Passer au playerPasser au contenu principal
  • il y a 2 jours
Cours de philosophie diffusé le 20/11/ 2025 sur la plateforme du Projet Europe, Éducation, École :
https://projet-eee.eu/diffusion-en-direct-564/

Dossier pédagogique : https://projet-eee.eu/wp-content/uploads/2025/09/eee.25-26_Meditations_metaphysiques_Descartes_Pigeard_de_Gurbert_G.pdf

Agora européenne des lycées : programme 2025-2026 :
- https://projet-eee.eu/wp-content/uploads/2025/10/EEE_Programme_2025-2026_Calendrier.pdf
- https://projet-eee.eu/wp-content/uploads/2025/09/Projet_EEE_Une-agora-francophone-des_lycees-2025-2026.pdf

Cours en vidéo classés par thèmes :
https://projet-eee.eu/cours-classes-par-themes/
E.E.E. sur Dailymotion : http://www.dailymotion.com/projeteee
Podcast du Projet EEE :
https://soundcloud.com/podcastprojeteee
https://www.deezer.com/fr/show/634442

Catégorie

📚
Éducation
Transcription
00:00Bonjour à tous, soyez les bienvenus sur la plateforme du projet Europe Éducation École
00:18qui ce matin reçoit Guillaume Pijard de Gurbère, professeur de philosophie au Luceguet-Lussac à Limoges
00:26pour une matinée de réflexion sur les méditations métaphysiques de Descartes.
00:31Il est entouré de trois classes de son lycée, la classe de M. You, la classe de Mme d'Ambruzio
00:39et la sienne, la classe d'Hippocagne et de Cagnes avec les terminales.
00:45Voilà, cher Guillaume, la parole est à toi, au plaisir de t'écouter.
00:50Alors, ça introduit exactement mon propos, donc je voulais faire un cours sur les méditations métaphysiques
00:55de Descartes, vous en avez peut-être entendu parler, c'est quand même pas un livre inconnu
00:59en philosophie, mais si vous n'en avez pas entendu parler, c'est bien, c'est pareil,
01:03c'est un français qu'on ne connaît pas.
01:05Et il y a six méditations, première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième, sixième méditation,
01:10chacune fait grosso modo dix, quinze pages.
01:14Ça, c'est quand même assez extraordinaire de se dire qu'en six fois une grosse dixième de pages,
01:20on a un texte absolument révolutionnaire pour la philosophie.
01:24Ça veut dire qu'il n'y a pas besoin de, vous voyez, il y a une économie de moyens
01:28assez incroyable, et il ne fait pas référence à d'autres philosophes, rien, il parle des
01:33choses, voilà, ce qu'on peut voir autour de nous.
01:35Voilà, et donc, pour répondre à la question d'Anne Bonne-Châtelet, c'est ce que je vais
01:39montrer, il y a un ordre nécessaire des six méditations, on ne peut pas du tout commencer
01:43par la fin, ni par le milieu.
01:45On est, c'est écrit de telle façon, c'est une sorte de corrigé idéal d'une dissertation,
01:51puisque ce qui vient en premier vient nécessairement en premier, et ce qui vient en second en second,
01:56etc., il y a un enchaînement, c'est comme une dissertation en six parties, si vous voulez,
02:01avec un enchaînement absolument magistral d'une méditation à l'autre, c'est ce sur
02:06quoi que je vais insister d'ailleurs.
02:07Voilà. Et du coup, pourquoi j'ai pris, pourquoi j'ai pris, alors je vais essayer de vous donner
02:15une idée synthétique du livre, des six méditations, c'est-à-dire une idée élémentaire du livre,
02:21élémentaire voulant dire fondamentale, pas basique, pas allégée pour des pauvres petits
02:28élèves qui commencent, pas du tout. Et c'est d'ailleurs, il faut avoir lu ce livre plusieurs fois
02:34et de longues années pour arriver à peu près à en saisir le caractère élémentaire.
02:39C'est ça qui est fort chez nous en philo, c'est que plus on progresse, plus ça devient simple, en fait.
02:44Vous voyez, dans d'autres disciplines, plus vous progressez, plus c'est subtil, plus c'est technique,
02:48et moins on est nombreux à se comprendre. Nous, c'est le contraire.
02:51Plus les années passent, plus c'est simple pour moi, et donc mieux je peux le communiquer,
02:55l'enseigner à d'autres. Voilà. Donc l'idée, c'est vraiment ça.
02:58Et du coup, l'angle d'attaque est assez simple, en fait.
03:02Et d'ailleurs, il suffit de lire le titre des six méditations,
03:05puisque chaque méditation a un titre pour le trouver, en fait, le plan, il nous le donne.
03:09Et pour le voir, il faut le lire longtemps.
03:11C'est, tout va se jouer entre ces deux concepts, que sont l'essence et l'existence.
03:15Qu'est-ce que c'est, évidemment ?
03:16Et le fil rouge des six méditations, c'est, est-ce qu'il s'agit d'une essence ?
03:23Est-ce qu'il s'agit d'une existence ?
03:26On va voir ce que ça veut dire, effectivement.
03:28Voilà. Donc je commence, si vous voulez bien, Antoine.
03:32Voilà. Donc je commence.
03:34Donc, alors, deux remarques préliminaires avant de rentrer dans la première méditation.
03:38D'abord, il y a un petit texte qui est, sans avertissement, du libraire au lecteur.
03:44Qui est ce libraire ? On ne sait pas trop, mais il y a souvent la main de l'auteur derrière.
03:49C'est souvent un masque de l'auteur, le libraire.
03:51Alors, je ne sais pas si Descartes y est pour quelque chose,
03:53mais en tout cas, si ce n'est pas lui, il aurait tout à fait pu le dire.
03:56Et comment ce livre est décrit par le libraire au lecteur ?
04:00Il dit qu'il s'agit de méditations fort libres, très libres, comme ça,
04:05de méditations fort libres, et qui peuvent même sembler extravagantes.
04:10Donc, attendez-vous à de l'extravagance.
04:13Ça, c'est déjà appétissant.
04:15Et puis surtout, il ne vous aura pas échappé, libre et extravagante.
04:19C'est-à-dire, il se pourrait bien que ma liberté se manifeste par mon extravagance
04:24et qu'à l'inverse, mon manque de liberté se traduise par un manque d'extravagance.
04:30Donc, ce couple est quand même assez amusant à lire.
04:32Ça donne une bonne idée de la philosophie.
04:34Il y a quand même une insolence, une indépendance, une extravagance.
04:38Mais vous allez voir qu'il y a quelque chose d'extravagant,
04:41mais de simple à comprendre.
04:43On est un peu sidéré quand on lit ce texte.
04:46Deuxième chose, dans cet avertissement du libraire,
04:51il dit, attention, comment on doit lire ce texte ?
04:53Et ça, je vous le dis parce que pour moi, c'est la méthode.
04:55Il parle d'une méthode de lecture.
04:57Comment on doit lire ?
04:58Pour moi, c'est la méthode de lecture.
04:59Et d'ailleurs, je dirais, pour aller au cinéma, pour aller au théâtre,
05:02pour regarder un tableau, c'est une méthode pour se cultiver,
05:06pour le dire vite fait.
05:07Je n'en vois pas d'autre.
05:08Et donc, première chose, avoir, dit le libraire, l'esprit décollier.
05:13L'écollier, c'est celui qui ne sait pas,
05:16qui est curieux d'apprendre ce qu'il ne connaît pas.
05:18Donc, je dépose mon esprit critique,
05:20je dépose ce que je sais déjà.
05:22Je ne sais rien.
05:23Je suis comme un enfant.
05:25Je découvre.
05:26Dis-moi ce que tu as à me dire.
05:28Donc, je laisse venir à moi une pensée nouvelle, etc.
05:31Parce que vous voyez, si vous êtes barricadé dans ce que vous savez déjà
05:33et que vous cherchez à le plaquer sur le livre, le film ou le tableau,
05:37à la fin, vous êtes dans le même état qu'au début.
05:40Ça ne vous a rien apporté.
05:42Donc, lire et au-delà, se cultiver, c'est se laisser altérer
05:45par autre chose, un autre imaginaire, une autre langue, une autre pensée.
05:49Sinon, ce n'est même pas la peine.
05:50On peut passer des heures à lire, mais sans jamais lire, en fait,
05:53parce qu'on reste barricadé dans ce qu'on avait déjà.
05:56D'accord ?
05:58Donc, l'esprit d'écolier et seulement ensuite l'esprit de censeur.
06:02Le censeur, c'est celui qui critique.
06:03Ah bon, mais comment on peut dire ça, etc.
06:05Et ça, ça vient après.
06:07Si on s'installe dans l'esprit de censeur,
06:09ce n'est pas la peine de lire des cartes.
06:10Ce n'est même pas que ça rentre par une oreille, ça sort par là.
06:13C'est que ça arrive sur l'oreille, ça ricoche et ça sort de l'autre côté
06:16et ça ne vous est pas passé dans le cerveau.
06:17Donc, vous n'avez pas été altéré.
06:20Et ça, je trouve que c'est important.
06:21Je trouve que c'est comme ça qu'il faut travailler.
06:23Et au bac, quand vous lisez un texte,
06:24« Ah oui, je vois, je vois. »
06:26Ben non, qu'est-ce qu'il est en train de me dire ?
06:28Qu'est-ce que ça me raconte ?
06:30Qu'est-ce qu'il y a là-dedans dont je n'ai jamais eu l'idée,
06:32que je n'ai jamais pensé ?
06:33Ben oui, parce que si j'ai tout déjà pensé,
06:37soit je suis moi-même des cartes, soit c'est quoi le...
06:39Vous voyez ?
06:39Donc non, il faut être prêt à être dépaysé.
06:42On va être dépaysé.
06:43Mais ça peut être vrai d'un film, d'un poème, de ce que vous voulez.
06:47Voilà, ça, c'est dit dans la lettre du libraire.
06:50Donc, je trouve que c'est très bien.
06:51Donc, je vous le dis.
06:53Alors, avant de rentrer dans la première méditation,
06:58une petite mise au point sur essence et existence.
07:00Parce qu'on va parler de ça, si on ne sait pas ce que c'est,
07:03ça devient ésotérique, ça ne va pas du tout.
07:05Alors, l'essence d'une chose, c'est quoi ?
07:08J'ai un critère pour savoir, est-ce que je connais l'essence d'une chose ?
07:12Je peux dire ce que c'est.
07:15Je prends un exemple, voilà ça.
07:17Qu'est-ce que c'est ?
07:19Et je peux répondre, c'est une craie bleue.
07:21Ceci est une craie bleue, donc ce n'est pas un feutre, ce n'est pas un stylo.
07:28Ceci est un stylo, ceci est une craie.
07:31Essence stylo, essence craie.
07:34D'accord ?
07:35C'est ça l'essence, tout simplement.
07:37Ou, ceci est un triangle, ceci est un cercle.
07:41Ceci est le Père Noël, on peut le définir.
07:47C'est un homme, il a un habit blanc et rouge, il a sa barbe, il donne des cadeaux,
07:53il vient une fois par an toujours au même moment, etc.
07:55C'est l'essence du Père Noël.
07:58D'accord ?
07:58L'essence d'une sirène, composée de femmes et d'oiseaux.
08:07Au départ, c'est ça, c'est d'où le champ des sirènes, c'est des oiseaux chez les Grecs.
08:11Après, ça devient des poissons, mais au départ, c'est des oiseaux.
08:13Donc, voilà.
08:14Et je peux définir, ça c'est l'essence de la sirène.
08:16Et ça répond, donc, l'essence répond à la question, qu'est-ce que c'est ?
08:20C'est une craie, c'est un stylo, c'est un triangle, c'est une sirène.
08:25C'est ça l'essence, je sais ce que c'est.
08:27D'accord ?
08:28Mais vous voyez bien que dans tous les exemples que j'ai donnés, ça ne dit rien de l'existence.
08:35Ce n'est pas parce que je peux définir parfaitement l'essence du Père Noël
08:38que je parle du fait qu'il existe ou qu'il n'existe pas.
08:44Pareil pour le triangle, pareil pour la craie, pareil pour le feutre.
08:47L'essence, c'est l'idée que j'ai d'une chose avec les attributs qui la définissent.
08:54Le triangle, par exemple, qu'est-ce qui définit l'essence du triangle ?
09:00C'est qu'il a trois angles et que la somme des angles est égale à deux angles droits, 180 degrés.
09:05Ça, c'est l'essence du triangle, comme le manteau rouge et blanc pour le Père Noël, si vous voulez.
09:10Il y a des attributs d'une essence et c'est ce qu'il a défini.
09:14C'est une notion.
09:15Et donc, si vous lisez les méditations métaphysiques, vous verrez,
09:17quand il dit nature, quand il dit idée, tout ça, ça veut dire essence.
09:24Souvent, en philosophie, on a un problème de compréhension.
09:28Ce n'est pas qu'il y ait des mots difficiles, il y a très peu de mots techniques en philosophie,
09:32finalement, il n'y en a pas tant que ça, on n'en n'a même pas besoin.
09:34C'est juste que c'est les mots de la vie de tous les jours, mais qui ont un sens précis qui n'est pas le même.
09:38Donc, Descartes, quand il dit nature, il dit essence.
09:41La nature du Père Noël, la nature du crayon, la nature du triangle.
09:45C'est ça que ça veut dire.
09:45C'est un sens précis, si vous voulez.
09:47Nature veut dire essence.
09:50Idée, voilà.
09:52Ça, c'est la première chose.
09:52Donc, ça, c'est l'essence.
09:54Quand on aborde une essence, on se demande, et on peut dire ce que c'est,
09:58parce qu'évidemment, on peut prendre l'inverse.
10:02L'élève qui découvre la géométrie, on lui dit, on trace un triangle, on dit, qu'est-ce que c'est ?
10:08On lui dit, je ne sais pas trop, etc.
10:09Parce qu'il ne connaît ni le triangle, ni le carré, ni le rectangle, ni le cercle.
10:13Enfin, il ne connaît pas.
10:14Donc, il ne sait pas.
10:14Il ne sait pas pourquoi ?
10:16Parce qu'il n'est pas capable de définir les attributs qui font que c'est un triangle,
10:19ou que c'est un cercle, etc.
10:22D'accord ?
10:22Il ne sait pas.
10:22Mais vous voyez que là-dedans, on ne dit pas un mot de la question de savoir si ça existe ou si ça n'existe pas.
10:31D'accord ?
10:32Donc, j'emploie juste un mot technique, philosophique, c'est le seul que j'emploie et que je m'autorise,
10:37sinon je n'en emploie aucun.
10:39C'est le mot ontologie, ontologique.
10:41Ça veut dire, ça existe indépendamment de nous.
10:43Ontologique, c'est réel en soi, qu'on soit là ou qu'on ne soit pas là.
10:50C'est ça l'ontologie.
10:51Parce que ontos en grec, c'est l'être.
10:53Le réel, l'être avec un grand E.
10:55L'être en soi, pas pour nous.
10:57D'accord ?
10:57Donc, vous voyez bien que quand j'ai l'essence du Père Noël, l'essence du Père Noël est muette ontologiquement.
11:07Il y a un mutisme ontologique de l'essence.
11:11C'est une manière philosophique de dire que l'essence ne parle pas de l'existence, elle ne dit rien de l'existence.
11:16Je peux définir parfaitement l'essence de tout ce que je veux, je n'ai encore rien dit de son existence.
11:22D'accord ?
11:24Donc, autre remarque très importante, en philosophie, quand on définit un concept, comme le concept d'essence, on le définit par son problème.
11:33Ça guérit du dogmatisme.
11:35On veut des thèses, on veut des réponses, etc.
11:37Oui, peut-être que dans la scolarité, ça marche comme ça, mais en philosophie, jamais.
11:41Donc, vous devez définir un mot par le problème qui est le sien et qui n'appartient qu'à lui.
11:46En l'occurrence, le problème de l'essence, ce qui définit l'essence, le concept d'essence, c'est son problème, c'est le problème.
11:52Le problème, qu'est-ce que c'est ?
11:55Qu'est-ce que c'est ?
11:57C'est une craie ou c'est un feutre ?
12:00C'est un triangle ou c'est un cercle ?
12:03Voilà.
12:04Le problème, qu'est-ce que c'est ?
12:06Le problème, qu'est-ce que ?
12:08Et ce qui compte là-dedans, c'est le « ce », le déterminant « ce ».
12:11Ceci.
12:13Ceci est une craie, cela est un feutre.
12:18D'accord ?
12:19Donc, l'essence dit quelque chose de déterminé.
12:24On peut déterminer ce que c'est.
12:26Si je dis c'est quoi ?
12:27Je ne sais pas trop, c'est un truc.
12:29Ben non, ça c'est que je ne connais pas l'essence.
12:32Si je connais l'essence, je ne dis pas c'est un truc, c'est un machin.
12:35Je dis c'est ceci, c'est-à-dire une craie, et non pas un stylo.
12:40Donc, l'essence répond à la question « qu'est-ce que ? »
12:43Et donc, « qu'est-ce que ? »
12:44Il y a ce, ceci.
12:47Et donc, ça permet de différencier ceci, cela.
12:49Qu'est-ce que c'est ?
12:50C'est un pommier.
12:51Oui, ben, ce n'est pas un poirier.
12:53Ça, c'est l'essence.
12:55D'accord ?
12:56La question du « ce », ceci.
13:00Alors maintenant, l'existence, c'est quoi ?
13:02Ben, je vous prends l'existence sans l'essence.
13:07Qu'est-ce que c'est ?
13:07Je prends des expériences très simples.
13:09Je suis dans ma chambre d'enfant.
13:12Il fait noir.
13:14Et tout d'un coup, il y a un truc au-dessus de l'armoire.
13:17Je pleure « maman, papa, il y a une chose sur l'armoire.
13:22Il y a un truc.
13:24Je ne sais pas ce que c'est.
13:28Il y a une présence, il y a une chose.
13:30On ne sait pas ce que c'est.
13:32Bon.
13:33Et puis, papa ou maman arrivent, allument la lumière.
13:36Mais c'est ton ours, c'est la peluche.
13:42Donc, l'existence, je ne sais pas ce que c'est.
13:46Le problème de l'existence, ce n'est pas de savoir ce que c'est.
13:49Ça, c'est le problème de l'essence.
13:52Le problème de l'existence, c'est « y a-t-il ? »
13:55Est-ce que ça existe ?
13:57Est-ce que c'est réel ?
13:57C'est-à-dire, est-ce que c'est hors de moi ?
13:59Est-ce que c'est quelque part en dehors de moi ?
14:03Existence.
14:05Le « ex » de existence, ça vient du grec, c'est l'extérieur.
14:08C'est le dehors.
14:10C'est ce qui est en dehors de moi.
14:13On a bien vu, les essences, elles sont d'abord toutes dans ma tête.
14:17Elles sont en moi.
14:18L'essence du triangle, l'essence du Père Noël, l'essence du pommier, l'essence du feu,
14:22tout ça, c'est des idées que j'ai en moi.
14:24Elles sont dans mon esprit.
14:26Et ça ne parle pas du dehors.
14:28L'existence, c'est là, il y a un truc, il y a quelque chose.
14:31Le « hors-là », le grand livre de l'expérience de l'existence sans essence,
14:37c'est le « hors-là » de Maupassant.
14:39« Hors-là » d'ailleurs.
14:42Vous ne pouvez pas dire qu'est-ce que c'est, le « hors-là ».
14:44« Hors-là », c'est le nom des choses sans nom.
14:47« Hors-là ».
14:47Vous voyez ?
14:48Ce n'est pas en parenthèse, je fais une parenthèse,
14:50mais c'est une bonne entrée dans Descartes,
14:53qui a quelque chose d'extravagant et de fantastique.
14:55C'est la différence entre le fantastique et le merveilleux.
14:58Le merveilleux, c'est le monde des essences.
15:03Une licorne, vous voyez ?
15:05Ça, c'est le monde du merveilleux.
15:07Le monde du fantastique, c'est le monde de l'existence.
15:09L'existence en dehors des essences.
15:12On ne sait pas ce que c'est.
15:13Il y a une chose.
15:14D'ailleurs, il y a des films, la chose, etc.
15:16La mouche, c'est du merveilleux.
15:18La chose, c'est du fantastique.
15:21On ne sait pas ce que c'est.
15:21On ne peut pas définir.
15:22Donc, le problème de l'existence n'est pas du tout celui de l'essence,
15:26de savoir ce que c'est.
15:28C'est de savoir est-ce que c'est.
15:32Pas ce que c'est, mais est-ce que c'est.
15:34Est-ce que ça existe ?
15:35Est-ce que c'est quelque part dans l'existence ?
15:38Est-ce que c'est juste une idée qui est dans ma tête ?
15:40Ou est-ce que c'est quelque chose qui existe,
15:42qui existe, qui est hors de moi ?
15:45C'est le problème du il y a.
15:47Il y a ou il n'y a pas.
15:49Et après, je peux dire il y a.
15:52Ah, il y a mon nounours.
15:55Mais ça, une fois que je dis mon nounours,
15:57je passe à l'essence.
15:58Je dis ce que c'est.
15:59Mais le il y a, le pur il y a,
16:00c'est le problème de l'existence.
16:02Par parenthèse, ce que je vous dis là,
16:05ce n'est pas juste une introduction,
16:06méditation métaphysique de Descartes.
16:07C'est toute l'histoire de la philosophie
16:08de Platon à Heidegger et à aujourd'hui.
16:12Par parenthèse.
16:14Donc voilà.
16:15En gros, voilà.
16:16Donc, pour résumer,
16:17l'essence, je sais ce que c'est.
16:20Je sais ce que la chose est.
16:22Un triangle, le Père Noël, un pommier.
16:25L'existence, je sais que c'est.
16:29Je sais que ça existe.
16:31Vous voyez ?
16:32Mais sans pour autant savoir ce que c'est.
16:36Donc, de même que l'essence est muette ontologiquement,
16:40ne dit rien de l'existence,
16:41l'existence comme telle ne dit rien de l'essence.
16:46Comme il y a un mutisme ontologique de l'essence,
16:51elle ne dit rien si ça existe ou pas,
16:52parce que j'ai la définition du Père Noël
16:54que j'ai parlé de son existence.
16:57Quand j'ai la connaissance de l'existence d'une chose,
17:01je ne dis rien en m'en tenant à l'existence
17:04de ce que c'est.
17:04Donc, il y a un mutisme,
17:06on pourrait dire,
17:07eidétique, eidétique, c'est l'eidos,
17:09ça donne l'essence, si vous voulez.
17:10Ne dit rien de l'essence,
17:11ça ne dit pas ce que c'est.
17:12Ça dit que c'est et c'est tout.
17:15Et encore une fois,
17:16il y a un très bon livre,
17:17un tout petit livre qui fait 30 pages
17:18de Fitz James O'Brien,
17:19c'est un auteur irlandais
17:20qui a écrit à New York, aux États-Unis,
17:22qui date des années 1850,
17:24qui s'appelle
17:24What was it ?
17:26Qu'est-ce que c'était ?
17:27Qu'était-ce ?
17:28Et c'est avant l'or, là.
17:29Alors là, vous avez l'existence
17:30qui vous tombe dessus,
17:33en dehors de l'essence.
17:34Ça fait 30 pages,
17:35c'est une nouvelle fantastique.
17:36C'est vraiment excellent,
17:37je vous en recommande la lecture.
17:39Voilà, donc,
17:40essence, existence.
17:41Alors,
17:42première méditation métaphysique.
17:44C'est ça qui est génial.
17:45Il dit,
17:45bon,
17:46je suis là,
17:47j'adapte,
17:48mais vous allez voir
17:48que je n'adapte pas tant que ça.
17:50Je suis là,
17:51bon,
17:51j'ai mon papier dans les mains,
17:53donc il y a ce papier,
17:54il y a le papier.
17:55Il existe le papier.
17:56Bon, d'accord.
17:58Père Noël,
17:58je ne peux pas le toucher,
17:59mais il ne va pas me dire
18:00que le papier,
18:00il n'est pas là.
18:01Il y a mon stylo,
18:02qui est là,
18:03et puis il y a mes mains.
18:05Donc,
18:06ce papier,
18:06ce stylo,
18:07cette main,
18:07tout ça,
18:07ça existe.
18:08Donc,
18:09on est naïvement,
18:11confortablement installé
18:12dans l'existence,
18:14dans l'identité
18:15de l'essence
18:15et de l'existence.
18:16Je sais ce que c'est
18:17et je sais que c'est.
18:20Qu'est-ce que c'est ?
18:20C'est une feuille de papier.
18:21Et bien sûr que ça existe
18:22puisque je la tiens dans mes mains.
18:24Qu'est-ce que c'est ?
18:24C'est une main.
18:25Donc,
18:26j'ai son essence
18:26et en même temps.
18:27Donc,
18:28voilà,
18:28on part,
18:29c'est le début d'une disserte,
18:30on part de l'évidence.
18:31Le moment pardi,
18:32bouvard et pécuchons la parole.
18:34Eh bien,
18:34pardi,
18:35bien sûr que je sais.
18:36Je sais ce que c'est
18:37et je sais que c'est.
18:38Eh bien alors,
18:39bien sûr.
18:40Voilà,
18:41on part de ça.
18:42C'est un modèle de disserte.
18:43Tu commences par le commencement
18:44le plus évident
18:45
18:46on tient pour évident
18:49et pour acquis
18:49que nous connaissons
18:51en même temps
18:52l'essence et l'existence.
18:53Il n'y a pas de problème en fait.
18:54Et d'ailleurs,
18:54c'est ça l'opinion,
18:55la doxa.
18:56Je ne vois pas le problème.
18:57Oui,
18:58c'est peut-être ça le problème justement.
19:00C'est ça l'opinion.
19:00La philosophie,
19:01ça commence quand on sort de
19:02je ne vois pas le problème.
19:02Tant que tu ne vois pas le problème,
19:03tu ne fais pas de philo.
19:04La philo,
19:05ça commence à dire
19:05mais il n'y aurait pas un problème
19:07là où je ne voyais pas de problème ?
19:08C'est ça la première méditation métaphysique.
19:11Et Descartes commence tranquillement,
19:12il dit quand même
19:12comment je le sais
19:15que c'est une feuille de papier ?
19:17Parce que je la vois.
19:19Bon,
19:19mais si on la met au fond de la salle,
19:21je vois moins bien déjà.
19:22C'est une feuille de papier,
19:24vous voyez ?
19:25Je vois une tour,
19:25vous savez les fameuses illusions d'essence,
19:27il y a une tour carrée au fond,
19:29je la vois ronde.
19:31Vous voyez ?
19:31Bon,
19:32donc déjà,
19:32il commence à inquiéter un petit peu
19:34ce confort comme ça
19:35de l'évidence
19:37que par nos sens,
19:38ce qu'on voit,
19:39ce qu'on touche et tout,
19:40on saurait ce que c'est
19:41et on saurait que c'est.
19:42Je sais ce que c'est,
19:44une feuille
19:44et je sais qu'elle existe.
19:46Vous voyez ?
19:46C'est ce confort-là
19:47qu'il commence à inquiéter gentiment.
19:50Et puis,
19:51il prend l'exemple,
19:51il dit oui,
19:52mais même,
19:52il aggrave un petit peu la situation.
19:54Il dit,
19:54mais il y a bien des gens
19:55qui croient
19:57que leur corps est en verre.
19:59Ils veulent se coucher
20:00sur de la paille,
20:01etc.
20:01Petite parenthèse magnifique,
20:03référence de Descartes,
20:04très probable
20:05à Cervantes.
20:07Cervantes a écrit
20:08Don Quichotte,
20:08mais il a écrit
20:08les nouvelles exemplaires,
20:11c'est 12 nouvelles
20:11et dans les nouvelles exemplaires,
20:13il y a le licencié de verre,
20:14V-E-2-R-E,
20:15le licencié,
20:15il a eu sa licence de droit,
20:17et c'est un licencié,
20:18il a la foi fou et génial,
20:20mais il pense que son corps
20:20est une cruche,
20:22donc il a peur de se casser,
20:23donc il dort dans de la paille,
20:24etc.
20:24C'est à ça que je dis,
20:26mais parfois,
20:27je crois que je vois mon corps,
20:28je vois mes mains,
20:29mais il y en a
20:30qui pensent que leur corps
20:31est en verre.
20:32Donc,
20:32est-ce que je peux me fier
20:33confortablement
20:34à ce que je vois,
20:35à ce que je sens,
20:35puisqu'il y en a,
20:36ils vont te jurer mordicus
20:38que leur corps est en verre,
20:39alors que leur corps,
20:40ce n'est pas du verre,
20:41c'est de la chair.
20:43Et là,
20:43on est sur
20:44qu'est-ce que c'est ?
20:47Est-ce que c'est un corps
20:48en chair
20:48ou est-ce que c'est un corps
20:50en verre ?
20:52Vous voyez ?
20:53On est sur ce problème-là.
20:56Et là,
20:56Descartes se fait à lui-même
20:57une objection,
20:58il dit,
20:58mais quoi,
20:59ce sont des fous.
21:01C'est des fous qui croient
21:02que leur corps est en verre.
21:02Je ne peux pas prendre ça
21:03comme argument,
21:04ça ne marche pas.
21:05Tout le monde va me dire,
21:05oui, mais bon,
21:06là, tu nous parles des fous,
21:07mais nous,
21:07on n'est pas fous,
21:08donc moi,
21:08je sais très bien.
21:09Et on retombe au départ
21:10dans notre certitude.
21:12Et là,
21:12il y a un glissement
21:13qu'il ne faut pas rater.
21:14Parce qu'il dit,
21:15oui, mais je suis homme.
21:17Donc, je ne suis peut-être pas fou,
21:18mais je suis homme.
21:19Mais on est tous hommes.
21:20On est tous des êtres humains.
21:22Et en étant homme,
21:24je rêve toutes les nuits.
21:26Et qu'est-ce qui se passe
21:26dans le rêve ?
21:27Et ça,
21:27c'est tout à fait banal.
21:28Personne ne peut dire,
21:29mais quoi,
21:29ce sont des fous.
21:30On ne peut pas dire,
21:30mais quoi,
21:31ce sont des hommes.
21:32Oui,
21:32donc c'est nous tous.
21:32Donc là,
21:33tout d'un coup,
21:33l'argument est universel,
21:34il est incontournable.
21:36Chaque nuit,
21:36je rêve que j'ai un corps,
21:39que je suis là,
21:41je rêve que je suis là,
21:42devant vous.
21:42Hier, peut-être,
21:43ça m'a stressé,
21:45cette conférence.
21:46Je rêvais que j'étais devant vous.
21:47J'aurais juré mordicus
21:48que j'avais ce papier,
21:50cette main, etc.
21:51Et pourtant,
21:52quoi que dit Descartes,
21:53je fus tout nu,
21:54je fus tout nu
21:55dedans mon lit.
21:56J'étais tout nu
21:57dedans mon lit
21:58et je me croyais
21:58habillé dans ce lieu.
22:01Je me croyais au lycée
22:02alors que j'étais chez moi,
22:03etc.
22:04Et là,
22:04ça touche le ilia.
22:06En passant des fous
22:08au rêve,
22:09on passe à l'existence.
22:10Donc,
22:10on doutait de
22:11est-ce que je suis sûr
22:12ce que c'est ?
22:12En le voyant,
22:13je dis c'est une tour ronde,
22:15ah ben non,
22:15finalement,
22:16je m'approche à l'écarrer.
22:18Vous voyez ?
22:19Ou je vois le soleil,
22:20ah ben il est tout petit,
22:21puis finalement,
22:21ben non.
22:22Donc,
22:23les sens peuvent nous tromper,
22:25les sens,
22:25les sensations peuvent,
22:26la vue,
22:27le toucher peuvent nous tromper
22:27sur les sens.
22:29Mais en passant au rêve,
22:31on n'a pas seulement une erreur,
22:33c'est pas ceci,
22:34c'est cela.
22:34Ce n'est pas du verre,
22:36c'est de la chair.
22:38Une erreur sur les sens,
22:39on base dans l'illusion.
22:42Et l'illusion,
22:43ce n'est pas de croire
22:43que ceci est cela,
22:44ça c'est l'erreur,
22:45on se trompe d'identité,
22:46ce n'est pas du verre,
22:47c'est de la chair,
22:48on se trompe d'essence.
22:51Là,
22:52l'illusion,
22:53c'est qu'on se trompe
22:53sur l'existence.
22:55On croit que ça existe,
22:55alors que ça n'existe pas.
22:57Je crois que je suis là,
22:58au lycée,
23:00or je suis dans mon lit,
23:01en train de rêver.
23:02Je crois que j'ai
23:04n'importe quoi dans les mains,
23:06cette feuille que j'ai
23:08dans les mains n'existe pas.
23:10Et voilà tout d'un coup
23:11que ma belle certitude
23:12commence à s'effriter.
23:14Je ne sais plus
23:14ni ce que sont les choses,
23:16ni même si elles sont.
23:21Donc,
23:21ma certitude du départ,
23:22vous voyez,
23:23saint Thomas,
23:24je crois ce que je vois,
23:25ce que je peux toucher,
23:26etc.
23:27Ce que je vois,
23:29ça peut me faire des erreurs
23:31sur je crois voir ceci,
23:32en fait c'est cela,
23:32ça peut me faire me tromper
23:34des sens,
23:35mais plus grave encore,
23:36ça peut me faire une illusion
23:37qui me fait croire
23:38qu'il existe ce qui n'existe pas.
23:42D'accord ?
23:43Voilà,
23:43ça c'est la première,
23:45c'est la première,
23:47c'est la première méditation.
23:50Et il arrive,
23:51alors je vous passe les détails
23:52parce que je centre mon propos
23:54pour faire quelque chose
23:56justement de cohérent,
23:57d'élémentaire,
23:57vous irez lire,
23:58mais la conclusion
24:00de la première méditation,
24:01je vous le lis,
24:02il n'y a donc aucune terre,
24:04aucun ciel,
24:04aucun corps étendu,
24:05aucune figure,
24:06aucune grandeur,
24:08aucun lieu.
24:09À la fin de la première méditation
24:10métaphysique,
24:11on n'a aucune assurance
24:12qu'on ne soit pas
24:14dans un rêve généralisé
24:15qui me dit
24:17que tout ça
24:18n'est pas une illusion.
24:20Et là où c'est très important,
24:21c'est que vous voyez
24:21que la différence entre
24:22l'erreur et l'illusion,
24:24c'est que l'erreur porte
24:24sur la nature de l'essence,
24:26est-ce que c'est un triangle
24:27ou un carré,
24:28est-ce que c'est
24:29une tour ronde ou carré,
24:31alors que là,
24:32on est tombé
24:33dans un doute
24:34qui attaque
24:35à sa racine
24:36l'existence elle-même.
24:38Et s'il n'y avait rien ?
24:41Et si rien n'existait ?
24:42Si on était dans le pur néant ?
24:44Ni monde,
24:46ni monde des choses,
24:47ni Dieu,
24:48ni même moi.
24:49Rien.
24:51Un rêve généralisé.
24:53Et c'est la fin
24:53de la première méditation ça.
24:55Ça s'appelle une catastrophe.
24:57Et en philosophie,
24:59un problème,
24:59c'est une catastrophe.
25:02Le problème,
25:02c'est pas,
25:03enfin,
25:03géologique,
25:04on se pose des questions,
25:05ça n'a rien à voir.
25:05Le problème,
25:06c'est un désastre.
25:08S'il n'y a pas de désastre,
25:09il n'y a pas de philosophie.
25:11Et le désastre,
25:11est-ce qu'on en sort,
25:12est-ce qu'on n'en sort pas ?
25:13C'est là que ça commence,
25:13la philosophie.
25:14Mais il faut déjà voir le désastre.
25:16Et là,
25:16vous avez un sacré désastre.
25:18Du coup,
25:19deuxième méditation métaphysique.
25:21Alors,
25:21la première méditation métaphysique,
25:23je reviendrai sur le titre
25:24tout à l'heure,
25:24elle dit des choses
25:28que l'on peut révoquer en doute.
25:30Des choses à propos desquelles
25:31on peut douter.
25:32Ben tout,
25:33la réponse c'est tout.
25:33On peut douter de tout.
25:35De Dieu,
25:35du monde et de moi.
25:37Et on peut douter pas seulement
25:38de leur nature,
25:39de leur essence,
25:39si c'est ceci ou cela,
25:41mais jusqu'à leur existence même.
25:43Donc,
25:43on est dans le néant.
25:45C'est ça la conclusion
25:45de la première méditation.
25:47Nous sommes abandonnés à ce néant.
25:50Voilà,
25:50donc je m'arrête là
25:51pour la première partie
25:51et je m'occuperai
25:54des cinq autres méditations
25:56après.
25:56Donc,
25:57est-ce que vous avez des questions
25:57sur cette première partie ?
26:03Pour vous aider
26:10à trouver des questions,
26:11est-ce que c'est clair ?
26:13Pourquoi je vous dis ça ?
26:14Parce que
26:14quand c'est pas clair,
26:16c'est-à-dire
26:16quand vous avez du mal
26:16à comprendre,
26:18c'est de ma faute.
26:19Et oui,
26:21l'incompréhension
26:21est à ma charge.
26:23C'est que je n'ai pas
26:23assez bien expliqué.
26:24Donc,
26:24vous n'avez pas à avoir peur
26:25de dire
26:25« je n'ai pas compris ou quoi ».
26:26Ça ne vous renvoie pas
26:27à « je ne suis pas doué,
26:28je ne comprends pas ».
26:29Non,
26:29ça renvoie à moi
26:30qui ne suis pas assez clair.
26:31Donc,
26:31n'hésitez pas à me dire
26:31ce que vous n'avez pas compris,
26:33ce qui n'était pas assez clair,
26:34etc.
26:42À quoi vous,
26:43en fait,
26:44vous pouvez dire
26:45parce qu'ils s'amusent
26:46des cartes
26:47dans ton rôle
26:49et vous dites
26:49« tiens,
26:50je ne suis pas sûr
26:52que je ne suis pas en merve.
26:53Je répète la question,
26:57je ne sais pas
26:57si vous l'avez entendu
26:58la question ? »
26:59Non.
27:00Donc,
27:00mon collègue,
27:01M. Yu,
27:02dit « c'est bien beau tout ça,
27:04mais pourquoi ? »
27:05On s'en fiche en fait
27:06d'avoir…
27:06Qu'est-ce qu'il a ?
27:07Il était fatigué,
27:08il avait que ça à faire.
27:09Ah bon,
27:10je suis en verre,
27:10je suis un fou.
27:12D'où ça sort ?
27:13Ça,
27:14c'est excellent.
27:14Il faut toujours
27:15se poser cette question-là
27:16parce que sinon,
27:17on a l'impression
27:18que c'est gratuit.
27:18On se dit
27:19« c'était des bourgeois,
27:20ils étaient payés
27:21à rien faire »
27:21et donc,
27:22ils passaient leur temps
27:22comme ça.
27:23Ben non,
27:24effectivement,
27:25il y a une urgence.
27:27S'il affronte un désastre,
27:29c'est au nom d'une urgence.
27:30Il y a une urgence vitale
27:31pour la philosophie derrière.
27:33Alors,
27:33je n'en ai pas parlé
27:33parce qu'on va la découvrir après,
27:35mais elle est annoncée
27:36dans le titre
27:37des méditations métaphysiques.
27:38Le titre des méditations métaphysiques,
27:40c'est
27:40« méditation de philosophie première »
27:42ou « méditation métaphysique »
27:44dans lesquelles sont démontrées
27:46l'existence de Dieu.
27:50Et alors,
27:51dans la première édition,
27:53il dit
27:53« l'existence de Dieu
27:54et l'immortalité de l'âme ».
27:56Et l'immortalité de l'âme,
27:57il ne va pas la démontrer.
27:59Donc,
27:59en fait,
28:00il change le titre
28:00et le titre devient
28:01« méditation métaphysique »
28:03dans lesquelles sont démontrées
28:05l'existence de Dieu
28:06et la distinction
28:07entre
28:09l'âme et le corps.
28:11Donc,
28:13l'objet des méditations
28:14est double.
28:15Un,
28:15c'est un problème d'existence.
28:18Dieu existe-t-il ?
28:19Et s'il existe,
28:20il faut qu'on le démontre
28:20parce qu'on est au XVIIe siècle,
28:23on est au siècle de Don Juan
28:24qui ne croit que deux et deux font quatre
28:26et que donc,
28:27on ne peut pas dire
28:28« moi, j'ai la foi,
28:28il y a ceux qui ont la foi,
28:29ceux qui n'ont pas la foi ».
28:29Non.
28:30Qu'est-ce qu'on fait,
28:31comme le pari de Pascal d'ailleurs,
28:32qu'est-ce qu'on fait
28:32pour prouver en raison
28:34à celui qui n'y croit pas
28:35que Dieu existe ?
28:37Donc,
28:37l'existence de Dieu
28:38doit être démontré.
28:39Donc,
28:39c'est l'existence de Dieu,
28:40c'est le « il y a » de Dieu
28:41qu'il faut démontrer.
28:42C'est l'objet des méditations
28:43et ça a un contexte
28:44pour le coup historique
28:45parce que c'est le siècle,
28:46le XVIIe siècle
28:47de l'émergence de la science
28:48qui vient de congédier la religion.
28:52La Terre n'est plus du tout
28:53au centre de l'univers.
28:54C'est un simple pauvre satellite
28:56du soleil
28:56qui lui-même est perdu
28:57dans l'univers infini.
28:59Donc,
28:59la religion
29:00et notamment la religion monothéiste
29:02et là en l'occurrence
29:03chrétienne
29:03est en danger.
29:06Donc,
29:06il s'agit de prouver
29:06l'existence de Dieu.
29:07Dans ce monde,
29:08pourquoi Dieu aurait créé
29:09un monde
29:09où l'homme est un satellite
29:10du soleil ?
29:12Tout d'un coup,
29:12vous voyez,
29:13ça commence à faire trembler
29:15des acquis théologiques
29:17qui sont millénaires.
29:18Donc,
29:18l'existence de Dieu
29:19est deuxièmement,
29:20deuxième objet,
29:21problème non pas d'existence
29:23mais d'essence.
29:24Il s'agit d'établir
29:26la différence
29:27entre l'essence
29:28de l'âme
29:29et l'essence du corps,
29:31de dire que les deux
29:31ne sont pas pareils.
29:32Après,
29:32est-ce que le fait
29:32que l'essence de l'âme
29:33soit différente
29:34de l'essence du corps,
29:35ça permet de dire
29:36qu'elle est immortelle ?
29:37C'est une question
29:38qui n'est pas abordée ici finalement,
29:39qui est sous-entendue
29:41mais qui n'est pas traitée
29:42comme telle.
29:43Lui,
29:43ce qu'il veut établir,
29:45c'est démontrer
29:45que Dieu existe,
29:46donc démontrer
29:47le « il y a » de Dieu,
29:48comment on peut faire ?
29:49Vous allez voir,
29:49c'est un tour de force
29:52incroyable.
29:54Et comment
29:54on peut établir
29:56la définition
29:57de l'essence de l'âme
29:58de façon
29:59à ne pas pouvoir
30:00la confondre
30:01avec l'essence du corps ?
30:04Séparer nettement les deux
30:05parce que c'est le corps
30:06qui pourrit,
30:07c'est le corps
30:08qu'on peut me couper un bras
30:09quand on meurt,
30:10c'est le corps qui paraît.
30:11Donc,
30:11si on arrive à établir
30:13la différence de nature
30:15entre deux essences,
30:15l'essence corporelle
30:16et l'essence spirituelle
30:17de l'âme,
30:18l'essence matérielle
30:19et l'essence spirituelle
30:20de l'âme,
30:21il y a des chances
30:21que l'âme,
30:23elle,
30:24ne soit pas corruptile,
30:25ne soit pas livrée au temps.
30:27C'est ça l'enjeu en fait.
30:28C'est un enjeu théologique
30:29et qui est,
30:30pour le coup,
30:30philosophique et théologique.
30:32Philosophique
30:32parce qu'il s'agit d'y aller
30:33par les moyens de la raison
30:34et pas par les moyens de la foi.
30:35Théologique
30:36parce qu'il parle
30:38en tant que philosophe chrétien,
30:39il le dit comme ça.
30:41Et historique
30:41parce que c'est au moment
30:42de la grande révolution
30:43de la science
30:44qui vient contester
30:45le récit biblique en fait.
30:57Vous êtes quoi ?
30:59Merci, Guillaume.
31:04Ah, il y a une question.
31:05Oui, allons-y.
31:06Il y a une question.
31:10Descartes, il dit
31:11qu'on est tous hommes
31:11et donc on est tous
31:13sujets à l'illusion.
31:15Mais comment il arrive
31:15à reconnaître
31:16l'existence des fous
31:18si justement,
31:20comment peut-il y avoir
31:20une distinction
31:21entre fous et hommes
31:22si en tant qu'hommes
31:23on est tous sujets
31:24aux illusions ?
31:26Très bonne question.
31:28Excellente question.
31:29Ça, c'est une bonne question.
31:31Elle est un peu...
31:32Oui, c'est une très bonne question.
31:34Oui, c'est une bonne question.
31:36Alors, en fait,
31:38ce que Descartes,
31:39au fond,
31:39je vais vous dire
31:39comment il le prend,
31:40il est encore plus radical
31:42que vous.
31:44Au fond,
31:44il n'est pas loin
31:45de dire tous fous en fait.
31:47Parce qu'en réalité,
31:48en passant,
31:49il dit bon d'accord,
31:50tu me dis les fous
31:50n'est pas tous fous, d'accord.
31:51Et le rêve ?
31:53Or, le rêve est pire.
31:55C'est pire l'illusion du rêve
31:56parce que le fou finalement
31:57ne fait que se tromper
31:58sur les essences.
31:59Il ne doute pas de son corps
32:00qu'il a un corps.
32:01Mais il dit non, non,
32:02mais moi,
32:02moi, j'ai un corps en verre.
32:03Donc, l'essence de mon corps,
32:04c'est des du verre.
32:05Alors que le rêve,
32:06c'est bien plus grave en fait.
32:07Si vous voulez,
32:07dans la hiérarchie des pathologies,
32:09la pathologie du rêve
32:11est beaucoup plus grave
32:12puisqu'elle nous met,
32:13elle nous fait passer
32:14de l'erreur à l'illusion,
32:16c'est-à-dire
32:16de se tromper d'essence
32:17à se tromper,
32:19à prendre quelque chose
32:20qui n'existe pas
32:21pour quelque chose
32:21qui existe.
32:22Or, ça,
32:22c'est le cas de tout le monde.
32:24Donc, à la limite,
32:24la différence fou-non-fou,
32:26elle est tout à fait,
32:27ce n'est même pas
32:28qu'elle est secondaire,
32:28elle est absorbée,
32:29elle est éliminée
32:30parce qu'on est tous
32:31non pas fous,
32:33mais pire que fous.
32:34Le fou ne fait que
32:35faire des erreurs.
32:36Nous, nous pataugeons
32:37tous dans l'illusion,
32:38nous baignons tous
32:39dans l'illusion.
32:40Alors là,
32:41je n'ai pas le temps
32:41d'en parler maintenant,
32:42mais vous avez eu
32:44un épisode
32:45très exceptionnel
32:47de lecteur de Descartes
32:49entre Michel Foucault,
32:51le philosophe Michel Foucault
32:52a écrit
32:52l'histoire de la folie
32:53et au début,
32:54il s'en prend à Descartes,
32:55il dit,
32:55ouais,
32:55il fait votre question
32:56si vous voulez.
32:56Là,
32:57c'est une question
32:57à la Foucault
32:58que vous dites.
32:58C'est quoi ce truc ?
32:59Et les fous,
33:00comment on les traite ?
33:01Mais quoi,
33:01mais quoi ?
33:02Etc.
33:02Voilà,
33:03il dit ça.
33:03Et il se sert de Descartes,
33:05représentant de la raison,
33:06de la rationalité
33:07qui exclurait les fous
33:09du champ philosophique.
33:10Et malheureusement,
33:12pour lui,
33:12sur ce coup-là,
33:13parce que Foucault
33:14est un très grand philosophe,
33:15un très bon décor,
33:15mais sur ce coup-là,
33:16il y a Derrida
33:17qui avait été son élève
33:19à l'école Norma Supérieure
33:20qui relit le texte
33:22et qui dit grosso modo
33:23ce que je viens de vous dire là.
33:25Il dit,
33:25mais en fait,
33:25si on lit bien le texte,
33:27Descartes ne dit pas
33:28mais quoi,
33:28ce sont des fous
33:29pour exclure la folie.
33:29Il dit,
33:30bon,
33:30c'est bon,
33:30laissons tomber les fous.
33:32Mais en fait,
33:32c'est beaucoup plus grave que ça
33:33puisque c'est le cas général.
33:35Tout le monde est dans l'illusion.
33:36Alors moi,
33:36je vous l'ai dit à ma façon,
33:37Derrida ne le dit pas comme ça.
33:38L'essence,
33:39erreur, illusion et tout ça,
33:40tout ça,
33:40ce n'est pas Derrida.
33:41Mais en tout cas,
33:42Derrida voit bien
33:43ce que ne voit pas Foucault,
33:45c'est-à-dire que voir dans ce texte
33:46une exclusion rationnelle
33:49de la folie par Descartes,
33:52c'est une lecture superficielle.
33:53Et votre question est très importante,
33:55elle touche des tas de problèmes,
33:56mais elle renvoie à ce que je vous ai dit au début,
33:59à voir l'esprit des colliers quand on lit.
34:02Foucault, là,
34:02il manque d'esprit des colliers.
34:03Il arrive avec son idée
34:04qu'au XVIIe siècle,
34:05la raison exclut de la folie
34:06et il plaque ça sur les méditations métaphysiques.
34:09Et là, sur ce coup-là,
34:10Derrida est un meilleur lecteur
34:11parce qu'il dit,
34:12bon, voyons ce que nous dit Descartes.
34:14Et en fait,
34:15il nous dit ce que je viens de vous dire là.
34:16C'est-à-dire, il dit,
34:16bon, d'accord,
34:17l'argument des fous, d'accord,
34:19mais et le rêve ?
34:21Et donc, en fait,
34:22c'est même pas,
34:24contrairement d'ailleurs à ce que dit Derrida,
34:25c'est même pas que le rêve
34:26vient généraliser la folie.
34:27Ce n'est pas tous fous.
34:29C'est tout,
34:30parce que si on était tous fous,
34:31ce serait mieux.
34:33On aurait la connaissance de l'existence,
34:35qu'il n'y aurait pas de problème
34:36de connaissance de l'existence
34:37et on se tromperait sur les essences.
34:38On sait qu'il y a quelque chose,
34:39mais j'ai cru que c'était un pommier,
34:41c'est un poirier.
34:42Bon, alors que là, non.
34:43Le rêve fait qu'on est tous
34:46dans un rêve,
34:47dans un délire.
34:49Et le mot d'illusion,
34:50il est dans la première méditation.
34:52On est dans un délire,
34:53mais un délire,
34:53pas un délire de fou,
34:54un délire ordinaire.
34:55C'est-à-dire,
34:56on croit qu'il existe
34:56ce qui n'existe pas.
34:59Vous voyez ?
35:00Et ça,
35:01si ça vous intéresse,
35:02vous pourrez m'envoyer un mail,
35:03la discussion Foucault-Dérida
35:06et Foucault répond par un petit texte
35:08qui est vraiment de mauvaise foi.
35:09Il est vraiment de mauvaise foi
35:10sur ce coup-là.
35:10Et pourtant,
35:11j'adore Michel Foucault,
35:12c'est un bon philosophe,
35:13mais là, sur ce coup-là,
35:14c'est son élève qui lui fait la nique.
35:16Il n'est pas de bonne foi, en fait.
35:21Merci, cher Guillaume.
35:22Est-ce que j'aurais le temps
35:23de donner la parole à Antoine
35:25qui nous attend ?
35:28Merci, Antoine.
35:29Merci, Antoine.
35:32Guillaume, vous dites
35:33« Rien ne me garantit,
35:35on peut douter de tout,
35:36essence et existence,
35:38et on tombe dans le néant. »
35:39Mais le néant,
35:40il se définit bien quand même.
35:42Donc, il y a quelque chose
35:44qui traduit l'essence du néant
35:47et l'existence du néant.
35:49Donc, finalement,
35:50il arrive au néant
35:51et il revient à ne pas douter du néant.
35:58Alors, ça, c'est effectivement,
36:00mais c'est une critique externe.
36:01Ça, ce n'est pas ce que dit Descartes.
36:03Ce n'est pas du tout comme ça
36:04qu'il le prend.
36:04Mais une critique,
36:05on peut lui faire.
36:06Mais ça, c'est aussi une question
36:07de méthode.
36:08C'est-à-dire que quand on fait
36:09une critique d'un texte,
36:11donc là,
36:11qu'on quitte l'esprit d'écolier
36:12pour l'esprit de censeur,
36:14il y a deux types de critiques.
36:16Il y a la critique interne.
36:18Il dit ça à un endroit,
36:18il dit ça à un autre endroit.
36:20Est-ce que c'est compatible ?
36:21Vous voyez ?
36:21Est-ce qu'il n'y a pas
36:22des contradictions,
36:22des tensions,
36:23des failles,
36:24des hiatus
36:25à l'intérieur du livre ?
36:27Ça, c'est la critique interne.
36:28Et on peut faire
36:29une critique externe.
36:30Alors, la critique externe,
36:31c'est que tout d'un coup,
36:32là, on est en train
36:33de dire Descartes
36:33et puis vous prenez Foucault
36:34et vous critiquez Descartes
36:36avec Foucault.
36:36C'est possible,
36:37mais c'est une critique externe.
36:38Moi, ce n'est pas
36:39ce que je veux faire
36:39parce que là,
36:40pour l'instant,
36:40je reste écolier
36:41et je pense que j'en ai pour ma vie
36:43de voir ce que Descartes
36:44avait à m'apprendre.
36:46Moi, je ne pratique pas trop
36:47la critique externe.
36:48Je trouve qu'elle est...
36:49C'est un raccourci.
36:51Voilà.
36:51Mais donc,
36:52pour prendre ton objection,
36:54est-ce qu'on a l'essence du néant ?
36:57C'est quoi son essence ?
36:58C'est quand même
36:59assez minimaliste, quoi.
37:02Oui, c'est clair.
37:03Oui, on sait ce que c'est,
37:04c'est rien, quoi.
37:06Oui, mais c'est quand même
37:08quelque chose.
37:10À titre d'essence.
37:12Mais ce n'est pas pour ça
37:12qu'on sait que ça existe.
37:13Ce n'est pas parce que
37:14je peux définir le néant
37:15que je dis que ça existe.
37:16Non.
37:16Donc, finalement,
37:17ça tomberait dans l'illusion.
37:19Ce que veut établir Descartes,
37:20c'est que
37:20on peut douter
37:22de l'existence,
37:23de tout, en fait.
37:24La première médiation,
37:25c'est de quoi on peut douter ?
37:27La réponse, c'est
37:28de tout.
37:30Il n'y a rien
37:30qui résiste au doute
37:31et pas seulement
37:32sur l'essence des choses,
37:33mais sur leur existence.
37:34Et donc, le néant lui-même.
37:35Quand bien même
37:36j'ai l'essence du néant,
37:37je peux le définir,
37:38le néant,
37:38c'est la totalité
37:40de ce qui n'est rien,
37:42etc.
37:43Oui,
37:44mais je ne sais pas
37:45s'il y a du néant
37:46ou s'il n'y en a pas.
37:48Donc,
37:49c'est ça,
37:50moi,
37:50quand j'ai dit le néant,
37:51c'est-à-dire que
37:52tout bascule dans le doute.
37:55Il n'y a aucune certitude
37:56de rien,
37:58ni sur aucune essence,
38:00ni sur aucune existence.
38:03Et voilà.
38:03Voilà la catastrophe.
38:06C'est pour ça
38:07que c'est un bouquin génial,
38:08parce que ça vous donne
38:09à l'état pur
38:10ce que c'est que la philo.
38:11Et si vous lisez
38:12le Té-tête de Platon,
38:13la première partie,
38:14c'est une catastrophe
38:15du même genre.
38:16C'est une catastrophe.
38:19Mais on a le sens
38:20de la catastrophe.
38:22On est un peu
38:23des sismologues,
38:25si vous voulez.
38:25C'est un peu ça l'idée.
38:26C'est-à-dire qu'il n'y a pas
38:27de quoi ?
38:28Jean-Guillaume,
38:30avant de terminer,
38:31parce que le temps
38:32nous presse,
38:33peut-être juste un mot
38:34sur ce que veut dire
38:35le mot doute,
38:36douter.
38:38Ça serait peut-être utile
38:39de préciser
38:40la nature du doute
38:42ou l'essence du doute.
38:44Douter chez Descartes,
38:48ça veut dire,
38:50on va le voir
38:51notamment dans la...
38:52Enfin, on va le voir plus tard,
38:53mais ça veut dire
38:54suspendre son jugement.
38:57C'est tout simple,
38:57ce n'est pas du tout
38:58une notion difficile.
38:59C'est-à-dire...
39:01D'ailleurs,
39:01ça, c'est une bonne règle
39:02de méthode.
39:02Quand je veux définir
39:03quelque chose
39:04et j'ai du mal,
39:05je prends le contraire.
39:06Comment je définis le contraire ?
39:08Et à partir de là,
39:09je vais pouvoir définir
39:09ce que je voulais définir,
39:10là, en l'occurrence,
39:11le doute.
39:11Par exemple,
39:12quand je n'ai pas de doute,
39:13c'est la certitude,
39:14je suis certain,
39:14je n'en doute pas.
39:15Donc, j'affirme.
39:16J'affirme ou je nis.
39:18Le Père Noël existe,
39:20le Père Noël n'existe pas.
39:22Vous voyez ?
39:22Moi, je vais dire
39:23le Père Noël n'existe pas.
39:24Ça, c'est une certitude.
39:26D'accord ?
39:27L'enfant, il va dire
39:28« Je doute.
39:30Je ne sais pas. »
39:31Ou alors,
39:32c'est un triangle
39:33ou c'est...
39:34Vous voyez ?
39:34Je ne sais pas.
39:36Donc,
39:37je me retiens,
39:38je suis douté,
39:39c'est je ne peux dire
39:40ni c'est ni c'est pas
39:42que ce soit sur l'essence
39:43ou sur l'existence.
39:45C'est mon jugement
39:47est suspendu.
39:48Il est ni je peux dire
39:49« Oui, c'est ceci »
39:52ou « Oui, ça existe »
39:53ni « Non, c'est pas ceci »
39:55et « Non, ça n'existe pas. »
39:56Je suis entre les deux.
39:58Je suis suspendu entre les deux.
40:00C'est ça, le doute.
40:02C'est ce moment-là.
40:02Et donc là,
40:03je ne peux pas dire
40:04que de quoi que ce soit
40:05que ça existe.
40:06c'est ça,
40:08c'est ça le doute.
40:10Mais est-ce qu'on peut mettre
40:11le doute au carré ?
40:12C'est-à-dire,
40:13est-ce qu'on peut douter
40:13qu'on doute aussi ?
40:16Et non.
40:16Comment ?
40:17Non.
40:18Et ça, c'est la deuxième méditation
40:19pour le coup, non ?
40:20Bien sûr.
40:21C'est pour ça que je vous tendais
40:22à la perche.
40:24Merci.
40:25Merci beaucoup,
40:26cher Guillaume.
40:27Merci à vos élèves
40:29à Limoges.
40:30Merci Antoine.
40:31Nous faisons une brève pause
40:35avant de poursuivre
40:37cette découverte
40:39des méditations métaphysiques
40:40de Descartes
40:41avec Guillaume Pujard de Burbert.
40:44Cher Jean-Luc,
40:46c'est le moment,
40:46je pense,
40:47de conclure la diffusion.
40:49Merci beaucoup.
40:50A tout de suite.
41:01Sous-titrage Société Radio-Canada
Écris le tout premier commentaire
Ajoute ton commentaire

Recommandations