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  • il y a 2 semaines
Et si la nature était la clé de notre bien-être ? Découvrez comment renouer avec le vivant peut transformer notre santé mentale et physique.

Ce documentaire explore le lien vital entre l'humain et la nature, en s'appuyant sur la théorie de la biophilie et les bienfaits psychologiques des espaces verts.

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00:00...
00:00Intuitivement, nous savons que la nature nous fait du bien.
00:25...
00:54Des atouts précieux pour notre santé physique et mentale.
00:59Maintenir le lien est vital.
01:02Mais quels sont les mécanismes physiologiques mis en œuvre ?
01:06Et quels sont les bénéfices pour la société de demain ?
01:10...
01:11La première explication de notre amour spontané du vivant est inscrite au plus profond de chacun de nous.
01:32Elle relève de l'histoire de notre évolution.
01:34Les 200 dernières années d'industrialisation n'ont pas effacé un héritage biologique acquis depuis la nuit des temps.
01:44C'est la thèse développée par le biologiste américain Edward Wilson il y a un peu plus de 40 ans.
01:50Il la nomme la biophilie.
01:51Edouard Wilson suggère que le cerveau humain s'est développé en synchronie, en symbiose avec le monde naturel pendant des millions d'années.
02:04Et donc nous aimons la nature parce que nous avons appris en fait à apprécier les éléments qui ont longtemps servi à notre survie.
02:13Il faut rappeler que 50% de la population mondiale vit en ville actuellement.
02:19C'est un phénomène qui est relativement récent, qui remonte à peu près à 200 ans avec la révolution industrielle.
02:24Et si on regarde le cerveau humain, moderne, finalement c'est le même cerveau que celui d'un homme de Cro-Magnon qui a par exemple vécu dans la vallée de la Dordogne il y a 30 000 ans.
02:36Même si on vit essentiellement en ville, en raison de cet héritage biologique, on a la nature en nous.
02:47La deuxième explication est d'ordre psychologique.
02:50Les cycles, formes et couleurs du monde végétal nous imposent un rythme plus contemplatif, autrement dit, plus naturel.
03:03On passe effectivement à peu près la moitié de notre temps à penser à autre chose que ce qu'on est en train de faire.
03:08On pense à des choses qu'on a vécues ou alors on se projette de manière anxieuse dans l'avenir.
03:14Par contre, lorsque la nature est fascinante et elle est belle,
03:18eh bien, ces stimulations naturelles attirent tout naturellement notre attention vers l'environnement.
03:23C'est une attraction qui est spontanée et qui fait que le cerveau peut faire des pauses, peut se régénérer.
03:33Véritable enjeu de santé publique, l'idée du jardin comme soin gratuit pour tous a encore du mal à s'imposer dans nos sociétés.
03:40Le tournant de la pandémie Covid a malgré tout accéléré la tendance que certaines personnes ont su intégrer depuis longtemps dans leur pratique professionnelle.
03:49Vous voulez boire, messieurs ?
04:05On fait quoi ? On met un peu de musique ?
04:09Au centre hospitalier Saint-Julien de Nancy,
04:35Les 4000 m² de jardin clos sont à disposition des patients, des familles et des soignants 24h sur 24.
04:44Le docteur Thérèse Rivasso-Jonvaux, neurologue et chef de service,
04:49l'imagine dès 2007 avec l'aide d'un médecin qui est aussi artiste sculpteur et un chercheur en agronomie.
04:56Tous trois allient leurs compétences pour créer ce jardin thérapeutique pionnier et unique en France pour son pôle de recherche sur les relations entre la santé et la nature.
05:07L'objectif de ce jardin, c'est qu'on ne se sente plus dans un hôpital.
05:15Et ça, c'est important de retrouver le contact avec la nature qui est familière, même pour les personnes qui ont des troubles de la mémoire,
05:22et de quitter un peu ce monde artificiel de l'intérieur de l'hôpital avec, bien sûr, quelque chose qui est très pauvre sensoriellement.
05:29Et donc, on veut faire contraste et donner au contraire une grande richesse d'informations pour les différentes sensorialités.
05:37Ça va ?
05:38Donc, on se sent effectivement plus tout à fait malade, mais déjà en train de retrouver le monde habituel et un monde familier qui est rassurant.
05:47Conçu autour des quatre éléments fondamentaux que sont l'eau, l'air, la terre et le feu,
06:00cet aménagement sert à stimuler l'essence et la curiosité de ces patients atteints de maladies neurodégénératives.
06:08Ici, le jardin n'est pas qu'un lieu de promenade, il est un espace de soins apaisant, un outil thérapeutique à part entière.
06:17On ramène la main au niveau de l'épaule et on ouvre.
06:26Et redescendre sur les côtés.
06:29On s'arrête à peu près à cette hauteur-là et après on fait la fleur.
06:33Parfait.
06:41On va faire un petit peu de jardinage ?
06:43Regardez.
06:45Emeline Nassau, psychologue du service, comme l'ensemble des soignants, privilégie dès que possible les activités au jardin.
06:54On va aller doucement parce qu'il y a une petite haute.
06:58Voilà, c'est super.
07:05Lorsqu'on a une maladie cognitive, la difficulté majeure c'est d'interpréter le monde.
07:11Et finalement, dans ce jardin, c'est comme un petit cocon.
07:14On va arriver tout doucement.
07:15Voilà.
07:18Vous aimez les fraises ?
07:20Oui, j'aime bien.
07:20On entend des petits oiseaux qui sentent.
07:22Oui, c'est agréable.
07:25On voit bien, les personnes, quand elles ont les mains dans la terre, ça leur rappelle quelque chose, ça stimule la mémoire.
07:30C'est important.
07:32Vous aimez jardiner ?
07:33Pas trop, non, parce que chez nous, on avait, chez mes parents, moi je vous parle, on avait pas mal de cultures, alors il y en a.
07:44Il n'y a pas de manière de bien faire ou de mal faire, parce que la terre c'est malléable.
07:49Il n'y a pas d'échec, c'est juste une expérience sensorielle.
07:54Peu importe que la graine soit plantée là ou là, c'est l'expérience sensorielle qui est très importante.
07:58Est-ce que vous faites des fleurs ?
08:00Oh, alors là !
08:01C'est mon dada.
08:05Ah ! Quelle fleur vous préférez ?
08:09Pour l'instant, c'est la période d'éranium.
08:12Ah oui !
08:13C'est une très richesse qui vient solliciter la personne sur plein de dimensions différentes, le langage, les émotions, la mémoire.
08:19Et effectivement, elle communique mieux, elle communique plus.
08:23Il y en avait trop sur la même ligne ?
08:24Voilà.
08:25D'accord.
08:26Je connais quand même un peu qui me reste de ma jeunesse.
08:29Oh oui, je vois. Vous avez très bien planté en tout cas.
08:33Vous avez le coup de main.
08:35Oui, mais ça ne fait rien. Les mains, ça se lave.
08:38Oui.
08:38Même quand les mots sont absents, le jardin offre une solution.
08:50Je me rappelle d'une personne, par exemple, qui ne parlait pas du tout et qui avait très peu de mouvements même physiques et qui avait, hop, été cueillir des groseilles dans le jardin et puis qui me les avait apportées.
08:59C'est une forme de communication, bien sûr.
09:00Dans la palette d'essence à disposition dans un jardin, l'odorat est l'un des outils les plus précieux.
09:13Souvent, les personnes ont du mal à sortir certains mots alors qu'elles savent bien ce qu'elles veulent dire.
09:19Et c'est là, effectivement, aussi le rôle de cette sensorialité.
09:22Car on se rend compte qu'une personne qui va contempler une rose, regarder sa couleur et humer son parfum va pouvoir, tout d'un coup, nous faire la belle surprise de dire, oh, une rose.
09:32Alors que le travail, par exemple, de l'orthophoniste dans le bureau sur une image ne va pas permettre, quelquefois, la production du mot.
09:39Vous avez senti ?
09:42Sont bon la rose, hein ?
09:46Les parois internes de nos narines sont directement reliées à une partie du cerveau dédiée aux souvenirs et programmée depuis la nuit des temps pour nous garder en alerte.
09:56Les odeurs ont une particularité qui est qu'il y a un lien direct avec une partie du cerveau qui joue un rôle très important dans les émotions et dans la mémoire.
10:05On a une sorte de, dans le nez, une sorte de petit tapis de neurones qui sont pratiquement à l'air libre.
10:12On a une partie du cerveau, d'une certaine manière, qui est directement en contact avec l'air quand on respire.
10:16Vous avez, par l'odeur, en fait, une sorte de connexion directe avec certains souvenirs en partie de l'enfance.
10:27Les odeurs sont effectivement extrêmement puissantes pour évoquer des souvenirs et pour rendre la mémoire plus vivace.
10:33Les recherches sur l'impact de la nature sur notre cerveau ne cessent de se multiplier ces dernières années.
10:48Mais l'une des premières études édifiantes a été publiée en 1984 par un des pionniers du domaine, le psychologue américain Roger Ulrich.
10:58Pour la petite histoire, Roger Ulrich était, en tant qu'enfant, a souffert d'une grave maladie rénale qu'il a obligé à rester au lit, à l'hôpital, pendant des longues semaines.
11:10Et il s'est aperçu, en fait, que la vue d'un arbre qu'il avait par sa fenêtre l'a beaucoup aidé dans sa rémission, dans sa guérison.
11:21Devenu psychologue, Roger Ulrich a l'intuition que ce souvenir d'enfance mérite d'être approfondi.
11:27Il lance une étude dans un service de chirurgie digestive.
11:32Les patients ayant subi une ablation de la vésicule biliaire.
11:37A l'époque, il s'agit d'une opération aux conséquences post-opératoires longues et douloureuses.
11:42Ce service avait un côté du couloir, dont les chambres donnaient sur un mur de briques, et l'autre côté sur la nature.
11:51Et il a eu cette idée simple, mais tout à fait novatrice, de comparer les personnes dans les deux parties du couloir.
11:57Il s'est aperçu que les patients qui avaient une vue verte, qui avaient une vue sur un espace naturel, se rétablissaient plus vite, avaient besoin de moins d'antidouleurs.
12:21Appelaient moins les infirmières, consommaient moins d'antalgiques lorsqu'elles avaient vue sur la nature, mais aussi que leur durée d'hospitalisation, et ça c'est une donnée objective très robuste, était plus courte d'un peu plus d'une journée.
12:32Et donc là, on voit quelque chose de très tangible sur le bienfait de la simple vue de la nature, et là ça nous montre aussi l'intérêt médico-économique,
12:43car bien sûr, dans notre période pas toujours très facile sur le plan économique, dans les hôpitaux, il faut qu'on puisse argumenter vis-à-vis d'un directeur,
12:51justement, l'intérêt d'investir dans un espace vert pour le transformer en jardin thérapeutique.
12:56Dans ce même souci d'efficacité, l'équipe a pu démontrer que, si la déambulation dans le jardin a rétabli un peu de confiance et de conscience de soi,
13:09elle impacte aussi le sommeil, et pas uniquement au seul bénéfice des patients.
13:13On a comparé des personnes qui allaient dans le jardin à celles qui n'y allaient pas, et donc on a remarqué que les personnes qui étaient allées dans le jardin,
13:19par exemple, pendant la période de l'étude, il n'y en a pas eu une seule qui a présenté d'agitation dans la nuit.
13:24Alors ça, ça peut paraître peut-être minime, mais ça ne l'est pas du tout pour une EHPAD où il y a très peu de soignants la nuit,
13:32et où un seul agité va rendre les soins extrêmement difficiles pour tous les autres,
13:37et donc si on imagine effectivement que passer ne serait-ce que 20 à 30 minutes dans le jardin
13:43permet d'éviter ces comportements nocturnes perturbateurs, c'est extrêmement précieux.
13:54L'équipe dirige des études non seulement sur les patients, mais aussi sur les soignants,
14:02dont l'une est directement liée au burn-out professionnel,
14:06ou comment le jardin influence la santé mentale des soignants.
14:09On fait passer ces tests avant et après la pause des soignants.
14:20Soit ils font leur pause dans le jardin, soit dans la salle de soins,
14:23et on remesure ensuite les mêmes capacités attentionnelles
14:27pour savoir s'ils ont une meilleure récupération attentionnelle dans le jardin
14:30ou que lorsqu'ils sont dans leur salle de soins.
14:33Il faut savoir qu'on n'a pas le droit de sortir du service.
14:48C'est 12h de présence, 7h, 19h non-stop.
14:51On fait 2 voire 3 jours de travail d'affilée, donc c'est difficile.
14:56Et ce jardin, en fait, c'est une bulle d'oxygène pour nous,
14:59et heureusement qu'il est là, heureusement qu'il est là.
15:03En France, 67% des soignants sont exposés à un risque de burn-out
15:11ou syndrome d'épuisement professionnel.
15:14Alors, M. Malou, je vous apporte le plan chaud.
15:18Bien arrivé.
15:21C'est des patients qui peuvent être agressifs, verbalement,
15:24qui peuvent être agressifs physiquement.
15:26Donc c'est ça la difficulté du service, c'est savoir gérer l'agressivité et le refus.
15:31Alors, M. Jeanne, je vous apporte la suite du plateau.
15:34Donc il faut avoir une certaine position vis-à-vis de ces patients.
15:38Il faut faire attention à la façon dont on les regarde, la façon dont on leur parle.
15:42On a une pratique qui est complètement différente d'un soin normal, en fait.
15:49Sabrina Pillet fait référence au niveau d'attention et de concentration soutenus
15:53requises dans l'exercice de sa profession.
15:57Cette charge mentale peut amener à un épuisement des fonctions cognitives essentielles.
16:03Ces dernières années, les recherches en neurosciences ont progressé
16:07dans le décryptage des mécanismes cérébraux de l'attention.
16:09Lorsque vous êtes attentif à quelque chose, c'est une activité très énergivore pour
16:17le cerveau qui demande beaucoup de glucose.
16:19Ça associe ce qu'on appelle les fonctions exécutives.
16:22Donc c'est ce qui vous permet de vous focaliser et de faire une sorte de filtre
16:27et qui permet un peu d'oublier d'autres éléments autour de soi.
16:32Au-delà de 20 minutes, souvent on ne peut pas se concentrer sur une tâche.
16:36Il faut s'arrêter, il faut faire des pauses.
17:02Le fait de rien faire, le fait de rêvasser, ce sont des moments très importants
17:06pour chaque être humain, pour régénérer ce nombre de fonctions cérébrales.
17:13Un mieux-être général pour les patients, leurs familles, les soignants.
17:19Moins de sédatifs, moins d'anxiolithiques.
17:22Il est légitime de se poser la question de l'intérêt de ce genre d'investissement
17:27qui rayonne également bien au-delà de l'enceinte.
17:30Ce jardin de 4000 m2, c'est un véritable foyer et un poumon de biodiversité dans le cœur de Nancy.
17:38Et par là même, il rayonne au-delà de son rôle initial qui était pour les patients, les visiteurs et les soignants,
17:45mais sur tout le quartier.
17:46Donc l'hôpital joue par là un rôle de prévention, mais aussi de leader en termes de santé environnementale dans la ville.
17:53On ne dira jamais assez que créer des sanctuaires en ville est un enjeu de santé publique essentiel.
18:03Dans un espace de vie bétonné, les troubles de l'humeur sont 30 à 40% plus élevés que dans un environnement végétalisé.
18:12Notre cerveau a besoin de sa dose quotidienne de nature pour réguler stress et anxiété.
18:17Nous sommes nombreux à l'avoir éprouvé, mais que se passe-t-il dans notre corps et comment cela fonctionne ?
18:47Notre cerveau est un organe paradoxal.
18:58Nous ne le sentons pas travailler, à l'inverse par exemple de notre cœur ou de notre estomac.
19:04Battements ou gargouillis ne font pas partie de la panoplie.
19:08C'est pourtant notre cerveau qui régit l'ensemble.
19:11Et il n'est pas que dans la boîte crânienne.
19:13Il se déroule de la tête aux pieds, comme de grandes racines qui innervent l'ensemble du corps, le système nerveux.
19:26Ce système marche de manière autonome et régule automatiquement les fonctions vitales de notre organisme.
19:33Comme un grand arbre intérieur, il possède deux grandes branches qui fonctionnent en alternance.
19:43Vous avez d'un côté ce qu'on appelle le système sympathique, qui est une sorte de système qui est un accélérateur physiologique.
19:51Ça réagit au stress, ça prépare le corps à l'action.
19:55Et donc ça sécrète un certain nombre d'hormones, de neurotransmetteurs qui sont associés au stress,
20:00comme le cortisol, la neuroadrénaline ou l'adrénaline.
20:04A l'inverse, lorsque vous vous reposez en situation de calme, c'est un autre système qui se met en place,
20:10ce qu'on appelle le système parasympathique.
20:12Et le système parasympathique, c'est ce qui permet à l'ensemble de l'organisme de se régénérer,
20:17au cœur, à la respiration, à la digestion, de retrouver d'une certaine manière un niveau de base.
20:22Et donc ces deux systèmes fonctionnent un peu en alternance, un peu comme un accélérateur et puis un frein d'une voiture.
20:29Lorsque l'un est actif, l'autre ne l'est pas.
20:30Donc c'est un équilibre très important à trouver entre le système sympathique et le système parasympathique.
20:45Quand le système sympathique est trop sollicité, quand le stress devient chronique, un cercle vicieux s'installe.
20:52La production de cortisol, hormone régulatrice en chef de notre système immunitaire, s'emballe.
20:58Elle désorganise l'action de ses hormones associées jusqu'à les rendre nocives.
21:04Le cerveau qui dirige le tout devient fragilisé à son tour.
21:08Notre immunité s'en ressent et c'est la porte ouverte aux problèmes de santé.
21:12L'antidote et ses perturbations métaboliques des grandes villes, c'est par exemple la nature.
21:22C'est-à-dire de faire des promenades dans la nature, d'aller dans la forêt ou de passer du temps dans les jardins.
21:28Ça permet à ce système parasympathique de nouveau d'être actif.
21:32On se relaxe.
21:33Ça permet de respirer plus profondément.
21:34Et ça permet de retrouver un équilibre de ce système nerveux autonome qui permet d'être en bonne santé.
21:47Les effets thérapeutiques du jardin ont inspiré un pionnier de la réinsertion sociale et professionnelle.
21:54Dès 1991, un éducateur de Besançon, Jean-Guy Henkel, créait une exploitation maraîchère associative,
22:02les jardins de cocagne.
22:04Le concept allie agriculture biologique, distribution en circuit court
22:12et surtout insertion par le travail de personnes en situation précaire.
22:17Il parie sur une idée simple.
22:20La reconnexion à la terre comme aide précieuse à la reconstruction psychosociale
22:24de personnes brisées par la vie ou éloignées de l'emploi.
22:29Aujourd'hui, le réseau compte une centaine d'exploitations.
22:34Frédéric Fénaud dirige le jardin de Tahon-les-Vosges et ses 60 salariés,
22:40dont 40 à 45 personnes en contrat d'insertion, encadrés par des professionnels.
22:45Au départ, très peu se dirige sur les jardins en se disant « j'ai envie de travailler dans
22:53le maraîchage ». Pour certaines personnes, ça peut être difficile d'accepter, de se dire
22:58« il faut se rabaisser au niveau de la terre ». Mais au fur et à mesure, on s'aperçoit
23:04quand même que ces personnes apprécient être dans un environnement en lien avec la nature
23:11et puis les éléments.
23:16Les trois premières semaines, c'était un peu difficile.
23:18Mais là, je me sens bien, épanoui en plus.
23:22Je reviens chez moi, j'ai le sourire.
23:24Des fois, un peu fatigué forcément.
23:25Mais parce qu'il ne faut pas croire, on bosse quand même.
23:27Il y a quand même pas mal de boulot.
23:34L'objectif de cette mise au verre n'est pas que les salariés deviennent maraîchers.
23:39Le but est qu'ils bénéficient de la reconnexion avec le vivant.
23:43Mais pas toujours facile avec les méthodes de l'agriculture biologique,
23:47qui demandent pas mal d'humilité et beaucoup d'efforts.
23:57Ça va, là ?
24:01Ça va, c'est propre.
24:02C'est propre, Jérémy ?
24:04Ben oui.
24:05Ouh, Jérémy !
24:07Ouh, tu vois, j'arrive et tu l'avoues.
24:11C'est quand même bizarre, ça.
24:13Non, c'est pas mal.
24:14Mais concentrez-vous, tu vois celle-ci, là ?
24:16Oui.
24:17Tu vois, je préfère que vous passiez un petit peu plus de temps
24:19et qu'on n'y revienne pas à la main.
24:22Cette année, avec les températures et l'humidité,
24:25puisque nous, on arrose,
24:26on évite dépasser, en fait.
24:29Ce qui fait que les mauvaises herbes, comme celle-ci, là,
24:31donc ça, ça s'appelle de la panique,
24:34ça ne s'invente pas,
24:36qui peut vous envahir, en fait, la ligne de carottes.
24:41En bio, ce qu'on explique aux salariés,
24:45c'est que si on n'intervient pas,
24:46puisqu'on n'a pas le droit au désherbant chimique,
24:50ben, en fait, on n'a pas de carottes.
24:52Même si le désherbage peut paraître lassant,
24:57l'exercice ne rebute pourtant pas tout le monde.
25:00On n'est pas enfermés.
25:04On n'est pas entre quatre murs,
25:06on a un paysage aussi.
25:08Et là, t'entends les oiseaux, t'entends le vent,
25:10les arbres qui font un peu de bruit et tout.
25:13C'est trop bien de désherber.
25:15Comme un boxeur.
25:17Un boxeur, il va boxer son truc et désherber.
25:20Par exemple, vous êtes énervés, vous faites toute la lait.
25:22Tellement que vous allez vider votre énervement dans un truc
25:25sans vous énerver sur les gens.
25:26Et même le fait d'avoir ce rapport avec la Terre,
25:30ça te permet d'enlever ta colère, ton énervement, ça t'apaise.
25:36C'est comme moi, à la fin de la journée,
25:38vous savez pourquoi vous êtes fatigués.
25:42Et puis, ben ouais, le soleil et la vitamine D aussi.
25:44Elodie ne croit pas si bien dire.
25:52La lumière du jour nous est indispensable.
25:54Depuis des millénaires,
25:56notre cerveau suit le rythme de notre horloge interne,
25:59appelée horloge circadienne,
26:01calée sur le cycle du soleil.
26:06Vous avez en fait dans la rétine
26:07les photorécepteurs qui jouent un rôle
26:09qui n'est pas directement lié à la vision.
26:12C'est un rôle qui est d'influencer
26:13notre horloge circadienne.
26:14L'horloge circadienne, c'est un tout petit groupe
26:19d'environ 10 000 cellules
26:20que vous avez dans votre cerveau
26:22qui régule l'ensemble des fonctions vitales
26:25sur un rythme de 24 heures.
26:26Elle est très précise,
26:28mais par contre, elle est obligée de se recaler
26:29de cette manière la lumière du jour
26:30et en partie la lumière du matin.
26:36Le sursaut d'énergie que nous pouvons ressentir
26:39devant un rayon de soleil matinal
26:41n'est pas seulement poétique.
26:43Ce sont les effets de la lumière
26:45sur la chimie du cerveau
26:46activés grâce à nos yeux.
26:485 % des cellules de la rétine
26:51ne transmettent pas d'image au cerveau,
26:54mais transmettent des informations lumineuses
26:56pour l'aider à se synchroniser.
26:58La lumière bleue du matin est connue
27:02pour être extrêmement stimulante
27:03et ça, c'est probablement lié
27:05à la présence de la mélanopsine,
27:07qui est un pigment que vous avez dans votre rétine
27:09et qui est sensible au gamme du bleu.
27:11Et donc, c'est très important, effectivement,
27:12de sortir dehors,
27:14par exemple, de travailler dans un jardin
27:15pour profiter de la lumière du jour
27:17et de remettre en phase un tout petit peu
27:19cette horloge circadienne
27:21qui est très importante dans notre santé.
27:23Quand on se sent éparpillé mentalement,
27:30retrouver le rythme des saisons
27:31et le cycle des plantes réconforte.
27:35Un diplôme de costumière en poche,
27:37Fanny travaille comme brodeuse
27:39pendant quelques années
27:40jusqu'à ce qu'elle ressente le besoin
27:42de remettre les pendules à l'heure.
27:43J'aime beaucoup, chez moi, je brode.
27:48Mais d'être enfermée tout le temps,
27:50ça ne me convenait plus.
27:52Moi qui suis très,
27:53toujours enfermée dans ma tête,
27:55j'ai besoin de respirer.
27:57Ça a plus de sens, au final,
27:59de mon travail avant.
28:01Tout ce que j'ai fait avant,
28:02je n'ai trouvé plus de sens.
28:03Ça paraît juste parfaite,
28:05faire les choses parfaitement.
28:07Et là, en fait, c'est juste normal
28:09de planter, de récolter.
28:11C'est la vie, quoi.
28:13Respecter, je ne sais pas,
28:15le temps de croissance, par exemple,
28:16d'une plante.
28:18Ou même, déjà, suivre la météo
28:19quand on doit récolter certaines choses.
28:22C'est ça que j'avais besoin de retrouver.
28:25Et là, ça fait du bien
28:26de suivre la nature
28:29et de se dire,
28:30en fait, là, ce n'est pas moi
28:31qui commande, quoi.
28:36Je suis plus douce avec moi-même, du coup.
28:39Et j'arrive plus à revenir
28:42dans mes gaudaces,
28:45à me poser,
28:47à être au calme dans ma tête.
28:48Quand j'étais un petit peu post-traumatique,
29:11quand j'étais petite,
29:12j'ai besoin de la sécurité.
29:12La nature, ça me ressource.
29:17Quand je suis stressée,
29:20ça m'apaise,
29:21ça me soulage un coup,
29:23ça me fait du bien, quoi.
29:25Le décès prématuré de sa mère
29:27a provoqué chez Thérèse
29:29un profond traumatisme d'enfance
29:31qu'elle a peu à peu surmonté
29:32par un lien particulier au jardin
29:34et à la cuisine.
29:36J'aime bien les odeurs,
29:41le goût, tout ça.
29:43C'est grâce à elle
29:44que j'aime bien les légumes.
29:46C'est bien au toucher,
29:47c'est très doux,
29:49c'est délicat,
29:50le goût, il est super bon.
29:54C'est grâce à maman
29:55parce qu'elle m'a appris
29:55comment faire les légumes,
29:57les cuire.
29:58Avec elle, j'ai fait des recettes.
29:59Je lis les recettes
30:00que j'ai avec elle
30:02pour avoir des souvenirs.
30:09Sur les 12 hectares de jardin,
30:11les salariés en insertion
30:12préparent chaque semaine
30:13plus de 900 paniers de légumes bio
30:15pour des consommateurs adhérents.
30:24On va faire un premier passage
30:27avec du gros calibre.
30:29Si on n'a pas assez du gros calibre,
30:30on fera des caisses
30:32de petit calibre
30:33et on verra
30:34si au panier
30:36ils compensent
30:37par autre chose
30:37ou si on met deux pièces.
30:39D'accord ?
30:39Dis-moi, Yann,
30:53est-ce que tu aimes la salade ?
30:54J'adore.
30:57J'ai une spécialité,
30:59enfin une spécialité,
30:59c'est un peu de chez nous aussi.
31:00C'est ça,
31:01c'est un peu de chez nous.
31:09Un parcours de vie
31:10profondément bousculé
31:11et Yann plonge dans l'alcool,
31:13prend du poids,
31:14quitte son emploi
31:15dans une entreprise
31:16de paysagisme.
31:18Aujourd'hui reconstruit,
31:19il reprend goût
31:20à une vie plus saine
31:21et équilibrée
31:22et ça passe aussi
31:23par l'alimentation.
31:24on fait toujours un truc rapide
31:28parce qu'on n'a pas vraiment
31:28le temps,
31:29on a tendance à manger
31:30beaucoup des chips,
31:31des trucs comme ça.
31:32Tout ça,
31:32j'ai arrêté,
31:33même le soda.
31:33J'ai dû perdre 9 kilos
31:38depuis que je suis ici,
31:39c'est-à-dire en deux mois.
31:44Deux coups,
31:44j'avais fait des brocolis
31:45avec Manuel,
31:46un encadrant
31:46et du coup,
31:48j'en ai ramené chez moi.
31:50Mais nous,
31:50ce qu'on faisait,
31:51on l'achetait plutôt
31:51en surgelé
31:52et du coup,
31:54le fait de faire
31:54de la cuisine
31:55avec des bons produits,
31:56ça fait plaisir.
31:57Et c'est vraiment bon.
31:59Le fenouil concombre,
32:01c'est bon,
32:02tout vert,
32:04le rote,
32:04c'est bon,
32:05le pack-soil.
32:07Les jardins de cocagne
32:08ont une mission secondaire
32:10moins évidente
32:11mais tout aussi efficace
32:12en termes de prévention
32:13et de protection
32:14de la santé.
32:16Celle de l'éducation
32:17à l'alimentation
32:18qui passe par la consommation
32:20de légumes frais,
32:21bio et diversifiés
32:22si possible.
32:24Si les salariés
32:25ont la satisfaction
32:26de participer
32:27à la production
32:28de produits vertueux
32:29pour des consommateurs militants,
32:31ils en bénéficient
32:32aussi directement.
32:40Ici,
32:40on fait deux jours
32:41avec de la viande
32:43et trois jours
32:43avec que des légumes.
32:44Et donc,
32:44on est obligé
32:45de remplacer
32:46la viande
32:47par quelque chose
32:49qui tient encore.
32:50Après,
32:50les gens vont travailler
32:50toute la journée
32:51dans les jardins
32:52il faut de l'énergie.
32:55Et de l'énergie,
32:56le corps en a besoin
32:57mais le cerveau aussi.
32:59Il puise entre autres
33:00un bon sucre contenu
33:02dans les légumes,
33:03le glucose,
33:04dont il est gros consommateur
33:06pour régénérer
33:07ses cellules nerveuses.
33:08J'ai Fana qui nous fait
33:10des tartes aux légumes
33:11à midi
33:11avec des légumes
33:12du jardin.
33:13Il y aura du brocoli,
33:14il y aura de la courgette,
33:15il y aura des poireaux,
33:16il y aura des oignons,
33:18il y aura du rutabaga,
33:19de la carotte.
33:24Depuis que je travaille ici,
33:26j'ai pu goûter du pané
33:27que je n'ai jamais eu l'idée
33:28d'acheter un magasin,
33:29de la rutabaga.
33:31Ici,
33:31on mange vraiment
33:32ce qu'on produit,
33:33ce que les jardins produisent,
33:35on va le manger,
33:36on a un très bon cuisinier en plus.
33:38Ici,
33:39vous avez l'opportunité
33:40de goûter,
33:41de pouvoir trouver des recettes.
33:42Je ne sais pas,
33:43le pané par exemple,
33:44je l'ai fait en version
33:45un peu gratin dauphinois.
33:47Bon appétit.
33:49Donc au niveau de l'alimentation,
33:51non,
33:51c'est vrai qu'on peut manger très bien,
33:53on est en équilibre en fin de compte.
33:55De tout ce qu'apportent les jardins,
33:57c'est un équilibre alimentaire
33:58qu'on ne trouve pas ailleurs.
34:05Ici,
34:05en plus du maraîchage,
34:07vient se greffer
34:07une activité d'éducation
34:09à l'environnement.
34:14Maxime en est le coordinateur.
34:16Il reçoit des groupes
34:17au jardin,
34:18mais ce qu'il préfère,
34:19c'est le travail au long cours,
34:20engagé avec un collège d'épinal,
34:22où il est toujours très attendu.
34:27On forme vraiment
34:28les futurs citoyens,
34:29on les éveille sur des problématiques
34:31comme l'alimentation,
34:33la gestion des déchets,
34:34comment on mange,
34:35etc.
34:35Qu'est-ce que la culture biologique ?
34:39La plupart des enfants,
34:40ils savent qu'il faut mettre
34:41une graine de l'eau,
34:41mais ils ne savent pas
34:42que derrière,
34:42il y a tout un suivi,
34:43qu'il y a plusieurs étapes,
34:44etc.
34:44Donc ça,
34:45c'est important,
34:47en tant que citoyen,
34:48de savoir comment on se nourrit.
34:49On ne sait pas
34:50le travail que ça demande,
34:51finalement.
34:51On y va ?
34:58Le mercredi,
35:01les ados ont le choix
35:02entre football,
35:03ping-pong
35:04ou potager.
35:04On aurait bien voulu avoir
35:08des froids au poisier.
35:10Ouah, regardez !
35:11Ah, mais là,
35:12c'est impressionnant !
35:13Faxine,
35:14c'est quoi déjà, ça ?
35:15On va demander.
35:16Allez,
35:16on se fait un petit jeu
35:17d'identification.
35:18C'est quoi, ça ?
35:20Des piments ?
35:21Non.
35:21Des poivrons ?
35:22Non.
35:24Des coquins ?
35:24Non, c'est la même.
35:25Des congettes.
35:26Très bien.
35:27Et le dernier,
35:28celui qu'on a mis
35:28la dernière fois,
35:29vous vous souvenez, ça ?
35:29C'est moi qui l'avais planté,
35:31mais je ne m'en rappelle plus.
35:32Ah !
35:33Artichaut !
35:34Parfait !
35:35Il y a le truc au milieu
35:35de la tomate qui a poussé.
35:37Eh, super !
35:37Ça s'appelle comment,
35:38ce qu'on a enlevé la dernière fois ?
35:39Je crois que je sais !
35:40Vas-y !
35:40Allez, euh...
35:43Je ne sais plus...
35:45Des gourmands !
35:46Des gourmands, très bien !
35:47Qui se souvient
35:48de pourquoi on enlève les gourmands ?
35:49Moi, je sais,
35:50pour que la sève,
35:51elle passe mal.
35:51Oui, c'est ce qu'on avait dit,
35:53pour éviter que la...
35:53Vas-y !
35:54Ça coupe là,
35:55et donc quand on les enlève,
35:56la sève, elle...
35:57Ouais, au lieu d'aller là,
35:58de dépenser de l'énergie
35:59pour refaire de la branche,
36:01elle va dépenser son énergie
36:02pour faire des fruits
36:02et aller là où elle a déjà
36:04des branches.
36:10C'est peut-être un peu
36:11stéréotype ce que je veux dire,
36:13mais il y a quand même
36:14un rapport un peu charnel
36:15à la terre.
36:16On voit tout de suite
36:16les gens, dès qu'ils commencent
36:17à manipuler la terre,
36:18il y a tout de suite
36:19quelque chose qui se crée
36:20une petite magie
36:21et qui opère
36:22chez tout le monde, finalement.
36:26Cette petite magie
36:32existe bel et bien.
36:35Le professeur Christopher Lowy,
36:37neurobiologiste britannique,
36:39a démontré scientifiquement
36:40l'effet relaxant
36:42du simple contact
36:43rapproché avec le sol.
36:50Cet effet un peu euphorisant
36:52est lié à la présence
36:53d'une bactérie bénéfique
36:55qui existe dans les sols.
36:57Cette bactérie,
36:58on peut la respirer
36:59ou on l'avale
37:00et cette bactérie
37:01s'intègre à ce petit zoo
37:02que vous avez dans votre estomac,
37:04dans votre intestin,
37:05qu'on appelle notre microbiote.
37:09Et ce que Christophe Avlevry
37:10a montré, c'est que
37:11lorsque cette bactérie
37:12qu'on trouve dans les sols
37:13s'intègre à notre microbiote,
37:14notre cerveau
37:16sécrète la sérotonine.
37:18De la sérotonine,
37:19c'est un neurotransmitter
37:20très important
37:21qui a un effet
37:21très fort antidépresseur.
37:25Le contact avec le sol
37:28par le biais
37:29de cette bactérie
37:30fait que notre estomac
37:31communique avec notre cerveau
37:32et facilite
37:33la sécrétion
37:34de la sérotonine.
37:43Cette petite colonie
37:44de bactéries
37:45qu'on a dans notre estomac
37:47joue un rôle
37:47vraiment très important
37:48dans notre santé.
37:51Il ne faut pas oublier
37:52que c'est un organe
37:52supplémentaire,
37:53c'est-à-dire que c'est
37:54composé de 50 000 milliards
37:56de bactéries et de virus
37:57et c'est à peu près
37:58autant de cellules
37:58qu'on a dans notre corps.
38:00Et donc, finalement,
38:02on est un peu des symbiotes
38:03dans lesquels on est
38:04mi-humain, mi-microbe,
38:06vous voyez.
38:06Donc ça, c'est très important
38:08de comprendre
38:09que finalement,
38:11la vie est en fait
38:13issue d'une sorte
38:14de continuité biologique
38:15qui va bien au-delà
38:16de notre propre corps.
38:17Dans notre monde urbain
38:26contemporain,
38:27cette continuité biologique
38:28indispensable
38:29au développement harmonieux
38:31des enfants
38:31est trop souvent
38:32mise à mal.
38:34Un syndrome a même
38:35été identifié
38:36par Richard Louvre,
38:37spécialiste de l'enfance.
38:39Le syndrome
38:40du manque de nature.
38:44Le risque de développer
38:46une maladie mentale
38:46à l'adolescence
38:47ou à l'âge adulte
38:49décroît en proportion
38:50du temps passé
38:51dans un cadre de verdure
38:52dans l'enfance.
38:56Le cerveau grandit mieux
38:58auprès de la nature
38:59et l'école publique
39:00a un rôle majeur à jouer.
39:02Ce sont les enfants
39:03des milieux défavorisés
39:05qui, avec l'urbanisation
39:06galopante,
39:08voient se restreindre
39:09ce lien
39:09avec le monde naturel.
39:12Lucas est venu
39:13avec une fleur en main.
39:16Regardez comme elle est jolie.
39:19Alors Lucas, explique-nous,
39:20tu la trouvais où cette fleur ?
39:21Je passais devant l'école.
39:23Ah d'accord,
39:24elle était devant l'école.
39:26Ok.
39:26Donc on est bien d'accord
39:27que c'est une fleur
39:28qui vient de la ville.
39:31Puisqu'on est dans la ville.
39:34Eh bien oui, effectivement.
39:35Et si vous regardez bien
39:36autour de vous,
39:36il y a plein, plein, plein
39:37de plantes dans la ville.
39:38Aussi, pas que au jardin.
39:40Alors regardez,
39:41elle est très, très intéressante
39:42parce qu'il y a plein, plein
39:43de toutes petites fleurs.
39:45Ça, les enfants,
39:46ça s'appelle une ombelle.
39:48C'est une fleur
39:48de carottes sauvages.
39:49Alors ça, c'est fou, ça !
39:51Il y a des carottes
39:51qui poussent en ville.
39:54C'est incroyable.
39:55Vous savez qu'il y a aussi
39:56des carottes qui poussent
39:56au jardin ?
39:57Oui.
39:59On va essayer
39:59de les trouver tout à l'heure.
40:01Et quand on la regarde,
40:01comme ça, les enfants,
40:02on dirait vraiment
40:03une œuvre d'art.
40:06C'est beau, hein ?
40:07Vous ne trouvez pas ?
40:08Oui.
40:09Alors les enfants,
40:09vous êtes prêts
40:09à aller au jardin ?
40:10Oui.
40:11Ouais ?
40:11On y va ?
40:13Voilà, vous allez à droite.
40:20On se met derrière
40:20le chariot, les loulous ?
40:21En formation route ?
40:24Marie-Estelle,
40:25soutenue par sa hiérarchie,
40:27décide en septembre 2021
40:29de faire classe hors les murs.
40:31Ça use !
40:33Ça use !
40:34Ça use les souliers !
40:38Chaque semaine
40:39et par tous les temps,
40:41les enfants prennent
40:42le chemin de l'école buissonnière
40:43et l'aventure commence
40:45au coin du trottoir.
40:52Regardez les loulous.
40:53Là, nous avons des murmures.
40:55C'est drôle, ça, ce mot.
40:57Murmures.
40:58On en avait parlé
40:58la dernière fois.
40:59Des murmures.
41:01C'est le même mot,
41:01mais ça ne veut pas dire
41:02la même chose.
41:03Oh, mais ça,
41:03tu connais, ça.
41:05Ça, c'est une super plante, ça.
41:06Bon, là, elle est un petit peu sale
41:07parce qu'elle est au bord de la route.
41:08Vous connaissez cette plante-là ?
41:10Ah oui, c'est le plantain.
41:11C'est le plantain.
41:12Pourquoi on aime bien le plantain, nous ?
41:14Ça guérit des piqûres d'ortie.
41:18Exactement.
41:20Allez-y, les loulous.
41:21Ça commence, ça.
41:22Dans mon projet,
41:23il y a un petit peu un acte militant
41:24parce que j'avais vraiment envie
41:26de faire découvrir aux enfants
41:27ce que c'était que la nature,
41:29le côté merveilleux de la nature
41:30pour pouvoir mieux en parler
41:32et puis pour qu'eux s'en imprègnent
41:35et plus envie de la protéger
41:37qui est pour eux quelque chose
41:39de clair et de sensé.
41:40Je fais ça parce que j'ai besoin
41:42des plantes,
41:43j'ai besoin de la nature
41:44pour être bien.
41:46Oh, oh !
41:48Viens, Fatima.
41:49Ok, c'est bon.
41:53Viens, Lucas.
41:55Ouais, ça ressemble
41:56à ce que tu as apporté, Lucas.
41:58Pour être sûr de ce que vous cueillez,
42:00il faut voir toute la plante.
42:02D'accord ?
42:03Il se trouve que la fleur de carotte,
42:06elle ressemble à une autre fleur
42:07qui est empoisonnée.
42:10Donc, il faut vraiment se méfier,
42:11les enfants, quand vous cueillez.
42:13Alors là, on sait que c'est de la carotte
42:14parce que ce sont les jardiniers
42:15qui l'ont plantée
42:16et on le sait aussi parce qu'on voit tout.
42:19Regarde-la bien, elle est superbe.
42:21T'avoue, toutes ces petites fleurs,
42:22elles sont trop belles.
42:25Quand j'en ai parlé à mes élèves
42:27en tout début d'année,
42:28ils ont été un peu apeurés.
42:29Ah non, mais il y a des petites bêtes.
42:32Oh non, je n'ai pas envie de marcher.
42:34Oh non, qu'est-ce qu'on va faire ?
42:35On va s'ennuyer.
42:36Il y a plein de trucs dans les béboules.
42:38Il y en a une ici.
42:39Une ici.
42:40Oui, mais...
42:40Et très, très rapidement,
42:42j'ai observé que lorsque mardi approchait,
42:44le matin, les enfants étaient ravis.
42:46C'est quelque chose d'important pour eux.
42:48Quand on n'y va pas,
42:48ils sont vraiment déçus.
42:51Alors regarde, je ne sais pas si tu as vu là,
42:52mais là, il y en a qui se sont accrochés.
42:54T'as vu ?
42:55Avant, il y avait une libellule qui vivait,
42:58mais maintenant, comme elle s'est enroulée,
43:00elle a séché, il n'y a plus rien dedans.
43:02Il n'y a plus aucun être vivant.
43:04On a vécu plein de choses cette année au Jardin Partagé,
43:16les enfants.
43:17Est-ce que vous avez apprécié aller au Jardin Partagé ?
43:18Vous avez le droit de dire non, hein ?
43:20Ah, Sia, au jardin, qu'est-ce qui te plaît ?
43:22Il y a quelque chose qui te plaît énormément.
43:23Les abeilles,
43:26les arbres,
43:30et j'aime aussi manger les fruits.
43:32Moi, mon plaisir, c'est d'aller dans la nature libérée de l'école.
43:39Ça me libère de...
43:41Parce que l'école, c'est...
43:42C'est trop chaud.
43:44C'est enfermé.
43:45Et alors qu'au Jardin, on est tout libéré, libéré, libéré,
43:51et en pleine nature, en plus.
43:53C'est comme s'il y avait une forêt au milieu de la ville.
43:56C'est trop bien.
43:58L'année du CP est une année d'apprentissage décisive.
44:02Pour Marie-Estelle, pratiquer cette école du dehors
44:05n'a donc pas été une décision facile à prendre.
44:08Mais le résultat est là.
44:09Eh bien, le soleil,
44:12les feuilles.
44:13Le jardin est une transversalité, en fait.
44:16On a pu faire des maths, on a pu faire du français.
44:19Donc, finalement, le pari est gagné
44:20parce que je n'ai pas perdu de temps.
44:22Ce qui me faisait peur beaucoup au début.
44:26Fatima, regarde, ce sont des framboises.
44:28Une belle framboise.
44:29On en a mangé ?
44:30La graine.
44:31J'en prends une cuve à laquelle ?
44:33Attends, là-bas, il y en a une belle.
44:36Sinon, je n'en ai plus.
44:38Et les enfants, si on allait goûter des groseilles ?
44:40Moi, je n'aime pas les groseilles.
44:42Par rapport aux années précédentes,
44:46j'ai l'impression qu'ils sont plus attentifs aux copains.
44:49Plus attentifs à ce que le copain peut amener,
44:51peut apporter, peut dire.
44:53J'ai l'impression aussi qu'ils ont cette appétence,
44:57ils ont acquis cette appétence et cette curiosité
44:59qui est de toute façon nécessaire
45:00dans tous les apprentissages qu'on fait.
45:02Ce côté observateur aussi.
45:04Tout comme la nature résonne en nous,
45:10elle nous aide à mieux raisonner.
45:13Des chercheurs espagnols l'ont mis en évidence
45:15en analysant les déplacements d'un groupe d'enfants
45:18entre 7 et 10 ans.
45:20Les chercheurs ont regardé la dose de la nature
45:23auxquelles ont été exposés les enfants.
45:25Et ils sont aperçus que les enfants
45:27qui étaient les plus exposés à la nature
45:28étaient aussi ceux qui avaient la meilleure mémoire de travail.
45:30Donc cette capacité que vous avez
45:33de maintenir ce nombre d'éléments en tête,
45:37de les manipuler aussi mentalement,
45:38c'est la base de ce qu'on appelle les fonctions exécutives.
45:41C'est ce qui vous permet de focaliser sur des éléments,
45:45d'en oublier d'autres.
45:46Donc c'est une fonction vraiment très importante
45:48pour les apprentissages.
45:53Grâce à la voie ouverte par Marie-Estelle,
45:56deux institutrices du groupe scolaire Mermoz
45:58ont rejoint le dispositif
46:00à la rentrée suivante.
46:03Une chance pour ces anciens élèves
46:05passés en classe de CE1
46:06et une aubaine pour les petits nouveaux de CP.
46:13Pour la deuxième sortie de l'année,
46:18les institutrices ont choisi
46:19de tester le jeu libre en forêt.
46:23Attention, faites attention au visage des enfants !
46:25Un concept de prime abord déstabilisant
46:28pour des pédagogues
46:29et pourtant si structurant pour les enfants.
46:31Allez, venez là !
46:33Nous sommes dans la forêt.
46:35Et dans la forêt, vous avez vu, il y a plein de choses.
46:38Vous rappelez la règle ?
46:40Que je te vois, tu te vois.
46:43Très bien.
46:43On va l'appliquer et on va rester dans cette zone de la forêt.
46:46Regardez, vous pourrez aller partout ici,
46:49dans ce coin de forêt,
46:49du moment qu'on se voit tous.
46:53Ah ! La sécurité !
46:56L'autre manière de nommer la peur du danger.
46:59Cette inquiétude d'adultes dont les spécialistes nous disent
47:02qu'elle est un frein majeur au développement des enfants.
47:07Il faut dire que les enfants n'aiment pas se mettre en danger.
47:11Ils veulent tenter le risque,
47:13mais il y a une différence.
47:14Et notre travail comme adulte,
47:16ou celui qui l'accompagne,
47:17c'est d'encadrer pour qu'on puisse permettre à l'enfant
47:21de prendre des risques, mesurer,
47:23et non pas être dans des situations dangereuses.
47:30On considère que si un enfant grimpe sur un tronc d'arbre,
47:33que c'est un danger.
47:35Or, lui, il est en train de tester sa force,
47:38tester ses capacités de grimper.
47:41Et tout ça, ce sont des sensations que l'enfant cherche
47:45pour justement connaître ses limites.
47:49Et on peut se poser une question,
47:50s'il n'y a pas des opportunités de tester ses limites,
47:53qu'est-ce qu'on devient quand elle est plus adulte
47:56et qu'on n'a pas de limites ?
47:59Alors, tu aurais besoin de quelle quantité ?
48:02Tu aurais besoin de quelle longueur, tu penses,
48:04pour faire ton petit bricolage ?
48:06Alors, ce qu'on peut faire, on peut en faire un deuxième.
48:08Comme ça, ça tiendra mieux.
48:09C'est assez marrant de voir qu'il y a certains enfants
48:16qui vont tout de suite être dans le besoin d'élaborer,
48:18de créer des choses,
48:19et d'autres qui sont vraiment dans le côté exploration,
48:21des charges motrices et vraiment l'activité physique.
48:25Et là, c'est très flagrant.
48:29Avec ce mini-test grandeur nature,
48:32les enseignantes portent déjà un regard neuf sur leurs élèves
48:35et ce temps de jeu libre, sans consigne,
48:38finit de les convaincre de son influence majeure
48:41sur l'autonomie et la créativité des enfants.
48:43Avec l'EFA, je me suis fait un petit collier.
48:46Un petit collier, voilà, c'est super.
48:48Super.
48:50Ce qui m'a marquée, c'est surtout la différence d'attitude
48:53entre les CP et les CE1.
48:54C'est-à-dire que les CE1 qu'il avait déjà fait l'année dernière
48:57ont été déjà un peu organisés.
49:00On voit déjà des groupes qui se font,
49:02qui travaillent ensemble.
49:04C'est la chose qui m'a marquée,
49:05et c'est le fait d'automatiquement
49:07d'essayer de faire quelque chose, mais à plusieurs.
49:09Il passe une tonne.
49:12Quoi ?
49:13J'arrive avec les autres bâtons ?
49:15Oui !
49:18Bon, je vais les poser dans la main.
49:22Là où il y a lui, tu peux l'accrocher ?
49:24Là ?
49:25Il faut énormément de coopération
49:27pour pouvoir passer un temps ensemble dans la forêt.
49:30Oui !
49:30Oui !
49:32C'est des expériences qui rendent l'enfant
49:35plus sûr de lui et plus confiant.
49:39Et je pense que c'est peut-être les valeurs nécessaires aujourd'hui
49:42d'avoir confiance en soi,
49:45être à l'écoute
49:46et être empathique vers l'autre.
49:48Ça contribue à une société qui a un regard envers soi-même
49:58et envers l'autre plus équilibré.
50:07Pour moi, c'est la question maintenant,
50:08pourquoi on n'y va pas dehors ?
50:11C'est pourquoi on a toujours autant de freins
50:13ou autant d'hésitations
50:15avant d'amener les classes dehors,
50:16avant d'amener les groupes d'enfants dehors.
50:19Et je pense que les politiques
50:20ne sont pas forcément au courant
50:22de tous les enjeux devant eux
50:24autour de ce sujet.
50:30À vouloir tout contrôler,
50:33tout aseptiser,
50:34n'est-on pas allé trop loin ?
50:37C'est à nous, adultes, parents, enseignants,
50:39de nous interroger sur nos propres freins.
50:43La vie, c'est le risque.
50:45La vie est risquée.
50:46Et si on n'apprend pas à l'aborder,
50:48c'est comme si on se ment et on ment aux enfants.
50:55Acceptons que les enfants touchent la terre,
50:58pataugent dans la gadoue,
50:59déchirent leurs vêtements,
51:01marchent pieds nus dans l'herbe fraîche
51:03ou s'allongent le nez au vent
51:04pour mieux raisonner avec le monde
51:06qui les entoure
51:07et dont ils font partie.
51:14Qu'on soit petit ou grand,
51:16notre plus grand défi
51:17est celui de ne pas perdre
51:18ce contact charnel avec la nature.
51:21Le capital santé des sociétés
51:23de demain en dépend.
51:24Le capital santé des sociétés
51:36est un peu plus grand défi.
51:37C'est parti.
52:07C'est parti.
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