00:00Ici Matin
00:017h47, l'invité d'Issi Roussion ce matin, Simon Colbock, c'est le coordinateur national du plan de prévention du mal-être en agriculture.
00:09Il est dans le département en ce moment et il est dans notre studio ce matin.
00:11Bonjour Olivier Damézin.
00:13Bonjour.
00:13Alors votre boulot, en résumé, c'est d'accompagner au mieux les agriculteurs.
00:17Et chez nous dans les PO, on peut dire que vous avez du boulot, les vignerons en pleine crise des ventes,
00:22les arboriculteurs, les maraîchers qui souffrent de la sécheresse.
00:25Et puis, ces dernières semaines, l'aspect sanitaire, en plus de l'aspect économique et climatique,
00:30les éleveurs de bovins frappés par la dermatose.
00:32Hier, 28 vaches ont été abattues dans notre département.
00:36Vous y étiez, vous avez assisté à cet abattage, vous avez rencontré l'éleveur qui a perdu son troupeau.
00:40Qu'est-ce que vous lui avez dit ?
00:42Oui, donc j'étais présent sur place.
00:44Moi, c'est pour accompagner vraiment l'agriculteur.
00:47Là, en l'occurrence, il y avait l'agriculteur et une salariée.
00:49Donc, on est là pour accompagner tout le monde, que ce soit les salariés, les agriculteurs et la famille.
00:52Parce que vous avez les grands-parents ou les enfants aussi qui peuvent être présents sur place
00:57et il faut être là pour les soutenir pendant le moment, mais surtout l'après.
01:00Ce que vous m'avez présenté, mais vous avez oublié de dire que je fais la prévention aussi du mal-être.
01:04Donc, on est là pour prévenir ce mal-être.
01:06Par exemple, demain, je pense que je vais faire une halte dans l'Aude,
01:09qui n'est pas impactée, mais qu'il y a d'autres problématiques.
01:10Et il faut être toujours là pour faire la prévention, pour aider les agriculteurs.
01:14Et cet éleveur hier, qui a perdu son troupeau, que lui avez-vous dit ?
01:18Je lui ai dit qu'on était là, qu'on était à ses côtés pour l'aider, justement, pour tout ce qui est administratif.
01:21Parce qu'on souffre de ce problème en France, c'est tout ce qui est suradministration.
01:27Donc, il va y avoir beaucoup de papiers à faire, donc il va falloir qu'on soit là pour l'aider.
01:31Pour être indemnisé, notamment.
01:32Pour être indemnisé, voilà.
01:33Donc, ça, il y avait M. le directeur qui était présent, M. le directeur, la DDP, qui était présent.
01:39Et donc, il a tout de suite rassuré aussi au niveau financier qu'il allait avoir ce qu'on appelle un accompte
01:44qui allait arriver par rapport à l'abattage de son troupeau.
01:47Donc, il faut qu'on soit là vraiment pour prévenir justement le mal-être qui peut apparaître
01:52et qui sache qu'il n'est pas tout seul.
01:54Vous avez la Chambre d'agriculture, vous avez les services de l'État qui font un travail d'ailleurs remarquable
01:58tous ensemble avec la MSA sur ce sujet du mal-être actuellement et de la dermatose.
02:02Est-ce que vous êtes le psy des agriculteurs, en fait ?
02:05Non, je ne me présente pas comme ça, parce que d'abord, je n'ai pas la formation et je n'ai pas eu le diplôme.
02:07Mais par contre, je suis vraiment à l'écoute.
02:09Et surtout, ce qu'il faut faire, c'est que chaque département a ses spécificités.
02:13Comme vous l'avez dit, le vôtre, malheureusement, il les collectionne.
02:16Je crois que ça fait la quatrième fois que je viens en trois ans.
02:19Si je viens souvent chez vous, il y a des différents départements où je ne suis pas allé.
02:21C'est qu'il n'y a pas ces problématiques-là.
02:22Mais alors, du coup, concrètement, à quoi ça sert cette coordination,
02:28ce plan national de prévention du mal-être agricole ?
02:30Vous dites, on aide, on met en relation.
02:33Malheureusement, on n'a pas le temps de rentrer trop dans les détails.
02:35Mais si, prenez-le, qu'est-ce que vous...
02:36Donc, je vais le prendre.
02:37Vous avez tout ce qui est des aides possibles et imaginables à travers la MSA,
02:41donc la Mutuelle Sociale Agricole, qui peut être le temps administratif,
02:44le temps au répit aussi, lui permettre de se reposer.
02:47Parce que vous avez certains éleveurs qui font 10 à 12 heures par jour minimum,
02:517 jours sur 7, et qui n'ont jamais pris de congé.
02:54Dans un pays comme le nôtre, c'est hallucinant et ce n'est pas normal.
02:56Donc, il faut qu'on soit là pour les aider,
02:58surtout quand ils vivent une situation comme celle-ci.
03:00Parce qu'il y a toujours des yacas faucons qui sont là pour manifester.
03:03Mais par contre, après, quand l'éleveur est dans la panade, il n'y a plus personne.
03:06Et surtout, ils ont acheté leur viande en grande surface.
03:07Ils ne vont pas faire du local, ils ne vont pas acheter chez lui.
03:09Donc, il faut faire aussi attention à ça.
03:12C'est bien de critiquer les actions qui sont prises,
03:14mais il faut toujours être là pour les aider.
03:16Donc, après, vous avez la Chambre d'agriculture,
03:17qui peut l'aider aussi au redémarrage, au repeuplement.
03:20Et vous avez l'administration en général avec un grand A,
03:22les services de l'État, dont on supervise M. le Préfet, tout ça.
03:27Et ça, c'est pour l'administratif.
03:28Comment c'est pour soigner la tête d'un agriculteur
03:31qui perd son troupeau, son travail ?
03:33Je n'ai pas fini les aides qu'il peut avoir.
03:35Vous avez Solidarité Paysans, par exemple, qui est une association.
03:38Vous avez le réseau Réagir, qui sont là pour les aider,
03:40justement, à surmonter tous ces problèmes.
03:42Parce que vous avez les problèmes administratifs,
03:45mais après, vous avez aussi le problème qui peut être aussi psychologique.
03:47Donc, on peut avoir des aides aussi avec un psychologue
03:49qui sont payés, qui sont là pour l'aider également.
03:52Ce n'est plus un gros mot,
03:53surtout la Grande Cause Nationale Santé Mentale,
03:552025, ce n'est plus un gros mot de dire
03:57qu'on peut avoir des problèmes de santé mentale.
03:59Mais on trouve des psys pour les agriculteurs,
04:01dans les zones rurales, en montagne,
04:02vous avez des psys en Cerdagne ?
04:03Avec tout le réseau que je vous ai dit,
04:04on arrive à trouver des psys.
04:06Et ça marche, ça ?
04:07Parce que les agriculteurs, on a cette image,
04:09peut-être que c'est un cliché,
04:10mais on a cette image de l'agriculteur
04:12qui, justement, ne part jamais en vacances,
04:14ne se plaint jamais non plus.
04:15Exactement.
04:15Ce sont des gens qui travaillent,
04:17et bien moi, je tiens à les féliciter,
04:19à les remercier du travail qu'ils font,
04:20parce qu'il y en a beaucoup qui critiquent
04:22dans notre pays comment ça fonctionne,
04:23mais ce que font les agriculteurs, c'est remarquable.
04:25Et d'ailleurs, on l'a dit depuis le début de l'émission,
04:27ce qui se passe dans votre département,
04:29il faut vraiment être courageux pour faire ce métier
04:30avec toutes les problématiques qui leur tombent dessus.
04:32Donc, on a vraiment des gens qui sont formidables,
04:34et les Français, quand je dis les Français,
04:36les citoyens, il faut vraiment qu'on les aide.
04:38Ils ont vraiment besoin de nous,
04:39et c'est le travail que l'on fait en commun, en chapelle.
04:41Parce que si vous voulez, avant,
04:42chaque structure qu'il vient de citer travaillait en silo.
04:45Alors que là, maintenant,
04:46tout le monde travaille autour de la table et en commun.
04:47Mais pour revenir à ma question,
04:48est-ce que ça change ça,
04:49ou est-ce que c'est facile d'amener l'agriculteur chez le psy ?
04:52Ah ben ça, après, c'est un travail de personne.
04:54Vous avez les travailleurs sociaux de l'AMSA
04:56qui font plusieurs rencontres,
04:57qui leur expliquent comment ça se passe, et autres.
04:59C'est une démarche individuelle,
05:00mais le tabou, je dirais qu'il a été brisé de la santé mentale.
05:04Ça a été brisé que maintenant,
05:05n'importe qui peut avoir des problèmes de santé mentale.
05:08Puisqu'on parle de malettes agricoles,
05:09on ne peut pas en parler sans parler
05:11de la question du suicide.
05:14Il y a dix ans, il y a eu un chiffre qui est sorti,
05:16un agriculteur sur deux,
05:18qui met fin à ces jours,
05:19un suicide sur un agriculteur qui, tous les jours,
05:22un jour sur deux, qui met fin à ces jours.
05:23C'était un ennemi, oui.
05:25C'était il y a dix ans, ce chiffre.
05:27On n'a pas de chiffre plus récent.
05:29Malheureusement, on n'a pas de chiffre récent.
05:30Vous avez publié un rapport sur cette question du suicide
05:33pour les agriculteurs,
05:35et vous dites que la première raison,
05:36ce n'est pas la raison forcément financière,
05:37c'est l'isolement.
05:38Alors en France, il y a tout confondu,
05:40toute profession confondue.
05:42On a dix mille suicides par an environ,
05:45et à chaque fois, le pur fort taux de suicide,
05:48la raison principale, l'une des raisons,
05:50parce que de toute manière,
05:50c'est toujours multifactoriel,
05:52c'est l'isolement et la solitude.
05:53Et dans l'agriculture, c'est l'isolement et la solitude.
05:56Votre département est magnifique,
05:57mais on voit qu'il y a des endroits
05:59où les maisons sont vraiment isolées,
06:00et il y a des agriculteurs qui ne voient plus personne
06:02toute la semaine.
06:03Donc il y a des gens qui n'ont aucun problème financier,
06:05mais par contre, ils sont vraiment dans l'isolement et la solitude,
06:07et malheureusement, ils passent à l'acte.
06:09De toute façon, la personne qui se suicide,
06:11ce n'est pas quelqu'un qui veut mourir,
06:12c'est quelqu'un qui ne veut plus souffrir.
06:14Merci beaucoup Olivier Damézin.
06:16Je rappelle que vous êtes donc le coordinateur national
06:18du plan de prévention du mal-être en agriculture.
06:20Vous êtes invité d'ici matin sur ICI Roussillon.
06:23Bonne journée.
06:24Sous-titrage Société Radio-Canada