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  • il y a 3 mois
Pierre Richard, acteur et réalisateur, pour son film “L'homme qui a vu l'ours qui a vu l'homme ”, en salles ce 17 septembre, est l'invité de Sonia Devillers sur France Inter. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-grand-portrait/le-grand-portrait-du-mercredi-17-septembre-2025-7047521

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Transcription
00:00Mettez un ours en liberté là où il n'y a jamais d'ours en liberté.
00:06Un ours qui vit sa vie d'ours pendant que les hommes vivent leur vie d'homme.
00:11Soudain, tout devient absurde, décalé, intense, zinzin.
00:17Pierre Richard a tourné son drôle de film près de chez lui, près de Narbonne.
00:22Il y a des étangs et il y a des accents éclatants.
00:25Des bouchers qui écoutent Johnny Hallyday, des pêcheurs au grand cœur.
00:30Des grands bourgeois qui ne savent pas s'aimer.
00:32Et cet ours sorti de nulle part.
00:34Pierre Richard a derrière lui les grands blonds, les compères, le coup du parapluie, la moutarde qui monte au nez.
00:40Et autre succès colossal du cinéma français.
00:43Il lui manquait un ours pour que la vie ne soit plus que tendresse et poésie.
00:49Eh bien, vous savez, cher Pierre Richard, nous sommes quelques-uns en ce bas-monde
00:52à connaître le pouvoir des ours.
00:55Portrait numéro 14.
01:00Bonjour Pierre Richard.
01:01Bonjour.
01:02Alors, sort en salle aujourd'hui, l'homme qui a vu l'ours qui a vu l'homme.
01:07Film que vous avez écrit, réalisé et vous jouez dedans.
01:11Alors, tout est une vaste blague, évidemment.
01:14Tout est une vaste blague.
01:15Quoique, il y a vraiment eu un ours qui s'est baladé dans les étangs près de Narbonne.
01:20Vraiment ?
01:21Oui, vraiment, cet ours, ce vrai ours, disons, était dans le parc animalier de Cijen.
01:30Il a dû s'échapper de sa cage, je ne sais pas comment.
01:33Il a dû faire quand même une trentaine de kilomètres, sûrement pas en longeant l'autoroute,
01:37il s'en serait fait repérer tout de suite.
01:38Donc, il a dû passer d'étang en étang parce que chez moi, j'ai tourné chez moi, en fait.
01:44Et je suis entouré d'étang.
01:46Il a dû aller d'étang en étang pour finir par le mien.
01:49Et il s'est posé sur mon territoire.
01:52Et je n'étais pas là.
01:54J'étais dans le nord de la Sibérie.
01:56Déjà que la Sibérie, c'est dans le nord, mais en plus dans le nord de la Sibérie, il ne faut pas dire.
01:59Et j'étais couché.
02:01Et tout à coup, j'ai vu sur une chaîne française, la chaîne française,
02:05des gendarmes qui discutaient avec un jeune homme qui disait
02:07« J'ai vu un ours, j'ai dit aux enfants de s'en aller ».
02:10Et puis, le plan s'est élargi.
02:12Et je me suis rendu compte que c'était chez moi.
02:15Et vous vous êtes dit « Ça, ça ferait un film ».
02:17Non, pas tout de suite.
02:18Pas tout de suite.
02:19Pas tout de suite.
02:20Une des joies de notre milieu, c'est l'incroyable variété d'imbéciles qu'on y rencontre.
02:26C'est pour ça que je les supporte d'ailleurs.
02:27Je les collectionne, comme les papillons.
02:31Des petits, des grands, des vieux, des gros, des imbéciles heureux, des malheureux, des fiers de l'être, des honteux, les plus rares.
02:41Il y a de tout, on ne s'ennuie jamais.
02:45Et puis un jour, on reconnaît qu'on est devant le phénomène ultime, l'indépassable.
02:51L'imbécilité totale et sans excuses.
02:55Vous pensez à quelqu'un de particulier ?
02:57Non, non, non, je pense à vous en général, à l'ensemble de votre œuvre.
03:01Ça, c'est la mère qui parle à son fils et Annie Dupéret avec une triple rangée de perles.
03:07Il y a une idée reçue, Pierre Richard.
03:10L'idée reçue, c'est qu'on est un acteur populaire qui fait des films populaires parce qu'on vient du peuple.
03:16Eh bien non, vous, vous avez grandi dans un château.
03:21Vous, vous avez bu des grands crus dans votre jeunesse.
03:25Vous avez vu votre père conduire des bagnoles fastueuses.
03:29Je vois que vous connaissez ma vie, enfin ma jeunesse.
03:33Oui, c'est ça.
03:34Et de ça, pourtant, vous avez fait quelque chose de populaire.
03:38D'abord, je tiens à signaler que c'est vrai que j'ai vécu dans un château, ce qui est une tour dorée.
03:42Mais j'ai quand même passé les trois quarts de ma scolarité en pension.
03:47C'est-à-dire que...
03:49Et ça, c'était beaucoup moins drôle.
03:50C'était beaucoup moins drôle.
03:52Et c'est d'où est venue mon envie d'indépendance, de liberté.
03:57C'est que j'étais enfermé dans une cage dorée, certes.
04:01Alors, pension religieuse en plus, on mangeait très très mal toute la semaine.
04:08Et j'ai mangé du foie gras le dimanche.
04:10Mais c'était un jour par semaine.
04:12En rentrant au château.
04:13Oui, voilà.
04:14Alors, ça m'a donné justement, ça m'a forgé quand même une sorte de vision des choses qui est différente.
04:22Parce que d'abord, j'avais un grand-père, châtelain et aristocrate.
04:26Mais j'en avais un autre qui était un immigré italien.
04:28Qui parlait comme ça.
04:30Alors, ça m'a donné comme ça une grande élasticité.
04:33Et vous réécrivez l'histoire à l'envers à propos d'élasticité.
04:38C'est ça, sans doute, le pouvoir du cinéma et le pouvoir de l'imaginaire.
04:42C'est-à-dire, dans la réalité, votre père a quitté sa famille et a dilapidé la fortune.
04:49À l'écran, vous êtes le père, fortuné, industriel.
04:54Et vous partez pour de nobles raisons.
04:58Pour mener une vie frugale et authentique.
05:02C'est ça, l'histoire du film qui sort aujourd'hui en salle.
05:05Est-ce que, Pierre Richard, vous auriez voulu que votre père, à vous, parte pour de belles et de bonnes raisons ?
05:12Oui, évidemment.
05:14J'ai toujours eu un problème avec, disons, le père.
05:17Tous les films que j'ai pu faire, ou même que je vois, qui parlent des rapports père-fils.
05:23Je fais allusion, par exemple, au jouet.
05:25J'étais le petit-fils du milliardaire que jouait Bouquet.
05:32C'était un film de Weber, le jouet ?
05:34C'était un film de Weber.
05:35Et tous les rapports que j'ai pu avoir sur le père, les films que j'ai pu voir sur le père, me touchent.
05:41Parce que j'étais en manque de père.
05:44Parce que c'est une cicatrice qui n'a jamais cicatrisé.
05:47C'est une blessure qui n'a jamais cicatrisé ?
05:49Il ne faut pas exagérer.
05:50Oui, c'est une blessure à l'époque où j'étais jeune.
05:52Maintenant, je ne vais pas me lamenter jusqu'à la fin de mes jours, sans que je n'ai pas eu de père.
05:58Non, mais il y a quand même quelque chose d'assez étonnant.
06:02Votre père avait une passion dans la vie.
06:05C'était le jeu.
06:06Il a tout donné au jeu.
06:08Il a tout perdu au jeu.
06:11Et vous, son fils, vous êtes acteur.
06:13Et du point de vue de la langue française, c'est quand même complètement dingue.
06:17C'est-à-dire que vous aussi, vous avez consacré votre vie au jeu.
06:21Ce ne sont pas les jeux de cartes.
06:22C'est le jeu sur scène, c'est le jeu au cinéma.
06:24Mais c'est le jeu.
06:25C'est le même jeu.
06:26C'est le même mot.
06:27De toute façon, le mot jeu, c'est tellement moi.
06:32J'ai passé mon temps.
06:34C'est formidable.
06:36Quand on est jeune, on joue à ceci, on joue à cela avec son cousin, sa cousine.
06:40Le docteur, on joue au méchant.
06:42Et puis, j'arrive à l'âge adulte et j'ai continué jusqu'à aujourd'hui à jouer un banquier, à jouer un imbécile heureux.
06:53Et j'ai passé ma vie à jouer.
06:58Je pense aussi qu'une des choses, peut-être on me dit, mais comment ça se fait que vous êtes encore aussi jeune ?
07:04Vous avez 91 ans.
07:06C'est le rire.
07:07C'est le jeu.
07:08J'adore rire et j'adore faire rire.
07:11Et vous vous êtes dit que votre père aussi avait passé sa vie à jouer et que ce n'était pas le même jeu ?
07:15Lui, c'est une addiction qui est… D'ailleurs, je n'ai jamais joué dans ma vie.
07:22C'est une addiction qui est terrible.
07:25C'est pareil que de prendre de la drogue.
07:28C'est comme ça que vous le regardez aujourd'hui, comme un homme malade ?
07:31Je pense, oui.
07:32D'ailleurs, il a fini un jour par m'attendre à la sortie de la Galerie 55 où je faisais un numéro avec Victor Lanoue.
07:39Je ne l'avais pas vu depuis des…
07:41Et il est venu à la sortie pour m'emprunter de l'argent.
07:44Alors que je gagnais, quoi ? 50 euros.
07:4650 francs, pas de gros.
07:4750 francs par jour.
07:49Et anciens francs.
07:50Et comment fait-on pour devenir père quand on a été très tôt quitté par son propre père ?
07:56Quand on a eu si peu de lien père-fils ?
08:00Parce que ça aussi, c'est au cœur de l'homme qui a vu, l'ours qui a vu l'homme.
08:04Comment on fait pour devenir père ?
08:06On s'accroche à d'autres figures paternelles ?
08:09Moi, j'ai eu plein de pères dans ma vie.
08:11C'est vrai ?
08:12Dès qu'un homme avait une affection ou une amitié pour moi, c'est mon père.
08:19Yves Robert était mon père.
08:21Yves Robert était votre père ?
08:23Pendant longtemps.
08:24J'avais 40 ans quand même.
08:26Mais à 40 ans, on a besoin d'un père.
08:29Mais on a toujours besoin d'un père.
08:30Toujours besoin d'un père.
08:31Et donc, j'ai eu comme ça des pères de substitution.
08:34J'ai eu d'ailleurs un autre père qui n'était pas mon père, mais qui a vécu avec ma mère jusqu'à la fin de séjour.
08:41Et que j'adorais.
08:42J'appelais Tipa.
08:43Pas papa parce que ce n'est pas possible.
08:45Et Tipa.
08:46Et je l'adorais parce que finalement, je ressemblais plus à lui qu'à mon père.
08:51Il était brouillon.
08:53Il était maladroit.
08:55Il oubliait de fermer sa braguette et il se faisait engueuler par ma mère.
08:59Et j'ai hérité de lui.
09:02Grégoire, est-ce que tu vas bientôt mourir ?
09:05Ce n'est pas dans mes projets.
09:07Ah, d'accord.
09:10Et c'est quoi un fonctionnaire ?
09:12C'est ce que tu ne seras jamais.
09:14Pourquoi ?
09:15On ne met pas un oiseau en cage.
09:18Et toi, Grégoire, tu es un oiseau, toi ?
09:20Oui.
09:21J'ai quitté ma cage il y a longtemps.
09:24Grégoire, c'est votre personnage dans le film, Pierre Richard.
09:28Un drôle de type qui est seul dans sa cabane de pêcheurs, qui est plein de fantaisies, mais qui est aussi plein d'absence, qui prend ses rêves pour des réalités.
09:36Et puis, il y a son ami Michel, un ado, Asperger, inadapté, touchant, fantastique acteur.
09:43Fantastique.
09:44Fantastique acteur.
09:46Moi, j'ai terminé ce film sans savoir si c'était quelqu'un qui était atteint d'autisme ou si c'était simplement un acteur fantastique.
09:53Non, c'était simplement un acteur de 19 ans.
09:56Il était évident quand il a passé une audition.
09:58Nous sommes tous tombés dans le bureau, mon producteur, moi et les secrétaires.
10:05On est tous tombés en arrêt devant ce jeune homme qui n'avait pas fait grand-chose avant et tout à coup qui s'est révélé extraordinairement juste, sincère, touchant.
10:18Et c'est un phénomène.
10:20Je lui souhaite une très belle carrière.
10:22Est-ce qu'on peut dire que vous inventez quelque chose avec ce film, Pierre Richard, le burlesque lent ?
10:29Pourquoi le burlesque lent ?
10:31Parce que vous, vous avez 91 ans.
10:33Vous êtes forcément moins rapide, moins agité, moins excité, moins sautillant que vous l'étiez avant.
10:41Et parce que ce personnage de ce jeune autiste Asperger a lui aussi sa lenteur.
10:46Oui, et j'ai appris ça, j'ai appris ce goût de la lenteur.
10:51J'étais le contraire pendant très longtemps dans mes propres films.
10:55Le burlesque m'obligeait et puis ma souplesse, ma gestuelle.
11:00Ma gestuelle était évidente.
11:01Pour moi, il fallait que ça aille vite.
11:05Le burlesque, c'est rarement lent.
11:07Le burlesque, c'est la répétition mécanique, c'est la maladresse, c'est la chute, c'est l'adaptation.
11:12Et là, j'ai une jambe qui m'ennuie beaucoup, c'est de l'arthrose, mais n'empêche qu'elle m'ennuie.
11:19Et du coup, j'ai appris à apprécier la lenteur.
11:22Et du coup, j'ai donné le temps au temps.
11:26Et ça, il y a deux ou trois critiques qui se sont aperçues, qui m'ont dit,
11:31des fois, on a pensé à vous en pensant à Rosier.
11:35Pour moi, c'est un grand compliment, Jacques Rosier.
11:37Et du coup, j'ai appris de ne pas me dépêcher de donner la réplique,
11:43de ne pas me réfléchir.
11:45On est en barque, on ne dit rien, tranquille, tous les deux.
11:48Et puis, on pêche et on ne dit rien.
11:50Dans le temps, j'ai fait, on ne dit rien.
11:51Qu'est-ce qui se passe si on ne dit rien ?
11:53En fait, il a fallu 70 ans de cinéma pour arriver à ça.
11:56Pour arriver à ce goût de la lenteur, quitte un rythme.
12:00Ce n'est pas un manque de rythme, c'est un rythme différent.
12:03Qu'est-ce qu'il y a de politique dans cette inadaptation de ces personnages
12:10à leur environnement, dans leur façon d'être des résistants ?
12:16C'est-à-dire, il y en a un qui ne sera jamais l'industriel, bourgeois,
12:21père de famille, conquérant qu'il était programmé pour être,
12:25et l'autre qui ne sera jamais fonctionnaire.
12:26C'est la nature qui m'a appris ça.
12:28J'étais parisien, j'allais faire du ski.
12:37Et puis, tout à coup, j'ai acquis cette propriété, la vigne.
12:44Oui, vous faites du vin, près de Narbonne.
12:46Et tout à coup, j'ai appris à regarder ces combattantes,
12:50ces vaillantes guerrières que sont les vignes,
12:53qui crèvent de soif et qui tiennent le coup.
12:55J'ai appris à aimer la nature, à la considérer.
13:01Du coup, cet amour de nature s'est élargi, les animaux.
13:08Et maintenant, c'est vrai que j'ai un côté...
13:11Rien ne me touche plus qu'un animal.
13:15D'où mon ours.
13:16D'où mon ours !
13:17Que j'aurais voulu sauver, qui était vrai,
13:19puisqu'il est arrivé dans ma propriété.
13:21Je crois que si j'avais été là, je l'aurais caché.
13:22Je l'aurais caché jusqu'à fin de séjour.
13:25Vous auriez menti aux gendarmes.
13:26J'aurais menti aux gendarmes carrément.
13:30Si j'ai le temps, cette année, cet été,
13:3417 hectares de vignes d'arbres ont brûlé.
13:38Et puis des maisons qui ont brûlé.
13:40Et c'est horrible.
13:40Mais bien sûr, toute la France a regardé ça à la télévision.
13:45Ce spectacle mortifère.
13:47Toute votre région autour de Narbonne a connu un été caniculaire de votre fenêtre.
13:53De ma fenêtre, j'ai vu ça.
13:54Aux vignes, elles ont été touchées ?
13:55Non, non.
13:56Non, mais ça se voit de loin, les feux.
14:00Ce que je voulais dire, c'est que c'est horrible.
14:02Il y a des gens qui ont perdu leur maison.
14:03Ce n'est pas que les maisons, ce n'est pas des murs.
14:05C'est aussi sa vie.
14:07Et c'était épouvantable.
14:09Mais il y a une chose qui m'a frappé,
14:10c'est que dans les commentaires des journalistes,
14:13je n'ai jamais entendu un mot sur le désastre et l'horreur
14:17qu'ont vécu les animaux qui ont grillé sur place.
14:21Donc c'est ça.
14:23C'est que la terre, elle n'appartient pas qu'aux hommes,
14:26elle appartient aussi aux animaux.
14:27Et on les tue, on les massacre, soit pour manger, soit pour...
14:31J'ai pris conscience de tout ça depuis que je suis dans les vignes.
14:36Sinon avant, j'allais faire la planchée sous-marine et du ski.
14:38Mais bon, je n'en fais plus.
14:41Ce n'est plus le même homme.
14:43D'abord, j'ai une pensée pour mes camarades
14:45qui étaient eux aussi nommés pour ce César
14:47de ceux qui n'ont pas eu le César
14:48et qui ne l'ont toujours pas ce soir.
14:52Je voudrais remercier tous ceux sans qui je n'aurais pas eu ce César, bien sûr.
14:55D'abord, je pense à M. Jacques Audiard
14:58qui ne m'a jamais engagé sur un de ses films.
15:02Ce qui m'a permis, bien sûr, d'avoir toutes mes chances
15:04pour ne pas l'avoir.
15:06Et puis, vous savez, moi, je dis souvent que je comprends
15:12pourquoi les comédies sont moins récompensées au César.
15:15Mais je voudrais juste rappeler à l'Académie
15:17que j'ai fait des comédies qui n'étaient pas drôles.
15:21Ça, c'était Franck Dubosc sur la scène des Césars cette année.
15:25Moi, je trouve son sketch absolument inoubliable.
15:27C'est long à venir, cette reconnaissance des pères,
15:33de la critique pour les gens de la comédie.
15:36Oui, mais j'ai souvent entendu ça.
15:39Moi, j'en ai un peu souffert au début aussi.
15:42Il a fallu du temps pour qu'on se rende compte
15:43qu'au-delà de mes yeux écarquillés, comme disait Néa Critique,
15:49et de mes chutes constantes,
15:50ils commencent à nous emmerder avec ces chutes.
15:51J'ai mis longtemps à accepter ça.
15:56Et puis maintenant...
15:57Vous-même, vous avez eu un César d'honneur.
16:00Vous-même, vous êtes monté sur la scène
16:01en disant qu'ils ont dû se tromper.
16:04Oui, oui, oui.
16:06Non, non, ils n'ont pas dû se tromper.
16:08Je veux dire, est-ce que j'en suis ?
16:10Est-ce que ma vie va...
16:12Parce que j'étais très frappé,
16:13parce que Bernard Blier, qui est un immense acteur,
16:16a eu enfin un prix au César.
16:20Et c'est un immense acteur.
16:21Et il l'a eu quelques mois avant de mourir.
16:24Du coup, moi, quand on m'a appris que j'avais un prix,
16:26j'ai dit, mon Dieu, j'ai été voir mon médecin d'assurance
16:29en disant, j'en suis là, dites-moi franchement la vérité
16:31sur ce qu'il me reste à vivre.
16:35C'était il y a une quinzaine d'années,
16:36vous allez toujours très bien.
16:37Oui, ça va.
16:38Ça va très bien.
16:38Du coup, on n'arrête pas d'annoncer ma mort
16:40ou que je suis très malade, mais ça, c'est autre chose.
16:42C'est vrai, on n'arrête pas d'annoncer votre mort ?
16:44Trois fois, oui.
16:45Trois fois ?
16:46Oui.
16:46Il y en a une avec des détails, même.
16:48J'étais mort vers 9h40, je meurs sur scène comme Molière.
16:52Sans blague.
16:53À Aix-les-Bains.
16:55Parce que l'homme qui a vu l'ours, qui a vu l'homme,
16:57est quand même un film qui s'ouvre sur une scène d'enterrement,
17:01qui s'achève sur une scène d'enterrement.
17:03Je ne vous raconte pas qui on enterre une fois et deux fois.
17:07Mais c'est ce décalage-là, puisqu'on vous a vous-même enterré trois fois.
17:12C'est une manière de regarder sa propre vie.
17:14De toute façon, le mieux, c'est de le regarder avec le plus d'humour possible.
17:19Mais c'est un avantage.
17:20C'est un énorme avantage.
17:22C'est que je suis le seul qui, le lendemain, dans les réseaux sociaux,
17:26apprend tout ce que j'étais.
17:27Oh là là, qu'est-ce qu'on l'a aimé.
17:29En général, on ne sait plus tout ça.
17:30C'est ça.
17:31Et quand vous êtes monté sur scène et que vous avez remercié le jour du César d'honneur,
17:37vous avez dit à Blier, à Carmet, à Dari, à qui j'avais dit que je ne l'aurais jamais.
17:43Ils rigolent bien là-haut.
17:46Et surtout, je leur avais dit que si on me le donnait, je le refuserais.
17:49Vous ne l'avez pas refusé.
17:51C'est ça aussi, d'avoir 91 ans.
17:53C'est d'avoir vu ses meilleurs copains partir avant soi.
17:57Oui, mais c'est un...
17:59J'ai des souvenirs inoubliables.
18:01Et toujours autour du rire, d'ailleurs.
18:03Parce que je n'ai jamais autant rire avec ces gens.
18:07Qui étaient imprévisibles.
18:12Carmet, totalement imprévisible.
18:15Gérard, c'est aussi.
18:16Mais Gérard, il faut qu'il ait bu pour être imprévisible.
18:18Gérard, c'est de part Dieu.
18:20Oui.
18:21Mais Carmet, il était naturellement.
18:23Et j'ai vécu avec lui des moments hilarants.
18:27Ce qui n'était pas forcément le cas d'Yves Robert, qui s'en plaignait.
18:31Mais c'était des gens doués et drôles.
18:35Alors, l'homme qui a vu l'ours, qui a vu l'homme, sort en salle aujourd'hui.
18:40C'est éminemment polémique.
18:44C'est poétique.
18:47Vous avez vu comment ma langue a fourché ?
18:49Oui, polémique, j'ai entendu.
18:50Oui, c'est polémique.
18:51Évidemment, de faire de la lenteur et de la poésie, aujourd'hui c'est politique.
18:55Bref.
18:56Oui, c'est joli ce que vous dites.
18:57C'est joli.
18:58C'est Pierre-Richard que j'ai en face de moi.
19:00Merci d'être venu sur France en paix.
19:01C'est moi qui vous remercie d'avoir accueilli.
19:03C'est moi qui vous remercie d'avoir accueilli.
19:03Merci.
19:04Merci.
19:05Merci.
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