00:00Et plus loin, Nelson Castello est ancien consul au Venezuela en France et notre invité, bonjour.
00:07Alors quel regard vous portez sur ce prix Nobel de la paix qui a été attribué à Maria Machado ?
00:14Écoutez, on est vraiment dans cette émotion, on est vraiment content pour la symbologie.
00:22Qu'est-ce que ça symbolise que cette femme qui a lutté d'une façon courageuse comme personne dans l'Amérique latine a réussi à lever, disons à nouveau, l'espoir des citoyens vénézuéliens ?
00:37Les citoyens vénézuéliens avaient subi vraiment des coups après coups qui avaient vraiment anéanti tous les mouvements de l'opposition.
00:46En plus, la persécution et toutes les violations des droits de l'homme qui se sont succédées, les gens en prison, les morts, les étudiants massacrés et l'opposition était anéantie complètement.
00:58Sa lutte personnelle a fait possible récupérer un mouvement d'opposition qui, dans les dernières élections, a représenté les 90% de la population vénézuélienne.
01:09Ça veut dire son reconnaissance à elle, à son courage, parce qu'il reste à l'intérieur des pays où il risque sa vie.
01:15Elle doit être cachée actuellement.
01:17Elle est cachée, elle ne peut pas être publique parce qu'elle sera immédiatement mise en prison.
01:22Mais ça représente aussi la lutte de plus de 25 ans que les vénézuéliens ont exercé vis-à-vis d'un régime que, si bien on a cru au début que c'est un régime politique,
01:34on a découvert, fur et à mesure, elle a montré son vrai visage.
01:39Le vrai visage, c'est un groupe délinquentiel qui, vraiment, c'est une mafia, c'est des trafiquants de drogue, c'est des trafiquants des êtres humains,
01:48c'est des gens qui ont violé tous les droits de l'homme et qui se sont installés dans les pouvoirs, dans le contrôle d'un pays.
01:55Et ce que vous dites, ça va dans le sens du salut qui a été fait aujourd'hui par le président du comité Nobel,
02:01qui a salué cette figure de l'opposition vénézuélienne en mettant en avant le fait qu'elle était en faveur d'une transition juste et pacifique de la dictature vers la démocratie.
02:14Aujourd'hui, dans quelles conditions elle est, elle vit ? Vous en avez un peu évoqué.
02:19En réalité, c'est effectivement ça. Le Venezuela a déjà pris la décision.
02:27Les 24 de l'année passée, des septembre de l'année passée, ça fait un peu plus d'un an maintenant,
02:34les Vénézuéliens ont voté pour un changement de régime.
02:39On a les actes qui prouvent ce résultat électoral.
02:42Ces actes ont été sauvés et envoyés à l'extérieur. Ils sont dans la banque centrale de Panama pour les sauvegarder.
02:52Et ça preuve que l'opposition avait déjà décidé le changement de régime.
02:57Sauf que ces régimes, comme ce n'est plus un parti politique ni rien, ils ne sont pas du tout démocratiques.
03:04Ils ont décidé de prendre le pouvoir à la force, rester au pouvoir à la force.
03:08Rester au pouvoir par la force. Vous évoquiez la situation aujourd'hui de Maria Machado,
03:15qui effectivement ne peut pas vivre comme tout le monde, parce qu'aujourd'hui, l'opposition vénézuélienne, elle est muselée.
03:23Complètement, mais aterrorisée, je pourrais dire.
03:28Après les élections, les premiers 20 jours, le gouvernement a mis en prison 1 000 personnes.
03:33Et de ces 1 000 personnes, après, il a libéré certains parce que c'était des mineurs, des gens qui n'avaient pas les 18 ans.
03:41Mais même comme ça, il a libéré, il applique une politique qu'on appelle de la porte tournante.
03:48Ça veut dire qu'il libère 3 et il reprend 5.
03:51Et actuellement, on pourrait dire qu'il est entre 800 et 900 prisonniers politiques dans les géoles du régime.
04:00Mais ce qui arrive, c'est qu'elle ne peut pas vivre, absolument pas.
04:04Elle est cachée, elle est dans la clandestinité.
04:07Si jamais on l'attrape, soit on l'utilise comme un mécanisme de pression pour plier la volonté populaire,
04:14soit on l'élimine, comme on l'a éliminé dans les passés des autres secteurs politiques.
04:19Alors, pour qu'on comprenne bien qui est Maria Machado, parce que tout le monde ne la connaît pas,
04:23c'est vraiment une figure politique de l'opposition qui compte au Venezuela.
04:27On revient sur son parcours où, notamment, elle s'engage dès les années 2000.
04:32Elle milite pour un référendum contre Hugo Chavez.
04:36Tout son parcours, c'est finalement de donner plus d'accès, en tout cas de donner de l'accès au plus grand nombre,
04:41à donner sa voix, à pouvoir se faire entendre ?
04:44À une décision démocratique, à que les pays puissent prendre une décision démocratique.
04:49C'est un ingénieur, il ne vient pas de la politique.
04:52C'est une femme ingénieur, avec une structure de pensée et d'action,
04:56comme quelqu'un qui vient pas des sciences sociales, sinon des sciences de la mathématique.
05:03C'est pas une apparatchi.
05:04Oui, exactement.
05:06Mais cette femme qui a découvert ses vocations, après qu'il est devenu pour la première fois députée,
05:13et en étant députée, c'est une des rares personnes qui a levé sa voix contre le président de l'époque,
05:21Hugo Chavez, qui était en train de faire toute une politique de confiscation des biens,
05:26mais qui ne les payait pas.
05:27Et quand on confisque et on ne les paye pas, c'est du vol.
05:32Et c'est ça qu'il a dit directement devant tout le monde.
05:35Et il a lutté à partir de ce moment pour la démocratie.
05:39Il a été persécuté, il a été frappé publiquement.
05:43On l'a cassé le nez, il a dû être opéré pour lui refaire le visage.
05:46C'est une femme qui a démontré de ne pas avoir peur,
05:50et qui s'est démarqué des politiciens, disons, habituels.
05:55Elle a été engagée de sa propre personne,
06:00ce qui a permis vraiment de reconquérir toute une population.
06:06Et dans les dernières élections, la preuve est évidente.
06:0890% de personnes qui ont été...
06:12Bon, le résultat officiel qui est dans les actes,
06:16c'est parce qu'il y a eu beaucoup d'extension.
06:18Il faut dire aussi que tous les Vénézoliens, qui représentent...
06:21Ils ne sont pas allés aux Yondes, forcément, et donc il a été élu.
06:25Il est à la tête du pays depuis 2013.
06:28C'est ça.
06:29Mais il y a un tiers des Vénézoliens qui sont dehors du pays.
06:32C'est la migration plus grande d'un pays sans guerre qui existe dans le monde.
06:37Ce tiers de la population n'a pas pu voter.
06:40Mais quand on compte les gens qui ont pu voter,
06:42ça fait un résultat de 70% à faveur de l'équipe de Maria Corina
06:47contre 30% à faveur du gouvernement.
06:49Mais ces 30%, on sait qu'il y a eu des...
06:52Tous les employés publics ont été obligés à voter.
06:55Mais même comme ça, ils n'ont eu que 30%.
06:58Et nous, on a eu 70%.
06:59Mais alors, comment expliquer que le pouvoir de Nicolas Maduro
07:03continue à tenir aujourd'hui ?
07:05Qu'est-ce qui pourrait le faire vaciller ?
07:06Malheureusement, il faut bien comprendre
07:09qu'au Venezuela, il n'y a pas un parti politique.
07:11Ce n'est pas un gouvernement des politiciens.
07:14Ce n'est pas un gouvernement des gens qui ont une philosophie,
07:17ont une idéologie.
07:18Non, ce n'est pas du tout ça.
07:20C'est une équipe de gangsters.
07:22Ils vivent et ils ont ruiné le pays complètement.
07:25Le pays, un des plus riches de l'Amérique latine,
07:28est devenu un des plus pauvres de l'Amérique latine.
07:31Les gens n'arrivent plus à vivre avec les pensions.
07:35Imaginez-vous vivre avec une pension
07:36qui n'arrive pas à 2 dollars par mois.
07:39Vous évoquez l'inflation, vous évoquez la crise économique
07:43qui frappe la population.
07:44Ils ont abandonné la production de pétrole.
07:48Vraiment, c'est la richesse du pays.
07:50Pourquoi ? Parce qu'ils n'ont pas entretenu l'industrie.
07:53Du coup, ils ne s'intéressent plus à ça
07:55parce qu'ils vivent du trafic des drogues.
07:57C'est ce qu'affirme Donald Trump.
08:01Donald Trump qui mène une guerre, on peut le dire par ses termes,
08:06contre Nicolas Maduro.
08:07Vous connaissez bien la diplomatie vénézuélienne,
08:10la diplomatie tout court, comme vous êtes ancien consul.
08:13Comment vous analysez ce qui se passe en ce moment ?
08:15Écoutez, il y a un changement, un changement vraiment de politique.
08:19Je crois qu'on est face à une nouvelle, disons, doctrine américaine
08:24de la part des États-Unis.
08:27C'est appliquer la force pour avoir la paix.
08:30Et ça, c'est complètement différent.
08:31Jusqu'à cette politique actuelle, la diplomatie était toujours en train
08:37de créer des points de dialogue, des points de réunion.
08:42Ça a été ségé chez nous.
08:44Plus de 27 dialogues, commissions de dialogue se sont établies.
08:48La Norvège a participé, le Canada a participé, le Qatar a participé.
08:53Et on a eu une quantité de réunions, de dialogues soutenus
09:01par les forces internationales.
09:03On a aussi, de notre côté, les preuves qui s'accumulent.
09:07La commission des faits des Nations Unies sur les droits de l'homme
09:12a condamné plusieurs fois.
09:14Et la dernière condamnation est un...
09:17Et on n'a pas d'argument quand on voit les chiffres
09:21de toutes les violations des droits de l'homme.
09:23Il est un procès ouvert à la Cour pénale internationale.
09:26Mais pour autant, Nicolas Maduro reste au pouvoir.
09:29Reste au pouvoir.
09:30Donc finalement, ça veut dire qu'il a trouvé les leviers nécessaires
09:33pour rester à la tête du Venezuela.
09:35Oui, cet levier, c'est...
09:38Disons, un groupe de militaires qui sont à la tête
09:42et qui sont membres de ce système.
09:45Ce n'est pas pour rien que les cartels qui font le trafic des drogues
09:48en partant du Venezuela
09:49soient en partie en production,
09:52mais surtout dans le transit de la drogue vers l'Europe
09:55et vers les États-Unis.
09:57Ne croyez pas qu'il n'y a pas un parti qui arrive en Europe.
10:00Et c'est dans les membres des militaires.
10:02C'est pour ça que ce cartel s'appelle le cartel de los Soles.
10:06Los Soles, c'est la symbologie qu'utilisent les militaires
10:10dans ces signes-signes quand on arrive à être général.
10:13Chez nous, il y a des étoiles,
10:14jusqu'au général qui commence à voir des soleils.
10:17C'est pour ça que ça s'appelle le cartel de soleil.
10:19Les chefs des gangs sont des généraux
10:23qui soutiennent Maduro
10:24parce que ça leur a permis de devenir milliardaires.
10:27Les preuves s'accumulent énormément.
10:29Et lorsqu'on pose la question,
10:30lorsqu'on pose la question finalement
10:31de comment sortir finalement de ce pouvoir de Nicolas Maduro,
10:35ça passe par justement réussir à ramener
10:37ces militaires du côté de la démocratie ?
10:41On essaie de casser cette structure.
10:45Pourquoi ? Parce que tous les militaires qui sont en bas
10:48ne sont pas nécessairement des trafiquants.
10:50Il a preuve qu'ils ne vivent pas bien comme les généraux.
10:53C'est un groupe qui doit représenter une quantité limitée de généraux
10:59qui sont celles qui profitent.
11:01Mais les autres n'osent pas.
11:03Parce qu'il faut dire que parmi les mille personnes qui sont en prison,
11:10presque la moitié sont des militaires.
11:13Ça veut dire qu'ils ont peur aussi.
11:15Peur pour eux, peur pour sa famille.
11:17Le problème c'est qu'ils ne peuvent pas partir
11:19parce qu'ils sont persécutés.
11:20On a vu déjà.
11:21Il y a un militaire qui s'est allévé,
11:23un jeune militaire qui s'est allévé
11:25et qui a demandé l'assile politique au Chili.
11:28Il est parti au Chili
11:29et il est un groupe parce que le gouvernement actuel
11:34ou les régimes, en réalité on devait dire,
11:36utilisent des autres mécanismes.
11:39Ils ont créé un mécanisme avec les anciens prisonniers
11:43qui ont été libérés
11:44et qui ont été envoyés dans l'Amérique latine
11:47et même aux Etats-Unis.
11:49Et c'est un autre qu'on appelle les traînes d'Arawa.
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