:34la valeur travail
33:35c'est dans toutes les classes populaires
33:38en fait
33:39c'est pas juste
33:39dans la ruralité
33:40je pense qu'en banlieue
33:41en outre-mer
33:42en fait
33:43dans tous les endroits
33:44où il n'y a pas forcément
33:45eu de fierté par l'école
33:46je rappelle quand même
33:47que l'école
33:48est une grande machine à trier
33:49est une expérience humiliante
33:51pour beaucoup de gens
33:51qui n'ont pas les codes
33:52donc quand on a
33:53pas de fierté
33:54lié au diplôme
33:55quand
33:56comme chez nous
33:57il y a un marché matrimonial
33:58qui se rétrécit
33:59parce que notamment
34:00les filles
34:00qui elles font plus d'études
34:02partent
34:02et que c'est plus compliqué
34:04de commencer
34:04une vie de famille
34:06et qu'on est en intérim
34:07donc on peut pas faire de prêt
34:07donc on peut pas acheter une baraque
34:09il faut bien de la fierté quelque part
34:11et ça je pense que c'est vraiment
34:13quelque chose d'humain
34:14et c'est pour ça que je parle
34:15beaucoup de fierté dans ce livre
34:16parce que pour moi
34:17c'est un peu le problème
34:18de la gauche matérialiste
34:19parfois on parle beaucoup
34:20des conditions matérielles
34:21d'existence
34:21mais on est aussi des gens
34:23avec une âme
34:23et des émotions
34:24et la fierté
34:25il faut qu'on la trouve quelque part
34:27et c'est très dangereux
34:28de ne pas en trouver
34:29parce que sinon
34:29elle devient mal placée
34:30elle se place sur le fait
34:31d'être français
34:32sur le fait d'être blanc
34:33ce qui est de la fierté
34:34absolument pas intéressante
34:35de la fierté passive
34:36bah t'es né français
34:37cool
34:37t'as rien fait pour ça
34:39limite la valeur travail
34:41je trouve ça plus intéressant
34:42parce que
34:42je pense qu'on peut aussi
34:44la retourner sur elle-même
34:46pour en faire un truc de gauche
34:47c'est-à-dire
34:48bah contribuer
34:49à hauteur de ses moyens
34:50bah moi ça
34:52si c'est pas un truc de gauche
34:52je sais pas ce que c'est en fait
34:53dire quand tu peux
34:55tu fais
34:55et puis quand tu peux pas
34:57tu fais moins
34:57et c'est aussi ça
34:58que j'essaye de dire dans le livre
34:59c'est que
35:00on a appelé ça la valeur travail
35:02mais en fait la droite
35:03a appelé ça la valeur travail
35:04parce que chez nous
35:05ce qui est valorisé
35:05c'est plus la participation
35:06au collectif
35:07parce que si t'es une
35:09comme ça peut arriver chez nous
35:10une maman
35:11qui travaille pas
35:12et que tu gardes
35:13les gamins des autres
35:14que tu fais des trajets
35:15à gauche à droite
35:16que tout le monde sait
35:16que tu peux rendre un coup de main
35:17qu'on peut compter sur toi
35:18c'est tout aussi valorisé
35:19si t'es un retraité
35:21qui coache le club de foot
35:23qui fait les galettes
35:24pour la fête des conscrits
35:26qui a toujours un canapes
35:28si jamais il y en a un bourré
35:29qui peut pas reprendre sa caisse
35:30ce serait bien que ça arrive plus souvent d'ailleurs
35:31et qu'ils arrêtent de prendre leur caisse
35:33les gens te respectent
35:36donc je pense qu'on peut aussi discuter de
35:40bah en fait c'est normal de participer
35:42et pour moi c'est aussi lutter contre l'individualisme
35:45et contre l'égoïsme de cette société capitaliste
35:47qui nous fait croire que
35:48on peut prendre et rien donner
35:49et donc je pense qu'on peut
35:51on peut le retourner un peu sur sa tête ce truc
35:54et puis il faut aussi qu'on discute de quel travail
35:56en fait
35:58quel travail
36:00bien sûr qu'il y a plein de gens pour qui
36:03aller au boulot, être payé
36:04et ne dépendre de personne
36:06c'est une fierté
36:08et c'est parfois un problème
36:10parce que du coup ça devient une critique
36:12quand les autres ne sont pas en mesure de faire ça
36:15et ça pour moi c'est vraiment
36:17et c'est ce que j'essaye de partager à mes potes
36:19quand ils ont ce genre de réflexion
36:22c'est de dire mais
36:24en fait c'est les deux pièces d'une
36:26en fait la
36:28la honte que tu fais porter à ceux qui n'y arrivent pas
36:31elle va se retourner contre toi
36:32le jour où toi tu n'y arriveras plus
36:33et en fait personne n'a envie de vivre dans la honte
36:36parce que le jour où c'est toi
36:37qui a un accident de voiture
36:39moi mes potes qui sont artisans
36:40quand t'as 25 ans
36:41et que t'as de l'eau dans les genoux
36:42et que t'es carreleur
36:42bah tu fais quoi ?
36:44bah tu te mets en arrêt maladie
36:45et tu le dis à personne
36:46pendant 6 mois
36:47t'es en arrêt maladie
36:48tu te fais pas opérer
36:49parce que sinon ça va se voir
36:50et personne sait que tu vas pas au boulot
36:53parce que c'est la honte
36:53mais putain mais on a pas envie de vivre comme ça en fait
36:56mais il y a aussi un écart générationnel
36:58de ceux qui ont travaillé par exemple toute leur vie
36:59et qui reprocheraient aux jeunes
37:01c'est qu'il y a parfois une dérégature
37:02mais on dit leur disant
37:04eux ils ont plus envie de travailler
37:05comme nous on a travaillé
37:06alors moi je pense qu'il y a un truc de vrai là dedans
37:09qui est aussi la victoire de l'individualisme
37:12et c'est vrai
37:12les gens moi j'ai des potes qui disent
37:14hé je vais faire ça
37:15je prends mon RSA
37:16je prends mon chômage
37:17je travaille 6 mois
37:18machin
37:19j'en ai des potes comme ça
37:20mais
37:20et je comprends que quand toi tu t'es jamais posé la question
37:23que t'as 60 berges
37:24que t'as commencé à bosser à 14 ans
37:25que tu t'es pas épargné
37:27tu te dis
37:28hé c'est un peu abusé
37:30mais
37:30tu sais c'est comme aux US
37:32sur cette grande conversation
37:33sur les prêts étudiants
37:35enfin la dette étudiante
37:36tous les gens qui ont remboursé leur dette étudiante
37:38qui sont là
37:38bah non mais attends vous aussi
37:39c'est comme le bizutage
37:40genre
37:40moi j'ai pris cher
37:41donc toi tu vas prendre cher
37:42bah peut-être qu'à un moment
37:44ce serait bien qu'on ait une conversation collective
37:45sur en fait les gens à qui tu dis
37:47tu vas prendre cher
37:48c'est tes enfants
37:49donc est-ce que t'as vraiment envie
37:51que tes enfants
37:52ils galèrent autant que toi
37:53non mais par contre
37:54il faudrait créer un espace
37:56où tu peux
37:57conserver ta fierté
37:58tout en disant que t'as été exploité
38:00ça c'est super dur
38:01quand ta fierté elle vient du fait
38:03que t'as pas flanché
38:04que tu t'es pas plaint
38:05que t'as jamais rien demandé
38:06alors que ça t'a coûté énormément
38:08quand les autres disent
38:09hé mais moi j'ai pas envie
38:10de vivre comme ça en fait
38:11venez on fait pas comme ça
38:13bah c'est dur
38:15mais tu sais c'est comme
38:15chez les meufs
38:16quand t'es une nana
38:18qui a des enfants
38:19et que tu te plains
38:20ou que tu demandes de l'aide
38:21et que t'as ta grand-mère
38:21qui te dit
38:22hé bah moi à mon époque
38:23et t'es là ouais
38:24bah t'étais plus heureuse ou pas
38:25bah ouais mais dire non
38:26ça veut dire quoi du coup
38:28ça veut dire que tu t'es
38:29tu t'es fait marcher dessus
38:30pendant
38:30mais personne n'a envie
38:31d'admettre ça en fait
38:32donc c'est pour moi
38:33ça revient à la conversation
38:34de comment est-ce qu'on a tort
38:35et comment est-ce qu'on dit
38:37hé là j'ai merdé
38:38en fait pour moi
38:40c'est des conversations
38:40de couple qu'on a
38:41ou de meilleurs potes
38:42enfin intimes
38:43qu'il faudrait qu'on arrive
38:44à avoir un niveau collectif
38:45et c'est dur
38:46je sais pas comment on fait
38:48une thérapie collective
38:48mais moi je pense que
38:49c'est ça qui nous attend
38:50je pense qu'on est
38:51multitraumatisé
38:52dans les classes populaires rurales
38:55qu'on ne sait plus
38:56où trouver notre fierté
38:58où trouver notre estime
38:59de nous-mêmes
38:59et que dans tout
39:01cette espèce de flou
39:02on est en train
39:03de se faire bouffer
39:04par des gens
39:05qui n'ont pas
39:05nos intérêts à coeur
39:06mais qui nous proposent
39:07une espèce de fierté
39:08toute packagée
39:08toute faite
39:09je te relais
39:10une toute dernière question
39:10en deux minutes
39:11avant de te libérer
39:12qui est particulièrement
39:13intéressante
39:14de quelqu'un
39:14qui nous dit
39:15je fais partie
39:15de la liste de gauche
39:16pour les élections municipales
39:17dans une ville moyenne
39:17de droite
39:18et qui risque
39:18de basculer
39:19à l'extrême droite
39:20il m'arrive souvent
39:20d'avoir l'impression
39:21de mettre des coups d'épée
39:22dans l'eau
39:22c'est très compliqué
39:23aujourd'hui
39:23d'afficher ses idées
39:24localement
39:25sans se prendre
39:25des torrents d'insultes
39:26comment reprendre
39:27du terrain médiatique
39:28difficile d'y répondre
39:30rapidement
39:30c'est dur
39:31déjà il faut admettre
39:32que c'est dur
39:33et bravo de le faire
39:34et merci
39:35parce que je crois
39:37que c'est ça
39:37qui nous attend
39:38collectivement
39:38c'est cette bagarre
39:39donc je sais que c'est dur
39:41je pense que
39:42si on commence
39:43avec les valeurs
39:43et ce qu'on a en commun
39:44c'est plus simple
39:46que si on commence
39:46avec les étiquettes
39:47je l'ai vu
39:47quand je me suis présentée
39:48en 2022
39:49j'ai commencé en candidate
39:50indépendante
39:50parce que comme je suis pas
39:51encartée
39:51et que les partis de gauche
39:52n'avaient pas encore
39:53géré leur projet
39:54j'ai commencé à me présenter
39:55en octobre 2021
39:57pour une élection en juin 2022
39:58donc autant dire
39:59que tout le monde s'en foutait
39:59bah c'était beaucoup plus simple
40:01parce que j'allais voir les gens
40:03en leur disant
40:03bon demain t'es président
40:04t'as une baguette magique
40:05c'est quoi la première chose
40:06que tu fais
40:06ils me disaient
40:07augmenter mon salaire
40:09j'étais là
40:09bah ça tombe bien
40:10c'est sur notre programme
40:10donc peut-être
40:12que ce que j'aurais envie
40:12de dire à cette personne
40:13c'est ne parlez pas des listes
40:15demandez aux gens
40:15demain t'es maire de la ville
40:16c'est quoi le premier truc
40:17que tu fais
40:18fais du porte à porte
40:19nouer des liens
40:20avec des gens
40:20trouver des leaders
40:22d'opinions locaux
40:23qui vont pouvoir
40:27accepter que parfois
40:27on perd
40:28mais qu'on met pas
40:29tous nos oeufs
40:29dans le même panier
40:30on est sur une reconquête
40:31des coeurs et des esprits
40:33mais mettez-vous
40:34à la place de l'extrême droite
40:35hé
40:35les mecs
40:36leur héritage
40:37c'est la Shoah
40:38la collaboration
40:40l'Algérie française
40:42enfin
40:44qui aurait parié
40:45un copec
40:46sur la capacité
40:47d'une espèce
40:47d'alliance
40:48mais complètement lunaire
40:49entre des monarchistes
40:50des nazis
40:51des réactionnaires
40:53des racistes
40:55des collaborateurs
40:56la ligne de l'humanité
40:58de dire
40:59hé
40:59ils sont pas d'accord
41:00entre eux
41:01y'en a un qui veut un roi
41:01y'en a un qui veut un chef
41:02on va vous mettre ensemble
41:04c'est ce qu'a fait
41:04Jean-Marie Le Pen
41:05je vous conseille à tous
41:05le très bon podcast
41:06de Philippe Collin
41:07sur Jean-Marie Le Pen
41:08et on va gagner
41:09et on va devenir majoritaire
41:11personne
41:12bah ouais
41:12mais 50 ans après
41:13on en est là
41:14et donc
41:15il n'y a pas de fatalité
41:16il faut un plan
41:17sur le long terme
41:18là on va pas gagner
41:19en deux jours
41:20les gens qui nous disent
41:21non mais moi
41:21j'ai la recette magique
41:22pour que
41:22c'est pas vrai
41:23ça va pas
41:24ça existe pas
41:24ni les attentionnistes
41:25qui votent plus depuis 10 ans
41:26on va pas les refaire voter
41:27en une fois
41:28ni les gens
41:28qu'on a perdus
41:29dans d'autres parties
41:30on va les faire voter
41:30en une fois
41:31par contre
41:31ce qu'on peut faire
41:32c'est se battre
41:33jour après jour
41:34brique à brébrique
41:35pour regagner
41:36encore une fois
41:37la vision du monde
41:38on parle même plus
41:38d'étiquette là
41:39le sujet c'est
41:40est-ce qu'on veut
41:40un monde
41:41où on est opposé
41:42les uns aux autres
41:42où les autres
41:43sont des dangers
41:43des ennemis
41:44c'est l'extrême droite
41:45où les autres
41:46sont des variables
41:47d'ajustement
41:47des gens non nécessaires
41:48genre quand on veut
41:49on peut
41:49moi je me fais tout seul
41:50c'est le néolibéralisme
41:51ou est-ce que les autres
41:52sont une force
41:53et ça c'est nous
41:54merci beaucoup Lumière
41:55d'avoir été avec nous
41:56merci de votre invitation
41:57et merci beaucoup Lucie
41:58d'avoir été avec nous
41:59également
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