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Les débats de l'été avec Arnaud de Morgny, directeur adjoint du centre de recherche de l’EGE

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00:01Sud Radio, les débats de l'été, 10h-13h, Maxime Liedot.
00:06Bonjour Arnaud Morny.
00:08Bonjour.
00:08Vous êtes le directeur adjoint du centre de recherche de l'EGE, pour le dire plus clairement, l'école de guerre économique.
00:15Et si on avait envie de vous inviter ce matin, c'est par rapport à tout ce qui se passe d'un point de vue bien sûr européen,
00:20avec cet accord entre les Etats-Unis et l'Europe, où on observe quoi ?
00:23On observe que beaucoup d'entreprises françaises risquent d'en pâtir.
00:27Mais il n'a pas fallu attendre cet accord en réalité, pour voir une certaine dégradation de la condition de nos grandes entreprises françaises.
00:33Et c'est pour ça que je voulais vous inviter.
00:34Vous avez créé récemment un indice sur le risque de désindustrialisation de nos grandes entreprises.
00:40On y retrouve ArcelorMittal, Renault, Michelin, Valeo, Sanofi, Danone, l'entreprise Seb.
00:46Pourquoi cet indice ? Et en quoi, d'une certaine manière, il vient révolutionner l'approche de la désindustrialisation ?
00:54Alors pourquoi cet indice ? Parce qu'on a posé un constat très simple, c'est-à-dire que les indices qui existent déjà,
01:03par exemple le baromètre de l'industrie qui a été créé par la Direction Générale des entreprises en 2022,
01:08constatent une situation une fois que les choses sont faites.
01:12On doit attendre en réalité des suppressions d'emplois pour que tout d'un coup, on se dise,
01:17tiens, cette entreprise est dans un état d'alerte majeure.
01:20Alors suppression ou création, puisque le baromètre de l'État calcule des différentiels
01:26et la différence entre la création et la soustraction ou la destruction.
01:32Donc en fait, c'est une logique presque d'autopsie, c'est-à-dire de médecin légiste.
01:37Voilà ce qui s'est passé l'année dernière. Et puis l'année suivante, voilà ce qui s'est passé l'année dernière.
01:42Nous, notre idée, c'est qu'il fallait un outil pour pouvoir anticiper, pour que les acteurs puissent se dire
01:49« Attention, il y a un problème qui est en train de se profiler, il faut que nous agissions ».
01:54Le but, c'est de créer un outil qui permet d'anticiper, qui soit une sorte de vigie dans la nuit.
02:01Justement, la vigie dans la nuit, c'est peut-être important d'en parler à l'heure où les regards se tournent davantage vers l'Europe et les États-Unis.
02:09Regardons concrètement ce qui se passe sur notre territoire, parce que, non pas que ce ne soit pas réjouissant,
02:13mais vous mettez des points d'alerte sur énormément d'entreprises, je les ai cités.
02:17Mais en réalité, vous, vous croisez plusieurs critères différents pour identifier les faiblesses.
02:22Est-ce que vous pouvez nous expliquer le mécanisme de cet indice ?
02:26Oui, alors en fait, on s'est posé la question en regardant l'actualité, en analysant les processus de désindustrialisation.
02:36Mais en plus, nous, on a une particularité, c'est qu'on est l'école de guerre économique,
02:40c'est-à-dire qu'on analyse les stratégies que des acteurs peuvent utiliser pour déstabiliser d'autres acteurs.
02:46Donc, en partant de ce savoir-faire, cette manière d'analyser comment des acteurs combattent d'un point de vue économique,
02:56eh bien, on a identifié ce que nous, on a considéré comme étant des axes de risque de désindustrialisation.
03:04Et donc, on a mis en place neuf axes, qui eux-mêmes ont été subdivisés en 25 critères.
03:10Et dans ces neuf axes, on a à la fois le positionnement stratégique de l'entreprise dans son propre secteur,
03:17mais on a aussi sa vulnérabilité technologique.
03:21C'est ça.
03:22Sa vulnérabilité technologique, c'est important, c'est-à-dire est-ce qu'elle contrôle la technologie qu'elle utilise,
03:26l'encadrement juridique, les décisions des politiques publiques, la fiscalité, la situation financière de l'entreprise,
03:33les compétences, l'ancrage territorial et l'image et la notoriété de l'entreprise.
03:39Et aussi un point qui est peut-être le point le plus faible, qui est la structure actionnariat et la gouvernance,
03:44puisqu'on était parti du principe difficilement vérifiable qu'un actionnariat français de long terme dans une entreprise
03:51l'a rattaché plus fermement au territoire national.
03:55De la même manière que la nationalité des membres du comité exécutif,
03:59plus il y a de français, plus, en théorie, c'est le postulat qu'on a pris,
04:04ils étaient attachés au territoire français, ce qui n'est pas toujours le cas.
04:07C'est sûr. Arnaud de Morni, vous êtes le directeur adjoint du centre de recherche de l'école de guerre économique.
04:12Rentrons justement dans le concret avec les entreprises que vous passez au scanner de votre indice
04:17sur le risque de désindustrialisation.
04:20Il y a ArcelorMittal, il y a Renault, il y a Michelin, il y a évidemment l'entreprise Seb, Valeo, Sanofi, Danone,
04:26bref, les grandes entreprises françaises.
04:28Rentrons concrètement dans le sujet.
04:29À l'heure où on parle beaucoup de la politique énergétique de la France,
04:32on a vu des investissements qui sont colossaux de la part de l'Union Européenne vers les Etats-Unis,
04:37c'est la une de l'actualité ces derniers jours.
04:39Parlons de Renault.
04:40Renault, entreprise française, vous ciblez très bien dans votre rapport de l'école de guerre économique
04:45à quel point Renault est aujourd'hui victime d'une certaine manière
04:48des normes et de la politique de transition écologique de l'Union Européenne.
04:52C'est totalement paradoxal quand on voit les investissements à coups de milliards de façon faramineuse
04:57qu'elles s'apprêtent à envoyer du côté américain plutôt que de sauver l'industrie automobile européenne.
05:02Alors le cas Renault est exemplaire de trois dimensions qui sont structurelles
05:07sur les rapports entre les pays membres de l'Union Européenne, l'Union Européenne, etc.
05:12Le premier point, c'est que Renault, constructeur automobile,
05:16est touché de plein fouet par la stratégie du tout électrique de l'Union Européenne.
05:21Mais Renault a une part de responsabilité parce qu'en fait, dès 2007, il y a eu des annonces
05:26disant, attention, cette politique de tout électrique va créer un boulevard pour les produits chinois
05:33parce qu'ils sont en avance de technologie, ils sont en baisse de coûts, etc.
05:38Et donc, au niveau de l'Union Européenne, ça a été comme si rien n'existait.
05:43Et au niveau de Renault, ils ont peu agi pour défendre leurs propres intérêts.
05:48Ça, c'est le premier point, c'est que les conséquences matérielles de décision de transition
05:53sont peu prises en compte par les décideurs.
05:57Le deuxième point, c'est qu'au niveau européen, à nouveau,
06:01Renault, comme tous les constructeurs de tous les produits qui utilisent du plastique,
06:06vont devoir, à partir de 2030, dans le cadre du règlement sur l'usage unique, le PPWR,
06:12réemployer du plastique recyclé.
06:15Or, dans l'Union Européenne, sur tout l'ensemble du territoire,
06:18il y a une pénurie de production.
06:19Et l'analyse que nous, nous faisons, c'est qu'il n'y aura pas assez de plastique recyclé
06:24produit en Europe pour répondre aux besoins.
06:27Et donc, Renault, actuellement, il emploie 8% de plastique recyclé.
06:32Il va avoir une obligation réglementaire de 30%, c'est-à-dire fois 3,5.
06:36Et il va y avoir une pénurie de production.
06:40Donc, à ce moment-là, ils ne pourront pas vendre leurs produits.
06:41Parcèmement, ce sera beaucoup plus compliqué.
06:43Ce sera plus compliqué.
06:44En sachant que ce qui se passe, c'est qu'en Chine et aux États-Unis, il y a des logiques similaires.
06:50Et donc, l'autre hypothèse, c'est que les Chinois qui font du plastique recyclé
06:55vont l'utiliser parce que ça a plus de valeur ajoutée de vendre une voiture électrique
06:59que de vendre du produit recyclé.
07:01Bien sûr.
07:02Et enfin, pour l'énergie...
07:04Pardon, je vous écoute ?
07:06Non, allez-y, finissez sur l'énergie, c'est important.
07:09Et enfin, pour l'énergie, Renault, qui est un constructeur, une industrie électro-intense,
07:18est touché de plein fouet par le fait que la France ait décidé de respecter les règles
07:25du marché européen de l'électricité, qui considère que l'étalon, c'est le prix du gaz.
07:31Mais ça, c'est une autre manifestation du fonctionnement industriel dans l'Union européenne.
07:37C'est que, pour finir, l'industrie allemande est privilégiée dans les règles européennes.
07:42Et ça, on l'a bien vu.
07:43Un autre cas aussi emblématique de ce qu'on voit et ce qu'on a vu dans les négociations
07:46entre Ursula von der Leyen et Donald Trump concerne l'acier.
07:49En réalité, l'accord sur la majorité des exportations, il n'y aura, on va dire, des droits de douane que de 15%.
07:56En revanche, l'acier restera à 50%.
07:59Et dans votre étude sur la désindustrialisation et cet indice que vous mettez en place,
08:02vous étudiez aussi le cas d'ArcelorMittal.
08:05C'est-à-dire que, là aussi, c'est un géant français, un bijou français, totalement en danger.
08:11Alors, je ne dirais pas...
08:13Vous posez une question sous-jacente.
08:15Quelle est la définition d'une entreprise française ?
08:18Donc, en fait, nous, par rapport à ArcelorMittal, on considère qu'il y a un risque de 3,5 sur 5.
08:24Donc, c'est un risque important.
08:25Mais ce n'est pas tellement ça qui est important.
08:27C'est qu'on a identifié 5 vulnérabilités stratégiques.
08:30Qui, au-delà de la valeur de l'indice, un seul axe suffit pour qu'une entreprise ferme ou se délocalise.
08:39Donc, pour ArcelorMittal, premier aspect, effectivement,
08:44il y a la question des tarifs douaniers qui va être très, très important,
08:49puisque, en fait, leurs prix vont augmenter par rapport aux prix américains.
08:53Mais j'attire l'attention sur le fait que Donald Trump, en 2018,
08:57avait déjà fait la même chose avec un traité de tarifs douaniers sur l'acier et l'aluminium.
09:06Et que, pour finir, il était revenu deux ans plus tard sur le sujet.
09:11Donc, c'est peut-être une situation du même type.
09:14En tout cas, à l'heure actuelle, ça, c'est un problème majeur.
09:17Le deuxième problème, c'est qu'en fait, le COMEX et l'actionnariat de ArcelorMittal,
09:23donc les décisions de l'entreprise sont très peu français.
09:26Et on a pu voir, lors de l'audition du président d'ArcelorMittal
09:30devant la Commission des finances à l'Assemblée nationale,
09:33que le poids de la parole de cet industriel vis-à-vis de l'État français
09:38était très faible par rapport au poids de ses intérêts.
09:40Et que, là encore, des accords financièrement plus rentables pour lui,
09:45avec des logiques de transition,
09:47tout ça, il est un peu compliqué, je le reconnais,
09:49mais au niveau de l'Union européenne,
09:51en fait, il ne va pas respecter l'accord français sur les fonderies à hydrogène.
09:54Il va respecter plutôt un engagement vis-à-vis de l'Union européenne,
09:59parce que c'est plus rentable.
10:00Troisième point...
10:00Dernière question pour avancer un peu concrètement, Arnaud de Morni,
10:05et c'est un point avant qu'on doive se quitter sur...
10:07J'espérais être concret, je suis à présent...
10:10Non, non, non, bien sûr,
10:11mais pour être encore un peu plus concret sur, là aussi,
10:13un événement qu'on voit beaucoup dans l'actualité,
10:15avec notamment la loi Duplomb.
10:17On le voit, dont la pétition a atteint près de 2 millions de signataires,
10:21absolument tous les politiques regardent ça comme le lait sur le feu.
10:25Vous aussi, vous étudiez une entreprise,
10:27c'est l'entreprise SEB,
10:28c'est le groupe industriel qui regroupe les marques
10:31qui sont dans les maisons de tous les Français,
10:34c'est Tefal, c'est Moulinex, c'est Roventa, etc.
10:37C'est à la fois l'extensile de cuisine et le petit électroménager.
10:40C'est exactement ça.
10:41Et vous utilisez, justement, parmi les vulnérabilités concernant cette entreprise,
10:44vous évaluez déjà un risque assez élevé,
10:47et vous dites que les discours, justement, aussi,
10:49viennent et sont capables d'aller fragiliser une entreprise.
10:52Absolument, puisqu'en fait, l'entreprise SEB,
10:56enfin, le groupe SEB, par son entreprise Stéphal,
10:59a été partie prenante de la contre-fers entre janvier et mars
11:04sur la loi contre l'épiphase.
11:07Donc, l'épiphase sont des substances chimiques.
11:10On ne sait pas combien il y en a exactement,
11:12puisqu'en fonction des experts, il y en a entre 10, 12 ou 14 000.
11:17Et parmi ces piphases, il y en a qui sont considérés comme étant toxiques
11:21et qui sont déjà interdits par la loi en France.
11:23Les fameux polluants éternels.
11:25Voilà.
11:26Donc, en fait, les polluants éternels, en fait,
11:29là, on pourrait rapidement...
11:30En fait, la traduction du terme anglais,
11:32c'est les produits chimiques persistants.
11:35Et donc, rien que d'utiliser le terme polluants éternels,
11:38vous donnez crédit aux contradicteurs de l'utilisation de ces produits chimiques.
11:44Donc, en fait, il y a une controverse disant que, en fait,
11:46grosso modo, Tefal vendait des produits qui étaient toxiques pour la santé.
11:52Donc, le législateur français a considéré que ce n'était pas le cas.
11:55Donc, les produits de la marque Tefal ne sont pas considérés
12:00comme étant limités ou interdits en France.
12:03Mais leurs contradicteurs ont considéré qu'ils allaient mener la bataille.
12:09Mais de notre point de vue, une bataille essentiellement symbolique.
12:12Puisqu'en fait, la poêle Tefal, tout le monde la connaît.
12:14Donc, une victoire sur Tefal, ce serait une victoire sur toute l'industrie.
12:19Mais que parfois, les discours, en effet, peuvent alimenter les faiblesses,
12:23parfois, ou aller marteler sur les faiblesses de certaines entreprises ?
12:28Alors, nous considérons que dans la guerre économique,
12:30la guerre de l'information, c'est-à-dire l'utilisation de la controverse
12:33et de la polémique, c'est le vecteur principal de la guerre économique à l'heure actuelle.
12:40Parce qu'en fait, c'est ce qui est le plus rentable, au sens où il faut peu d'investissement.
12:45Et une bonne force le sera pour avoir pas mal de résultats.
12:48Voilà.
12:49Si vous avez des relais médiatiques, c'est d'autant plus aisé,
12:52surtout s'ils sont des relais engagés.
12:55Et ça coûte beaucoup moins cher que de devoir prendre le contrôle d'un sous-traitant.
12:59Donc, d'un point de vue économique, c'est beaucoup plus facile.
13:02Et en termes d'efficacité, c'est beaucoup plus rentable.
13:04Merci beaucoup à Nôme Morny, directeur adjoint du Centre de recherche de l'École économique de guerre,
13:09pour nous avoir alerté sur la création de cet indice,
13:11sur le risque de désindustrialisation dans notre pays.
13:15Dans un instant, qu'est-ce qui se passe du côté de la poste ?
13:17Est-ce que c'est encore un service public, après l'augmentation du prix du timbre,
13:20qui va atteindre la modique somme de 1,52 euros ?
13:26Est-ce qu'on peut encore dire, aujourd'hui, que la poste est utile ?
13:29Ce sera d'ailleurs l'un de nos débats à partir de 10h30.
13:31On en parle dans quelques instants, à tout de suite.

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