- il y a 5 mois
Comment l’Iran est-il devenu l’ennemi d’Israël et des États-Unis, qui furent pourtant les alliés du Chah dans les années 1970 ?
Avec certains des acteurs de cette guerre larvée, retour sur une spirale funeste qui menace de semer le chaos au Moyen-Orient et au-delà.
Avec certains des acteurs de cette guerre larvée, retour sur une spirale funeste qui menace de semer le chaos au Moyen-Orient et au-delà.
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00:00C'est l'histoire d'une guerre qui ne dit pas son nom.
00:22Une guerre qui a démarré il y a plus de 40 ans, mais que personne n'a déclaré officiellement.
00:30Entre l'Iran d'un côté, les Etats-Unis et Israël de l'autre, cette guerre aussi bien idéologique que stratégique n'en finit pas d'attiser les passions, les rancœurs, les haines.
00:43Et si elle éclatait véritablement, c'est tout le Moyen-Orient qui s'embraserait, avec le risque d'engendrer un nouveau conflit mondial.
00:50Alors, pour comprendre ce retour possible de la plus barbare des violences, il faut remonter le temps, dénouer les fils de la tragédie,
01:01chercher les insaisissables vérités des uns et des autres derrière les dogmes et les certitudes,
01:07et raconter cette histoire.
01:08Sous-titrage MFP.
01:38Sous-titrage MFP.
02:08L'histoire de cette guerre démarre le 1er février 1979,
02:15à bord d'un avion en provenance de Paris, à destination de Téhéran.
02:26Un vieil homme prie, c'est l'Ayatollah Romény.
02:30Il s'apprête à bouleverser radicalement l'histoire de l'Iran.
02:32Ce n'est pas facile de parler de la grandeur du personnage.
02:41Un jour, un de ses ennemis a déclaré,
02:44« Il n'y a eu personne comme lui depuis 800 ans,
02:48et il n'y aura personne d'autre comme lui dans les mille ans à venir. »
02:54Ce vieil homme est alors la figure historique de l'opposition au Shah,
03:00le roi tout-puissant qui règne sur l'Iran depuis près de 40 ans.
03:05Exilé depuis 15 ans,
03:07l'Ayatollah rentre enfin chez lui pour engager le combat final auprès de son peuple.
03:10La révolution au nom de l'islam chiite.
03:17Bientôt, tout le Moyen-Orient va basculer dans une nouvelle ère.
03:20Un an avant le retour de Romény,
03:46Téhéran s'est soulevé.
03:47Dès le début de l'année 1978,
03:51des centaines de milliers d'Iraniens sont descendus dans les rues pour défier leur monarque.
03:59Le régime du Shah était une dictature.
04:03Une dictature militaire, si on peut dire.
04:06L'armée était partout.
04:09Et c'était si corrompu.
04:10Pas seulement dans l'économie ou la justice,
04:18mais tous les secteurs, à tous les niveaux du pouvoir l'étaient.
04:22Et tout était fermé à tout le monde.
04:24Donc, il n'y avait aucune opportunité pour personne d'évoluer dans la société.
04:29Et cette corruption était un très bon moyen pour vous encourager à vous opposer à ce régime.
04:44Les manifestants ne veulent plus de ce roi qui, pour faire de l'Iran une grande puissance,
04:48veut leur imposer, de gré ou de force, une modernité à l'occidentale.
04:52Ils y voient un système injuste et corrompu
04:55qui ne satisfait pas les besoins les plus élémentaires de la population.
05:14Deux pays incarnent cet impérialisme dénoncé par les manifestants.
05:18Deux pays qui soutiennent le régime du Shah.
05:25Les Etats-Unis et Israël.
05:33Aujourd'hui, il est difficile de concevoir que ces deux pays
05:36étaient alors les plus proches partenaires de l'Etat iranien.
05:41Les relations étaient excellentes avec les Iraniens à l'époque.
05:44Beaucoup d'Israéliens habitaient en Iran et aidaient ce pays dans de nombreux domaines.
05:54Pour nous, l'Iran était sans doute le partenaire le plus important après les Etats-Unis
05:58pour ce qui est des intérêts économiques.
06:01Avec eux, on a mené à bien des projets grandioses.
06:03C'est dans les années 50 qu'Israël se rapproche du Shah.
06:14Isolé au sein d'un monde arabe qui refuse son existence,
06:18l'Etat hébreu cherche des partenaires non-arabes, plus loin au Moyen-Orient.
06:23L'Iran, Perse, pro-occidental,
06:26d'un islam autre que celui des pays arabes,
06:29s'impose comme un allié naturel.
06:33Les Iraniens venaient souvent chez nous.
06:36C'était une collaboration d'une très grande intensité.
06:39Vraiment.
06:40Inimaginable.
06:42Yitzhak Segev prend ses fonctions d'attaché militaire en Iran en 1977,
06:46un an avant le début des manifestations.
06:50Sa mission ?
06:51Renforcer la coopération sécuritaire entre les deux pays.
06:53J'étais alors chargé d'exécuter un contrat
06:58entre l'Iran et Israël
07:00pour 1,2 milliard.
07:05L'Iran payait
07:06et Israël fournissait matériel et savoir-faire
07:09dans des domaines très sensibles.
07:12Missiles, avions, etc.
07:20Washington aussi a choisi de faire de l'Iran
07:22un instrument central de son influence dans la région.
07:29Une intense coopération militaire
07:31veut lui permettre de maintenir Téhéran
07:32dans le camp occidental.
07:36Et c'est aussi l'époque de la guerre froide, bien sûr.
07:40L'Iran était alors une arène majeure
07:44de la confrontation américano-soviétique.
07:50Donc le chat était proche des Etats-Unis.
07:55Il comprenait qu'il avait besoin de leur soutien
07:57pour s'opposer à l'Union soviétique
07:58et se maintenir au pouvoir.
08:00Alors aujourd'hui,
08:05quand je donne une conférence à des jeunes,
08:07ils ne me croient pas
08:08quand je leur dis qu'en 77 et 78,
08:10les deux plus grands alliés de l'Iran
08:12étaient les Etats-Unis et Israël.
08:19Pour Tel Aviv comme pour Washington,
08:21l'Iran du chat est un partenaire inestimable.
08:23La pièce maîtresse dans le grand jeu Moyen-Oriental.
08:32Israéliens et Américains
08:33ne perçoivent pas alors la profondeur,
08:36la force de cette opposition
08:37qui va tout emporter.
08:42Quand je parlais avec les généraux,
08:45ils me disaient
08:45« Écoute, c'est comme la rougeole.
08:49À cette période, il y a des manifestations,
08:51c'est comme ça. »
08:53« Le chat nous demande de résoudre le problème
08:54car il est le chef des armées. »
08:57« Eh bien, nous résolvons le problème. »
09:01L'Amérique ne voyait pas
09:04ce qui se passait
09:05au sein de la société iranienne
09:07car on n'avait personne
09:09immergé dans cette société.
09:14Nos contacts,
09:16c'était les gens de la classe supérieure,
09:20des militaires partisans du statu quo
09:22qui se forçaient donc
09:23à rester fidèles au chat
09:24en espérant ainsi
09:26que tout continuerait comme avant.
09:32C'était ça, nos contacts.
09:36Des gens mal informés
09:37et qui n'allaient pas
09:38nous annoncer de mauvaises nouvelles.
09:40L'aveuglement,
09:52l'incompréhension du régime
09:53devant la puissance
09:54et la détermination du peuple en marche
09:55ne peuvent conduire qu'au drame.
10:03Ce jour-là,
10:04l'armée du chat ouvre le feu
10:05dans les rues de Téhéran.
10:06c'est le Vendredi Noir.
10:0987 morts officiellement,
10:124000 selon l'opposition.
10:14La monarchie vient de montrer
10:15son véritable visage.
10:17Je me souviens,
10:22je prenais une douche le matin
10:23après le Vendredi Noir,
10:25comme on l'a appelé.
10:26Il m'est apparu que ce qui se passait
10:28alors,
10:29c'était une guerre
10:30entre le chat
10:31et son peuple.
10:33Et il m'a semblé
10:34que le chat n'allait pas gagner
10:35et qu'on allait devoir affronter
10:38une nouvelle situation en Iran
10:39comme on n'avait alors jamais connu.
10:41Le processus révolutionnaire est lancé.
10:52Il ne s'arrêtera plus.
10:56Considérés comme des soutiens du chat,
10:58les expatriés israéliens et américains
11:00commencent à quitter le pays.
11:02Ils sont devenus des cibles.
11:03Les manifestants attaquent
11:08café, restaurant, banque
11:09ou cinéma.
11:11Les symboles de la modernité
11:13à l'occidentale
11:14qu'ils associent à la mainmise
11:15d'Israël et des Etats-Unis
11:17sur leur pays.
11:19Le discours anti-américain
11:22était dû au fait
11:23que le discours de gauche
11:24contre l'impérialisme,
11:25considéré comme une menace,
11:27était alors dominant.
11:29Il fallait résoudre
11:30la contradiction principale,
11:32comme on disait à l'époque.
11:33Les forces religieuses
11:37étaient aussi inflexibles
11:39contre les USA.
11:40Elles voyaient l'Amérique
11:41comme le phare de la modernité.
11:43Elles le voient toujours comme ça.
11:52Concernant le discours
11:53contre Israël,
11:53il était également lié
11:54à ce discours de gauche
11:55qui identifiait ce pays,
11:57et c'est toujours le cas,
11:59à la cause palestinienne.
12:00Pour la gauche,
12:02Israël était le responsable
12:03de la négation des Palestiniens.
12:07Et il y avait un sentiment profond
12:09au sein du système iranien
12:11que les services secrets iraniens,
12:14la SAVAC,
12:15étaient dirigés par le Mossad,
12:18par Israël.
12:18Donc,
12:22il y avait ces Américains
12:24qui pillaient le pays,
12:27les Israéliens
12:27qui dirigeaient
12:28les services secrets du Shah
12:30et participaient
12:32aux tortures,
12:32aux tueries.
12:36C'est pourquoi
12:37les Iraniens
12:39voyaient alors Israël
12:40comme une part
12:42des États-Unis.
12:42Abattre la monarchie,
12:54briser les liens
12:54avec Washington
12:55et Tel Aviv,
12:56rejeter la modernité
12:57à l'occidentale.
12:58Tout cela s'agrège
12:59alors dans un même combat.
13:02Pour réussir,
13:04celui-ci doit trouver
13:05son incarnation.
13:08Petit à petit,
13:09alors que le mouvement
13:10a commencé à prendre
13:11de l'ampleur,
13:12il lui fallait une direction,
13:15donc un responsable.
13:17La personne
13:18qui pouvait remplir
13:19parfaitement ce rôle,
13:21c'était l'Ayatollah Khomeini.
13:31Je dois dire
13:33qu'il n'y a pas
13:34que les différentes factions
13:35de l'opposition islamiste
13:36qui ont rejoint
13:37l'Ayatollah Khomeini,
13:38mais d'autres membres
13:39de l'opposition,
13:40comme les nationnels
13:41et les marxistes aussi.
13:45Toutes ces factions
13:46ont reconnu
13:47l'Ayatollah Khomeini
13:47comme le leader
13:48de la révolution.
13:50Le moment est venu
14:03pour lui
14:04de réaliser son rêve,
14:05l'application
14:06d'une doctrine radicale.
14:08Établir une république islamique,
14:10c'est-à-dire une théocratie,
14:12au sein de laquelle
14:12le pouvoir ultime
14:13est détenu
14:14par une autorité religieuse,
14:15le guide suprême,
14:17lui.
14:17En posant le pied
14:43sur le sol iranien,
14:44Roménie s'apprête
14:45à porter le coup fatal
14:46à la monarchie.
14:47Rien ni personne
14:53ne peut s'opposer
14:54à son triomphe.
14:55C'était bouleversant.
15:08Vraiment bouleversant.
15:10Environ 10 millions de gens
15:12marchaient dans les rues
15:14de Téhéran.
15:15D'aussi loin que je me souvienne,
15:18c'était la plus grande
15:19cérémonie d'accueil
15:20de l'histoire.
15:2110 millions de personnes
15:23étaient venues
15:24pour accueillir
15:25son évolu.
15:31Tout le monde
15:32le voyait
15:34comme le leader
15:34de la révolution.
15:36Un leader charismatique
15:38et comme un représentant
15:40de Dieu aussi.
15:44Il allait sauver le pays.
15:48Il allait nous apporter
15:49le paradis sur terre.
15:57C'est désormais lui
15:58qui incarne la légitimité
15:59du pouvoir.
16:00D'autant que le chat,
16:02très affaibli par la maladie,
16:03a quitté le pays
16:04trois semaines plus tôt.
16:05dix jours plus tard,
16:28après seulement 48 heures
16:29de combat
16:30dans les rues de Téhéran,
16:31la monarchie iranienne
16:32sur laquelle régnait le chat
16:33depuis 37 ans,
16:34s'effondre.
16:42La victoire de la révolution
16:44est totale.
16:46L'ayatollah Khomeini
16:47est le nouveau maître
16:48du pays.
16:48Les révolutionnaires
17:07s'attaquent immédiatement
17:08aux ennemis désignés
17:09du nouveau régime.
17:09La mission diplomatique israélienne
17:13est mise à sac,
17:14entièrement ravagée.
17:18Ses 33 membres,
17:20les derniers israéliens
17:21encore présents en Iran,
17:23doivent trouver un moyen
17:23de quitter le pays.
17:24« Personne ne rentre chez lui.
17:29On s'installe dans des appartements
17:31qu'on avait prévus avant,
17:32cinq ou six dans chaque appartement,
17:35et on y est resté enfermé
17:36pendant une semaine.
17:37On avait tous une arme.
17:42Certains avaient leur passeport.
17:44On se préparait à s'enfuir.
17:46À ce moment-là,
17:48c'était dur.
17:49On était très peu
17:50à pouvoir sortir dans la rue. »
17:55Une semaine plus tard,
17:56c'est enfin l'heure du départ.
17:58Ils se rendent par petits groupes
17:59à l'hôtel Hilton
18:00dans le centre de Téhéran,
18:01où un bus doit les conduire
18:02à l'aéroport.
18:03Distance, 17 kilomètres.
18:0917 kilomètres à parcourir
18:11en pleine effervescence révolutionnaire.
18:14Tout peut arriver.
18:1817 kilomètres.
18:1910 millions d'Iraniens
18:21de chaque côté de la route.
18:22Tous avec des tomates et des œufs.
18:24Dans le bus,
18:26il y a un chauffeur
18:27et deux Iraniens
18:28avec des kalachnikovs.
18:29Notre bus avance.
18:31Ils ont cru que c'était
18:32un bus de la révolution.
18:33Ils n'ont pas jeté
18:34une tomate à Tignanov.
18:39Une fois arrivé à l'aéroport,
18:42c'est enfin l'embarquement.
18:44Puis le décollage.
18:46Et la délivrance.
18:49Peut-être.
18:49« Quand nous sommes montés
18:50dans l'avion,
18:52il a démarré.
18:52Il a commencé à rouler.
18:53Et tout d'un coup,
19:01il s'est arrêté.
19:03Les portes se sont ouvertes
19:05et encore une fois,
19:06ces salauds de la révolution
19:08sont entrés.
19:09Je me suis dit,
19:11qu'est-ce qu'ils ont encore oublié ?
19:13Ils voulaient faire encore
19:14une dernière vérification,
19:16je ne sais pas quoi.
19:17Puis ils ont fermé la porte
19:19et nous avons décollé.
19:30Au même moment,
19:31le grand ennemi des Israéliens,
19:33Yasser Arafat,
19:34le leader de l'OLP,
19:35l'Organisation de Libération
19:37de la Palestine,
19:38arrive à Téhéran,
19:39accueilli comme un véritable
19:41chef d'État.
19:48C'est en 1969
19:49qu'Arafat prend la tête
19:50de l'OLP.
19:52Son ambition ?
19:53Créer un État palestinien
19:54sans dépendre
19:55de ses parrains arabes.
19:59Installé au Liban,
20:01Arafat mène avec ses fédahines,
20:02ses combattants,
20:03des actions de guérillas
20:04à la frontière nord
20:05de l'État hébreu.
20:06Aujourd'hui,
20:09il vient demander l'aide
20:10de Khomeini,
20:11grâce à qui il espère
20:12pouvoir acquérir
20:13les moyens
20:13de son autonomie.
20:14En invitant Arafat à Téhéran,
20:38Khomeini lance un message fort
20:39à l'ensemble du monde musulman.
20:41L'Iran soutiendra
20:44dorénavant la cause
20:45palestinienne,
20:46considérée comme un combat
20:47existentiel entre l'Islam
20:48et l'Occident chrétien,
20:50impérialiste,
20:52parrain de l'État juif.
20:53Il faut reconnaître
21:04qu'Israël
21:05est un moyen d'oppression
21:07de l'Occident
21:08sur le monde musulman.
21:10Le fait de dire
21:19qu'on a voulu créer
21:20un pays pour un peuple,
21:22le peuple juif,
21:23c'est du n'importe quoi.
21:25C'est un vrai mensonge
21:37que l'Ouest a proféré
21:38pour régner
21:39sur toute la région,
21:40sachant bien
21:41que nous n'accepterons
21:42jamais ce pays.
21:43Roménie prend alors
21:50une initiative spectaculaire.
21:54En lieu et place
21:55de la mission diplomatique
21:56israélienne,
21:58il y aura maintenant
21:58l'ambassade de la Palestine.
22:01Tout un symbole.
22:04Par ce geste,
22:05le leader religieux
22:06rompt tout lien
22:07avec l'État hébreu,
22:08dont l'existence
22:09n'a pour lui
22:09aucune légitimité.
22:10L'alliance stratégique
22:16entre Israël
22:17et l'Iran
22:17appartient définitivement
22:19au passé.
22:24Les États-Unis
22:25ont reconnu
22:26la jeune république islamique,
22:28mais à Washington,
22:29on s'inquiète.
22:30Quel genre de relation
22:31sera-t-il possible
22:32d'entretenir
22:32avec ces nouveaux dirigeants ?
22:36Au sein du gouvernement
22:38américain,
22:40les avis divergent.
22:40certains pensaient
22:43que Roménie
22:43était trop radical
22:45et qu'il serait difficile
22:47de négocier avec lui.
22:50Je crois que la plupart
22:52des gens pensaient
22:53quand même
22:53que nous pourrions
22:54continuer à avoir
22:55des relations
22:56avec l'Iran.
22:57Même malgré
22:58le départ du Shah,
23:00on allait maintenir
23:01un lien.
23:02On avait notre
23:03ambassade là-bas.
23:03Justement,
23:11le 4 novembre 1979,
23:13des centaines
23:14d'étudiants islamistes
23:15envahissent
23:15l'ambassade américaine
23:16et prennent en otage
23:1752 diplomates.
23:18Roménie hésite.
23:30Roménie hésite.
23:31Va-t-il soutenir
23:31ses étudiants
23:32au risque
23:33d'une grave crise
23:33avec les États-Unis ?
23:35Va-t-il les soutenir
23:36pour garder la main
23:37sur le mouvement ?
24:07Quand la crise
24:12des otages
24:13est survenue,
24:15c'était clair
24:16que nous n'étions
24:17pas préparés
24:19à traiter
24:19avec un Iran
24:21de cette nature.
24:27Le fait que
24:29cette haine
24:30à notre égard
24:31s'incarne
24:33dans la crise
24:34des otages
24:35a fait
24:37de l'Iran
24:37immédiatement
24:39un de nos soucis
24:41majeurs.
24:50Les derniers otages
24:51seront libérés
24:52au bout de
24:52444 jours.
24:53En apportant
24:57son soutien
24:58aux étudiants,
24:59Roménie fait
25:00de cette affaire
25:00l'acte 2
25:01de la révolution,
25:02un des mythes
25:03fondateurs
25:03du nouveau régime
25:04et la cause
25:06principale
25:06de la rupture
25:07entre son pays
25:07et les États-Unis.
25:10Un nouveau
25:11Moyen-Orient
25:11est en marche.
25:13Plus rien
25:14ne sera jamais
25:14comme avant.
25:17Les ambitions
25:18et les intérêts
25:18respectifs de Téhéran
25:19d'un côté,
25:21Washington
25:21et Tel Aviv
25:22de l'autre
25:22vont bientôt
25:22entrer en collision
25:23dans le plus
25:25grand fracas.
25:40Ce jour-là,
25:41près de 90 000 soldats
25:42israéliens,
25:441300 tanks
25:44et 1500
25:45transports de troupes
25:46envahissent le Liban.
25:48Un pays qui n'a
25:49a priori rien à voir
25:50avec l'affrontement
25:50naissant entre l'Iran,
25:52Israël et les États-Unis.
25:55Déchiré par une guerre
25:56civile depuis des années,
25:58le Liban est devenu
25:59un champ de bataille
25:59régional.
26:02La Syrie occupe
26:03une partie du pays,
26:04à l'est.
26:06Surtout,
26:07au sud,
26:08c'est l'OLP
26:08qui est toute puissante.
26:10L'organisation
26:11palestinienne
26:11a fait de la zone
26:12sa base opérationnelle
26:13pour lancer des raids
26:14meurtriers
26:14contre Israël.
26:15Le 6 juin 1982,
26:21Tel Aviv lance
26:21son opération
26:22Paix en Galilée.
26:30L'objectif annoncé
26:31est défini
26:31haut et fort.
26:34Nettoyer
26:34et prendre le contrôle
26:35du sud-Liban
26:36afin de stopper
26:37les opérations
26:38de guérilla
26:38des Fédahines d'Arafat.
26:39Ariel Sharon,
27:04récemment nommé
27:05ministre de la Défense,
27:06dirige l'offensive.
27:08Aux yeux de beaucoup
27:09d'Israéliens,
27:09c'est un héros.
27:11Il a été au premier rang
27:12de toutes les victoires
27:13remportées par l'État hébreu
27:14depuis sa création
27:15en 1948.
27:29Il s'agissait
27:31de faire reculer
27:32les terroristes,
27:33principalement
27:34les membres
27:34de l'OLP.
27:36Il fallait les repousser
27:37vers une ligne
27:38qui nous mettrait
27:39à l'abri des tirs.
27:41La rumeur était
27:42qu'ils avaient
27:42un canon
27:43à longue portée,
27:44le long tome,
27:45une portée
27:46de 40 kilomètres.
27:48Donc il fallait
27:48les éloigner
27:49à plus de 40 kilomètres
27:51de la frontière.
27:53C'était le plan,
27:54ni plus ni moins.
27:54En moins d'une semaine,
28:05Sharon dépasse largement
28:06le plan initial.
28:07L'avancée de son armée
28:08est foudroyante.
28:09L'opération s'est transformée
28:22en quelque chose
28:23de beaucoup plus important.
28:25Sharon a avancé vers le nord
28:26et progressé avec succès
28:28de plus en plus loin au nord
28:30jusqu'à ce que nous
28:31nous rapprochions
28:32de Beyrouth.
28:33A Téhéran,
28:43c'est la stupeur.
28:44Avec l'avancée
28:45des troupes israéliennes
28:46vers la capitale libanaise,
28:48le rapport de force
28:48au Moyen-Orient
28:49change radicalement.
28:51Pour Khomeini,
28:52il n'en est pas question.
28:53Mais comment peut-il réagir ?
28:55Engagée dans une guerre totale
29:04contre l'Irak
29:04depuis l'attaque lancée
29:05par Saddam Hussein
29:06deux ans plus tôt,
29:08en septembre 1980,
29:10la jeune république islamique
29:11va devoir se battre
29:12pour sa survie
29:13pendant huit longues années
29:14dans ce qu'on appellera
29:15la guerre Iran-Irak.
29:20Le leader iranien
29:22n'a donc pas les moyens
29:22d'ouvrir un autre front
29:23contre Israël au Liban.
29:25Pour justifier sa décision,
29:31Khomeini a déclaré
29:32que la route
29:32qui mène à Jérusalem
29:33doit passer par Karbala,
29:35ce qui est une manière religieuse
29:38d'exprimer une décision
29:39stratégique fondamentale
29:40selon laquelle
29:42chaque chose en son temps.
29:44L'aspiration de l'Iran
29:46à participer
29:46à la libération de Jérusalem
29:48doit venir après la défaite
29:50que l'Iran doit infliger
29:51à Saddam Hussein.
29:55à Beyrouth,
30:04un pilonnage massif
30:05s'abat maintenant
30:06sur l'ouest de la capitale
30:07où se sont réfugiés
30:08Arafat et le gros
30:09de ses troupes.
30:10Une partie de la ville
30:25est rasée.
30:27Il y a des milliers de morts,
30:28surtout des civils.
30:29Le 21 août 1982,
30:37le siège israélien
30:38prend fin.
30:48Défait,
30:50Arafat quitte le Liban
30:51et s'exile en Tunisie
30:52avec 10 000 de ses fédains.
30:53Ils seront bientôt remplacés
31:00par une force internationale
31:01composée surtout
31:02de soldats américains
31:03et français
31:04dont la mission sera
31:05de sécuriser
31:06la capitale libanaise.
31:12Pour Sharon
31:13et le Premier ministre
31:14Menahem Begin,
31:16la question palestinienne
31:17est réglée.
31:18Ils peuvent donc passer
31:19à leur objectif inavoué,
31:21la transformation du Liban.
31:23D'un pays multiconfessionnel,
31:27ils veulent faire
31:27un État chrétien,
31:28dirigé par la minorité
31:29maronite,
31:31un État puissant
31:31et surtout
31:32un État allié.
31:41Mais en agissant de la sorte,
31:43ils vont réveiller
31:44sans le savoir
31:44une autre communauté libanaise,
31:46la plus nombreuse du pays,
31:48la communauté chiite.
31:49Installés surtout à l'est
32:08et au sud du Liban,
32:10les chiites ont subi
32:11directement l'invasion
32:12puis maintenant
32:13l'occupation israélienne.
32:15Certains d'entre eux
32:16sont bien décidés
32:17à prendre les armes
32:18et résister.
32:21C'était ma conviction
32:26en 1982
32:28qu'Israël était un ennemi.
32:32Et je soutenais
32:33la cause palestinienne,
32:35je me considérais
32:36de ce camp.
32:37Naïm Kassem est alors
32:41âgé de 29 ans.
32:43Professeur de chimie
32:44à Beyrouth,
32:44il dirige l'Union
32:45des associations islamistes
32:47d'enseignement,
32:48une organisation chiite.
32:49Pour nous,
32:57la pensée de l'imam Khomeini
32:59correspondait parfaitement
33:00à notre croyance profonde.
33:03Avec d'autres groupes islamistes,
33:06on s'est réunis
33:07et on est tombés d'accord.
33:11Nous sommes partis en Iran
33:13pour y proclamer notre volonté
33:14de prêter allégeance
33:15à l'imam Khomeini
33:16afin qu'il soit notre guide,
33:19qu'on respecte son autorité
33:21et il nous a donné
33:22sa bénédiction.
33:31Khomeini accueille
33:32avec intérêt
33:32l'offre de services.
33:34Il va pouvoir se rapprocher
33:35de l'État juif
33:36pour mieux le combattre
33:37par l'intermédiaire
33:38de ses nouveaux alliés.
33:40Une association
33:41d'autant plus évidente
33:42qu'il entretient
33:42avec ses chiites libanais
33:43des liens anciens
33:45et profonds.
33:46Beaucoup des leaders
33:51de la révolution en Iran
33:52qui ont occupé
33:53des positions très importantes
33:55dans les semaines
33:56qui ont suivi
33:56leur arrivée au pouvoir
33:57ont été formés au Liban.
34:01Leur lien
34:01avec la communauté
34:02chiite libanaise
34:03était profond.
34:08Vous savez,
34:09le chiisme du sud-Liban
34:11est plus ancien
34:11que le chiisme iranien.
34:12A l'été 82,
34:23les responsables chiites
34:25libanais créent donc
34:26dans la ville de Baalbek
34:27située à l'est du pays,
34:28dans la plaine de la Beka,
34:30une nouvelle organisation
34:31de lutte contre Israël
34:32avec l'accord de Khomeini.
34:34La RIL,
34:35la résistance islamique
34:36du Liban.
34:36Elle prendra officiellement
34:42le nom de Hezbollah
34:43trois ans plus tard,
34:44en 1985.
34:46Pour le moment,
34:47ses buts sont avant tout
34:48opérationnels et secrets.
34:49A sa naissance,
34:57notre mouvement
34:57de résistance
34:58devait rester clandestin
34:59pour pouvoir être efficace
35:01et se développer.
35:06Donc,
35:08la confidentialité
35:09était la règle.
35:12Il nous fallait agir
35:13secrètement
35:14pour exister
35:15politiquement
35:16plus tard.
35:16C'était le seul moyen
35:24de nous protéger
35:24et de permettre
35:26notre expansion.
35:32L'objectif initial
35:35du Hezbollah
35:36était militaire.
35:39Il ne s'agissait pas
35:40seulement de proposer
35:41une résistance armée
35:42contre Israël,
35:44mais bien de vaincre
35:44par tous les moyens
35:45cette occupation
35:46et d'obtenir
35:47un retrait du Liban.
35:55Pour aider
35:56la nouvelle organisation,
35:57l'Iran envoie
35:58au cours de cet été 82
36:00quelques centaines
36:00de gardiens de la révolution
36:02dans la BK.
36:04Ces hommes appartiennent
36:05à un corps d'élite
36:05créé dès la naissance
36:06de la République islamique
36:07et chargé de sa défense.
36:10Dépendant directement
36:11du guide,
36:12ils forment
36:12la garde prétorienne
36:13du régime.
36:14Nous n'avions pas
36:18demandé à l'Iran,
36:19pas plus
36:20aux gardiens
36:20de la révolution,
36:22ni à qui que ce soit
36:23de combattre Israël
36:24à notre place,
36:25nous,
36:26les Libanais
36:26ou les Palestiniens.
36:28Nous demandions
36:29de l'aide,
36:30c'est tout.
36:31Car à l'époque,
36:32personne ne soutenait
36:33les forces libératrices
36:34qui luttaient
36:35contre Israël.
36:42Ces soldats d'élite
36:43ne combattent pas,
36:44mais ils apportent
36:45des armes,
36:46de l'argent,
36:47un savoir-faire.
36:55Leur présence implique
36:56l'aide d'un autre pays
36:57dont l'armée occupe
36:58cette partie du Liban,
37:00la Syrie.
37:00Pour arriver
37:04dans la BK,
37:05ces hommes ont ainsi
37:05bénéficié
37:06de l'aide
37:06du dictateur
37:07Hafez al-Assad,
37:08un opposant fervent
37:09lui aussi
37:10à l'État d'Israël.
37:12En envoyant
37:13ses passes d'Aran,
37:14Khomeini met sur pied
37:15un partenariat
37:16qui va s'avérer
37:16stratégique
37:17pour les décennies à venir,
37:19le partenariat
37:19avec la Syrie.
37:20Ils ont commencé
37:25à mettre sur pied
37:26le Hezbollah,
37:27à organiser
37:28cette alliance
37:28avec Assad,
37:31à fournir
37:31Assad en pétrole,
37:33à financer
37:35donc cette relation
37:36avec Assad
37:37parce qu'ils ont
37:38alors pensé
37:39qu'ils avaient besoin
37:40de ce qu'ils appellent
37:42une profondeur
37:43stratégique.
37:45Ils avaient besoin
37:45d'outils à leur disposition
37:47pour menacer
37:48Israël,
37:48ce qui signifiait aussi
37:50menacer les États-Unis
37:51en disant
37:52« si vous nous frappez,
37:53nous vous frapperons
37:54en retour ».
37:55En créant le Hezbollah,
37:57ils frappent à la fois
37:57Israël et les États-Unis
37:59au Liban.
38:00Je ne sais pas
38:01s'ils savaient
38:03dès l'origine
38:04que cela deviendrait
38:05leur succès
38:05le plus éclatant.
38:07Mais je pense
38:08qu'ils avaient fixé
38:09certains objectifs
38:10au tout début.
38:11Et dès le départ,
38:13l'objectif n'était pas
38:14de cantonner le Hezbollah
38:15à n'être qu'un acteur
38:16non étatique,
38:16mais de l'aider
38:18à devenir un parti politique,
38:20à devenir une force
38:20dominante au Liban
38:21et au Moyen-Orient.
38:29C'est un véritable
38:30système d'alliance
38:31qui prend à leur naissance
38:32dans les confins
38:32de la plaine de la Béka.
38:39Un système
38:39mis en place
38:40par l'Iran
38:40avec le concours
38:41de la Syrie.
38:43Un système
38:43qui crée
38:43un objet politique
38:44inconnu,
38:45le Hezbollah.
38:48un système
38:49qui donnera
38:49plus tard naissance
38:50à un axe majeur
38:51du Moyen-Orient,
38:52l'axe Iran-Syrie-Hezbollah.
38:57Mais ce système,
38:58pour le moment,
38:59personne n'en devine
39:00l'émergence.
39:02Pas plus les Américains
39:03que les Israéliens.
39:04d'Erkanoun,
39:18sud-Liban,
39:19à une dizaine
39:20de kilomètres
39:20de la frontière israélienne.
39:24Vers 6h30 du matin,
39:26une Peugeot blanche,
39:28bourrée d'explosifs,
39:29quitte le village
39:29en direction de Tyr,
39:31la grande ville
39:31de la région.
39:34Au volant,
39:34un jeune résistant
39:35de 18 ans,
39:36membre du Hezbollah.
39:38Il s'appelle
39:39Ahmad Kassir.
39:43Le martyr Ahmad Kassir
39:45était discret
39:46depuis sa jeunesse,
39:47mais vertueux.
39:49Il ne pouvait jamais
39:50se taire
39:50ou faire des compromis
39:51face à l'injustice.
39:53Il vivait en Arabie saoudite,
39:55mais il est rentré
39:56directement au Liban
39:57après l'invasion israélienne.
39:59« Notre oncle paternel
40:02a essayé de le retenir
40:03en lui disant
40:04qu'il n'avait rien
40:05à faire ici
40:05en période de guerre.
40:07Et sa réponse a été
40:09« Je sais très bien
40:10ce qu'il faut que je fasse. »
40:14Ce jeune homme inconnu
40:18va dans quelques instants
40:18devenir un héros légendaire
40:20du combat des chiites
40:21contre Israël,
40:23ce qu'on appelle ici
40:23un chaïd,
40:25un martyr de la résistance.
40:27Il va commettre
40:28un acte que personne
40:29n'a encore jamais
40:29osé réaliser au Liban.
40:31Un acte où c'est bien
40:32religieux
40:33que politique.
40:36« En 1982,
40:42on considérait
40:42que la confrontation
40:43avec Israël
40:44nous était défavorable.
40:47Nous ne pouvions pas
40:48lui causer de dégâts.
40:51Il nous fallait prendre
40:52une initiative originale,
40:55commettre un acte atypique,
40:56l'acte martyr. »
41:03Le culte des martyrs
41:04remonte aux origines
41:05du chiisme.
41:07Au 7e siècle,
41:08l'imam Hussein
41:09et ses compagnons
41:10sont massacrés
41:11à Karbala,
41:11dans l'actuel Irak,
41:13lors d'un combat fratricide
41:14pour prendre la succession
41:15du prophète Mahomet.
41:17L'événement,
41:18commémoré chaque année,
41:19constitue le fondement
41:20même du chiisme.
41:21« Cette aptitude,
41:25cette prédisposition
41:26au sacrifice,
41:28à la lutte
41:28contre l'injustice
41:29et la corruption,
41:30cela fait partie intégrante
41:32de la pensée chiite.
41:34Et cela était central
41:35dans la mobilisation
41:36des chiites du Liban.
41:38Ce n'est pas une simple
41:39question militaire,
41:41mais cela relève
41:42d'une doctrine,
41:43d'une vision.
41:44Le but était de lutter
41:46contre l'occupation,
41:47mais ces opérations martyres
41:49étaient aussi une nouvelle
41:50forme inconnue
41:51de lutte dans la région.
41:58Il est 7 heures maintenant,
42:00ce 11 novembre 1982.
42:04Ahmad Kassir emprunte
42:05l'avenue principale de tir.
42:09Sans hésiter,
42:10il accélère
42:11et se jette
42:12avec sa voiture
42:13sur un grand ensemble
42:13résidentiel.
42:20Le quartier général
42:26de l'armée israélienne
42:27pour tout le sud Liban
42:28vient de s'effondrer.
42:33Un bâtiment de 7 étages,
42:36pulvérisé.
42:37de l'armée est
43:07J'étais à Tyre à ce moment-là, car on avait une épicerie là-bas.
43:18Je rentrais par le même chemin que d'habitude, mais les Juifs avaient barré la route.
43:23C'était inoubliable.
43:24L'incendie était vif encore.
43:28Les meubles, les pierres, tout brûlait.
43:31On était fiers.
43:33Il se passait enfin quelque chose.
43:37L'envahisseur subissait des pertes.
43:45Il y avait des morts.
43:47On était contents de cela.
43:49On se demandait qui avait bien pu oser faire ça.
43:53Je ne savais pas que mon frère Ahmad était devenu martyr.
43:57Je n'ai jamais oublié ce moment.
44:07C'est un carnage.
44:1091 soldats israéliens et 15 prisonniers libanais trouvent la mort.
44:17Ariel Sharon ne comprend pas.
44:20Comment un événement pareil a-t-il pu survenir alors que le seul ennemi connu, l'OLP, a été écrasé il y a plus de deux mois déjà ?
44:27Il y a plus de deux mois.
44:573 semaines plus tard, la commission d'enquête conclut à l'explosion d'une conduite de gaz.
45:10C'est donc un accident.
45:13Cette version hallucinante des faits ne sera jamais remise en question officiellement.
45:18Comme pour mieux souligner l'aveuglement des services de renseignement israéliens,
45:22qui ignoraient alors totalement ce qui se déroulait dans la plaine de la Béka.
45:27On n'avait pas d'informations en temps réel.
45:33C'est bien malheureux, rétrospectivement.
45:36On savait qu'il y avait des religieux qui agissaient.
45:40Certains, on les connaissait, d'autres, on ne savait pas qui c'était.
45:43On ne savait pas qui c'était.
45:57J'ai subi un choc beaucoup plus grand quand j'ai commencé à entreprendre des recherches sur ce qui existait,
46:07disons au sein des renseignements concernant les chiites au Liban en général.
46:11J'ai été très déçu.
46:16Je n'ai alors presque rien trouvé comme document sur le sujet.
46:20Il n'y avait pas grand-chose non plus dans les services académiques.
46:24Il y avait très peu de choses.
46:25Les forces internationales présentes au Liban,
46:36Américains et Français en tête,
46:37sont tout aussi aveugles que l'armée israélienne.
46:40Le 23 octobre 1983,
46:43presque un an plus tard,
46:45elles subissent à leur tour une attaque similaire.
46:47D'une violence inouïe.
46:48Les Américains perdent 241 soldats.
47:06Au même moment,
47:07un kamikaze se fait sauter dans le quartier général des troupes françaises,
47:11l'immeuble de Rakkar.
47:1358 morts.
47:14Une double opération revendiquée
47:19par un mystérieux mouvement du djihad islamique.
47:22Très certainement un prêtre nom du Hezbollah et de l'Iran.
47:28Je pense que beaucoup d'éléments indiquent
47:31que les Iraniens ont joué un rôle,
47:33et même un rôle clé dans cette affaire.
47:34Vous avez une indication sur la responsabilité ?
47:37Oui, nous avons des...
47:40Mais nous ne allons pas le point de la main.
47:42Nous sommes absolument certain.
47:43Mais je pense que l'ambassadeur d'Iran en Syrie,
47:46c'est juste la nature insidue de l'international terror.
47:52Le renseignement américain a dit
47:55qu'il avait réussi à intercepter une réunion
47:57au cours de laquelle l'ambassadeur d'Iran en Syrie,
48:00qui a été un des créateurs du Hezbollah,
48:02avait explicitement demandé
48:03l'organisation d'une telle opération.
48:08Bon, les services américains
48:11n'ont jamais produit publiquement de preuves.
48:13Ils se sont déjà trompés dans le passé,
48:16et ils ont aussi déjà menti dans le passé.
48:19Donc, on ne peut pas être sûrs à 100%.
48:22Quoi qu'il en soit,
48:27la perception est devenue la réalité.
48:28Les États-Unis, la France et d'autres
48:31ont agi comme si l'Iran en avait été le responsable.
48:33Avec cette nouvelle attaque,
48:38personne ne peut plus ignorer les chiites du Hezbollah.
48:42Ils se veulent l'incarnation de la résistance
48:44à Israël et à ses alliés.
48:46Les fanatiques qu'on surnomme déjà les fous de Dieu
48:54ne font aucun mystère de leurs intentions.
48:58Grâce à leurs protecteurs et bienfaiteurs,
49:00l'Iran et leur capitale, Baalbek,
49:03leur combat ne fait que commencer.
49:04Je me souviens que le Hezbollah
49:18semblait être un acteur local.
49:22Puis, au milieu des années 80,
49:24il était clair qu'il était alimenté
49:26en armes et en hommes par l'Iran,
49:29que des otages allaient du Liban à l'Iran.
49:34Bref, qu'il était soutenu politiquement.
49:38L'organisation prenait de l'importance.
49:51Dès le départ, les Iraniens avaient compris
49:54très intelligemment qu'on ne peut pas créer
49:56une milice armée sans que celle-ci
49:58n'ait le soutien de la population locale.
50:03Les Iraniens ont construit
50:04ce que j'appelle une contre-société.
50:08À côté de la société libanaise normale,
50:11il y a une autre société.
50:14La société du Hezbollah est la suivante.
50:17Un enfant naît,
50:20il va à la crèche du Hezbollah.
50:22Après, il va à l'école du Hezbollah.
50:26Puis, il va au scout du Hezbollah.
50:28Il va ensuite au lycée du Hezbollah.
50:32Alors, il s'engage dans le Hezbollah.
50:35Il va à la crèche du Hezbollah.
50:35Il va à la crèche du Hezbollah.
50:37Les Israéliens étaient en comptant 600 men de deux ans.
50:59C'était un prix que beaucoup n'ont pas prêt à payer.
51:07L'armée israélienne s'enlise au Liban chaque jour un peu plus.
51:13Le 6 juin 1985, trois ans après le début de l'invasion, elle quitte le pays, tout en conservant une zone de sécurité au sud, soit 10% du territoire libanais.
51:23Elle y restera 15 ans, jusqu'en 2000.
51:30Ce premier retrait, partiel, constitue pour l'État hébreu une défaite sévère, humiliante même.
51:38Pour le Hezbollah, c'est sa première victoire.
51:44Surtout, l'organisation chiite révèle ce jour-là sa responsabilité dans la destruction du QG israélien, à tir.
51:52Le nom du shahide, Ahmad Kassir, est révélé.
51:56Le 11 novembre, jour de l'attentat, devient le jour officiel des martyrs de la résistance.
52:00Alors, lorsque l'Ayatollah Khomeini disparaît en juin 1989, son héritage est plus vivant que jamais.
52:17La théocratie chiite qu'il a fondée dix ans plus tôt est solidement installée.
52:29Et le combat qu'il a initié contre Israël et les États-Unis, par l'intermédiaire du Hezbollah, a imposé l'émergence d'un nouveau Moyen-Orient.
52:36Désormais, que vont faire les successeurs du guide de cet héritage ?
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