Le philosophe André Comte-Sponville était l'invité du Face à Face d'Apolline de Malherbe ce mercredi 21 mai sur RMC et BFMTV.
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00:00puisque la loi sur la fin de vie a encore franchi une étape importante hier avec certains articles adoptés
00:05et on s'achemine plutôt vers l'acceptation de cette loi. Vous êtes pour ?
00:11Je suis pour. Depuis très très longtemps, je me bats pour une légalisation du suicide assisté et de l'euthanasie.
00:18Je suis content de voir qu'on arrive enfin au moment où une loi va être votée
00:24qui sera sans doute beaucoup plus restrictive que ce que je ne souhaite.
00:30Mais disons que c'est un premier pas et donc je m'en réjouis.
00:33Pourquoi plus restrictive ? Quels sont les garde-fous ?
00:36Puisque c'est l'expression qui avait notamment été utilisée par la ministre de la Santé
00:39qui n'imaginait pas cette loi sans garde-fous sur la lucidité, sur la décision collégiale.
00:45Ces garde-fous vous paraissent excessifs ?
00:47Non, il faut bien sûr des garde-fous, ça va de soi.
00:49Mais ce qui m'étonne, c'est que le débat sur l'euthanasie a été relancé puissamment en France il y a 20 ans
00:56à propos du jeune Vincent Imbert.
00:59Alors rappelez-vous, c'est un jeune homme de 20 ans, accidenté en moto, paralysé des quatre membres, aveugle et muet.
01:08Vous pouvez plus s'exprimer qu'en bougeant le pouce de la main gauche, je crois.
01:12Qui demande à mourir, qui supplie sa mère de l'aider à mourir.
01:15Sa mère accepte et donc elle est accusée d'assassinat.
01:20Le paradoxe, c'est que 20 ans plus tard, le jeune Vincent Imbert ne rentrerait pas dans le cadre de cette loi.
01:26Il ne pourrait pas en bénéficier puisqu'il n'était pas en fin de vie.
01:28Il avait 20 ans, il avait une espérance de vie de 60 ans devant lui.
01:32Il n'était même pas malade.
01:34Il était en bonne santé, simplement, terriblement handicapé par les quatre membres aveugles et muets.
01:41S'il avait souhaité vivre, il avait de soi qu'il fallait donner les moyens de vivre le mieux possible ou le moins mal possible.
01:47Mais dès lors qu'il décidait d'en mourir, de quel droit l'en empêcher ?
01:52De quel droit empêcher sa mère de l'aider à mourir ?
01:55Et donc, c'est quand même étonnant que 20 ans plus tard, on fasse une loi, mais qu'il laisserait le jeune Vincent Imbert dans le même état de détresse.
02:02Ça veut dire, André Comte-Sponville, que pour vous, la question effectivement de l'irréversabilité, du diagnostic de fin de vie, c'est ça qui limite trop la loi pour vous ?
02:15Oui, et d'autant plus que les accidentés, ça existe, il y en a pas mal, mais le pire, ce n'est pas ça.
02:22C'est la maladie d'Alzheimer.
02:24Il y a 225 000 nouveaux cas d'Alzheimer rien qu'en France chaque année.
02:29225 000 nouveaux cas chaque année.
02:31Or, il y a deux exigences dans cette loi qui vont en exclure les malades d'Alzheimer, parce qu'on leur demande qu'ils soient maîtres de leur discernement, et c'est une demande tout à fait légitime.
02:45Et donc, en fin de vie, nous ne pourrons plus bénéficier de cette loi, puisqu'en fin de vie d'Alzheimer, on n'est plus lucide.
02:52Mais s'ils demandent à mourir avant du temps où ils sont encore lucides, quand ils viennent d'être diagnostiqués au début de la dégradation, on leur dira, vous n'êtes pas en fin de vie.
03:00Effectivement, au début de l'Alzheimer, on a plusieurs années devant soi de vie.
03:05Et donc, soit ces deux exigences ensemble excluent en pratique les 225 000 nouveaux cas d'Alzheimer chaque année.
03:13Et donc, soit ces deux exigences ensemble.
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