- il y a 4 mois
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00:00Bienvenue au Cœur du Crime, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:11Savez-vous que plus d'un tiers des crimes et délits commis en France sont traités par la Gendarmerie Nationale ?
00:19Je m'appelle Yann Kermadek, je suis commandant de gendarmerie.
00:25Je dirige une section de recherche dont la mission essentielle est une mission de police judiciaire.
00:41L'histoire que je vais vous raconter est une histoire vraie.
00:46Tous les faits sont réels et se sont déroulés en France.
00:50Seuls les noms des personnes et des lieux ont été changés.
00:55On vient de retirer le corps, et maintenant nous sommes une vingtaine à regarder les pompiers nettoyer le sang qui a éclaboussé la chaussée devant le centre médical.
01:12« Personne ne l'a vu tomber ! » dit le sergent Allen.
01:18« Mais deux personnes l'ont entendu ! »
01:21Il a crié ?
01:22« Pas non, apparemment non. »
01:26Des projecteurs éclairent l'endroit où s'activent les pompiers.
01:30Je lève le nez pour examiner la façade de l'immeuble de cinq étages.
01:35Allen tire sur son cigare un petit coup sec.
01:38« Quand on tombe, » dit-il, « il n'y a qu'une trajectoire possible.
01:43Tout droit, verticalement.
01:45S'il n'est pas tombé du toit, c'est de l'une de ses trois fenêtres.
01:48Cinquième étage, quatrième étage ou troisième étage.
01:51S'il était tombé de moins haut, il ne serait pas dans un état pareil. »
01:56« Qui était-ce ? »
01:57« D'après les papiers qu'on a trouvés dans son portefeuille, il s'appelle Thomas Fraser.
02:02On ne sait pas grand-chose d'autre sur lui. »
02:06« Un policier en civil vient vers nous. »
02:08« Il n'est pas tombé du toit. »
02:10« Il n'y a qu'une porte qui conduit et elle est fermée à clé. »
02:14« Il a peut-être trouvé une clé refermée derrière lui, » dis-je.
02:19« Ben, ça n'a pas l'air. Il y a une épaisse couche de suie sur le toit.
02:23S'il y était monté, il aurait laissé des traces de pas. »
02:28Je me remets à examiner la façade de l'immeuble.
02:31Le sergent Allen est toujours sur mes talons.
02:33« Quand nous sommes arrivés, » dit-il, « les fenêtres des troisième et cinquième étages étaient ouvertes et des gens s'y penchaient.
02:41Celles du quatrième étaient fermées et la lumière éteinte, comme maintenant. »
02:46« Est-ce qu'il aurait pu passer par une autre fenêtre et marcher le long d'une corniche avant de sauter dans le vide ? »
02:52« Ben non, il n'y a pas de corniche et les appuis de fenêtres ne font que dix centimètres de large. »
02:59Je jette un coup d'œil à ma montre. Je n'étais déjà plus de service quand j'ai appris cette histoire par la radio de ma voiture.
03:05« Je suppose que vous pouvez continuer sans moi, sergent. Ma femme m'attend. Mais si vous avez besoin de me joindre, je serai chez moi. »
03:16Quand j'arrive à la maison, ma femme lève à peine la tête de son magazine de mode en m'entendant entrer.
03:23« Tu es en retard ? » dit-elle, toujours sans me regarder.
03:28« Tu n'as pas oublié que nous allions dîner chez les Danissons ce soir, au moins. Il te reste tout juste le temps de te changer. »
03:35Je me demande si Philip Thompson sera là aussi à se dîner. Probablement, s'il sait que Doris y sera.
03:46Toute la soirée, je surveille Doris et Philip Thompson du coin de l'œil. Ils ne se parlent que rarement, ne s'isolent jamais des autres, et personne ne pourrait deviner ce que je sais sur eux.
03:59Le lendemain matin, au bureau, le détective Vox vient m'apporter l'information qu'Halen a laissée pour moi avant de quitter son service.
04:11Les plans des troisième, quatrième et cinquième étages sont les mêmes. Chacune des trois fenêtres qui nous intéressent est celle de la salle d'attente d'un médecin.
04:22Au troisième, docteur Abrams, médecin interne. Il y avait trois malades et sa réceptionniste dans la salle d'attente au moment de l'accident.
04:30Ils n'ont vu personne sauter, tomber ou être poussé par la fenêtre.
04:35Au quatrième, le docteur Warner, un dentiste. Mais il ne donne aucune consultation le soir. Il faisait noir chez lui et les portes étaient fermées à clé.
04:46« Vous savez, Brooks, Fraser a peut-être pu entrer quand même d'une manière quelconque. »
04:53« Comment ? Nous n'avons pas trouvé de clé sur le corps et aucune porte du cabinet du docteur Warner n'a été forcée. »
05:00« On a pu le faire entrer, le pousser par la fenêtre et reverrouiller les portes en sortant. »
05:06« Impossible ! Les seules empreintes que nous ayons trouvées sur l'appui de la fenêtre sont celles de l'assistante du docteur Warner. »
05:13« À l'heure dite, elle dînait chez des amis à dix kilomètres. Nous avons vérifié. »
05:18« Et si ce quelqu'un portait des gants ? »
05:21« Il aurait alors fatalement brouillé les autres empreintes. Or, celles-ci sont très très nettes. »
05:28« Donc, il ne nous reste plus que le cinquième étage. »
05:32« Oui, docteur Gavin, auto-rhino-laryngologiste. »
05:37« À sept heures et quart, il avait un client et sa réceptionniste dans la salle d'attente. Personne n'a rien vu et ils n'ont jamais entendu parler de Fraser avant. »
05:45« Où est-elle, docteur Gavin ? »
05:48Le détective Brooks feuillette rapidement le dossier qu'il tient à la main.
05:52« Le docteur Gavin... Voilà ! Il n'est arrivé qu'à sept heures trente. »
05:57« D'après lui, Fraser est tombé ou a été poussé du toit ou du cinquième étage. »
06:02« Et comme nous avons exclu l'hypothèse du toit, sergent... »
06:07« Oui, je vois ce que vous voulez dire, lieutenant. »
06:10« D'ailleurs, j'ai convoqué la réceptionniste, Clara Nevins, et aussi le client, Amos Orwell. »
06:15« Parfait, Brooks. Merci, je n'ai plus besoin de vous pour le moment. Envoyez-moi Amos Orwell en partant, voulez-vous. »
06:24« Amos Orwell est un grand type, maigre, au regard sympathique, derrière des lunettes à verre très épais. »
06:30« Il est arrivé en avance vers sept heures moins dix. Il affirme que la porte de la salle d'attente n'était pas fermée et que la réceptionniste est arrivée environ cinq minutes après lui. »
06:41« Je prends quelques notes sur mon bloc, puis je lui demande... »
06:46« Et le docteur Gavin, il était dans son cabinet ? »
06:50« Non, je croyais qu'il y était, mais en fait, il n'était pas là. »
06:55« Pourquoi pensiez-vous qu'il était là ? »
06:58« Son chapeau était accroché au porte-manteau. »
07:02« Comment savez-vous que c'était son chapeau ? »
07:05« Eh bien, quand il est arrivé vers sept heures trente, après que cet homme soit tombé, donc, il a pris son chapeau pour l'emmener dans son cabinet. »
07:14« Parfait, M. Orwell, parfait. Mais revenons un peu en arrière, s'il vous plaît. Vous dites que la réceptionniste est arrivée cinq minutes après vous ? »
07:23« Oui ? Et qu'a-t-elle fait ? Vous vous en souvenez ? »
07:29« Ah oui, oui, oui. Elle est allée à la porte du cabinet du docteur et a essayé de l'ouvrir. C'était fermée à clé et elle m'a dit que le docteur arriverait probablement dans quelques minutes. »
07:41« Oui. Et vous, qu'avez-vous fait, M. Orwell ? »
07:45« Eh bien, j'ai lu un magazine. Mademoiselle Nevins faisait un peu de classement, je crois. Enfin, elle travaillait sur des papiers, en tout cas.
07:53Et vers sept heures vingt, nous avons entendu les sirènes. Mademoiselle Nevins a ouvert la fenêtre et nous nous sommes penchés au dehors.
08:01Nous étions encore à la fenêtre quand le docteur Gavin est arrivé quelques minutes plus tard.
08:06Il a demandé ce qui était arrivé, puis il a pris son chapeau, accroché au porte-manteau, a ouvert la porte de son cabinet et il y est entré. »
08:16« Le cabinet du docteur Gavin a-t-il une autre entrée directe sur le palier ? »
08:21« Euh, oui, je crois bien. »
08:25« Quand j'en ai fini avec Orwell, je fais entrer Mlle Nevins. C'est une petite jeune femme brune aux yeux, petit, grande vivacité. »
08:35« Depuis combien de temps travaillez-vous pour le docteur Gavin, Mlle Nevins ? »
08:39« À peu près un mois, la réceptionniste qu'il avait avant est partie pour se marier. »
08:45« Dites-moi, Mlle Nevins, le docteur Gavin porte-t-il un chapeau ? »
08:51« Ma question a l'air de l'étonner. »
08:54« Pourquoi ? Non, je ne crois pas. En tout cas, je ne me rappelle pas lui en avoir jamais vu. »
09:00« Clara Nevins vient juste de sortir quand le détective Brooks revient dans mon bureau. »
09:06« Vous avez trouvé quelque chose, Brooks ? »
09:09« Peut-être, lieutenant. Mais que savons-nous au juste sur Thomas Fraser ? »
09:15Il travaillait dans l'immobilier, son affaire marchait apparemment bien,
09:19et il s'était marié il y a trois ans pour la première fois. Il avait quarante-cinq ans.
09:25À l'heure du déjeuner, je me rends au restaurant Louco où je prends une table dans un angle de la salle.
09:36Je sais que de là, je peux voir sans être vu.
09:40Vingt minutes plus tard, ma femme et Philip Thompson s'installent à leur tour, à leur table habituelle.
09:49Ils commandent un cocktail, se tiennent les mains, se sourient.
09:55Quand ils quittent l'établissement, vers une heure et demie, je règle mon addition, puis me rends directement au centre médical.
10:05Le docteur Gavine est grand, avec d'épais poignets velus et des yeux bleus pâles, qui ne me regardent jamais vraiment en face.
10:14« Connaissiez-vous Thomas Fraser, docteur ? »
10:18« L'homme qui s'est tué ici hier soir ? Non, je ne le connaissais pas. »
10:22« À quelle heure êtes-vous arrivé à votre bureau hier soir ? »
10:26« Vers sept heures trente. »
10:29« Vous avez une porte donnant directement sur le palier ? »
10:32« Oui, mais je m'en sers rarement. D'habitude, je rentre par la salle d'attente.
10:36Il y a parfois des malades qui arrivent en avance, et il n'y a aucune raison de les faire attendre inutilement, n'est-ce pas, si je peux m'en occuper tout de suite. »
10:44« En tout cas, hier soir, vous n'étiez pas en avance. J'ai cru comprendre que M. Howell avait rendez-vous à sept heures et quart. »
10:54Il a l'air beaucoup moins à l'aise, le docteur Gavine.
10:57Avant de répondre, il passe nerveusement ses mains sur les revers de sa blouse blanche.
11:02« J'essaie en général d'arriver à sept heures, mais hier, effectivement, je me suis arrêté en route pour prendre un sandwich et un café en bas de la rue. »
11:12« Je ne fais aucune allusion au chapeau. Mieux vaut garder cette question en réserve pour plus tard, quand j'en saurai un peu plus sur lui. »
11:22Le docteur Gavine a manifestement quelque chose à cacher.
11:27Mais quoi ? Puisque le corps de Fraser a difficilement pu tomber de la fenêtre de sa salle d'attente.
11:34C'est ce que vous saurez dans quelques instants.
11:43Le corps de Thomas Fraser a été découvert devant un centre médical abritant les cabinets de plusieurs médecins.
11:48Selon toute voie-semblance, la victime est tombée, ou a été poussée, d'une fenêtre du troisième, du quatrième ou du cinquième étage.
11:59Mais, curieusement, personne ne connaît Fraser. Personne ne l'a même jamais vue.
12:08En quittant le docteur Gavine, je prends l'ascenseur jusqu'au rez-de-chaussée, occupé par une pharmacie.
12:14Il me paraît logique que 95% des gens qui viennent consulter ici y portent leur ordonnance.
12:23Je demande à voir le registre et je ne suis pas vraiment surpris de ce que j'y découvre.
12:28Aucune trace de Thomas Fraser.
12:30En revanche, j'y trouve la trace d'une Hélène Fraser dont je m'empresse de chercher l'adresse dans la nuire.
12:37Hélène Fraser a les yeux verts et un joli sourire de toute évidence.
12:44La mort de son mari ne lui a pas causé un choc insurmontable.
12:48Elle m'apprend que le médecin traitant de son mari était un certain docteur Bradford,
12:55et elle affirme n'avoir jamais entendu parler du docteur Gavine.
12:59Avant de partir, je lui pose une dernière question.
13:04Est-ce que votre mari avait une assurance sur la vie ?
13:09Hélène Fraser a un sourire prudent.
13:12Oui, mais elle n'était que de 300 000 dollars, et il en valait dix fois autant, lieutenant.
13:18Je passe le reste de la journée à mon bureau à mettre noir sur blanc ce que je soupçonne sur la mort de Fraser,
13:27et aussi ce qu'il me reste à vérifier.
13:29À mon avis, les choses se sont passées ainsi.
13:33Le docteur Gavine et Hélène Fraser ont, ou ont eu, une liaison.
13:38Fraser l'a appris et s'est rendu au cabinet de Gavine avant l'arrivée de Howell et de Mademoiselle Nevins.
13:44Il a trouvé le médecin seul, les deux hommes ont échangé des mots, puis des menaces, et ont fini par en venir aux mains.
13:53Et Gavine a tué Fraser.
13:56C'est alors qu'un problème s'est posé à Gavine.
13:59Comment se débarrasser du corps ?
14:02Impossible de le transporter sur le palier.
14:04On pouvait le voir et son assistante risquait d'arriver d'un moment à l'autre.
14:08Il était donc coincé dans son propre cabinet avec ce cadavre encombrant sur les bras.
14:12Alors il avait pensé à la fenêtre.
14:16Mais il s'était dit, bien sûr, que la police ferait une enquête pour découvrir de quelles fenêtres le corps était tombé.
14:22Et sa liaison avec Hélène Fraser serait découverte par la même occasion.
14:27Alors une idée lui est venue.
14:30Faire croire que Fraser était tombé d'une autre fenêtre.
14:34Mais comment ?
14:35Pour l'instant, je ne m'attarde pas sur cette question.
14:39Ce qui est probable, c'est que Gavine s'est débarrassé du corps, puis a quitté son bureau sans bruit par la porte donnant sur le palier.
14:48Il n'est revenu qu'en entendant les sirènes.
14:50C'est là qu'il a vu Howell et Clara Nevins penchés à la fenêtre.
14:53Mais il a vu aussi autre chose.
14:55Il a vu le chapeau de Fraser, toujours accroché aux portes-manteaux.
14:58Ce soir-là, Doris me regarde d'un air maussard faire ma valise.
15:06« Tu ne te mets pas en tenue de chasse ? » demande-t-elle.
15:10« Non, il faut que j'aille encore au bureau signer quelques papiers.
15:15Je me changerai chez Léo Bryan.
15:17Au revoir, mon chou. »
15:20Doris a un imperceptible haussement d'épaule.
15:24« Au revoir. Amuse-toi bien. »
15:28Je mets ma valise et mon fusil dans le coffre de ma voiture
15:31et j'avance de deux pâtés de maison avant de faire demi-tour et de m'arrêter.
15:38Et là, j'attends.
15:41Oh, je n'attends pas longtemps, d'ailleurs.
15:44Une demi-heure plus tard,
15:46Philip Thompson vient garer sa voiture devant notre immeuble.
15:50Quelques instants après, je vois sortir Doris
15:52un petit sac de voyage à la main.
15:54Je les suis jusqu'à un hôtel assez miteux de l'autre côté de la ville.
16:00Je garde ma voiture dans l'ombre, un peu plus loin,
16:02et sors mon 38 spécial de ma poche.
16:06Deux cartouches suffiraient.
16:09Ou dois-je en prévoir une troisième pour moi-même ?
16:12Je n'en sais encore rien.
16:15Quand je pénètre dans le hall, la chance est avec moi.
16:21Personne n'a la réception.
16:24Je parcours en vitesse le registre des entrées.
16:27Ils se sont inscrits sous le nom de M. et Mme Swanson,
16:32chambre 406.
16:35Je jette un coup d'œil à la pendule démodée accrochée au mur.
16:39Il est 8h30.
16:41Je me dirige vers l'ascenseur,
16:45puis soudain je m'arrête et me retourne.
16:48Je fixe la pendule pendant une bonne minute au moins.
16:52Je fixe surtout son balancier.
16:56Je sais à présent que ce ne sera pas trois cartouches,
17:00ni deux, ni même une.
17:01Et ce n'est pas la clé de la chambre 406
17:05que je décroche du tableau,
17:08mais celle de la 408,
17:11qui, logiquement, doit être la chambre voisine.
17:15Puis je décroche le téléphone et compose le numéro 406.
17:19Quand Philip Thompson me répond,
17:21je déguise ma voix.
17:22« Ah non, Charlie ! Ici c'est Fred ! »
17:25« Fred ? »
17:26« Bien sûr ! T'as-tu de même pas oublié
17:27le Sportsman Bar à Toledo ? »
17:30« Écoutez, monsieur ! »
17:31dit la voix sèche de Thompson.
17:33« Je n'ai jamais entendu parler de vous
17:34et je ne suis jamais à la Toledo.
17:35En clair, vous vous trompez de numéro.
17:37« Voyons, Charlie ! Tu ne vas pas me faire ça à moi,
17:39si vieux copain !
17:40Je monte tout de suite avec une bonne bouteille ! »
17:43« Attendez ! »
17:44fait principitamment Thompson.
17:46« Où êtes-vous ? »
17:46« Eh bien, dans le hall ! »
17:48Je l'entends étouffer un juron.
17:49« C'est bon ! J'arrive tout de suite ! »
17:53À partir de là,
17:54tout marche comme sur des roulettes.
17:56« Thompson est tellement ahuri
17:59en me voyant avec mon 38 spécial à la main
18:01qu'il ne fait aucune difficulté
18:02pour entrer dans la chambre 408.
18:04Sans doute croit-il
18:05que je suis venu exiger une explication,
18:08mais je ne lui laisse pas le temps
18:09de dire un mot.
18:10Je lui donne un bon coup de crosse sur la nuque,
18:12le rattrape en souplesse
18:13et l'étend sans bruit sur le plancher.
18:15Puis je vais à la fenêtre
18:16en me servant de mon mouchoir pour l'ouvrir.
18:18Je me penche
18:19et jette un coup d'œil à gauche.
18:20La fenêtre allumée est celle du 406,
18:24celle dans laquelle Doris
18:26attend le retour de son amant.
18:29J'éteins la lumière dans la chambre 408
18:31et tire Thompson vers la fenêtre.
18:35Il ne me reste plus qu'à m'en débarrasser
18:36en appliquant la méthode de ce cher docteur Gavin.
18:40Je monte Thompson sur l'appui de la fenêtre,
18:43me cale les pieds sous le radiateur
18:44et bascule tout le corps au dehors
18:46en le retenant par les chevilles.
18:48Alors je me mets à le balancer lentement
18:50de droite à gauche,
18:52de gauche à droite,
18:53encore et toujours
18:53comme le balancier d'une pendule.
18:56Et quand l'arc de cercle
18:57me paraît suffisamment grand,
18:59je lâche prise.
19:01Puis je ressors de la chambre,
19:02verrouille la porte,
19:04descends par l'escalier de service
19:05et remets la clé au tableau.
19:08Quand j'arrive à ma voiture,
19:10j'entends les sirènes hurler au loin.
19:14Un quart d'heure plus tard,
19:16je suis chez les O'Brien.
19:18« Presque huit mois plus tard,
19:23je rencontre par hasard
19:24le docteur Gavin dans un bar.
19:26Nous nous saluons
19:27et je commande un whisky.
19:30Il fait teinter distraitement
19:31les glaçons dans son verre. »
19:34« Au fait, rien de neuf
19:35dans l'affaire Fraser, lieutenant ? »
19:37demande-t-il.
19:39« Non, non, toujours le poiment.
19:40Vous savez, je ne voudrais pas
19:42saper votre confiance en la police,
19:44mais il y a des cas
19:45que nous ne résolvons jamais. »
19:49Quand mon verre arrive,
19:51Gavin tend un billet au barman.
19:53« C'est ma tournée ! »
19:55Ce qui est bien la moindre des choses, non ?
19:58J'aurais très bien pu résoudre
20:00le cas Fraser et envoyer Gavin en prison,
20:03sans compter que ça m'aurait valu
20:06un bel avancement.
20:08Mais qu'aurais-je fait
20:10de ce bel avancement
20:12si quelqu'un d'autre
20:13s'était demandé
20:14ce qui était réellement arrivé
20:17à Philip Thompson ?
20:19Quelqu'un d'un peu moins borné
20:22que les membres du jury
20:23qui, eux, n'ont pas hésité longtemps.
20:27Ils ont conclu un meurtre
20:29et ma chère Doris
20:31en a pris pour vingt ans.
20:32Une fois par mois,
20:36je lui apporte des oranges.
20:38Vous venez d'écouter
20:45« Au cœur du crime »,
20:47un podcast issu des archives d'Europe 1.
20:49Réalisation, Julien Tarot.
20:52Production, Estelle Laffont.
20:54Patrimoine sonore,
20:55Sylvaine Denis,
20:56Laetitia Casanova
20:57et Antoine Reclut.
21:01« Au cœur du crime »
21:02est disponible sur le site
21:04et l'appli Europe 1.
21:05Écoutez aussi l'épisode suivant
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21:10Sous-titrage Société Radio-Canada
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