Julie Pietri : “Ma vie n'est pas finie à 69 ans, n'en déplaise aux haters des réseaux sociaux”

  • il y a 4 mois
Véritable star des années 80, Julie Pietri a de quoi être fière. Avec 12 millions de disques vendus, six disques d’or, un disque de platine et un disque de diamant, la chanteuse, à la voix envoûtante, peut se vanter d’avoir réussi sa carrière, une carrière qu’elle ne souhaite surtout pas arrêter. Le 8 mars dernier, l’artiste de 69 ans, dont le titre “Ève, lève-toi” a marqué toute une génération, a dévoilé la réédition de son dernier album "Origami", sorti initialement en juin 2022. Un opus dans lequel elle propose deux duos inédits et inattendus et qui ont, sans aucun doute, ravi ses fans les plus fidèles.
Dans le nouveau format de Yahoo, "Inoubliable", elle a accepté de retracer son parcours, revenant sur les grands évènements qui ont marqué sa vie, notamment son enfance en Algérie et son cancer de l’endomètre. Un témoignage émouvant.

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Transcript
00:00 Bonjour, c'est Julie Pietri.
00:01 Vous me connaissez forcément avec Avec le Veu Toi, mais pas que.
00:04 Alors, je viens de sortir un double album vinyle
00:12 de mon CD Origami, qui s'appelle comme ça parce que si vous dépliez
00:16 les petites facettes d'un origami, vous verrez que c'est plus complexe
00:20 que ce que vous n'imaginiez.
00:22 Voilà, donc on a fait des choses qui n'ont rien à voir avec les années 80,
00:26 mais qui sont de très, très belles chansons.
00:28 Donc le double vinyle, le pitcher vinyle que je viens de sortir,
00:31 il y a deux duos avec mes amis
00:33 Lio et Ancila, qui a composé et écrit
00:39 le morceau À Quel Âge.
00:41 Et puis avec Lio, on a fait un magnifique morceau écrit vraiment
00:46 pour nous deux, qui s'appelle Femme du Sud.
00:49 Ça, c'est vrai qu'on ne va pas se changer.
00:51 Et dans ces bonus, c'est ce duo avec Ancila
00:53 qu'elle a écrit pour nous deux et qui s'appelle À Quel Âge.
00:57 On rentre dedans directement.
00:59 Je dis dans la première phrase
01:01 du duo de mes 68 ans.
01:04 Elle répond du haut de mes 33 décembre.
01:07 Quand je lui ai proposé le duo, elle m'a dit Ah, je suis trop contente.
01:10 Alors c'est moi qui vais essayer de composer et d'écrire.
01:14 Est ce que tu es d'accord ?
01:15 Je dis vas-y banco.
01:17 Et elle est rentrée dans le top du sujet qui est souvent dans nos métiers.
01:22 Par exemple, l'agisme.
01:24 Mais ne nous fermons pas
01:27 aux possibilités d'amour, d'ouverture.
01:30 Tout est possible et à tout âge.
01:33 N'en déplaise aux haters des réseaux sociaux.
01:36 Non, une vie ne finit pas à 68 ans.
01:39 Chanter dans ma vie, c'est vivre d'abord et puis aussi me permettre
01:43 de lutter contre les agressions de ce monde,
01:46 de transmettre aussi cette espèce d'amour qu'on vous renvoie, par exemple,
01:51 sur scène. C'est extraordinaire parce que ça vous revient en boomerang.
01:56 Également lutter contre mes angoisses parce que j'ai été atteinte d'un cancer
02:00 et j'ai été opérée l'année dernière.
02:02 Le retour à la musique, le retour à ce double vinyle et à la scène
02:06 me permet de me battre pour la vie et d'être dans la vie et d'être vivante.
02:11 Voilà en quoi la création me nourrit, mais elle est juste toute ma vie.
02:15 Ça me vient même sans y réfléchir.
02:18 Je suis nourrie par la passion de ce métier, la passion de chanter, d'écrire,
02:23 de produire, puisque c'est moi qui produis origami.
02:26 Alors, quand on m'a annoncé mon cancer, j'ai eu très peur.
02:29 L'histoire s'est avérée très compliquée.
02:31 J'étais déjà en service oncologique quand on m'a dit qu'il fallait donc
02:36 me faire faire une hystérectomie.
02:38 Quand on m'avait annoncé que pendant un an, je pourrais rien refaire.
02:41 Donc aujourd'hui, je ne serai pas devant vous.
02:42 Si on était à choisir ma perruque où je réfléchis sur ma vie,
02:48 où je me suis demandé si tout allait s'arrêter, y compris ma vie,
02:51 j'ai pensé beaucoup à ma fille.
02:53 Et puis, je me disais que je ne me voyais pas avec la tête rasée.
02:56 C'était lourd.
02:57 Et ensuite, après les bilans, on m'a annoncé que non,
03:00 je n'aurais qu'une hystérectomie et que je n'aurais qu'une radiothérapie.
03:05 Je pense que j'ai une puissance vitale et une énergie vitale
03:08 que j'ai envie de transmettre aux autres femmes et aux gens qui sont atteints de cancer.
03:12 On parle beaucoup d'octobre rose.
03:15 Moi, je voudrais parler de septembre turquoise sur les cancers féminins,
03:19 dont on parle peu, mais qui, s'ils sont pris trop tard, sont dans de très mauvais pronostics.
03:24 Donc, mesdames, les filles,
03:28 si vous avez le moindre symptôme,
03:31 un saignement, quelque chose comme ça, n'hésitez pas.
03:35 Quand c'est pris à temps,
03:37 on vit, on est vivant et on continue.
03:39 Donc, allez-y, vraiment, allez-y.
03:43 Consultez. Alors, en quoi, à 68 ans, la vie est-elle toujours aussi belle ?
03:47 Je ne me pose pas du tout la question.
03:49 Je ne vis pas du tout avec mon âge.
03:51 Je vis comme si j'en avais 38.
03:53 Le jour où j'aurai un déambulateur, je vous dirai que la vie est moche.
03:57 Ou encore, je ne suis pas sûre, comme dirait Madonna, l'âgisme,
04:01 on s'en fout, c'est fait pour quelques aigris.
04:04 Je ne suis pas du tout là-dedans, quoi.
04:06 Sauf que bon, un cancer, ça fatigue, mais je crois qu'à 38 ans, ça peut fatiguer aussi.
04:11 Moi qui suis née en Algérie, j'ai beaucoup d'ambivalence avec ça.
04:14 Je voudrais à la fois l'oublier et à la fois le célébrer,
04:17 parce que j'adore les pays d'Afrique du Nord.
04:22 C'est d'ailleurs dans ce sens-là que j'ai fait toute ma carrière,
04:25 même depuis Maria Magdalena, il y a quelque chose de profondément sud.
04:29 Et quand j'ai voulu le morceau "Ève, lève-toi",
04:33 je voulais le vouler dans les mélanges de cultures
04:36 qui ont fait que ce que je suis, ce que je suis.
04:39 Mais j'ai aussi vécu dans ma petite enfance des choses horriblement difficiles
04:44 que je ne souhaite à personne, qui est le lot d'aujourd'hui,
04:47 peut-être les enfants palestiniens, les enfants israéliens du 7 octobre.
04:51 Enfin, un massacre n'en exclut pas un autre.
04:54 Je n'ai vécu ma petite enfance que dans les bombes.
04:58 Et en regardant et en demandant pourquoi il y avait des gens par terre
05:01 couchés sous des couvertures et pourquoi il y avait du sang.
05:05 Ce que je vois de l'Algérie, c'est un ciel qui s'embrasse
05:09 parce qu'il y a dix bombes qui sautent en même temps.
05:11 Donc, je ne peux pas vous parler de la beauté.
05:13 Voilà, j'ai des sentiments, encore une fois, très ambivalents
05:16 où j'ai le sentiment que ma famille a beaucoup souffert.
05:21 Évidemment, il fallait partir d'un pays qui était le nôtre.
05:25 Nous, on est parti en 62, quand tout sautait.
05:27 Très vite, plus tard, moi, j'étais en inadéquation avec mon milieu
05:31 puisque moi, j'étais plutôt pour l'indépendance d'Algérie.
05:33 Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.
05:35 Et je n'étais pas très colonialiste.
05:37 C'est le moins qu'on puisse dire.
05:38 Je peux comprendre, par contre, que l'émotion des gens de ma famille.
05:43 L'exil n'a rien d'amusant pour qui que ce soit.
05:46 Donc, oui, je peux comprendre complètement ce point de vue
05:49 puisqu'il était présent dans ma chair, mais je peux comprendre
05:52 les envies d'indépendance
05:55 et le fait que le colonialisme n'est pas quelque chose de naturel.
05:59 L'Algérie n'est pas présente dans ma vie aujourd'hui.
06:01 Du tout.
06:03 J'ai fait ma carrière en France et Dieu merci.
06:05 J'ai été distinguée en 2019
06:07 au Liban, à Beyrouth.
06:11 J'ai reçu un Murex d'or pour l'ensemble de ma carrière.
06:15 Voilà pour les 12 millions de disques vendus jusqu'à aujourd'hui.
06:20 D'ailleurs, j'ai été plus distinguée au Liban qu'en France.
06:23 Donc, oui, je me considère comme une citoyenne du monde.
06:26 Je trouve que s'il y avait cette humanité qui se tienne un peu la main,
06:30 on serait un petit peu mieux aujourd'hui.
06:32 Mais je pense qu'on s'en éloigne beaucoup.
06:34 Les guerres sont à nos portes
06:36 et je trouve que c'est terrible, cet embrasement.
06:39 C'est terrible pour les générations qui arrivent.
06:41 Moi, j'ai pensé naïvement
06:43 que le XXIe siècle serait celui de la paix.
06:46 Ben dis donc, je me suis vachement gourée.
06:47 !

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