00:00Bonjour Eugénie Bastier. Bonjour à tous. Avec nous ce matin sur Europe 1. Eugénie, alors vous, vous revenez ce matin sur un anniversaire, puisqu'il y a 50 ans, le 17 avril 1975, la capitale du Cambodge, Phnom Penh, tombait aux mains des Khmer Rouges.
00:14Le drapeau de la résistance flotte sur Phnom Penh. Le 17 avril 1975, c'est par ce titre glorieux que le quotidien Libération saluait avec enthousiasme la prise de la capitale cambodgienne par les Khmer Rouges.
00:27Le gouvernement militaire de Lonnel, soutenu par les Américains, allait laisser place à l'une des pires dictatures du XXe siècle.
00:35Ce régime communiste semi-clandestin, l'Ankar, allait pratiquer la torture, la déportation, la rééducation, l'autodafé, et aboutir à l'extermination d'1,7 million de personnes, soit un quart du peuple cambodgien.
00:48Mais à l'époque, l'arrivée des Khmer Rouges a été célébrée par l'intelligentsia de gauche française et ses médias.
00:54Le monde parlait alors d'une libération, d'un enthousiasme populaire évident. L'humanité célébrait la victoire du peuple cambodgien.
01:02Mais c'est vrai qu'en ce 17 avril 1975, on ne pouvait pas savoir ce qu'allait devenir le régime des Khmer Rouges.
01:07On pouvait déjà savoir en tout cas que derrière les grands idéaux communistes, les miradors et les goulags ne tardaient pas à surgir.
01:14En 1975, on connaissait déjà l'étendue de la répression soviétique.
01:18Quelques jours avant la prise de Phnom Penh, Solzhenistin passait à l'émission Apostrophe et mettait en garde les intellectuels occidentaux contre la tentation de s'aveugler sur les méfaits du communisme.
01:30D'ailleurs, à l'époque, toute la presse n'a pas été aussi enthousiaste à l'arrivée de ces Khmer Rouges.
01:34Le Figaro et Le Point ont très vite publié des témoignages de réfugiés fuyant la terreur et relatant l'ampleur de la répression.
01:41Il faut rappeler que dès le 17 avril, le jour de la prise de Phnom Penh, la capitale a été entièrement et violemment évacuée.
01:48Des centaines de milliers de personnes, femmes, vieillards, blessés, enfants, envoyés sans subsistance dans la campagne.
01:55Des dizaines de milliers sont morts.
01:56Ceux qui n'ont pas vu à l'époque ne voulaient pas voir.
01:59Alors, quelle leçon vous tirez de cet épisode pour aujourd'hui, 2025 ?
02:04D'abord, comme je vous le disais déjà la semaine dernière, on peut voir l'extraordinaire capacité des intellectuels de gauche à s'aveugler au nom des causes révolutionnaires
02:12et à refuser de reconnaître le bain de sang produit par leurs idéaux.
02:17Cette myopie historique s'est faite au nom de la cubabilité coloniale, de l'anti-américanisme primaire, d'un romantisme de la révolution et d'un marxisme à l'épreuve de tout réel.
02:27Et vous savez, le pire, c'est que la leçon des Khmer Rouges n'a même pas suffi.
02:31En 1979, l'année même où le régime sanguinaire était renversé, une autre révolution avait lieu, cette fois-ci à Téhéran.
02:40Elle n'était pas menée par les communistes, mais par les islamistes.
02:43Et devinez qui s'enthousiasma à nouveau ? Les intellectuels de Saint-Germain-des-Prés.
02:49Décidément, l'utopie est une maladie incurable.
