00:00La revue de presse d'Europe 1, Olivier Delagarde, l'actualité ce matin est tout le contraire,
00:04c'est une anti-bardeau, parce qu'elle n'est pas au bord de l'explosion, mais de l'épuisement.
00:08Il y a 50 ans, quasiment jour pour jour, paraissait l'un des livres les plus singuliers de l'histoire de la littérature française.
00:15Tentative d'épuisement d'un lieu parisien.
00:18Et ce sont les éco-week-ends qui ont eu la bonne idée de célébrer l'anniversaire de ce petit ovni littéraire.
00:23Le 18 octobre 1974, Georges Pérec s'installe effectivement Place Saint-Sulpice à Paris.
00:30Trois jours durant, il va observer la vie passée, noter ce qu'il voit, les gens, les bus, les nuages.
00:36Il en fera un texte rythmé comme une soirée diapo, et pourtant ce petit livre reste, un demi-siècle plus tard,
00:42curieusement fascinant, et il continue à se vendre comme des petits pains.
00:4750 ans après, Adrien Gombeau est retourné au Café de la Mairie, là où Pérec a vu et noté.
00:52Et on est frappé, écrit-il, par ce qui n'est plus.
00:55Où sont les autobianquis, les autocars Cityrama et les vélos Solex ?
01:00Et puis où sont les soutanes et les coiffes des bonnes sœurs, évaporées, seules à avoir survécu ?
01:05La valse des bus, 63, 70, 96, qui n'a jamais cessé de scander Saint-Sulpice.
01:11C'est la plus belle publicité littéraire pour la RATP, estime d'ailleurs l'éditeur.
01:15J'ai envoyé le livre à Jean Castex, s'il lit les éco-week-ends, j'aimerais beaucoup qu'il me réponde, déclare-t-il.
01:21Et s'il écoute Europe 1, il n'aura vraiment aucune excuse.
01:24Un autre livre dans l'actualité.
01:27Brigitte passe une tête dans mon bureau pour me montrer son nouveau tailleur.
01:30Un parafeur sous le bras, Alexis Colère semble soucieux.
01:33Un huissier patiente dans le couloir, sa lourde chaîne autour du cou.
01:37C'est un livre qui n'existe pas, pas encore, mais qu'Emmanuel Macron pourrait écrire à la manière de Georges Pérec,
01:42et qui s'intitulerait Tentative d'épuisement d'un président en son palais.
01:47Car à en croire le Figaro, ce matin, l'Elysée est désormais devenue une coquille vide.
01:51La frénésie, le pouvoir ont quitté les lieux, les conseillers démissionnent.
01:55Depuis la défaite des législatives, le pouvoir a changé de rive, les courtisans ont apparemment changé d'âme.
02:00Et maintenant, on a René Coty, il fait des inaugurations.
02:03Raïl, l'un d'entre eux, raconte Louis Auxaltère,
02:05c'est la fin de la toute-puissance présidentielle, titre le journal.
02:08Un peu de lecture peut-être à proposer à notre président désœuvré.
02:12Et bien qu'il commence peut-être par le dernier numéro de Philosophie Magazine,
02:15excellent mensuel où il trouvera la réponse à cette question.
02:18Puis-je rester ami avec quelqu'un dont je ne partage pas les idées politiques ?
02:22Sujet de circonstance, quand vous présidez en ce moment le Conseil des ministres.
02:25Alors, réponse du philosophe Charles Pépin, deux visions s'affrontent.
02:28La première idéaliste véhicule l'idée aristotélicienne,
02:33d'une amitié capable de nous rendre meilleurs, voire de nous permettre de changer d'avis.
02:37Pas très Macron ça.
02:39La deuxième, plus réaliste, à tout le moins acceptable,
02:42nous n'avons qu'une vie et elle peut être courte.
02:45Alors prenons ce qu'il y a à prendre et renonçons au reste.
02:49Et ça, cela ressemble furieusement à la démarche de Sylvain Tesson.
02:52Une fois par mois, l'écrivain raconte dans Le Point ses déambulations sur Terre.
02:56Mais c'est la mer qu'il prend cette fois.
02:58Un sous-marin, le suffrène, un lanceur d'engins nucléaires nouvelle génération,
03:03peuplé par des marins philosophes.
03:05Métaphysique, le sous-marinier ne quitte pas la profondeur, écrit Tesson.
03:09Monde d'abstraction, purement platonicien, on dirait des moines attendant un signe dans le néant.
03:14Lisez ce récit formidable et improbable parce que, pour moi qui ne jure que par les bivouacs aux étoiles, reconnaît-il,
03:21c'est une gageur de s'enfermer dans une cathédrale engloutie.
03:24Alors pour affronter les abysses, Tesson s'est armé de deux apophtègmes
03:28et je ne résiste pas au plaisir de vous les dévoiler.
03:31Celui de Bossuet d'abord, nous savons que nous allons mourir mais nous n'y croyons pas.
03:36Et celui d'Alphonse Allais enfin, qui deux siècles plus tard semblait lui répondre,
03:40ne nous prenons pas au sérieux, il n'y aura pas de survivants.
03:44Bon week-end quand même.
03:45Il était confiant en montant à bord du Suffren, visiblement, Sylvain Tesson.
03:48Il avait certitude de revenir, on dirait bien.
03:51C'est pas un homme de la mer.