00:00Maintenant que Boilem Sansal est libre, est-ce que l'Algérie va reprendre la coopération avec les autorités françaises ?
00:05La question est notamment de savoir si Alger va récupérer ses OQTF, on en parle beaucoup ce matin forcément.
00:10Thomas Bonnet, à l'heure actuelle, les expulsions d'Algériens sous OQTF,
00:15donc des Algériens qui sont en France mais qui se comportent mal et à qui la France dit « on ne vous veut plus sur le territoire »,
00:21ces expulsions-là, elles sont au point mort.
00:23Oui, parce que les cris de victoire de l'Elysée et de la diplomatie française n'étouffent pas le silence assourdissant du régime algérien concernant la question migratoire.
00:32Depuis plusieurs mois, plus de son, plus d'image des autorités algériennes pour la reprise de leurs ressortissants que la France veut donc expulser.
00:39Les CRA, les centres de rétention administratives, sont remplis à moitié par des Algériens.
00:44Le nombre de détenus algériens dans les prisons a plus que doublé en 10 ans.
00:47A l'inverse, le nombre d'expulsions, lui, est au plus bas. Seuls quelques retours forcés ont pu être effectués l'an dernier.
00:54La situation est donc très problématique et le verrou levé par la libération de Boilem-Sensal doit appeler à un changement radical dans la relation entre Paris et Alger.
01:02Et pourtant, côté français, on plaide l'apaisement et le calme.
01:05Depuis l'annonce de la libération par l'Allemagne de l'écrivain franco-algérien,
01:09les services de l'Elysée et du Quai d'Orsay abreuvent la presse d'éléments de langage pour imprimer dans les esprits et dans les colonnes des journaux
01:16que la France, évidemment, est à l'initiative de cette libération.
01:19Et puis, en sous-texte, se joue autre chose.
01:21La validation a posteriori de la méthode dite la méthode douce.
01:25Voici par exemple ce que l'Elysée a communiqué à la presse ces dernières heures.
01:30Le bras de fer ne fonctionne pas, dit l'Elysée, pas parce que les États, de manière générale, sont souverains.
01:35Et entre les États, comme dans la vie, il est douteux que l'on obtienne les meilleurs résultats en se fâchant avec les gens que l'on sollicite.
01:42Alors déjà, sur le fond, c'est questionnable.
01:43Le rapport de force régit les relations internationales depuis la nuit des temps.
01:47Et il n'exclut pas non plus le recours au langage diplomatique.
01:51Une position exigeante et un dialogue exigeant.
01:54Mais ce qu'il faut lire entre les lignes dans le narratif de l'Elysée, c'est que la méthode Rotaillot n'aurait pas fonctionné.
01:59C'est lui qui avait parlé de bras de fer quand il était ministre de l'Intérieur.
02:03Et dans le Figaro, ce matin, un proche de Bruno Rotaillot réplique.
02:06La grande différence entre le chef de l'État et nous, c'est qu'on ne remercie pas les preneurs d'otages, surtout quand ils retiennent encore Christophe Gleize.
02:14Même dans la sémantique officielle, le président lâche tout.
02:17C'est déshonorant, dit ce proche de l'ancien ministre de l'Intérieur.
02:20Oui.
02:21La question algérienne est donc devenue une affaire de politique intérieure en France.
02:25Et oui, plus que jamais, parce que ce dossier est au croisement de plusieurs enjeux, migratoires, sécuritaires, historiques et même économiques.
02:32Ce n'est pas anodin si le premier texte que le RN a réussi à faire voter dans son histoire à l'Assemblée nationale concerne l'accord franco-algérien de 1968.
02:40La question de notre rapport avec l'Algérie dépasse les attaches partisanes et chacun veut voir dans ce sujet un aspect précis.
02:47Il y a ceux comme Charles Rodouel, qui sera votre invité, qui pointent le coup aberrant provoqué par le déséquilibre des règles fixées dans les traités bilatéraux.
02:54Et puis il y a ceux qui veulent faire de la question algérienne l'exemple d'une diplomatie française qui retrouverait sa puissance.
02:59Et puis il y a l'élément central de ce sujet, la présence sur le sol de France d'une diaspora composée de plusieurs millions de Français d'origine algérienne.
03:07Pour certains élus de gauche, cette présence d'une diaspora dicte la marche à suivre car froisser cette communauté, ce serait un suicide électoral.
03:15Mais en Macronier aussi, cette donnée semble guider l'action du président.
03:18« Rappelez-vous, en mars dernier, à bord de l'avion présidentiel, un proche du chef de l'État confié au Figaro, redouté que la diaspora algérienne, je cite,
03:26« ne casse la baraque en cas de bras de fer avec le régime algérien ».
03:29Un discours qui est largement partagé au Quai d'Orsay et qui invite donc à la prudence aujourd'hui quant à une possible évolution de notre relation.
03:35Avant de crier victoire, avant de finfaronner et de promettre le retour massif des OQTF en Algérie,
03:40la diplomatie française ferait bien d'admettre qu'elle est soumise aux craintes, d'ailleurs sûrement surestimées, des réactions de ses propres habitants, en tout cas d'une partie d'entre eux.
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