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00:00A quelques kilomètres au sud d'Agadir, ces terres où l'on croise des troupeaux de dromadaires sont
00:15parmi les plus arides du Maroc. Nous roulons pourtant au cœur de l'un des plus grands
00:21potagers du monde. Sous ces serres qui couvrent l'horizon travaillent des milliers d'ouvriers.
00:29Les petites mains de la tomate.
00:32« Je retire les fleurs pour que la tomate ait de la place pour mûrir. Je gagne 9 euros par jour. Et ça vous
00:42suffit ? Ça va, avec l'aide de Dieu. » Dans cette ferme, ces femmes cueillent les tomates à peine mûres,
00:53pour qu'elles puissent supporter les 15 jours de voyage qui les attendent.
00:57Les clients nous demandent qu'elles ne soient pas trop rouges.
01:00La grande majorité de ces tomates seront bientôt vendues sur les étals des supermarchés français.
01:08« Chaque année, on exporte 30 000 tonnes de tomates. Et on va dire qu'on envoie environ 20 000 tonnes vers la France. »
01:20La France et l'Europe sont les premiers destinataires des tomates marocaines. En 25 ans, les exportations
01:28vers l'Union européenne ont même été multipliées par 4. La production a explosé. Et aujourd'hui,
01:35les serres recouvrent toute la région d'Agadir. Acteur majeur de ce grand bond en avant, le groupe franco-marocain Azura.
01:45Pour la première fois, le leader du secteur a autorisé des caméras à filmer cet immense entrepôt
01:52où travaillent 4000 personnes. Ces chaînes de tri seraient à la pointe de la technologie.
01:58Pour preuve, nous dit-on, cette machine qui traque le moindre défaut sur chaque tomate.
02:07« La machine peut traiter jusqu'à 1 200 000 fruits par jour, ce qui est équivalent à une moyenne de 60-65 tonnes par jour.
02:18Et pour chaque fruit, il y a plusieurs photons, jusqu'à 8 photons par fruit, qui nous permettent vraiment une précision. »
02:27Ces machines permettraient de tirer encore les coûts de production vers le bas et de proposer des tomates
02:33toujours moins chers aux consommateurs, comme ces boîtes vendues dans nos supermarchés 99 centimes d'euros,
02:39deux à trois fois moins chères que leurs concurrentes françaises.
02:43« Quand on vous dit que vous cassez le marché, vous n'êtes pas d'accord avec ce qui est ? »
02:47« Non, pas du tout. »
02:48« Mais par contre, on peut nous dire qu'on tient bon pour garder un bon prix vis-à-vis des consommateurs. »
02:55« Sincèrement, je ne comprends pas. »
02:56« Ça ragace notre projet de loi. »
02:59« Autant qu'opérateurs économiques et autant que pays, on n'a pas parfaitement le droit de se développer. »
03:06Avec ces usines ultramodernes, l'industrie de la tomate marocaine affronte pourtant un péril à même de contrarier ses rêves de grandeur.
03:16L'eau manque peu à peu.
03:20Dans les fermes, on doit aller la puiser toujours plus profond.
03:24Là, on est à 140 mètres de profondeur.
03:31Selon les scientifiques, le réchauffement climatique, mais surtout l'épuisement des nappes phréatiques par l'agriculture, sont à l'origine du manque d'eau.
03:41Face à la pénurie, les producteurs les plus riches achètent de l'eau de mer des salées.
03:46La famille Benelassri, elle, n'en a pas les moyens.
03:48Pendant des décennies, sur une quinzaine d'hectares de terre, elle a cultivé des fruits et des légumes.
03:57« Tu te souviens des bananes qu'on faisait pousser là ? »
04:01Mais il y a cinq ans, privée d'irrigation,
04:04Abdoula Benelassri a choisi comme plus d'une dizaine d'agriculteurs des environs de mettre fin à l'exploitation familiale.
04:11« Quand mon frère m'a dit j'arrête, j'ai dit non, c'est pas possible.
04:15Non, ça peut pas, ça peut pas s'arrêter comme ça.
04:18J'ai eu beaucoup de mal à accepter ça.
04:20D'ailleurs, je pense qu'il a dû le sentir.
04:23Bien sûr, on n'a rien à faire.
04:25On ne peut pas changer notre destin.
04:28On cultivait tellement de légumes et maintenant, plus rien.
04:32On est au chômage. »
04:35Par fierté, Abdoula Benelassri n'a pas souhaité rejoindre les cohortes d'ouvriers
04:39et employés par les grandes fermes des environs.
04:43Sous les serfs pourtant, la main-d'œuvre manque.
04:47Selon nos informations, plusieurs entreprises d'Agadir feraient même appel à des migrants illégaux
04:52originaires d'Afrique subsaharienne.
04:55Sur les réseaux sociaux, des vidéos montrent des Ivoiriens, des Sénégalais, des Guinéens
05:00travailler illégalement dans les fermes.
05:04On y trouve même des annonces pour des emplois.
05:06Dans les faubourgs d'Agadir, nous rencontrons cet homme qui dénonce l'exploitation des migrants
05:19dans les fermes.
05:21C'est l'un des responsables d'une communauté subsaharienne sur place.
05:24Il nous propose d'aller à la rencontre de ces travailleurs migrants.
05:39Mais alors que nous roulons depuis quelques minutes, il reçoit un appel.
05:42Nous sommes suivis par les services de sécurité marocains.
05:53Cette voiture au centre de l'image.
05:55Pourquoi les policiers ne veulent pas qu'on rencontre les gens ?
05:57Après quelques détours, nous rejoignons finalement cet appartement à l'abri des regards.
06:12Nous y attendent un homme et une femme.
06:16Sans titre de séjour ni contrat de travail, ils affirment récolter des légumes destinés
06:21aux marchés étrangers.
06:23N'est-ce pas ça ? En Espagne, et de l'Espagne, ça va dans tous les coins de l'Europe.
06:28Tous deux décrivent des conditions de travail très difficiles et disent avoir à épandre
06:32des pesticides, parfois à mains nues.
06:34Souvent, on est malade.
06:37Tous les jours, on prend des produits.
06:39Et vous avez quoi, un masque ?
06:41Non, on n'est pas protégé quand même.
06:43On est tout le temps exposé.
06:45On part à 7 heures, pour d'autres à 6 heures.
06:51Et on finit à 14 heures pour un salaire de 70 dirhams.
06:57C'est un travail qui est épuisant.
06:59Après notre tournage, nous avons tenté de contacter l'entreprise qui les emploie.
07:09Mais ni elle, ni l'association locale des producteurs n'ont répondu à nos sollicitations.
07:15Au Maroc, l'industrie de la tomate est un fleuron qui ne souhaite pas s'étendre
07:19sur certains de ses secrets de fabrication.
07:22L'actualité ? Parlons-en.
07:25Des débats, des discussions pour aller plus loin et comprendre ce qui agite le monde.
07:32Parlons-en avec Pauline Pacquart.
07:34Tous les matins sur France 24.
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