00:03Europe Info, la suite à 13h32 sur Europe 1 avec vous, Clélie Mathias et vos deux chroniqueurs.
00:07Sébastien Lignier, il vous a rejoint aussi en studio.
00:09La journaliste et chroniqueuse sur CNews, Xenia Fedorova.
00:12Bonjour Xenia Fedorova, soyez la bienvenue.
00:14Bonjour.
00:15On va revenir sur les propos d'Emmanuel Macron,
00:19qui avait enfilé ses habits de chef des armées ce matin sur RTL et M6.
00:23Il a été beaucoup question de défense,
00:26beaucoup question du conflit entre l'Ukraine et la Russie.
00:29Oui, je voudrais que vous écoutiez le chef de l'État déjà.
00:31La Russie mène une confrontation stratégique, qu'on appelle hybride, avec les Européens.
00:38C'est-à-dire qu'elle les provoque par ses déclarations sur le nucléaire,
00:42elle mène des actions cyber, elle attaque nos hôpitaux,
00:44elle attaque nos systèmes d'information,
00:46elle mène une guerre informationnelle, pour saper le moral,
00:49et elle mène ses provocations par l'immigration, par les drones et la guerre en Ukraine.
00:53Donc cet ensemble fait que oui, il y a une confrontation.
00:56Nous aurions tort d'être faibles face à cette menace.
00:59Xenia Fedorova, en tant que journaliste russe, je voulais avoir votre avis sur cette phrase.
01:05Qu'en pensez-vous de ce qu'a dit le chef de l'État ce matin ?
01:09Ça fait deux mois, si pas des années, qu'Emmanuel Macron accuse la Russie.
01:14En fait, vous savez, la Russie niait toujours sa participation dans ses attaques hybrides, comme on dit.
01:23En fait, c'est toujours sans preuve.
01:26La même chose pour les drones.
01:27Les drones, ils sont identifiés comme les Russes, mais en fait, ça n'a aucune preuve.
01:33Il y a des faisceaux d'indices, comme on dit.
01:36Je ne connais pas ces mots.
01:37Mais je pense qu'il a dit, en fait, ce qu'Emmanuel Macron utilise, cette menace russe, vraiment pour, en façon cachée, les problématiques qui sont à l'intérieur de son propre pays.
01:51Ah, vous pensez que ce sont des contre-feux ?
01:53Je pense que c'est toujours, sans parler de l'Ukraine, je pense que c'est utile pour Emmanuel Macron de faire passer les messages que la vraie menace, c'est l'extérieur.
02:02Et ce ne sont pas les problèmes qui sont en face des Français, aujourd'hui, à l'intérieur.
02:08Donc la Russie n'est pas une menace pour la France ?
02:11Pas une menace imminente, c'est sûr.
02:14Il n'y a aucune indication de dire que la Russie va attaquer un pays européen, la France, ou un pays européen, dans le futur.
02:21Donc, en fait, aujourd'hui, sous le prétexte de cette guerre en Ukraine, la Russie est utilisée pour faire peur aux Français et pour créer cette ambiance de peur.
02:37Et aussi pour jouer, je pense qu'Emmanuel Macron cherche à jouer un rôle plus important dans les mondes de géopolitique, on peut dire.
02:46Parce que, déjà, c'est Emmanuel Macron qui décidait d'arrêter les contacts diplomatiques avec la Russie.
02:52Donc, à la place de jouer en médiateur et d'essayer de régler ces conflits par les voies diplomatiques, il a pris une position assez claire.
03:01Il a cherché, il a dit à plusieurs reprises, il a cherché un défaite stratégique de la Russie.
03:06Aujourd'hui, la réalité est différente.
03:08C'est les Américains et Donald Trump qui cherchent à imposer un pays pour une guerre qui n'est plus intéressante de tout pour les Etats-Unis.
03:16Sauf qu'ils vendent les armements toujours, mais en général, ce n'est pas leur guerre.
03:20Donald Trump a dit ça depuis le début qu'il était élu.
03:23Et donc, Emmanuel Macron se trouve un peu au milieu, sans jouer un vrai rôle dans ces conflits.
03:29Et il se trouve dans les côtés, on peut dire, de ceux qui perdent.
03:33Parce que, pour l'Europe, avoir un accord d'épée où la Russie garde en basse et la Crimée, c'est comme avoir un défaite.
03:40En fait, c'est la victoire pour la Russie.
03:41On va y venir sur le plan de paix et ce qui a été dit dessus.
03:45Je voulais juste avoir votre lecture à vous, Sébastien Ligné.
03:47Oui, en fait, je pense qu'il y a deux choses.
03:50On peut très bien considérer, en effet, que la Russie représente une menace pour la France et pour l'Europe,
03:55et pas une menace existentielle pour la France, qui était le mot employé par Emmanuel Macron.
04:00Premier point.
04:01Ensuite, on peut considérer que la Russie représente une menace,
04:04mais on peut aussi très bien considérer que ce n'est pas le seul pays qui mène des actions parfois offensives contre la France.
04:11Pourquoi on n'entend jamais Emmanuel Macron, ou avec autant d'insistance, sur la guerre commerciale que nous mène la Chine ?
04:18Pourquoi on n'entend jamais Emmanuel Macron nous parler de la stratégie d'infiltration des mouvements islamistes
04:24qui sont financés par certains pays du Moyen-Orient ?
04:26Pourquoi on n'entend jamais Emmanuel Macron nous parler de la guerre des renseignements et des écoutes
04:31menées par les États-Unis sur le sol européen ?
04:33Le problème, c'est qu'on peut reconnaître des menaces, bien évidemment,
04:36mais dans ce cas-là, il faut parler de toutes les menaces.
04:38Et le problème avec Emmanuel Macron, c'est qu'il se focalise tellement sur la Russie,
04:43qui, encore une fois, est un point important,
04:45en oubliant tout le reste et en oubliant aussi la menace intérieure.
04:48Moi, j'aimerais bien qu'on entende autant Emmanuel Macron sur la Russie
04:51que sur le narcotrafic ou sur l'islamisme en France.
04:55Le problème, c'est qu'il y a une partie de ces menaces qui l'ignorent.
04:58Et c'est ça qui crée un déséquilibre.
05:01On ne peut pas simplement choisir les menaces qui vous arrangent.
05:04Soit vous êtes président de la République et vous parlez de toutes les menaces qui pèsent sur votre République,
05:07soit vous acceptez de mener un combat politique contre certaines menaces.
05:11Et j'ai l'impression que, sur le cas russe, Emmanuel Macron fait du zèle
05:15et se sert de cette menace en particulier pour servir son propre agenda politique.
05:20Alors, dans le cadre de cette menace russe, a-t-il dit, il ne faut pas être faible.
05:25Et il a annoncé la transformation du service national universel, le SNU, exit donc,
05:31en service militaire.
05:33Écoutez, Emmanuel Macron sur RTL, ce matin.
05:35Il est très clair que nous devons renforcer le pacte armée-nation.
05:39Il est très important qu'un maximum de nos compatriotes comprennent ce que sont nos armées,
05:44comment ça marche, participent à la réserve, que nous avons aussi mis en place
05:48et qui est très importante parce qu'elle apporte des compétences à nos armées
05:51et que nous raffermissions en quelque sorte la nation.
05:54Et c'est dans ce contexte-là qu'on prend plusieurs initiatives,
05:57dont celle de la transformation du service national universel vers une nouvelle forme.
06:01Et je pense qu'il faut vraiment, en tout cas, tout de suite supprimer toute idée confuse
06:06qui consisterait à dire qu'on va envoyer nos jeunes en Ukraine.
06:09Ce n'est pas du tout le sens de cette affaire.
06:11Emmanuel Macron qui s'est voulu rassurant par rapport à la phrase prononcée par le chef d'état-major des armées,
06:15Fabien Mandon, qui avait dit qu'il fallait être prêt à perdre nos enfants.
06:21Là, Emmanuel Macron a plutôt rassuré.
06:23Mais cela dit, Xenia Federova, est-ce que l'idée d'un service militaire en France,
06:29comme ça se fait d'ailleurs dans d'autres pays, d'autres pays européens y songent,
06:32est-ce que ça vous paraît totalement aberrant ?
06:35Je pense que depuis un moment où l'Europe a en fait laissé leur défense aux États-Unis à l'OTAN.
06:46Et en fait, c'est un choix qui était fait par les dirigeants de chaque pays européenne.
06:51Aujourd'hui, je pense qu'ils regrettent ces choix.
06:53Ils cherchent à renforcer leur armée, soit vis-à-vis de la menace, comme ils disent, russe,
06:59ou seulement parce qu'il faut les faire, parce qu'ils ne peuvent plus compter sur les États-Unis et l'OTAN.
07:05Mais la vérité, c'est que pour renforcer l'armée, il faut déjà avoir, pour changer la législation, il faut avoir d'argent.
07:14L'argent aujourd'hui pour la France, c'est une grande question avec une énorme dette.
07:18Donc, il faut absolument pousser les mesures, je pense, vis-à-vis les Français et expliquer pourquoi ils sont obligés de donner encore plus.
07:27Et donc, cette peur, encore une fois, pour revenir sur la question de la Russie, ça marche très bien,
07:32parce que quand vous avez un ennemi de l'extérieur, ça vous fait un peu...
07:35Bon, ça facilite un peu les choses, on peut dire, de la part des communications, des côtés de la communication.
07:41Après, moi, je ne suis pas une spécialiste sur question d'armée et militaire,
07:49mais je pense que ça prend beaucoup de temps, mais on voit la même tendance en Allemagne,
07:53par exemple l'Allemagne qui est en train de serrer et militariser.
07:55Et ils cherchent, on peut dire désespérément, d'avoir deux hommes, probablement défendants à l'armée.
08:06Et ça peut arriver à la France, la question, est-ce que les Français sont prêts d'aller en armée
08:12et de se préparer pour la guerre ?
08:14Macron vient de dire qu'il ne va pas envoyer le jeune Français en Ukraine,
08:19en même temps, il envisage avoir les troupes français sur le sol ukrainien.
08:23Le force de réassurance.
08:25Exactement, derrière la ligne de front, mais quand même des O'Kiv.
08:29J'imagine que ce sont encore les gens français, professionnels militaires.
08:33Mais oui, pour moi, la question, combien ça va coûter aux Français et à quel prix ?
08:39Sébastien Ligné.
08:40Moi, je vais vous dire quelque chose, je suis totalement favorable au retour du service militaire obligatoire pour tous.
08:46Ah oui ?
08:46Oui, mais pas pour une raison...
08:48Dans la version maximale.
08:50La version qui existait jusqu'en 1997.
08:53Avant qu'il soit d'abord suspendu par Jacques Chirac, puis ensuite définitivement arrêté, je crois, en 2001.
08:58Mais pas pour une question militaire.
09:00Parce qu'en réalité, moi, j'étais trop jeune, donc je n'ai jamais fait mon service militaire.
09:03Mais quand je discute avec des gens qui l'ont fait à l'époque,
09:07ils vous disent tous qu'ils ne ressortaient pas du service militaire avec une énorme connaissance militaire.
09:13Ils n'étaient pas devenus des soldats en puissance au bout de dix mois de service militaire.
09:16Au contraire, le service militaire servait à autre chose que ça.
09:19Évidemment, vous apprenez les bases du conflit militaire, mais c'était surtout un moment d'insertion citoyenne extraordinaire,
09:28où vous avez des jeunes qui étaient parfois, qui ne connaissaient pas leur parcours scolaire,
09:31qui n'avaient pas de débouchés, qui ne savaient pas où aller, qui avaient du mal avec l'autorité,
09:36et qui étaient enlevés de leur famille pendant un an.
09:39C'était un peu dur, en effet, mais ils ressortaient là avec un certain amour de la patrie,
09:45un certain patriotisme qui aujourd'hui a disparu.
09:47Ce n'est pas pour rien que le patriotisme s'est écroulé depuis notamment la fin du service militaire.
09:51Donc ça a apporté un cursus de valeur commune à des centaines de milliers de jeunes.
09:56Et quand je vois aujourd'hui l'état de la jeunesse française de 2025,
10:00honnêtement, je me dis que vous avez énormément de jeunes qui bénéficieraient à faire un petit tour au service militaire,
10:04pas pour apprendre à tirer avec un fusil.
10:05Oui, donc vous n'êtes pas sur les questions de défense, vous êtes plutôt sur les questions de cohésion nationale.
10:10Mais ça peut servir, évidemment.
10:11On n'est jamais à l'abri qu'un conflit d'envergure arrive et que tous les jeunes doivent partir à la guerre.
10:16Mais ce n'est pas ça le but du service militaire.
10:18Le but premier, c'est de faire nation.
10:21Et en effet, je pense que le service militaire était un excellent exercice grandeur nature pour cela.
10:25Et je pense que c'était une grave erreur de l'avoir supprimé d'ailleurs.
10:28J'ai une impression pour...
10:30Xavier Fedorova.
10:30Le patriotisme a un peu interdit en France aujourd'hui.
10:33Donc je pense que...
10:34Que ça ferait du bien ?
10:35Non, non, je pense que...
10:37Honnêtement, moi personnellement, je pense que c'est très important d'aimer son pays,
10:41de comprendre et connaître l'histoire de son pays.
10:44Je pense qu'aujourd'hui, on voit qu'il y a même un drapeau français qui crée le problème pour certains.
10:49Donc je m'en crois que la jeunesse, par exemple, qui vit dans les beaux lieux,
10:54sera très contente d'y aller en armée.
10:55Mais elle n'aura pas le choix, du fait que ce soit obligatoire.
10:57Mais dans ce cas, je pense que...
10:58Mon père, il n'avait pas forcément envie d'aller au service militaire.
11:00Oui, mais il faut que vous vous êtes prête à certaines protestes,
11:06et même peut-être plus que ça, si ça sera l'écart.
11:10Je pense qu'Emmanuel Macron comprend ça très bien.
11:12C'est pour ça qu'il est très légère à ses moments avec les formulations de ses phrases.
11:17Allez, alors qu'un plan de paix est en cours d'élaboration entre justement l'Ukraine et la Russie,
11:22c'est pas gagné.
11:22On va y venir justement.
11:24Il y a une nouvelle nuit de frappe sur les sols ukrainiens et russes.
11:28On en parlera avec vous, Xenia Fedorova et Sébastien Ligné, dans un instant.
11:31Il est 13h43, vous écoutez Clémy Mathias sur Europe 1.
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