Un personnage tiraillé entre raison et passion pour Nadia Tereszkiewicz dans Deux Pianos

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Transcript

00:00Je ne veux pas trop en dévoiler, mais Claude est confrontée en fait à un choix qu'elle n'a pas fait, qu'elle a refusé de faire.

00:06Et Déplechin dit d'elle, elle s'est jetée dans les bras du hasard.

00:10J'apprends au passage que le hasard a des bras donc.

00:13Elle a laissé le destin choisir à sa place.

00:15Comment est-ce qu'on cerne un personnage comme ça aussi fuyant ?

00:19Je trouve que c'est très beau un personnage qui est en lutte,

00:23qui est en fait traversé par des élans contradictoires,

00:28qui a besoin de comprendre qui elle est.

00:32Et j'ai aimé chercher ça avec elle en fait.

00:35J'ai l'impression pendant le tournage, c'est un personnage qui se cherche

00:38et qui arrive à décider pour elle-même.

00:41J'ai l'impression qu'elle se libère par ça.

00:43D'ailleurs, c'est ce que vous dites, elle est tiraillée entre un peu la raison et la passion.

00:47Oui, complètement.

00:47Est-ce que vous, en tant que comédienne, vous vous laissez plutôt guider par votre esprit ou vos émotions ?

00:52Les deux en général.

00:54Oui, c'est génial en tant que comédienne de pouvoir chercher un personnage

00:59qui est débordé par des émotions qu'elle essaie de contrôler.

01:03Parce que j'ai l'impression qu'à la fois savoir ce qu'on doit faire en tant que personne

01:08et après en tant que comédienne, être raisonnable et puis d'un coup être submergée par quelque chose

01:15et qu'on ne peut plus contrôler, ça c'est beau.

01:17Même si c'est immoral, j'aime bien qu'on ne la juge pas, par exemple, cette femme

01:23et qu'on soit juste face à quelqu'un qui se laisse envahir.

01:28Moi, j'ai tendance à être assez émotionnelle dans la vie.

01:31Je suis assez submergée quand même.

01:34Travailler avec Des Pléchins, ça faisait partie de votre wish list.

01:37Je sais que Roi et Reine est un film qu'a beaucoup compté pour vous.

01:40Oui, complètement.

01:41Mon Roi et Reine, j'ai dû le voir une dizaine de fois.

01:43Ça fait partie de mes films préférés.

01:46Je trouve que dans ce film, il y a une liberté folle,

01:49que c'était comme un accès pour moi parce que Arnaud écrit le cinéma comme de la littérature.

01:56Enfin, il fait un lien justement entre littérature et cinéma.

01:59Est-il exact que lors de votre première rencontre avec Des Pléchins,

02:02vous avez parlé pendant des heures de livres ?

02:04En fait, on n'a parlé que de ça.

02:05Il m'a même envoyé un mail après en me disant

02:07« Je suis désolée, on n'a pas parlé de films. »

02:09On n'a parlé que de littérature.

02:11Mais il m'avait dit que le personnage de Claude

02:13était entre Mathilde Lamol et Madame de Reynal, chez Stendhal.

02:19Et je pense que comme il ne savait pas,

02:21mais j'aime énormément Stendhal,

02:23donc tout de suite, j'ai compris ce tiraillement entre raison et passion.

02:27Je me suis dit « Ah, ça suffit. »

02:28C'est vrai que vous aimez tellement la littérature

02:30que vous avez songé un moment à l'enseigner ?

02:33Oui, parce que je faisais une prépa-lettres.

02:36Et qu'est-ce qui vous en a dissuadé ?

02:38Comment s'est passé ?

02:39Les célèbres doivent être tristes aujourd'hui pour nous avoir.

02:40Franchement.

02:42Moi, j'ai toujours aimé enseigner de toute façon.

02:43Et puis, je crois que je n'avais pas réfléchi plus que ça.

02:48J'avais envie de faire un métier en lien avec la littérature.

02:51Et donc, les études de lettres mènent à l'enseignement.

02:54Mais je crois que j'ai été happée par le cinéma et j'en suis bien heureuse.

02:59Vous dites que c'est un engagement de choisir d'incarner quelqu'un.

03:02Or, vous avez eu des incarnations très, très différentes

03:04dans votre déjà riche filmographie.

03:07Est-ce que vous auriez par hasard une petite peur de la redite ?

03:10Je crois qu'avant les rôles, je cherche à rencontrer des réalisateurs

03:14et rentrer dans leur monde.

03:17Et après, je regarde le rôle, disons.

03:20Vous ne regardez pas les costumes, donc, parce que...

03:22En plus, c'était des costumes faits avec des tissus d'époque.

03:27C'était vraiment une chance.

03:29Après, j'aime bien voyager dans le temps, ça, c'est sûr.

03:31Oui, mais alors, pourquoi pas, après Astrid, la scandinave,

03:35Nadia Lafinoise, par exemple ?

03:36Est-ce que vous êtes franco-finlandaise ?

03:38Voilà, mon rêve.

03:39Et que vous parlez couramment le finnois ?

03:41Eh bien, voilà, vous êtes malin, Antoine.

03:47Et ça voulait dire quoi ?

03:49Que j'aimais beaucoup tourner en Finlande, en fait.

03:51Ah bon ? Très bien, je le prends bien, donc.

03:53Et puis, c'est que vous aimez...

03:54On ne peut pas s'arrêter là ?

03:55Non, non, ce n'est pas le lieu.

03:57Puisque vous aimez changer de registre, vous allez jouer,

04:00on va vous voir bientôt dans un western qui s'appelle

04:02Pile ou Face, d'Alessio Rigaud et Rigui, de Matteo Zoppis.

04:06Oui, j'adore ce film.

04:07C'est un western avec John C. Reilly,

04:10qu'on avait vu chez Scorsese, qu'on avait vu chez Paul Thomas Anderson,

04:12qu'on avait vu aussi dans le film d'Odiard,

04:15Les Frères Sisters.

04:15Et je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'en parler avec Reilly,

04:19mais cette approche un peu différente du western,

04:22c'est quelque chose qui vous intéresse aussi, vous ?

04:25Oui, ça nous a vraiment intéressés,

04:27parce que, en fait, ça commence comme un western classique

04:30avec les codes du western, donc c'est un monde d'hommes.

04:33Et en fait, il joue, d'un coup, il change les codes,

04:37il joue avec, et ça devient presque surréaliste,

04:40voire magique, le film.

04:41Et puis, on suit cette femme.

04:43Donc, pour une fois, c'est le parcours d'une femme

04:45qui s'émancipe et qui fugue.

04:48Et cette fugue, elle devient presque existentielle.

04:50C'est...

04:51Voilà, enfin, bref, c'est très beau sur la transmission.

04:54C'est agréable, le corset ?

04:57Alors, pour faire du cheval,

04:58je ne conseille absolument pas.

04:59Au moins, on aura appris ça.

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