- il y a 4 jours
L'invitée du Grand portrait de Sonia Devillers est Kaouther Ben Hania, réalisatrice du film “La Voix de Hind Rajab”, du nom de cette petite fille massacrée avec une partie de sa famille par l'armée israélienne en janvier 2024 à Gaza. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-grand-portrait/le-grand-portrait-du-lundi-24-novembre-2025-3698496
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00:00France Inter, la grande matinale, Sonia De Villers.
00:06C'est l'histoire d'un film applaudi debout pendant 24 minutes d'affilée au Festival de Venise.
00:13C'est l'histoire d'un projet que les plus grandes stars du cinéma international ont tenu à produire,
00:17Brad Pitt et Joachim Phoenix en tête de file.
00:20C'est l'histoire d'une fiction qui fait entendre la voix bien réelle d'une petite fille palestinienne
00:26prise à Gaza sous les tirs de l'armée israélienne.
00:30Elle s'appelle Hine Rajab.
00:32Sa famille a prévenu le croissant rouge qui n'a finalement pas pu sauver la petite.
00:37C'est l'histoire des femmes et des hommes qui sont restés en ligne avec elle jusqu'à sa mort.
00:42C'est l'histoire d'une réalisatrice franco-tunisienne qui, découvrant ses enregistrements, décide d'en faire un film.
00:49Et moi, de qui dois-je faire le portrait ce matin ?
00:52D'une enfant de 6 ans, arrachée à la vie ?
00:55Ou de ces adultes qui se sont donnés la main tout autour du monde pour que la voix de Hine Rajab entre dans l'histoire ?
01:02Portrait 51.
01:04Bonjour Kauter Benania.
01:09Bonjour Sonia.
01:11La voix de Hine Rajab, c'est votre film qui a mis littéralement KO le festival de Venise.
01:17J'ai vu des images sortant du public, sortant de la projection, mais dans un état.
01:24Quand je dis KO, c'est KO.
01:25Ils étaient physiquement KO.
01:27Ça s'est fini par un lion d'argent.
01:29Le film sort cette semaine au cinéma.
01:32Et pour que tout le monde comprenne vraiment cette histoire, où se trouve la petite Hinde quand sa voix surgit pour la première fois ?
01:40Elle est située où physiquement ?
01:42Alors, elle se trouve dans une voiture criblée de balles, entourée de six membres de sa famille qui sont tués, massacrés.
01:50Donc, elle est entourée de cadavres, entourée de tanks.
01:56On est où dans la bande de Gaza ?
01:58Atal El Hawa, c'est un quartier qui était assiégé.
02:01Le matin même, on a demandé l'évacuation.
02:04Donc, sa mère l'a mis dans la voiture parce qu'il pleuvait.
02:07Elle voulait la protéger.
02:09La voiture de son oncle.
02:11Donc, elle est partie avec l'oncle et la tante et leurs quatre enfants dans la voiture derrière.
02:16Et ils étaient tués tous, sauf Hine Rajab.
02:21Sauf Hine Rajab.
02:22Et comment est-ce qu'elle se retrouve, elle, petite fille de six ans, en ligne avec le croissant rouge, qui est l'équivalent de la croix rouge ?
02:28Au fait, avant qu'elle soit au téléphone avec le croissant rouge, il y a eu une autre survivante avant elle, qui est sa cousine de 15 ans, qui s'appelle Laiane,
02:39et qui était au téléphone avec le croissant rouge.
02:42Et c'est un enregistrement qu'on a beaucoup écouté sur les réseaux sociaux, où elle est tuée en direct.
02:48Elle parle avec l'employé du croissant rouge et on entend les tirs et ses cris à elle.
02:54Et sa voix qui disparaît.
02:56Exactement.
02:56Et donc, le croissant rouge rappelle, et c'est là où il découvre qu'il y a une petite fille vivante dans la voiture.
03:03Elle a six ans, même pas six ans, moins de six ans.
03:06Et là commence le sauvetage, ou la mission de sauvetage, impossible, pour lui envoyer une ambulance.
03:15On écoute un extrait, on va entendre la voix, je précise, la voix bien réelle de Hyde.
03:20De la voix, je sais pas je sais pas qu'il y a une petite fille.
03:27Donc, c'est...
03:28Je sais pas, je sais pas, je sais pas, je sais pas.
03:31Comment vous avez découvert ces bandes, vous, Kauter Ben Anya, ces enregistrements ?
03:58Sur internet, comme tout le monde, parce qu'à l'époque, le croissant rouge palestinien Aramala avait envoyé deux ambulanciers pour sauver Inde, et puis plus de nouvelles.
04:10Et donc, ce quartier était assigé pendant 12 jours, et eux, ils n'avaient plus de nouvelles, ni de Inde, ni de secouristes.
04:19Donc, pendant 12 jours, ils sont dans l'incertitude de savoir est-ce que la petite a survécu ou pas, eux, ils n'arrivent plus à la joindre.
04:25Est-ce que les ambulanciers qui sont partis la chercher ont survécu ou pas ? 12 jours de silence.
04:31Exactement. Et donc, ils étaient obligés de sensibiliser le monde.
04:35Donc, ils ont mis des extraits de cet appel-là sur internet.
04:40Qui vous a autorisé à les exploiter ? C'est-à-dire que vous, vous faites beaucoup plus que les exploiter, vous faites beaucoup plus.
04:47C'est-à-dire que vous reconstituez à travers la fiction et avec des acteurs tout ce qui s'est passé dans les bureaux du croissant rouge,
04:53avec les écoutants et les coordinateurs du sauvetage.
04:57Seule la voix de Inde est réelle.
04:59Vous avez commencé par poser la question à la maman de Inde.
05:03Qui, elle, a survécu ?
05:04Exactement. Donc, pour moi, il était hors de question de faire ce film sans l'accord.
05:10Donc, je l'ai appelée.
05:12Elle était en deuil, évidemment.
05:14Perdre un enfant pour une mère, c'est l'une des choses les plus horribles au monde.
05:20Mais, oui, Sam, elle s'appelle, est une femme extrêmement courageuse.
05:26Et elle m'a dit, je ne veux pas que ma fille soit oubliée dans l'amas de cadavres qui existent à Gaza.
05:32Elle a un petit garçon aussi.
05:33Elle a aussi un petit garçon.
05:36Le petit frère de Inde.
05:37Exactement.
05:38Et donc, elle nous a non seulement donné son accord, mais elle est devenue partie prenante du film, puisqu'on la voit aussi à la fin du film.
05:48Oui. Là, vous rentrez de Doha. C'est ça ? Vous avez vu West Ham ?
05:52Oui. Pour la première fois, parce qu'avant, elle était à Gaza. On s'est beaucoup parlé au téléphone.
06:00Et j'étais à Doha, parce qu'il y a le Doha Film Festival. Et ils ont fait l'inauguration du festival avec la voix de Inde Rajab.
06:09Donc, ils ont invité tout le monde. Moi, mes acteurs, mais aussi les vrais secouristes.
06:15Les vrais secouristes du Croissant Rouge, que vous étiez tous réunis à Doha, là ?
06:19Exactement. Les quatre, les vrais Rana, Omar...
06:23Mati, Nesrine, la psychologue...
06:25Exactement.
06:26Les vrais étaient là, Doha ?
06:27Les vrais étaient là.
06:28Avec vos acteurs.
06:29Avec mes acteurs.
06:30C'est très émouvant.
06:30C'est très émouvant. J'ai passé trois jours. On se prenait dans les bras. Et tous, on était réunis autour de la mer de Inde.
06:40Comment elle a réagi quand elle a vu le film ?
06:42Elle n'a pas vu le film. Elle ne veut pas le voir. Et pour elle, c'est impossible de le voir. Mais par contre, elle a tenu à assister à tous les débats après le film.
06:54Parce que pour elle, il y a quelque chose de l'ordre des funérailles de sa fille. Elle reçoit les condoléances du public. Et c'est quelque chose qui l'émeut énormément.
07:04Parce qu'elle n'est plus seule dans cette douleur.
07:08Je prends un extrait du film. Évidemment, c'est en arabe. Et voilà, je n'allais pas m'amuser, moi, à le traduire en français.
07:13Mais vous allez nous raconter.
07:14Je pourrais le faire.
07:16Là, ça s'engueule très fort. Il y a un coordinateur qui s'appelle Madi. Il y a un écoutant du Croissant Rouge qui s'appelle Omar.
07:25Et ils vont passer des heures, des heures à attendre d'avoir un plan de validation pour que l'ambulance, qui n'est pourtant qu'à huit minutes de la gosse, aille la chercher.
07:36Et regardez les tensions que ça provoque.
07:38Là, qu'est-ce qui se passe ? Au fait, ils sont dans une situation impossible.
08:00Impossible.
08:01Impossible. C'est-à-dire, pour envoyer une ambulance partout dans le monde, s'il y a un enfant qui demande de l'aide, il y a une ambulance à huit minutes, on l'envoie tout de suite.
08:10Ce n'est pas le cas en Palestine. Ce n'est pas le cas à Gaza parce que l'ambulance risque d'être bombardée.
08:16Donc, il faut faire une procédure compliquée et impossible, presque, pour envoyer l'ambulance.
08:24Il faut passer par plusieurs intermédiaires.
08:26C'est ça. Il y a plusieurs organismes intermédiaires pour que l'ambulance soit envoyée sans que l'armée israélienne la bombarde.
08:34Et donc, l'un veut envoyer l'ambulance tout de suite parce qu'il ne fait pas confiance à l'armée israélienne.
08:41Et l'autre, il veut suivre la procédure à la lettre parce qu'il a tellement perdu de collègues.
08:45Et ça, c'est vrai. Le croissant rouge a payé un prix énorme, c'est-à-dire le nombre d'humanitaires, de secouristes tués, dépasse l'entendement.
08:56Donc, il ne veut pas sacrifier ses collègues.
08:59Mais c'est un dilemme moral, c'est un dilemme éthique que pose ce film parce que ce film est un huis clos.
09:05Il ne sort jamais des bureaux du croissant rouge.
09:07C'est extrêmement simple. Il y a quatre... Enfin, je vous le dis, c'est un chef-d'oeuvre de mise en scène.
09:11C'est champ contre champ, les quatre visages de ces écoutants et coordinateurs de la Croix-Rouge.
09:16C'est-à-dire, est-ce qu'on sauve la petite ? Est-ce qu'on sacrifie nos ambulanciers ?
09:20Et derrière, il y a la petite au téléphone. Toujours la petite au téléphone qui dit « mais viens me chercher ».
09:24D'ailleurs, on a l'impression que la petite...
09:27Vous, vous avez... Pardon, je suis émue parce que je me...
09:33La petite, on a l'impression qu'elle grandit dans ces deux heures-là.
09:38C'est-à-dire qu'au début, la petite, elle dit « ma famille autour de moi, ils dorment ».
09:42Et puis, à un moment, elle dit à la psy « ils sont morts ».
09:45Arrête de me dire qu'ils dorment, ils sont morts. C'est ça ?
09:49Oui, exactement. Elle dit...
09:51Sa cousine, Sarah, qu'elle aime beaucoup d'ailleurs, qui est très proche d'elle,
09:55elle lui dit « parle avec Sarah ».
09:57Elle lui dit « mais Sarah, elle dort ».
09:59Et donc, Rana, au téléphone, elle est contente qu'elle considère que sa cousine dort.
10:07Parce que pour elle... Et donc, elle part...
10:09Elle la conforte, elle laisse-les dormir, elle ne réveille pas.
10:12Elle lui dit « mais non ! »
10:14Non, non, j'ai dit « elle dort ». Non, elle ne dort pas.
10:16Ils ne dorment pas. Ils sont morts.
10:19Ils sont tous des cadavres, elle rajoute.
10:21Et elle a cinq ans et demi.
10:22Que disent les enquêtes, aujourd'hui ?
10:24Parce que l'armée israélienne a d'abord nié toute responsabilité,
10:28affirmant qu'il n'y avait aucun soldat à proximité.
10:31Il y a eu plusieurs enquêtes indépendantes.
10:33Une menée par le Washington Post, une par Al Jazeera,
10:35une par Foresting Architecture,
10:37qui ont toutefois établi la présence de chars.
10:40On en est où ? Est-ce que c'est un crime ?
10:42Il n'y a pas d'enquête.
10:43Enfin, il y a ces enquêtes-là.
10:44Ils ont fait un travail formidable,
10:46surtout forensic architectes qui ont précisé point par point
10:53en travaillant sur le sang,
10:54en travaillant sur les images satellitaires
10:57où on voit, bien sûr, la présence des tanks israéliennes.
11:00Et la petite, elle n'arrête pas de parler des tanks.
11:02Plusieurs tanks, pas un seul tank.
11:04Donc, la présence de l'armée israélienne
11:07et le fait que l'ambulance soit bombardée à la fin,
11:11qu'on a envoyée, alors qu'on a suivi à la lettre.
11:13Je spoil mon film, mais ce n'est pas un film,
11:16c'est la réalité.
11:18C'est une histoire très connue.
11:19C'est-à-dire qu'on respecte à la lettre
11:21la procédure imposée par l'occupation
11:24pour leur rendre la vie impossible.
11:26On envoie l'ambulance
11:27et dans l'enregistrement sonore,
11:30l'ambulancier au téléphone, il dit
11:31« Ah, voilà la voiture ! »
11:33parce qu'il l'a cherchée.
11:34Donc, il la voit.
11:34Il la voit, il l'a vue et bam !
11:38On entend l'explosion de l'ambulance
11:41dans l'enregistrement.
11:42Donc, c'est une histoire.
11:46Moi, quand j'ai compris ce qui s'est passé,
11:49pour moi, c'est un crime de guerre.
11:51L'innommable a été commis,
11:53non seulement pour cette petite fille,
11:57pour toute sa famille,
11:58c'est une famille entière qui a été décimée,
12:01mais en plus, pour les secouristes
12:03qui étaient là pour la sauver.
12:04Les secouristes que vous avez retrouvés là à Doha,
12:06les secouristes du croissant rouge,
12:08ils continuent ce métier.
12:09C'est-à-dire, on les voit, même au début du film,
12:11on voit Rana, par exemple,
12:13qui est psychologiquement usée,
12:15épuisée.
12:16Et on voit bien que l'engueulade
12:17entre Madi et Omar,
12:19elle vient de ça aussi.
12:21Je crois que Madi dit
12:22« Ça fait deux mois et demi que j'ai pas vu mes enfants. »
12:23Ils craquent tous.
12:25Absolument, oui.
12:26Alors, dans le film,
12:27on a le personnage de Madi
12:29qui est face à ce dilemme impossible
12:31d'envoyer au nom de ses collègues
12:33qui dit à un certain moment,
12:34en montrant toutes les victimes,
12:37ses collègues secouristes
12:38qui ont été bombardés,
12:40« Si une autre photo s'ajoute sur ce mur,
12:43je démissionne. »
12:44C'est ce qu'il a fait, le vrai Madi.
12:45Il a démissionné.
12:46Il a démissionné.
12:47Et alors expliquez la photo sur le mur,
12:48parce qu'il faut qu'on comprenne.
12:50Alors, c'est une photo où ils mettent,
12:52pour rendre hommage à leurs martyrs,
12:55à tous ceux qui sont morts.
12:58À tous ceux qui n'ont pas pu sauver.
13:00Ils n'ont pas pu sauver.
13:01Ils n'ont pas pu sauver.
13:02Et on comprend dans le film
13:03qu'ils ont besoin de mettre des visages
13:05sur ces victimes.
13:07C'est-à-dire au moins une silhouette.
13:08Et quand on peut, une photo.
13:10Exactement.
13:11Donc nous, on passe tout le film
13:14avec la photo de la petite Hind
13:15au moment de son galate-dance
13:17avec sa couronne de fleurs sur la tête.
13:20D'ailleurs, je parlais avec sa mère
13:21qui me racontait plein de choses sur Hind.
13:23À quel point elle adorait s'habiller
13:25en petite princesse.
13:27À quel point elle adorait la plage.
13:29On le voit dans le film.
13:32À quel point elle était coquette.
13:35Elle choisissait ses vêtements.
13:37Pour elle, être élégante,
13:38c'est...
13:39Voilà.
13:39Et à quel point elle était drôle aussi.
13:41La petite Hind.
13:42Et à quel point elle est intelligente.
13:44On l'entend dans ses réflexions.
13:46Parce qu'à un certain moment,
13:48elle donnait des solutions
13:49aux employés du Croissant Rouge.
13:53Elle lui dit,
13:54appelle ton mari pour venir me chercher.
13:56Appelle mes oncles.
13:57Elle commence...
13:58Quand elle comprend qu'ils ne vont pas arriver,
14:00parce qu'il faut préciser quelque chose.
14:01Je ne sais pas si on l'a précisé.
14:03Les employés du Croissant Rouge
14:04sont à Ramallah.
14:06Et ils viennent d'aller à Gaza.
14:07Parce qu'on a bombardé
14:09toutes les lignes du Croissant Rouge à Gaza.
14:11Donc tous les appels
14:13sont transférés à Ramallah
14:15de l'autre côté.
14:16Et depuis Ramallah,
14:17ils ont une image satellitaire
14:19de ce qui se passe à Gaza.
14:21Et ils suivent la situation
14:22sur les écrans.
14:23Ce qui d'ailleurs,
14:24d'un point de vue cinématographique,
14:25donne un effet extrêmement fort
14:27et puissant.
14:29Normalement,
14:30j'étais là pour faire un portrait de vous.
14:31Mais cette histoire est tellement folle
14:32et tellement magnifique
14:33qu'on fera un portrait de vous
14:35une autre fois qu'à Outhère Benania.
14:37Simplement pour comprendre
14:38le rôle que joue le cinéma
14:40dans cette histoire.
14:42Parce qu'il y a un moment,
14:43Omar dit,
14:44des visages d'enfants déchiquetés.
14:47Il y en a plein,
14:47les réseaux sociaux.
14:49Sauf qu'on ne les voit plus.
14:50On ne les entend plus.
14:52C'est ça ?
14:52C'est une forme d'anesthésie émotionnelle ?
14:55Anesthésie, amnésie,
14:57parce qu'on est dans un flux
14:58d'images horribles
14:59qui nous arrivent de Gaza.
15:00Et on est dans le scrolling.
15:02Donc à un certain moment,
15:04moi je me suis posé cette question
15:05puisque je suis réalisatrice.
15:08C'est quoi le rôle du cinéma ?
15:09Et des images.
15:10Et des images.
15:11Et comment on montre des images
15:14ou comment on rend ces images impactantes.
15:20Et donc, pour moi,
15:21la littérature, le cinéma,
15:23l'art en général,
15:24c'est le lieu de la mémoire
15:26par excellence.
15:28Et puis, c'est le lieu aussi
15:30où vous entremêlez
15:31depuis le début de votre carrière
15:33la fiction et le réel.
15:35C'est-à-dire que là,
15:36vous faites un choix de mise en scène
15:37très puissant.
15:38La voix de Hind est réelle.
15:41Ce sont quatre acteurs
15:42qui rejouent les secouristes
15:43du croissant rouge.
15:44Et puis, parfois,
15:46ressurgissent la voix
15:47des vrais secouristes.
15:48Et puis, parfois,
15:48ressurgissent leur vrai visage.
15:50Pourquoi est-ce que vous
15:51superposez comme ça
15:52le réel et la fiction ?
15:54Parce que...
15:54L'effet vertigineux.
15:56Parce que moi,
15:57je me posais la question
15:58de quelle meilleure forme,
16:00quelle est la forme
16:01pour raconter cette histoire.
16:03Et je ne voulais pas faire
16:04un documentaire a posteriori
16:05sur un événement du passé.
16:07Je voulais faire ce film
16:08au présent.
16:09Ça aurait pu.
16:10Oui, ça a été fait.
16:11Al Jazeera,
16:12ils ont fait un documentaire
16:13dans ce sens-là.
16:14Moi, je voulais faire
16:14un film au présent
16:15quand tout était possible,
16:17quand c'était possible
16:18de la sauver.
16:19Et de montrer
16:19tous les mécanismes
16:21qui ont empêché
16:22son sauvetage.
16:24Donc, il me fallait
16:25pour revenir à ce moment
16:27des comédiens.
16:29Mais, par contre,
16:30pour moi,
16:30c'était essentiel
16:31de rappeler que,
16:33OK, c'est un contrat
16:34avec le spectateur,
16:36c'est des comédiens,
16:37mais c'est la réalité.
16:38C'est presque
16:39de la reconstitution.
16:40Parce que, moi,
16:41j'avais l'enregistrement
16:43qui était la colonne
16:44vertébrale de ce film.
16:45Mais tout ce qu'il y a autour,
16:47c'est les témoignages
16:47des cas de secouristes.
16:48Et je peux vous demander
16:49comment Brad Pitt,
16:50Joachim Phoenix,
16:52son épouse,
16:53René Marat,
16:55Alfonso Cuarón,
16:56immense réalisateur mexicain,
16:59mais aussi Jonathan Glazer
17:01qui est le réalisateur
17:02de la zone d'intérêt.
17:03Comment ils se retrouvent
17:03tous au générique ?
17:04C'est-à-dire,
17:05vous avez tous les faits
17:06du cinéma mondial
17:07le plus élégant
17:08et le plus brillant
17:09aujourd'hui.
17:10Oui, moi aussi,
17:11je me suis demandé.
17:14Parce qu'à un certain moment,
17:16quand on a terminé le film,
17:17on avait envie de...
17:19Vous savez,
17:20nos films en langue arabe
17:21avec sous-titres
17:22sont en général
17:23des films niches.
17:24C'est-à-dire...
17:25Et moi,
17:25je voulais amplifier
17:27la voix d'Indra Jab,
17:28et c'était important
17:29d'aller solliciter
17:30du soutien,
17:32parce que,
17:32eux,
17:33c'est vraiment du soutien
17:35à mettre leur nom
17:36dans le générique.
17:37Et on a montré
17:39le film
17:39à quelques personnes
17:40en espérant avoir
17:42un an,
17:42peut-être.
17:43Un an.
17:43Ils ont tous regardé
17:45le film.
17:45Ils vous ont tous ramassé.
17:46Oui.
17:47Lyon d'or à Venise,
17:48la voix de Indra Jab,
17:50mercredi au cinéma.
17:51Magnifique film.
17:52Merci Kauter.
17:53Merci Sonia.
17:53Merci.
17:54Vous reviendrez,
17:54on fera votre portrait à vous.
17:56À bientôt.
17:57Merci.
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