- il y a 20 heures
Bill François, biophysicien, naturaliste et écrivain, incarne cette nouvelle génération de scientifiques qui allient rigueur académique et passion de terrain. Il publie son “Eaux douces” (Tana) avec des photographies de Yann Arthus Bertrand.    
Retrouvez « Le Grand portrait par Daphné Burki » avec Daphné Burki sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-9h10
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00:00France Inter, la grande matinale, Daphné Burki.
00:06Et mon grand portrait ce matin est consacré à Bill François, pêcheur.
00:09En vous baladant sur l'île de la Cité, tôt le matin, vous pourriez le croiser en train de pêcher du silure.
00:14C'est pas pour les manger, non.
00:16Car ce pêcheur urbain est aussi et surtout physicien et naturaliste.
00:20Il étudie les espèces qui vivent dans nos eaux pour mieux les comprendre, pour mieux nous comprendre, nous les humains.
00:26Autant dire qu'il n'a pas fini sa thèse.
00:27Mais il pêche aussi pour rêver et c'est d'ailleurs l'objet de son nouvel ouvrage « Eau douce » publié aux éditions TANA.
00:33Son savoir scientifique, il dialogue avec la beauté sensible et spectaculaire des photographies de Yann Arthus Bertrand.
00:39À quelques jours de la COP30, il nous rappelle qu'en protégeant nos espaces naturels, on protège aussi nos imaginaires.
00:45Bill François, explorateur, physicien, écrivain, portrait numéro 38.
00:53Bonjour Bill.
00:54Bonjour.
00:54Bienvenue sur France Inter. Vous êtes allé pêcher ce matin ?
00:57Ce matin, non. Mais l'eau est un peu haute aujourd'hui, oui.
01:01Et alors dans ce cas-là, il ne faut pas y aller ?
01:02Je ne m'empêche pas de regarder à chaque fois, surtout en venant vers la maison de la radio où il y a tout un espace très naturel.
01:07Oui. Alors, on va raconter parce que vous êtes ce qu'on appelle un pêcheur urbain.
01:12Vous avez déjà pêché un peu partout d'ailleurs en France ou encore à l'autre bout du monde.
01:15Mais il vous arrive aussi de jeter la ligne en plein cœur de Paris au bord de la Seine.
01:19Et un jour, cette passion vous a mené à une rencontre assez improbable.
01:23Avec Jamel Debouze, on écoute.
01:24Qu'est-ce que tu penses que tu as attrapé ?
01:27C'est un scilure.
01:28Un scilure ?
01:28Le scilure, là, il est plus grand que moi.
01:30Mais tu veux le charrer ou quoi ?
01:31Non, non, non. Il ne fait plus que 2 mètres.
01:32Il ne fait plus que 2 mètres ?
01:33Mon frère, il ne fait qu'il y a un pêcheur.
01:35On ne les abîme pas, on les laisse dans l'eau.
01:36Mais par contre, il faut qu'il aille l'attraper avec un gant en l'attrapant par la bouche.
01:39C'est ton collègue, lui ?
01:41C'est un nouveau collègue, un peu comme toi.
01:43Ah oui ?
01:44Vous êtes passé dans la rue et vous avez décidé de devenir Martin Pêcher.
01:48Il va le relâcher, ne vous inquiétez pas madame.
01:51Attrape pas le bas de ligne, s'il veut repartir, tu le laisses repartir.
01:54Yes !
01:55Eh bien tiens-le, mets-lui la tête dans l'eau, j'arrive.
01:57Quoi ?
01:57Attends, attends.
01:59Non mais quand même, c'est quand même incroyable.
02:01Waouh !
02:02Cette coïncidence était assez folle.
02:04Eh oui, sacrée coïncidence de rencontrer en même temps un poisson que je cherchais depuis plusieurs jours,
02:09que j'ai pied son comportement du côté de l'île Saint-Louis et un artiste que j'adore.
02:16Il n'y a que Paris qui apporte ce genre de choses.
02:17Cette vidéo, elle en est à des dizaines, millions de vues, parce que je crois qu'elle a fait du bien.
02:21Il y avait une telle insouciance, légèreté, sourire.
02:24Et donc c'était un silure colossal de près de 2,10 m, une créature de légende que vous cherchez depuis longtemps.
02:30Vous l'avez vraiment appelée Jamel ?
02:31Oui, bien sûr.
02:32Et on l'a revue depuis.
02:34Vous l'avez retrouvée ?
02:35On leur donne des noms, on les suit avec les tâches.
02:37Ils ont des tâches qui sont un peu comme nos empreintes digitales, qui permettent de reconnaître les individus.
02:41Et donc on les suit pour voir de combien ils grandissent, où est-ce qu'ils se déplacent, etc.
02:44Viralité de l'espace, je disais pour cette vidéo, mais ce qui est génial avec cette séquence,
02:48c'est qu'elle permet aussi de voir qui sont les habitants de la Seine.
02:51Alors pour rassurer toutes les personnes qui se sont baignées encore une fois dans la Seine l'été dernier,
02:55le silure, c'est un poisson un peu effrayant, d'accord, au premier regard.
02:58Mais en fait, il souffre surtout d'un délit de sale gueule parce qu'il est inoffensif, non ?
03:01Il est totalement inoffensif parce qu'il n'a pas de dents qui peuvent nous mordre.
03:04Il n'a que des sortes de râpes, donc c'est comme du papier de verre, ça ne peut pas.
03:07Et puis de toute façon, il n'attaquerait pas un humain, on n'est pas leur proie naturelle.
03:11Je suis obligée de vous poser la question, Bill François, même si ce n'était pas pour ça que je vous ai invité,
03:14mais est-ce que cette séquence virale a donné plus de visibilité à votre travail, l'air de rien ?
03:18Moi, j'étais content parce que ça a donné un coup de projecteur sur les milieux aquatiques,
03:21dont on parle assez peu, ça n'a pas beaucoup de temps d'antenne quand même,
03:24les invertébrés aquatiques ou les poissons d'eau douce.
03:27Ça a permis, par exemple, quand on a découvert des mouches de mai,
03:30donc c'est des insectes très sensibles à la pollution, on les a redécouverts pour la première fois dans la Seine,
03:35ça a permis d'en parler dans plusieurs médias nationaux, ce qui n'aurait sans doute pas été le cas autrement,
03:40et de sensibiliser à plein de problèmes autour de ça.
03:44Parce que ce Bill François que j'ai invité aujourd'hui dans le studio,
03:46sa première vocation, c'était vraiment celle-là.
03:49Elle n'avait rien de... c'était d'écrire justement sur ce sujet-là.
03:53Elle n'avait rien de virale, elle était viscérale.
03:55Mais il fallait écrire sur la nature dans ces carnets que vous bricoliez enfant
03:59et que votre grand-père reliait à la ficelle.
04:01Ce n'était pas gagné d'ailleurs d'être publié,
04:03mais vous avez participé à un grand concours d'éloquence sur le service public
04:06que vous avez remporté haut la main.
04:08Et le lot vous a permis un contrat d'édition.
04:11Et depuis, vous dites souvent qu'il faut croire à sa chance.
04:14Oui, c'est une série de hasards finalement qui m'a permis d'être publié,
04:16de faire ce que j'avais toujours voulu faire et toujours aimé faire,
04:20c'est-à-dire de partager toutes ces histoires du monde vivant
04:21avec ce hasard d'un concours d'éloquence.
04:24Donc il n'y a rien à voir.
04:25C'est un peu du stand-up, un truc souvent plutôt pour les avocats.
04:28Et puis je me retrouve dans cet événement, je le remporte.
04:33On me dit, tu as un contrat d'édition, tu peux écrire sur un peu ce que tu veux.
04:36Je leur réponds, surtout pas sur l'éloquence.
04:38En revanche, je peux vous faire un truc sur les poissons.
04:41Et Sophie Decloset, l'éditrice à ce moment-là, me dit,
04:45Banco, tu as deux mois, fais-nous un truc sur les poissons.
04:48Les poissons, pour mieux vous connaître.
04:50Il y a des sons aussi qui font partie de votre vie.
04:52Le groupe qui vous aide à vivre, par exemple, ce sont les Cowboys Fringants.
04:56Toutes les huit secondes, un enfant crève au tiers-monde.
05:00Parce qu'il n'y a pas accès à l'eau, et on dit que dans son pays chaud,
05:03c'est le soleil qui a séché les ruisseaux.
05:05Bon, il y a aussi...
05:07Alors là, ce n'est pas la plus joyeuse des Cowboys Fringants, mais c'est sur l'eau.
05:09Non, mais c'est ça qui parle, de l'eau.
05:11C'est pour ça que je l'ai choisie, elle s'appelle Huit secondes,
05:13et elle est raccord avec notre sujet du jour.
05:15Mais il y a aussi Brassens qui n'est jamais loin.
05:16On dirait un fanatique de la cause halieutique
05:26Avec sa belle canet, son moulinet
05:30Celle-ci, elle est assez inédite de Brassens, le pêcheur.
05:34Ce qui est beau avec Brassens, c'est qu'il manie à la fois le sublime,
05:38le ridicule, l'humour, la tendresse, l'émotion.
05:42Alors, pour me retrouver dans votre univers, que j'ai adoré, Bill François,
05:46moi, il y a un film qui m'est revenu, qui m'a bouleversé.
05:49Il s'appelle « Et au milieu coule une rivière ».
05:51Mais ce n'est pas pour Brad Pitt, Bill François, que j'ai aimé ce film.
05:54C'est pour les plans larges, c'est pour la lumière,
05:57c'est pour la danse de la ligne de la canne à pêche au ras de l'eau.
05:59Ce film, il est sorti en 92, il a été réalisé par Robert Redford.
06:03Je ne sais pas si vous vous souvenez de ce film,
06:05mais est-ce que vous vous souvenez du super pouvoir que vous aimeriez avoir ?
06:10Alors, moi, j'aimerais bien pouvoir être un être amphibie,
06:13voyager dans ces deux mondes que sont l'eau et l'air,
06:16parce que je trouve que c'est dommage d'avoir qu'un seul univers.
06:19Il y a tellement de créatures qui arrivent à faire les deux.
06:21On est sous l'eau, Bill François.
06:23Vous partez à la rencontre de qui ?
06:25Il y a tellement d'espèces où j'aimerais partir à leur rencontre.
06:31Je dirais les plus mystérieuses,
06:33certaines espèces qui n'ont jamais été observées,
06:34comme il y a certaines truies très rares
06:37qui n'ont quasiment jamais été documentées,
06:39dans des rivières très pures,
06:41dans des coins hyper isolés.
06:43C'est ça qui me fait rêver en ce moment.
06:45Bill François, le livre, il s'appelle Eau douce.
06:47Et il s'ouvre sur votre rencontre avec Yann Arthus Bertrand.
06:50Lui, il photographie, vous le savez, la Terre vue du ciel.
06:52Et vous, vous explorez ce qu'il se passe sous l'eau.
06:55Ces deux regards, deux surfaces,
06:56et puis un même miroir, celui du vivant,
06:59vous dites que vous essayez de lire l'eau comme les pêcheurs.
07:01Mais qu'est-ce que vous lisez, vous, dans l'eau ?
07:03Moi, je ne sais pas ce que ça veut dire de lire l'eau.
07:05C'est une expression de pêcheur à la mouche au départ,
07:07donc les mêmes que dans le film de Robert Redford.
07:10Et l'idée, c'est qu'on essaye d'interpréter
07:12ce qu'il y a à la surface de l'eau
07:13pour comprendre ce qu'il y a en dessous.
07:15Parce que ce n'est pas toujours facile de plonger sous l'eau,
07:17en particulier dans des rivières, des torrents,
07:19ou des endroits où l'eau est trouble, etc.
07:20Donc, on va regarder tout ce qui se passe à la surface de l'eau
07:23pour interpréter les indices et comprendre ce qu'il y a dessous.
07:25Et à partir de là, on peut voir toutes sortes de traces,
07:27des tourbillons, des vortex, des mouvements d'eau,
07:31et parfois quelques reflets, des choses assez ténues,
07:34assez sensibles, mais qui permettent d'interpréter
07:36et de comprendre ce qu'il y a dessous.
07:37Et c'est un exercice du cerveau, quelque part.
07:40Il y a un côté presque chamanique à faire ça,
07:43où on intériorise vraiment à quoi ressemblent
07:46les créatures aquatiques jusqu'à les voir,
07:48même quand on ne les voit pas.
07:49C'est assez spécial.
07:50Mais après, on ne peut plus marcher dans Paris
07:52sans voir des cilures immenses, etc., qui sont là.
07:56Vous avez choisi de vous concentrer sur l'eau douce avec ce livre
07:58et on réalise à quel point elle est rare sur notre planète.
08:00Toute l'eau douce liquide réunie
08:02tiendrait dans un globe d'à peine 56 km de diamètre.
08:06Autrement dit, un petit aller-retour Radio France au travail.
08:08C'est pour cette fragilité-là que vous avez voulu faire
08:11votre terrain d'exploitation ?
08:13Oui, c'est complètement fou.
08:14C'est un milieu qui est minuscule, l'eau douce.
08:16C'est-à-dire que c'est moins d'un vingt millième de l'eau sur Terre
08:19qui est l'eau douce liquide
08:21qui va alimenter nos verres d'eau,
08:24la vie terrestre,
08:25les rivières qui sculptent le paysage, etc.
08:28Et dans ce vingt millième de l'eau sur Terre,
08:31il y a à peu près autant d'espèces que dans les océans.
08:33Si on compte par exemple les espèces de poissons
08:35qui sont un bon indice,
08:37il y en a autant dans l'eau douce que dans l'eau de mer.
08:39Donc c'est un milieu extrêmement riche aussi,
08:42très varié.
08:43On va repartir en musique parce que,
08:46encore une fois, en tournant les pages de Sliv,
08:48il est vraiment merveilleux.
08:49Vous nous alertez sur la dégradation de l'état de l'eau douce
08:52et puis lue généralement de l'environnement.
08:54Vous avez décidé dans cet ouvrage
08:56de vous concentrer sur la beauté des espaces
08:58plutôt que sur leur péril.
09:00Il est rempli de photographies absolument somptueuses.
09:02On voit des glaciers argentins,
09:03des fleuves amazoniens,
09:04des torrents,
09:05des méandres,
09:05des marécages,
09:06de couleurs complètement folles
09:07que je n'avais jamais vues.
09:09Montrer la beauté,
09:10c'était faire le choix de l'optimisme.
09:13Absolument,
09:13de l'émerveillement
09:14parce qu'on protège ce qu'on aime avant tout.
09:17Et pour ça,
09:17il faut d'abord aimer
09:18avant de se battre et de protéger,
09:19je pense.
09:20En tout cas,
09:20c'est l'ordre logique des choses.
09:21Moi,
09:21c'est comme ça que je l'ai vécu.
09:23Et montrer cette beauté,
09:25raconter ce qu'il y a dessous.
09:26C'est vraiment l'idée de ce livre.
09:27Les photos vues du dessus
09:29et les histoires du vivant vues d'en dessous.
09:33Et à partir de là,
09:34on peut s'émerveiller
09:35et se poser des questions.
09:36On apprend beaucoup de choses,
09:38notamment qu'il y a du plancton
09:39dans les nuages.
09:40Qu'est-ce que c'est que ce phénomène bizarre ?
09:42Vous avez entendu parler de ça ?
09:43C'est assez incroyable ça,
09:44effectivement.
09:45Dès qu'une goutte d'eau tombe dans l'eau,
09:46en fait,
09:47ça fait des petites gouttelettes minuscules
09:49qui s'envolent.
09:50Et ces gouttelettes,
09:51elles peuvent monter très, très, très haut
09:52jusqu'à la haute atmosphère.
09:54Et elles emportent avec elles,
09:55évidemment,
09:55toutes les petites êtres vivants
09:57qu'il y avait dans l'eau
09:58au moment où la goutte s'est envolée.
10:01Et ça, en fait,
10:01ça mélange comme ça
10:02les populations de bactéries,
10:04de virus,
10:04au travers des océans,
10:06au travers des eaux douces.
10:07Et ça joue un rôle important
10:08dans la biodiversité.
10:10Ce sont les pêcheurs comme vous.
10:11Et comme les 1,5 millions d'inscrits
10:12d'ailleurs en Fédération en France
10:14qui participent à cette mission
10:15de protection des rivières.
10:16Je m'explique,
10:17vous dites qu'une grande partie
10:18de la connaissance scientifique
10:19aujourd'hui,
10:19elle se construit en dehors
10:20des institutions
10:21parce que finalement,
10:22la science,
10:22elle manque de moyens.
10:23Et c'est important,
10:24en effet,
10:24d'en parler
10:25parce que ça casse aussi
10:26l'image du pêcheur
10:27qui abîme la nature.
10:28Une grande partie pratique
10:29ce qu'on appelle
10:30le catch and release,
10:31c'est-à-dire qu'on relâche
10:32les poissons
10:33sans les faire souffrir.
10:34Et vous dites d'ailleurs
10:35que ce manque de moyens
10:36dans la recherche
10:36est lié à une coupure,
10:38à une déconnexion
10:39de l'humain
10:39par rapport à la biodiversité.
10:41C'est un avis
10:42qui est partagé
10:42par Yann Arthus Bertrand.
10:44C'est ensemble
10:45qu'on va y arriver.
10:46C'est les 8 milliards
10:47d'intelligences
10:47des êtres humains sur Terre
10:48qui peuvent changer des choses.
10:50Il n'y a pas d'homme providentiel
10:51qui va nous imposer quelque chose.
10:53C'est véritablement
10:54quelque chose
10:56de très profond
10:58et très personnel
10:58de passer
10:59d'une conscience personnelle
11:01à une conscience universelle.
11:03Et tous les gens
11:04qui font,
11:05ils ont un regard de bonheur,
11:07ils ont quelque chose
11:07en plus dans nos visages.
11:10Agir rend heureux.
11:12C'est une empathie
11:12qu'on doit développer
11:13envers tout le vivant
11:14qui est autour de nous.
11:15Qu'est-ce qu'il y a
11:15de plus beau
11:16que de voir un chevreuil
11:17traverser un champ ?
11:19Comment vous expliquez
11:20cet éloignement ?
11:21Comment on y remédie ?
11:22Par rapport aux cours d'eau
11:24et aux rivières,
11:25au monde de l'eau douce,
11:26c'est historique.
11:28Il y a eu toute une vague
11:30de dégradation
11:30des milieux aquatiques
11:31pour privatiser les terres
11:32en les asséchant.
11:33Mais depuis la fin
11:34du Moyen-Âge en fait.
11:36Depuis Henri IV,
11:37Henri IV l'a institutionnalisé
11:39et ensuite ça a continué
11:40jusqu'à aujourd'hui
11:40où on continue
11:41d'assécher des zones humides
11:42etc.
11:43pour en faire des terres cultivables.
11:45C'est un peu
11:45la civilisation du marais
11:47et de la liberté
11:48versus la civilisation
11:49de la propriété privée
11:50et de l'accaparement
11:52des terres.
11:53Mais ça c'est si on va
11:55dans les causes profondes.
11:56Mais si on veut
11:56y remédier alors ?
11:57Mais pour y remédier aujourd'hui,
11:59je pense que c'est vraiment
11:59de recréer ce lien,
12:00de renouer ce contact
12:01avec les créatures qui nous entourent.
12:03On a tous et toutes
12:04des rivières en bas de chez nous.
12:05Et si on allait voir
12:06ce qu'il y a dedans ?
12:08Et au-delà de l'action,
12:09moi ce que m'a dégagé
12:10votre ouvrage,
12:11c'est qu'il faudrait
12:12repeupler les imaginaires.
12:14Peut-être que c'est ça.
12:15C'est aussi ce à quoi
12:16s'attachent les artistes
12:17qui créent des œuvres
12:18à destination de la jeunesse.
12:19Je pense notamment forcément
12:20à Miyazaki,
12:21célèbre pour son engagement écologique.
12:23Il représente une quantité
12:24impressionnante d'espèces,
12:26de faunes et de flores.
12:27La nature,
12:28c'est un personnage d'ailleurs
12:29à chaque fois dans l'une
12:29de ces histoires.
12:30Ou encore récemment,
12:31Arco, réalisé par Hugo Bienvenu,
12:33une fable écologique
12:34pleine d'optimisme
12:35que je vous recommande
12:36encore une fois chaudement,
12:37repeupler nos imaginaires.
12:39Ça ne peut passer que
12:40par là finalement l'engagement ?
12:41Je ne sais pas,
12:42c'est mon avis.
12:43J'en suis convaincu
12:44parce que c'est vraiment
12:45une question d'imaginaire.
12:46On ne rêve plus
12:47de toutes ces espèces
12:48comme en rêvaient
12:49les populations
12:50de chasseurs-cueilleurs
12:51d'autrefois
12:52où même nos ancêtres
12:53des générations,
12:54nos grands-parents,
12:55où tout le monde
12:55allait à la pêche,
12:56aux champignons, etc.
12:58Moi, j'ai été beaucoup
12:59en contact avec des autochtones
13:01dans les régions d'Amazonie
13:02parce que c'est des gens
13:03qui vivent de leurs rivières,
13:04de leurs fleuves,
13:04de leurs poissons.
13:06Et c'est vrai que c'est
13:06toute la spiritualité
13:07qu'il y a autour
13:08de ces espèces
13:09qui crée le lien.
13:10Et nous,
13:11on l'a un peu perdu
13:11à part des gens
13:13comme les naturalistes,
13:14les ornithologues,
13:15les pêcheurs à la ligne,
13:16des gens qui ont la chance
13:17de créer ce contact.
13:18Et oui,
13:19c'est sûr que c'est
13:20une question d'imaginaire
13:21et de culture avant tout.
13:23Et vous,
13:23vous vous souvenez
13:24dans votre enfance
13:24d'une oeuvre
13:25ou je ne sais pas
13:26ou d'un livre
13:27ou quelque chose
13:27qui vous a connecté
13:28justement à cette nature ?
13:31Vous vous êtes dit
13:31mais c'est là
13:32que je suis bien en fait.
13:33J'ai grandi à Paris
13:34mais j'avais la chance
13:35pendant les vacances
13:36et dès que je pouvais
13:37m'échapper un peu
13:37d'aller au bord de l'eau.
13:40Les tétards m'ont beaucoup marqué.
13:42C'est ces petites bestioles
13:43qu'on peut attraper
13:44dans la main
13:44puis on les voit grandir
13:45d'un jour sur l'autre.
13:47À un moment,
13:47du jour au lendemain,
13:48ils ont des pâtes
13:48et puis ils sortent de l'eau.
13:49Donc c'est quelque chose
13:51qui m'a beaucoup marqué.
13:51On les trouve dans les lavoirs
13:52encore qui existent
13:53dans certains villages ?
13:54Oui, oui.
13:55Ça a beaucoup diminué
13:56les batraciens comme ça
13:57mais on en trouve encore
13:58quand même heureusement.
13:59Et un livre
14:00qui m'a beaucoup marqué
14:01pour ça,
14:01c'était les copains.
14:03La collection,
14:04il y avait copains des mers,
14:05copains des forêts,
14:06etc.
14:06Et c'était génial
14:08parce que ça proposait
14:09plein de petites activités
14:10pour les enfants
14:10avec des bricolages
14:11qui reconnectent
14:12complètement à la nature.
14:14Ils sont encore toujours bien
14:15ces ouvrages.
14:15Ah oui, ils n'ont pas pris une ride.
14:16C'est ça qui est incroyable.
14:17C'est ça qui est génial
14:18avec la nature.
14:19Repeupler nos imaginaires
14:20et puis sauter la barrière.
14:21Quelle est la chose
14:22la plus illégale
14:23que vous ayez faite
14:24pile François ?
14:25Où ça ?
14:25Pour aller observer
14:26des espèces
14:27dans des milieux naturels.
14:29Oui, parce qu'en France,
14:30malheureusement,
14:30on a beaucoup
14:31de propriétés privées.
14:32On s'est pas mal
14:33accaparé comme ça.
14:34La nature s'est beaucoup fermée.
14:36Donc on m'a lâché
14:37les chiens
14:38un certain nombre de fois
14:39alors que j'essayais simplement
14:40d'aller documenter
14:42quelques poissons un peu rares.
14:43Vous avez sauté la barrière
14:45de certaines maisons
14:45pour aller observer
14:46leurs mares ?
14:47Ah bah sauter
14:48ou passer sous les barbelés,
14:49oui, mais...
14:50Vous n'avez jamais fini en tôle ?
14:51Non, non, non.
14:52Heureusement,
14:52je ne me suis jamais fait prendre.
14:54Jamais ?
14:55Vous pouvez nous regarder
14:57en vidéo
14:57pour repérer la tête
14:58de Bill François d'ailleurs.
14:59Je tiens à vous dire,
15:00chers auditeurs,
15:01si vous voulez.
15:01Ah bah comme ça,
15:02après, ils vont me repérer
15:03et je ne pourrais plus
15:04sauter la barrière.
15:04C'est une mauvaise idée.
15:05Oh mon Dieu,
15:05c'est une mauvaise idée.
15:06Si je vous propose
15:07une date,
15:08on imagine,
15:09on joue à « Tu préfères »
15:10Bill François ce matin
15:11sur l'antenne de France Inter.
15:13Une date avec un humain
15:14vraiment joli,
15:15sympathique
15:16ou une rencontre
15:17avec une truite
15:18d'une espèce
15:19pas encore étudiée au Maroc.
15:20Qu'est-ce que vous choisissez ?
15:22Qu'est-ce que vous préférez ?
15:23Ah bah la truite
15:24de très très loin.
15:26Les humains,
15:27on les a assez étudiés
15:28comme ça.
15:29Non mais c'est bon,
15:30on sait qu'ils ont
15:30deux bras, deux jambes
15:31et un cerveau
15:32parfois un peu trop gros.
15:35Non, j'ai eu la chance
15:36de rencontrer cette truite
15:37au Maroc
15:37il y a quelques mois
15:39une espèce
15:40ou une sous-espèce
15:41où on ne sait pas encore
15:42mais que personne
15:43n'avait jamais vu
15:44dans le fond d'un lac
15:44à 2500 mètres d'altitude
15:46au pied du mont Toubkal
15:47donc c'est
15:48les points culminants
15:49de l'Atlas
15:50et c'est vrai que ça
15:51ça fait une sensation
15:52incroyable
15:52d'observer une créature
15:54inconnue
15:56ce côté inexploré
15:57qui reste comme ça.
15:59Qu'est-ce que ça
15:59qu'elle vous apprend ?
16:01Qu'est-ce que ça
16:01vous apprend ?
16:03Intimement au fond
16:04déjà l'idée
16:05qu'il reste de l'inexploré
16:06dans cette planète
16:07qu'on a découvert
16:08la plupart des continents
16:09des terres émergées
16:10mais que dans l'eau
16:11y compris dans l'eau douce
16:12près de chez nous
16:13même en France
16:13on découvre des nouvelles espèces
16:15de poissons
16:15à peu près tous les 2-3 ans
16:17donc l'idée
16:19qui reste de l'inexploré
16:20et puis les truites
16:22c'est les vertébrés
16:23les plus variés au monde
16:24génétiquement
16:25il y a plus de diversité
16:26au sein
16:27simplement des truites
16:28d'un pays comme la France
16:29que dans toute l'espèce humaine
16:30c'est donc pour ça
16:31que je préfère rencontrer la truite
16:33vous avez compris
16:33mais du coup
16:35ça apprend aussi
16:36plein d'histoires
16:37sur l'évolution
16:37donc dans ce lac
16:39en l'occurrence
16:39qui a été coincé là
16:41depuis l'ère glaciaire
16:42il y a eu des spéciations
16:44des espèces
16:45qui se sont créées
16:46simplement à cause
16:46de l'isolement
16:47et ça permet
16:48de voir un territoire
16:49différemment
16:50de comprendre
16:51comment des espèces
16:51ont évolué
16:52en lien avec ce territoire
16:53j'étais heureuse
16:54de vous rencontrer
16:55Bill François ce matin
16:56votre session de l'inexplorée
16:58elle est vraiment contagieuse
16:59merci
16:59merci vraiment beaucoup
17:00et bravo
17:01vous êtes donc biophysicien
17:03écrivain
17:03chroniqueur d'ailleurs
17:04sur France Info
17:04on salue les collègues
17:06vous copubliez avec
17:07Yann Arthus Bertrand
17:08au douce
17:09et j'avoue
17:09que je lui montre le livre
17:10pour la première fois
17:11puisque le livre
17:11paraîtra le 6 novembre
17:12aux éditions Tana
17:13c'est la première fois
17:14que vous le tenez dans les mains
17:15il vous plaît votre livre
17:16je l'ai eu avant vous
17:18ça aussi c'est un peu
17:19de l'inexplorée
17:19de découvrir comme ça
17:20mon propre livre
17:21et je suis très heureux
17:23merci
17:24alors à bientôt
17:25et merci d'avoir été avec nous
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