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  • 22/07/2025
Olivier Leducq, directeur général du groupe Tereos, était l'invité de Sandra Gandoin dans Good Morning Business, ce mardi 22 juillet. Il a réagi par rapport à la loi Duplomb, défendue par les producteurs de betterave, avant d'évoquer la question de la rentabilité agricole qui peut être compatible avec la santé et la préservation de l'écosystème, sur BFM Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.

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Transcription
00:00Le grand entretien, Raphaël Legendre m'a rejoint sur ce plateau, nous recevons Olivier Leduc, directeur général du groupe Théreos, bonjour.
00:06Bonjour, bonjour.
00:06Bienvenue dans la matinale de l'économie, vous êtes le deuxième producteur mondial de sucre, c'est Béguin, c'est, c'est la Perruche, ce sont des produits qu'on connaît très bien en France, évidemment.
00:15Une coopérative de 10 300 membres, 38 sites industriels, 15 000 collaborateurs, c'est un très gros groupe Théreos.
00:23Alors on va revenir évidemment sur votre actualité, sur votre plan de décarbonation, mais avant ça je voudrais vous faire réagir, évidemment, à ce qui se passe sur la loi Duplomb,
00:31cette pétition qui a recueilli un million et demi de signatures depuis quelques jours.
00:37Vous, vous la souteniez cette loi Duplomb, évidemment elle concerne les producteurs de betteraves qui ne sont pas traités de la même façon en France qu'ils ne le sont en Europe.
00:46Comment vous réagissez au mouvement citoyen ?
00:49Non mais franchement, la question que je me pose face à ça, c'est est-ce qu'on veut encore des agriculteurs en France ?
00:56On a aujourd'hui, et je les fréquente tous les jours, ce sont de nos coopérateurs, des femmes et des hommes qui sont étouffés par les contraintes.
01:04Ces mêmes femmes et ces mêmes hommes qui développent aujourd'hui des pratiques agriculturales, d'agriculture régénératrice, on en parlera peut-être tout à l'heure,
01:12pour décarboner, pour produire des matières premières plus durables, qui sont vraiment étouffées sous des contraintes qui peuvent être considérées parfois comme injustes ou injustifiées.
01:26Et surtout, vous l'avez souligné, nous jouons en France avec des règles du jeu qui sont différentes de ce qui se pratique ailleurs en Europe et ailleurs dans le monde,
01:33alors que nous sommes d'ailleurs exposés sur les mêmes marchés. Donc, ça crée un grand sentiment d'incompréhension.
01:39Qu'est-ce que vous répondez, Olivier Leduc, à la députée écologiste Sandrine Rousseau, qui a déclaré, je cite,
01:44« je n'en ai rien à péter de la rentabilité des agriculteurs » et qui en a remis une couche d'ailleurs hier,
01:50en expliquant que, quand on joue avec la santé des gens, c'est de l'argent sale, une attaque directe.
01:56Non mais ça m'a triste. Ça m'a triste. Encore une fois, d'abord, la productivité, ce n'est pas un gros mot.
02:05Ce sont des gens qui doivent vivre de leur production et vendre leur production, mais de tels propos, franchement, m'a tristes.
02:11Et la question que ça pose vraiment, c'est la place de la France et de l'agriculture française au sein de l'agriculture européenne et de l'agriculture mondiale.
02:18C'est un problème de souveraineté, pas seulement de souveraineté alimentaire, parce qu'avec la betterave, on fait du sucre, vous l'avez souligné,
02:25on fait aussi de l'alcool et de l'éthanol. Je rappellerai juste que pendant la crise du Covid, nous avons augmenté de manière très significative,
02:32à la demande du gouvernement d'ailleurs, notre production d'alcool pour servir les industries pharmaceutiques et l'industrie du gel hydroalcoolique.
02:38Si demain, il n'y a plus de betterave en France, si demain, on arrête la culture de la betterave, il n'y aura plus de production d'alcool en France non plus.
02:46Donc c'est vraiment un sujet de souveraineté qu'on traite un peu à la légère, je pense.
02:49J'entends très bien, évidemment, votre implication par rapport à ces producteurs de betterave.
02:54Est-ce que pour autant, ce n'est pas un peu court-termiste ? Est-ce qu'il ne faut pas... Vous-même, vous allez décarboner le secteur,
03:01donc ça importe dans votre secteur, cette décarbonation de l'agriculture.
03:05Est-ce qu'il ne faut pas voir à plus long terme, financer les alternatives, travailler là-dessus davantage ?
03:10C'est le cas. C'est le cas, sauf qu'on est sur du temps long et que dans une situation intermédiaire,
03:16les agriculteurs ont besoin de solutions, ont besoin de médicaments.
03:21On fait ça comme ça, d'autant plus que, si j'ai bien lu la loi, qui d'ailleurs a un processus législatif en cours
03:28qui doit passer au Conseil constitutionnel, donc on n'y a pas encore, si j'ai bien lu la loi,
03:32l'acétamipride ne sera utilisé que dans certains cas bien spécifiques.
03:36Il faudra démontrer une situation de crise.
03:38Ce n'est pas une utilisation à tout va de ce produit.
03:42Le secteur de la betterave est un des secteurs avec celui des noisettes qui demande vraiment le retour de la réautorisation de l'acétamipride.
03:50Aucune alternative n'existe à ce néonicotinoïde ?
03:54Pas aujourd'hui. Aucune alternative chimique, aucune alternative viable qui permet d'avoir des rendements,
04:00une productivité décente sur la culture n'est disponible encore aujourd'hui.
04:04Et pourtant, il y a des travaux de recherche, il y a le PNRI, le plan national de recherche qui a été lancé avec l'État,
04:11et que je souviens de l'État, donc il y a beaucoup de travaux en cours, mais qui durent depuis 5 ans.
04:15Tout ça a été lancé en 2020.
04:17De façon plus large, vous qui produisez du sucre à travers la betterave, la canne à sucre,
04:23quelle est la part de la betterave dans la production de sucre chez vous par exemple ?
04:29Un peu plus de la moitié.
04:30En fait, chez Tereos, le sucre ne représente qu'un peu moins de la totalité de notre activité, notre chiffre d'affaires.
04:37On a un produit très diversifié.
04:38Je voudrais dire qu'on est le deuxième producteur d'éthanol en Europe,
04:42deuxième producteur d'alcool en Europe,
04:44on est le troisième producteur d'amidon en Europe,
04:46on produit du gluten aussi, deuxième producteur mondial de gluten,
04:48donc on a une gamme de produits très diversifiés.
04:50Donc le sucre ne représente que la moitié de notre activité,
04:52la part de la betterave représente un peu plus de la moitié dans cette activité sucre.
04:56Et vous lancez aujourd'hui Cultivate Net Zero,
04:59qui est une offre structurée autour de la décarbonation,
05:01et de l'agriculture régénératrice.
05:06Quelle est l'ambition de cette initiative ?
05:08Expliquez-nous un peu de quoi il s'agit.
05:10Alors avec Cultivate Net Zero, on franchit une nouvelle étape.
05:13Vous avez eu la gentillesse de m'inviter l'année dernière d'ailleurs sur ce plateau
05:16pour vous exposer notre démarche de décarbonation,
05:20essentiellement industrielle à l'époque,
05:22avec un plan d'investissement de 800 millions d'euros
05:23pour réduire de 65% nos émissions de CO2 sur les 10 prochaines années.
05:29Aujourd'hui, on passe à l'étape suivante et on s'adresse à nos clients.
05:32Avec Cultivate Net Zero, on propose notre gamme de produits
05:37en version décarbonée et issue de l'agriculture régénératrice.
05:41Donc l'agriculture régénératrice, c'est un ensemble de pratiques agricoles vertueuses
05:45qui préservent la santé des sols,
05:47qui améliorent la teneur en carbone des sols,
05:49et qui est une première étape vers la décarbonation de la matière première.
05:56Et donc avec Cultivate Net Zero, on va permettre à nos clients,
05:59l'industrie cosmétique, l'industrie pharmaceutique,
06:01bien sûr l'industrie agroalimentaire,
06:03d'amorcer ou d'accélérer leur trajectoire de décarbonation
06:08en proposant une matière première plus durable,
06:11en réduisant l'empreinte carbone de notre matière première.
06:14Mais ça prend quelle forme de réduire les empreintes carbone,
06:16de réduire les émissions ?
06:18Concrètement, c'est quelles actions par exemple ?
06:20Eh bien, typiquement, il y a le volet agricole et le volet industriel.
06:25Sur le volet agricole, pour préserver la santé des sols, par exemple,
06:30c'est moins de labours, de manière à préserver la structure des sols,
06:33à préserver la vie dans les sols.
06:35C'est aussi le développement de couverture du sol,
06:38le plus longtemps possible pendant l'année,
06:40de manière à conserver la matière organique dans les sols,
06:43à éviter les émissions de CO2.
06:44Sur le volet industriel, ce qu'on a choisi,
06:47on est un industriel énergo-intensif,
06:49on utilise beaucoup de gaz,
06:50c'est de substituer ce gaz par de l'électricité.
06:53On va utiliser des technologies matures,
06:55des technologies éprouvées,
06:57pour électrifier nos process,
06:58et puis en France, on a de la chance,
06:59on a une électricité nucléaire,
07:01je ne vais pas encore me faire une amie avec Mme Brosseau,
07:03on a une électricité nucléaire qui est assez largement décarbonée,
07:07et donc qui nous permet de réduire nos émissions de carbone,
07:10en réduisant la part du gaz dans nos mix énergétiques,
07:12et en multipliant par deux ou trois la part de l'électricité.
07:16Mais ça demande des investissements très conséquents.
07:18Donc je voudrais revenir sur Cultivate Net Zero,
07:20et vous prendre un exemple.
07:21Un flacon de parfum, par exemple.
07:23Prenons un flacon de parfum de 100 ml.
07:25L'alcool est un ingrédient essentiel du parfum.
07:29Aujourd'hui, avec un alcool standard,
07:31l'alcool représente 45% de l'empreinte carbone
07:34de ce flacon de parfum,
07:36le contenant le verre, donc le verre y compris.
07:39Avec un alcool Cultivate Net Zero,
07:42avec une betterave Cultivate Net Zero,
07:44vous réduirez de 25% l'empreinte carbone totale
07:47de ce flacon de parfum.
07:48Alors on parle que d'un flacon de parfum,
07:50mais cet exemple, on peut le multiplier à l'infini
07:52par la multitude de produits du quotidien
07:56dans lesquels sont incorporés nos ingrédients.
07:59Raphaël ?
07:59Vous évoquez un programme en trois volets,
08:01Activate, Connect, Engage,
08:03pour accompagner la transition climatique.
08:05Comment ces briques s'articulent concrètement
08:08pour répondre aux enjeux des entreprises ?
08:11En fait, c'est un programme sur mesure.
08:13C'est-à-dire qu'en fonction de l'ambition
08:15de décarbonation du client,
08:18on va adapter la réduction de l'empreinte carbone
08:21du produit qu'on va lui fournir
08:23en fonction de ce besoin.
08:24C'est du sur mesure ?
08:25C'est vraiment du sur mesure.
08:27Donc il y a des programmes qui ne concernent
08:28que l'agriculture régénératrice.
08:30Le produit ne sera pas décarboné.
08:34La baisse de l'empreinte carbone au niveau industriel
08:36ne sera pas traduite dans l'empreinte carbone du produit.
08:39Il n'achètera que des produits issus
08:40de l'agriculture régénératrice.
08:41Et il y a des offres complètes
08:42où le client peut acheter de l'agriculture régénératrice,
08:45mais en même temps, un produit plus décarboné.
08:48C'est lui qui choisit le niveau de décarbonation,
08:51le niveau de réduction de l'empreinte carbone
08:52qu'il souhaite pour son produit
08:54en fonction de ses propres stratégies.
08:54Donc vous avez un catalogue de services,
08:56de producteurs, j'allais dire, finalement.
08:59Et les producteurs, comment vous les accompagnez ?
09:01Parce que c'est un vrai changement pour eux aussi, parfois.
09:03C'est une bonne question.
09:04C'est un gros changement.
09:06Il y a d'abord le temps de la mesure.
09:08On se doit, et c'est le rôle de la coopérative,
09:11d'accompagner nos coopérateurs
09:12pour les inciter à faire ce qu'on appelle
09:15les diagnostics carbone,
09:16à mesurer dans leur exploitation,
09:18pas seulement sur la betterave,
09:19sur toute leur exploitation,
09:21leur empreinte carbone,
09:22le niveau d'émission de CO2 qu'ils ont.
09:26Et la coopérative finance là
09:28une grande partie du coût de ce diagnostic carbone.
09:32Et puis, il y a le temps de l'amélioration.
09:35C'est-à-dire qu'on participe
09:36à un certain nombre de programmes
09:37avec d'autres coopératives
09:38pour partager ensemble un référentiel.
09:40Et ensuite, pour ceux de nos agriculteurs,
09:42on en a plusieurs centaines,
09:43aujourd'hui on en a 600,
09:44qui s'engagent dans une démarche de progrès,
09:46d'amélioration de leur empreinte carbone
09:48via la mise en place des pratiques
09:50que j'évoquais tout à l'heure.
09:52Nous leur restons une prime filière
09:53pour les accompagner.
09:54Parce que c'est des investissements,
09:55parce que c'est des coûts,
09:56parce que parfois c'est aussi
09:56une baisse de rendement
09:57et de productivité sur les premières années.
10:00Donc on les accompagne.
10:01Et c'est le rôle de la coopérative.
10:01Et on parle de quel quantum d'agriculteurs,
10:04de producteurs, là ?
10:05Aujourd'hui, vous l'avez dit tout à l'heure,
10:06on a 10 300 coopérateurs.
10:07Cette année, on aura fait
10:081 000 diagnostics carbone.
10:10Et on a 600 agriculteurs
10:11qui sont engagés
10:12dans l'agriculture régénératrice.
10:13On a pris un engagement,
10:14c'est que d'ici 2032,
10:1520 % des matières premières
10:17qu'on utilisera
10:18seront issues
10:18de l'agriculture régénératrice.
10:20Ça fait 8 millions de tonnes
10:21de matières premières
10:21au niveau du groupe 1.
10:23C'est-à-dire non seulement la betterave,
10:24mais également le blé,
10:25le maïs et la canne.
10:26Merci beaucoup Olivier Leduc
10:27d'être venu nous voir,
10:28directeur général du groupe Tereos.
10:30Merci d'être venu
10:31dans la matinale de l'économie.

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