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  • il y a 2 jours
Le producteur et animateur Arthur est l'invité de 7h50 pour son livre “J’ai perdu un bédouin dans Paris”, chez Grasset. Il s'exprime également sur le plan de paix présenté par le président américain Donald Trump.

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Transcription
00:00La grande matinale.
00:027h49, Benjamin Duhamel, votre invité est animateur et producteur.
00:06Bonjour Arthur.
00:07Bonjour.
00:08Merci d'être avec nous ce matin sur France Inter.
00:10Alors que vous publiez Demain, j'ai perdu un bédouin dans Paris, aux éditions Grasset,
00:15presque deux ans après les massacres terroristes du 7 octobre.
00:18Ce livre est un cri du cœur qui vient des tripes sur ce moment de bascule
00:21où l'animateur de télévision que vous êtes, habitué à faire rire les Français,
00:24s'est mis à dire « je », à dire « juif ».
00:27Une bascule qui s'est notamment opérée, vous le racontez dans votre livre,
00:29dans ce studio.
00:30Face à Sonia de Villers, vous étiez venue pour parler d'un nouveau programme télé
00:33et vous vous êtes retrouvée à parler de la peur.
00:35La vôtre, une vie percutée par l'antisémitisme, les menaces de mort,
00:39par des officiers de sécurité qui vous suivent désormais à la trace
00:42et presque sans le vouloir, vous avez parlé pour tous les Français juifs.
00:45Ce jour-là, vous êtes devenu comme une sorte de porte-parole, Arthur ?
00:49Alors malgré moi, parce qu'il y a des institutions qui le font très bien,
00:52mais c'est vrai que pour la première fois en 30 ans dans ma vie,
00:55j'ai parlé avec mon cœur et j'ai parlé de ce que vivaient les Français juifs,
01:03c'est-à-dire la peur, l'angoisse, la montée de l'antisémitisme.
01:07Et comme peu de paroles l'avaient fait,
01:10je me suis retrouvé à parler peut-être au nom de ceux
01:13qui trouvaient bien silencieux la majorité des autres personnalités.
01:18Mais ce n'est pas un rôle que j'ai endossé, c'est venu comme ça.
01:22Et c'est vrai que pendant 30 ans, j'avais toujours mis de côté mes opinions personnelles,
01:26j'ai toujours mis de côté ce que je pensais,
01:28parce que je considérais que ce n'était pas mon rôle.
01:30Puis aujourd'hui, j'approche des 60 ans et je me dis que voilà,
01:33mettre ma notoriété, mes 20 millions d'abonnés sur les réseaux sociaux
01:37au service d'une cause que je trouvais juste,
01:39qui était de parler de la montée de l'antisémitisme,
01:41mais aussi des otages.
01:42Parce qu'à l'époque, quand je suis venu, il y avait des otages français.
01:43Il y avait 50 morts après le massacre du 7 octobre
01:47et je trouvais qu'il y avait un silence qui devenait pesant.
01:50Et on parlera dans un instant, bien sûr, du sort des otages.
01:53Sur ces amis artistes qui, vous le racontez,
01:55ont refusé de s'engager après le 7 octobre,
01:57tout en vous envoyant par derrière des messages,
01:59vous disant « ce n'est pas vraiment contre toi ».
02:02Vous parlez même d'un réalisateur juif,
02:05vous ne le citez pas, on ne sait pas qui est cette personne,
02:07qui a refusé de réaliser un clip sur l'antisémitisme.
02:10Vous avez perçu ça comme une forme de trahison ?
02:14Je ne dirais pas jusqu'à là.
02:15D'abord, qui suis-je pour exiger des artistes de soutenir telle ou telle cause ?
02:20Je dis simplement que j'étais assez perturbé
02:23de voir tous ceux qui n'étaient pas capables
02:26d'avoir la même empathie à la fois pour des otages
02:29et le massacre du 7 octobre
02:30que pour les malheureux palestiniens qui vivent sous les bombes.
02:35Je trouvais ça complètement dingue
02:36de voir qu'on était capables de dire « libérer les otages »
02:40et cesser le fait en même temps.
02:41Ils avaient peur de quoi ?
02:42Je ne sais pas.
02:43Est-ce que c'était une pression qui venait du métier ?
02:46Est-ce que c'était une peur de l'opinion publique ?
02:48Je ne sais pas et je ne veux pas savoir.
02:50Je dis juste que ce qui m'a le plus bouleversé,
02:51c'est qu'à chaque fois que des artistes proches
02:54ou des gens que je connaissais
02:55qui venaient régulièrement de mes émissions de télé
02:57poster un truc terrible contre Israël,
02:59ils m'ont envoyé un texto
03:00« mais ça n'a rien à voir avec toi ».
03:02Comme si j'étais l'ambassadeur d'Israël.
03:06Vous savez, on peut aimer Israël
03:07et ne pas être en accord avec le gouvernement israélien.
03:10Comme on peut critiquer le Hamas
03:12et avoir de l'empathie pour les palestiniens qui souffrent.
03:15Donc je me suis retrouvé, malgré moi,
03:17à être une espèce de...
03:20Je ne dirais pas porte-parole parce que je refuse ce terme,
03:22mais quelqu'un qui parlait à haute voix
03:23et qui a dit peut-être tout haut
03:25ce que les juifs pensaient tout bas.
03:26Justement sur cette assimilation
03:28qui est parfois faite au gouvernement israélien,
03:30vous racontez ce dîner avec celui qui était votre ami,
03:33un dénommé Fabrice,
03:34et qui visiblement ne l'est plus.
03:35Et vous dites dans ce dîner,
03:36il m'a mis dans la case de celui
03:38qui devait défendre le gouvernement israélien.
03:41Et au fond, le choc du 7 octobre,
03:43c'est aussi ces Français juifs
03:44qui, au quotidien, sont renvoyés
03:46à la politique d'un gouvernement
03:47avec lequel ils n'ont,
03:50pour l'immense majorité,
03:51strictement rien à voir.
03:52Exactement.
03:52Moi, je suis Français et Juif,
03:54mais j'ai l'impression que depuis le 7 octobre,
03:55on m'est réduit à ma judaïté.
03:58Et je raconte un passage
03:59où je dîne avec des amis
04:01et je suis devenu, parce que juif,
04:03le représentant de tout ce qui se passait en Israël
04:05et je devais justifier
04:07de tout ce qui se passait à Gaza.
04:09Alors que moi,
04:10les Français n'ont pas
04:11à similiser dans la politique israélienne.
04:13D'ailleurs, vous aviez un invité hier
04:15qui a dit un truc terrible,
04:16qui a dit qu'il fallait que
04:17les Juifs de France
04:19se désolidarisent
04:20de la politique
04:21de Benjamin Netanyahou.
04:23Mais oui, c'est comme si j'avais dit
04:25ou il avait dit ici même
04:27il faudrait que les musulmans de France
04:28se désolidarisent du Hamas
04:30pour éviter qu'il y ait
04:31du racisme anti-musulman en France.
04:34Parfois, on marche sur la tête.
04:35Et c'est ce qui, d'ailleurs,
04:36lui a été répondu.
04:37Vous insistez beaucoup dans votre livre
04:38sur votre refus de l'indignation
04:39à deux vitesses,
04:40justement, du deux poids deux mesures.
04:41Vous dénoncez ceux qui sont incapables
04:43d'imaginer que l'on puisse pleurer
04:44à égalité un enfant juif
04:45et un enfant palestinien.
04:46Est-ce que vous considérez, Arthur,
04:48que l'opinion publique,
04:49les Français, juifs et non-juifs,
04:51ont suffisamment pleuré
04:53les dizaines de milliers
04:54de victimes civiles à Gaza
04:55comme beaucoup ont pleuré
04:57et a raison les victimes
04:58du pogrom du 7 octobre ?
04:59Est-ce que, là-dessus,
05:01les propos, les mots
05:03ont été suffisamment forts ?
05:04Écoutez, moi, je pense qu'un mort,
05:06qu'il soit à Gaza ou à Tel Aviv,
05:09c'est un mort de trop.
05:11Et franchement, celui qui n'est pas
05:12bouleversé par les milliers de morts
05:14à Gaza n'a pas d'humanité en soi.
05:16En lui, quoi, je veux dire,
05:18c'est un pléonasme.
05:19Et pas qu'à Gaza, d'ailleurs.
05:21Dans le monde entier,
05:22il y a 101 guerres sur la planète.
05:24Et celui qui n'est pas ému par les morts,
05:26il n'a rien à faire sur Terre.
05:27Oui, mais sur la spécificité, Arthur,
05:28de la situation à Gaza,
05:29on a beaucoup entendu,
05:30après le 7 octobre,
05:31ce fameux 8 mai de certains
05:32qui tentaient déjà
05:33de minorer ou minimiser
05:35ce qui s'était passé le 7 octobre.
05:36Est-ce que ce 8 mai-là,
05:38on ne l'a pas aussi entendu
05:39ces derniers mois
05:40quand le gouvernement israélien
05:42bombardait et faisait
05:43des dizaines de milliers
05:44de victimes civiles à Gaza ?
05:46Cher Benjamin,
05:46nous sommes sur une radio
05:47qui, depuis le 7 octobre,
05:49tous les jours,
05:51a rappelé ce qui se passait à Gaza.
05:53Parfois de manière partisane,
05:55mais c'est la politique.
05:55Non, je ne crois pas partisane,
05:57non, non.
05:57Je ne crois pas de vous,
05:57mais de manière...
05:58En général, je veux dire, si...
05:59En rappelant les faits, Arthur,
06:00dans les journaux,
06:01avec des reporteurs
06:02qui sont sur le terrain.
06:03J'ai été maladroit,
06:04mais on va dire que
06:05si vous faites la balance
06:06de toutes les personnalités
06:08qui sont venues blâmer Israël
06:10et toutes celles
06:10qui sont venues défendre Israël,
06:12je pense que la balance
06:13pèsera du côté
06:14de ceux que vous avez reçus
06:16en majorité.
06:17Mais ce n'est pas grave,
06:17je ne suis pas là
06:18pour faire le procès
06:18de votre radio,
06:19loin de là.
06:20D'autant que c'est sur cette radio
06:21qu'est né mon livre.
06:22Mais ce que je veux dire,
06:23c'est que je ne crois pas
06:24qu'on a manqué d'empathie
06:26et d'informations
06:27concernant la situation à Gaza.
06:28Mais moi, mon livre,
06:28il n'est pas sur Gaza.
06:30Moi, mon livre est sur
06:30la solitude des Juifs
06:32après le 7 octobre,
06:33sur ce sentiment d'abandon,
06:34sur cette peur croissante
06:36et sur la montée
06:40livre « Quel antisémitisme ? »
06:41sur ces Français
06:42de confession juive
06:43qui dissimulent leur nom,
06:45qui n'osent plus mettre
06:46une kippa,
06:46qui enlèvent ce qu'on appelle
06:47la mésousa devant leur part.
06:49Est-ce que vous avez le sentiment
06:49que la classe politique française
06:51a pris la mesure
06:52de l'explosion
06:53de cet antisémitisme ?
06:55Moi, je pense qu'il y a eu
06:56beaucoup de mots,
06:56mais maintenant,
06:57il faut passer aux actes.
06:58Je crois qu'au-delà
07:00de la classe politique,
07:00je pense que les Français
07:02ne sont pas conscients
07:03de la peur et de l'angoisse
07:04dans laquelle vive
07:05la communauté juive.
07:07Vous le disiez,
07:07moi, j'ai des amis
07:08qui, pour prendre un taxi,
07:09changent leur nom.
07:10On en a fait une publicité
07:11d'ailleurs avec Maurice Lévy
07:12qui a été diffusée,
07:13qui a été vue 100 millions de fois,
07:14qui était juste,
07:15non pas pour se victimiser
07:17ou se plaindre,
07:17pour dire,
07:18voilà notre situation aujourd'hui.
07:19Les étudiants juifs
07:20ont peur quand ils vont
07:21à la fac.
07:22Les étudiants juifs
07:23cachent leur étoile de David
07:24quand ils vont à la fac.
07:25Les femmes,
07:26quand elles vont
07:26à la boucherie cachère,
07:28elles se retournent
07:28trois fois en sortant
07:29de la boutique.
07:30Ce n'est pas normal.
07:30Et vous-même, Arthur,
07:32je le disais en début
07:32de cet entretien,
07:33vous continuez d'être
07:33accompagné par plusieurs
07:35vous parlez de votre famille.
07:38Oui, j'explique que
07:39c'est vrai que ma vie
07:39a été un peu bouleversée
07:40parce qu'aujourd'hui
07:41je vis protégé,
07:42mais c'est un privilège
07:43quelque part,
07:43même si c'est aberrant
07:45de se dire que je suis protégé,
07:46c'est un privilège.
07:47Mais moi je pense
07:47au petit jeune de Sarcelles
07:49qui va se faire tabasser
07:50parce qu'il avait
07:50une kippa sur la tête
07:51ou à ce monsieur Cohen
07:53qui a été dévisagé hier encore
07:55parce que juif,
07:56qui n'a pas la chance
07:57d'être protégé
07:58comme moi je le suis.
07:59Dans les colonnes
07:59de la tribune dimanche,
08:00vous parlez d'une communauté
08:01juive de France
08:01qui s'est, je cite,
08:02fermée comme une huître
08:03face à Emmanuel Macron.
08:05Ça veut dire qu'en France
08:06le débat est tellement polarisé
08:07que le fait d'avoir reconnu
08:09un État palestinien
08:10fait qu'Emmanuel Macron
08:11se met à dos
08:12la communauté juive ?
08:13Je pense que c'est
08:14une succession
08:15de déclarations du président
08:16qui ont fait que,
08:17je le disais,
08:18la communauté s'est refermée
08:19comme une huître.
08:19On a démarré le 8 ou 9 octobre
08:21avec une déclaration du président
08:23qui voulait monter
08:24une énorme coalition
08:25pour attaquer le Hamas.
08:27Et puis petit à petit
08:28les déclarations
08:29étaient de plus en plus violentes.
08:30On a parlé de
08:31barbares,
08:32on a parlé de massacre,
08:33on a parlé de famine
08:33et puis plus récemment
08:34le président se posait
08:35la question de l'humanisme
08:37des juifs français.
08:39Donc évidemment
08:39qu'on s'est senti
08:40un petit peu abandonné
08:42et puis surtout
08:43la déclaration à l'ONU
08:44sans condition
08:45qui était de ne pas
08:46ressortir les otages,
08:47on a trouvé que c'était
08:48un blanc-seing donné
08:49aux terroristes.
08:50Avec des conditions
08:51qui étaient fixées.
08:52Justement,
08:53un dernier mot là-dessus
08:53Arthur,
08:54sur la perspective
08:56de ce plan de paix.
08:57On attend la réponse
08:58du Hamas
08:59avec la possibilité,
09:00et vous en parlez beaucoup
09:00dans votre livre
09:01des otages,
09:01de leur libération
09:02dans les oiseaux.
09:02Moi c'est la seule chose
09:03qui m'intéresse.
09:04Vous dites
09:05et vous vous assimilez
09:06à ce bédouin perdu
09:07dans Paris,
09:08vous dites
09:08ce bédouin c'est moi.
09:09Quand les otages
09:10seront libérés,
09:11ce bédouin
09:12vous l'aurez retrouvé ?
09:12Écoutez,
09:13depuis le premier jour
09:14je fais partie
09:15de ceux qui ont accueilli
09:16en France
09:16les familles des otages,
09:17on leur a présenté
09:18les pouvoirs publics,
09:18on leur a présenté
09:19les journalistes,
09:20donc je me suis attaché
09:20et même si ce sont des gens
09:21qui ne sont pas de ma famille,
09:22je les considère désormais
09:23comme des gens de ma famille.
09:25Hier,
09:26ce plan de paix
09:27c'est une lueur d'espoir
09:27et j'ai écouté ce matin
09:28sur votre radio
09:29quelqu'un qui a dit
09:29ce n'est pas la fin
09:30mais c'est le début de la fin
09:31et j'espère qu'on va arriver
09:33à ce début de la fin
09:33et à cette fin
09:34qui est libérer les otages
09:36et que la paix revienne
09:37et que les souffrances
09:38du peuple palestinien
09:38s'arrêtent.
09:39Merci beaucoup Arthur,
09:40j'ai perdu un bédouin
09:41dans Paris,
09:41c'est au 10 édition Grasset
09:42et ça paraît demain.
09:43Merci Benjamin Duhamel.
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