Actualité Hebdo du 21 Mai 2021 sur la CRTV

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00:00 [Musique]
00:18 Bonsoir, je tiens là un livre d'histoire politique du Cameroun rédigé par un de nos plus éminents universitaires, le professeur Magouar Oundoua sur l'état unitaire au Cameroun.
00:33 C'est que justement nous avons rendez-vous avec l'état unitaire et son histoire, mais également un des acteurs majeurs de cette histoire.
00:44 Au sens de Thomas Carlyle, écrivain et historien britannique, l'histoire du monde n'est à la vérité que la biographie des grands hommes.
00:55 Il en est du monde comme du Cameroun qui vient de tourner une page importante de son histoire cette semaine,
01:02 étouffant ainsi la biographie d'un homme d'état, Paul Bia, qui présidait au boulevard du 20 mai 1972 sa 37e parade militaire et civile à l'occasion des 51 ans de l'état unitaire.
01:16 La pluie qui a arrosé la capitale camerounaise et les manifestations n'étaient pas assez fortes pour doucher le souvenir et les images de la présence d'un homme réputé discret
01:29 qui participe de cette histoire camerounaise et qui, en 1972, année du référendum de l'état unitaire justement,
01:37 passait sa licence en droit privé à l'université de Yaoundé.
01:42 Philemon Young, puisqu'il s'agit de lui, connaît bien l'ancien et l'actuel régime qui l'a servi, tout comme le premier et le second président de la République du Cameroun.
01:53 Premier ministre et chef du gouvernement du 30 juin 2009 au 4 janvier 2019, il détient le record et sans doute le secret de la longévité à ce poste sous le renouveau.
02:06 Depuis le 17 avril 2020, il est grand chancelier des ordres nationaux et c'est l'invité de cette sortie d'actualité hebdo consacrée, comme je l'ai dit, à l'unité nationale et à son parcours des Titans.
02:22 Philemon Young, bonsoir et merci d'accueillir Actualité Hebdo ici dans votre résidence.
02:29 Merci, c'est pour moi un grand plaisir d'être avec vous.
02:33 Commençons par le défilé d'hier et disons même l'ensemble de la journée.
02:39 On a vu certaines personnalités partir du boulevard du 20 mai sous la pluie. Est-ce que c'était aussi votre cas?
02:46 Oui, effectivement, la pluie c'est la bénédiction. Nous avons tout regardé, tout s'est bien passé. Même le soir, tout s'est bien passé.
02:56 Évidemment, la pluie a joué son jeu. C'est tout à fait normal. Même l'année passée, il y a eu de la pluie. La journée était formidable malgré ça.
03:07 On a déjà l'habitude de cette pluie le 20 mai, comme vous le dites. On ne nous a jamais dit si le 20 mai 1972, le jour du référendum, il avait également plu.
03:18 Vous qui étiez là ce jour, partagez un peu avec nous les souvenirs de cette journée. Comment était-elle? A quoi vous vous êtes occupés vous-même?
03:28 Je ne crois pas qu'il y ait eu de pluie ce jour-là. C'était plutôt une bonne journée. On était des électeurs.
03:36 Parce que le 20 mai, on a voté à ce qu'on appelle communément Château d'eau. C'est l'endroit qui est tout près de l'université de Yandé.
03:46 En Guayquilie. En Guayquilie. À l'époque, il n'y avait qu'une seule université fédérale du Cameroun.
03:51 Donc on a voté effectivement. Nous étions étudiants et je crois que la plupart des gens autour de nous étaient des étudiants de l'université de Yandé.
04:03 Est-ce que ce référendum a été vraiment nécessaire?
04:09 Je crois que le référendum était absolument nécessaire. Nous sommes un grand pays et chaque pays s'organise pour trouver des solutions qui sont bonnes.
04:22 Je peux dire qu'avant, il y avait déjà des problèmes. Disons qu'en général, en Afrique, à l'époque, il y avait des coups d'État.
04:32 Nous étions un jeune pays et d'ailleurs, le Cameroun n'avait qu'à peine 12 ans d'existence.
04:39 Nous étions un jeune pays et nous n'avions pas à l'époque tous ces grands Camerounais qui sont ingénieurs, qui sont des professeurs et des médecins.
04:50 Nous n'avions pas beaucoup de gens et nous étions un pays pauvre. Je dis un pays pauvre par rapport à ce que nous sommes devenus, parce que nous sommes un grand pays qui est riche aussi.
05:02 Donc à l'époque, il fallait trouver une solution à un problème qui se posait.
05:09 Quel était ce problème?
05:11 Nous avons opté pour le fédéralisme en 1961 et le fédéralisme était lourd.
05:20 Il y avait trois gouvernements, un gouvernement fédéral, un gouvernement abouyan, un gouvernement ayande, c'est-à-dire de deux États fédérés.
05:31 Nous avions quatre assemblées. Il y avait une assemblée fédérale, une assemblée du Cameroun occidental et du Cameroun oriental, mais en plus, le House of Chiefs s'est bouillé.
05:45 Je crois que pendant les 12 ans, on a vu que c'était lourd, que ça coûtait cher et qu'il y avait énormément de frictions.
05:56 Donc il fallait trouver une solution.
05:59 On était assez mal organisé et avec la centralisation, c'est-à-dire la création de l'État unitaire, on est devenu un pays plus fort.
06:11 Je pense que le référendum était absolument nécessaire.
06:15 D'accord. En 1984, on est passé de la République unie du Cameroun, issue de la Constitution du 2 juin 1972, à la République du Cameroun, suite à une loi de l'Assemblée actée par le chef de l'État.
06:33 Certains disent souvent que cela a sapé les fondements et même les fondamentaux de l'unité nationale.
06:40 Est-ce que vous voyez les débuts d'une crise de l'État unitaire?
06:48 Non. On peut donner cela comme l'une des raisons pour lesquelles les séparatistes avancent.
06:54 Mais vous savez, le nom ne donne pas du pain aux Camerounais, ce n'est pas ce qui fait vivre les Camerounais.
07:00 Je crois qu'il y avait aussi la recherche de donner à ce pays un nom qui correspond à ce que nous voulons être.
07:08 Je crois qu'on peut donner cela comme argument, mais ce n'est pas un argument qui tient.
07:13 Pour commencer, le pays est ce qu'il est. Le nom de la République du Cameroun nous permet de continuer à travailler.
07:22 S'il y avait un acte qui empêchait aux Camerounais de bien travailler, de bien faire les études, de développer ce grand pays que nous avons, on n'aurait pas pensé que cela soit important.
07:33 Donc c'est un argument de séparatisme qui n'est pas important.
07:38 A cette période-là, Monsieur le Premier ministre, qu'est-ce qui soudait les Camerounais entre eux? Qu'est-ce qui les reliait fortement?
07:48 Je crois que pour parler de cette question, il faut regarder l'histoire de notre pays.
07:54 C'est-à-dire qu'en 1884, les Allemands sont arrivés ici et on est devenu une colonie allemande.
08:02 Et par la suite, après la Première Guerre mondiale, nous sommes devenus un pays divisé entre les Britanniques et les Français.
08:14 Et par la suite, il a fallu réunir le pays pour psychologiquement être ce qu'on souhaitait être.
08:22 Donc c'était important que l'on puisse redevenir le pays que nous sommes.
08:27 Et c'était important d'imaginer que les frères qui se connaissaient avant, à l'époque allemande, souhaitaient redevenir un pays, un seul pays.
08:37 Je crois que c'est cela qui a fait que les Camerounais ont été animés par ce sentiment de recréer le pays qu'ils connaissaient avant, à l'époque allemande.
08:49 Dans le discours officiel, le Cameroun est uni, mais ce n'est pas toujours le sentiment qu'on a lorsque l'on regarde les réseaux sociaux,
08:58 qu'on écoute les débats à la radio ou qu'on les regarde à la télévision.
09:04 Pour vous qui avez été au gouvernement et qui en avez même été le chef, qu'est-ce qui divise autant les Camerounais ?
09:11 C'est le partage du pouvoir et ses avantages ou alors l'arrogance de ceux qui veulent tout pour eux et rien pour les autres ?
09:20 Il y a tout ça, mais je crois que le problème de fond, c'est que nous sommes un pays en création.
09:27 En 60 ans, on ne peut pas tout faire.
09:30 Mais c'est sûr que dans l'avenir, certains des arguments qu'on avance maintenant, on ne va pas les avoir.
09:37 On peut imaginer qu'il y a des gens qui donnent des arguments par-ci, par-là,
09:42 mais il faudrait une grande éducation, une éducation civique, pour que l'on puisse penser à ce pays,
09:49 simplement en disant que nous sommes tous des Camerounais.
09:52 Mais il y a des gens qui peuvent utiliser d'autres arguments, les séparatistes, les tribalistes, etc.
10:00 Mais je crois que l'objectif, c'est de créer un pays fort.
10:07 Et je crois que nous sommes un pays comme tous les autres.
10:10 Aucun pays ne peut tout faire du jour au lendemain.
10:13 Vous allez en Europe, vous verrez des pays où il y a des tendances sécessionnistes par-ci, par-là.
10:21 Vous pouvez aller aux États-Unis, même à l'intérieur des États-Unis, vous allez au Canada, il y a des frictions.
10:27 Donc je ne crois pas que c'est ça qui devrait décourager les Camerounais.
10:31 Ce sont des problèmes que nous avons, mais nous sommes tous capables de trouver une solution.
10:36 Est-ce que nous avons quelque chose à copier du Canada, justement, par exemple ?
10:40 Vous avez été longuement en poste comme ambassadeur, me semblait-il, pendant une vingtaine d'années.
10:47 Puisque le Canada a également la chance d'utiliser le français et l'anglais, qu'est-ce que nous pouvons gagner du Canada ?
10:56 Je crois qu'avec le Canada, nous avons énormément de points communs.
11:01 D'abord, les deux langues que nous utilisons, en fait les langues principales,
11:07 parce qu'il y a l'anglais, il y a le français au Canada, mais il y a aussi d'autres langues au Canada,
11:12 comme nous avons d'autres langues ici.
11:14 Mais c'est surtout le fait que les Canadiens ont pu mettre ensemble l'expérience de la Grande-Bretagne et l'expérience de la France.
11:25 Ils ont pu créer un pays qui n'est pas parfait, il n'y a pas de pays parfait.
11:30 Mais nous pouvons regarder le système politique canadien et apprendre certaines choses.
11:36 Nous sommes maintenant au niveau de la décentralisation.
11:40 Les Canadiens ont plutôt une confédération et on peut continuer à travailler ensemble
11:46 et apprendre certaines choses du Canada et d'autres pays.
11:50 Mais je pense que le système canadien est très intéressant.
11:54 Nous avons aussi adopté le multiculturalisme, qui est déjà une politique au Canada depuis longtemps,
12:01 sous le Premier ministre Pierre Eliot Trudeau.
12:05 Et avec le multiculturalisme, je crois que c'est un début d'une solution.
12:11 Ça veut dire que je respecte votre culture et vous respectez la mienne.
12:16 Donc il y a l'équité quand on commence à regarder la culture.
12:20 Je crois que l'on peut regarder le Canada, mais il faut se méfier d'une solution qui a été fabriquée ailleurs.
12:27 Si on essaie de l'amener ici, il faut faire beaucoup de travail.
12:33 À propos des facteurs qui divisent les Camerounais et du train de vie des hauts fonctionnaires,
12:38 j'ai observé tout à l'heure, de manière tout à fait par hasard,
12:43 devant votre parking, il n'y a pas beaucoup de véhicules.
12:46 Ce n'est pas souvent le cas chez beaucoup de vos anciens collaborateurs ministres et hautes personnalités de la République.
12:54 Comment est-ce que, lorsque vous étiez Premier ministre,
12:58 vous gériez ce niveau d'accumulation des richesses, d'enrichissement des personnalités publiques ?
13:06 En fait, le Premier ministre est un secrétaire de l'État.
13:13 Il n'utilise que les moyens qui sont à sa disposition.
13:17 Je crois que c'est une pratique qui devrait devenir plus répandue.
13:25 Je ne pense pas que simplement voir le nombre de véhicules peut déterminer la capacité de qui que ce soit.
13:32 Je n'ai pas beaucoup de véhicules ici, mais en même temps, nous avons les véhicules dont on a besoin.
13:38 Donc, il ne vous est jamais arrivé de rappeler vos collaborateurs à l'ordre par rapport à leur train de vie ?
13:46 Non, mais vous savez, c'est une politique de notre président de rappeler à l'ordre tous les serviteurs de l'État.
13:54 On le fait constamment, mais nous ne sommes pas dans un monde parfait, M. Gok.
14:01 Si vous le dites, M. le Premier ministre, dites-moi, le 6 mai 1972, vous étiez où ?
14:08 J'étais en faculté de droit, mais je crois qu'à ce moment spécifique, j'étais à la cité universitaire.
14:17 J'ai suivi le discours du chef de l'État, le président Ahmadou Haïdio.
14:24 Sur la convocation du référendum ?
14:27 Oui, effectivement, quand il a dit cela, nous ne nous y attendions pas.
14:33 Mais il a aussi donné la journée de l'élection, de la révolution pacifique.
14:39 Nous avons déjà l'âge, nous allons voter et nous l'avons fait.
14:45 Je voudrais vous proposer ainsi qu'à nos téléspectateurs de replonger dans les souvenirs de cette journée du 6 mai 1972,
14:55 en réécoutant la déclaration du président Ahmadou Haïdio à l'Assemblée nationale.
15:01 Au cours des dix années écoulées, nous avons constamment privilégié ce qui nous unit.
15:08 C'est ainsi que tout ce qui pouvait être fait l'a été pour consolider toujours davantage l'intégration économique et sociale de la nation
15:19 et harmoniser les conditions de vie et le chance de développement sur les deux rives du Mungo.
15:26 C'est également ainsi que nous avons ensemble, dans la conscience aiguë de l'intérêt supérieur de la patrie cameroonaise,
15:36 créé l'Union nationale cameroonaise pour manifester de façon vivante l'unité de la nation et servir,
15:45 appuyer sur ces organismes annexes que vient de renforcer l'UNTC d'instrument de son destin.
15:52 Dans ces conditions où les structures fédérales apparaissent comme un handicap au développement rapide du pays,
15:59 en revanche, le peuple cameroonais a déjà consacré dans l'effet sa profonde unité, ma conviction,
16:08 Mesdames et Messieurs les députés, ma profonde conviction,
16:12 que le moment est venu de dépasser l'organisation fédérale de l'État.
16:20 J'ai, en conséquence, conscient de mes responsabilités à l'égard de la nation et devant l'histoire,
16:30 décidé de consulter par voie de référendum le peuple cameroonais, souverain et maître de son destin,
16:39 sur l'institution immédiate d'un État unitaire.
16:43 (Applaudissements)
16:49 Vous avez suivi ses discours en temps réel ?
16:53 Je l'ai très bien suivi et je suis-ce encore maintenant, c'est beau.
16:59 Comment les Cameroonais ont-ils réagi globalement autour de vous immédiatement après ses discours ?
17:08 Je dois avouer que nous, dans les milliers de studiantins, la plupart des gens étaient pour. Pourquoi ?
17:18 C'est que quand vous regardez depuis, on en a parlé parmi nos enseignants aussi,
17:25 la plupart des pays dans l'histoire centralisent d'abord, avant de décentraliser.
17:34 Il faut avoir un pays fort, un pays uni, avant de décentraliser.
17:40 Donc ça c'est un processus que je trouve tout à fait normal.
17:44 Quand on a eu la réunification en 1961, on a créé un système qui était trop ouvert
17:53 et qui n'était pas assez bon pour organiser un jeune pays.
18:00 C'est pour cela qu'en 1972, on s'est rendu compte qu'il fallait trouver une solution.
18:07 Et donc cette solution sort de notre culture politique, sort de notre système économique,
18:14 en fait sortait à l'époque de notre système économique,
18:17 dont la centralisation était absolument nécessaire.
18:21 Et on peut aussi dire que par la suite, en 1996, on a pu décentraliser
18:28 parce qu'on avait déjà un pays unitaire et un pays fort.
18:33 Je voudrais maintenant recueillir votre regard sur un des éléments de force de notre unité nationale,
18:40 mais qui est devenu une faiblesse, l'équilibre régional,
18:43 adopté par l'État pour limiter les injustices, est instrumentalisé,
18:48 est torpillé par ceux qui ont la signature ou le pouvoir politique.
18:54 Et généralement, ce n'est pas toujours les meilleurs qui sont retenus à tel concours
19:00 ou promus à tel poste dans l'administration.
19:03 Dans vos milieux de pouvoir, est-ce qu'il y a eu souvent,
19:07 est-ce qu'il y a souvent même un débat sur cette politique d'équilibre régional ?
19:12 Oui, c'est sûr qu'il y a un débat, mais nous sommes dans une jeune société.
19:18 Il est absolument important de s'organiser pour que l'on puisse avoir la participation de tout le monde.
19:26 Et je crois que quand vous regardez de près, il serait anormal,
19:31 si on se basait uniquement sur les intelligences,
19:35 d'avoir une ou deux régions qui occupent tous les postes.
19:39 Ce ne serait pas bien.
19:41 Et je crois que l'équilibre régional nous permet d'organiser le pays.
19:46 C'est sûr qu'un jour, quand on sera super développé,
19:51 quand on aura ce qu'on a dans beaucoup de pays,
19:56 où le système est déjà tellement bien,
19:59 où il y a déjà un équilibre national,
20:02 où toutes les régions sont bien placées,
20:04 et où on n'a plus d'équilibre à trouver,
20:07 à ce moment-là, on pourrait mettre ça à l'écart.
20:10 Mais pour le moment, c'est très important
20:13 pour qu'on n'ait pas de régions qui sont écartées.
20:18 Comment replacer l'unité au centre des préoccupations?
20:23 Alors, l'unité nationale est absolument nécessaire.
20:27 Si l'unité souffre, c'est le pays qui va souffrir.
20:31 Et c'est pour cela que le président Paul Biya insiste sur l'unité de la nation.
20:37 Mais regardez, on ne peut pas laisser tomber la tribu.
20:43 La tribu en tant que telle n'est pas un problème.
20:46 Le tribalisme est un problème parce que c'est un abus.
20:50 Et le tribalisme à outrance est dangereux.
20:54 Mais la tribu en tant que telle ne pose pas de problème.
20:58 La tribu est même une question d'identité.
21:02 Mais je m'appelle et vous appelez M. Ngoc.
21:07 Vous êtes d'une tribu, je suis d'une tribu aussi.
21:10 Ça en tant que telle ne pose pas de problème.
21:13 Mais il peut y avoir des abus si chacun de nous se comporte mal en utilisant sa tribu.
21:19 Je crois que s'il y a des failles dans ce domaine,
21:24 ce sont des failles qui proviennent de nous les êtres humains qui sont imparfaits.
21:29 Ce n'est pas la politique qui est mauvaise.
21:31 Et le chef de l'État insiste sur le fait que nous devrions respecter tout le monde
21:38 et que dans la gestion des choses, que ce soit l'argent ou le personnel de l'État,
21:43 que l'on soit plus juste.
21:46 Mais ce n'est pas une politique nationale.
21:48 S'il y a des gens qui commettent des abus,
21:51 mais ça ce n'est pas la politique de notre pays.
21:54 Mais il faut continuer à travailler contre ça.
21:56 Et le chef de l'État dans ses discours, dans ce qu'il dit,
22:00 ne fait qu'insister sur le fait qu'il faut chaque fois bien gérer.
22:04 Mais est-ce qu'il a suivi le président de la République dans ce qu'il dit,
22:08 notamment au niveau de l'équipe gouvernementale,
22:12 pour les souvenirs que vous vous en gardez ?
22:14 Je crois que le chef de l'État a suivi.
22:16 Mais regardez, quand on nomme les gens, on regarde le ministère,
22:22 on fait attention pour que les gens ne viennent pas d'un seul village.
22:27 Ça c'est déjà une façon d'appliquer la politique du chef de l'État.
22:32 Quand on travaille sur le budget,
22:35 le budget n'est pas dépensé uniquement à Yaoundé.
22:38 On dépense le budget à Yaoundé, à Douala, à Bamenda,
22:42 et à Nkelemeduka et à Nkambé.
22:45 Donc il y a un essai, il y a une tentative
22:49 de trouver des solutions qui sont bonnes.
22:51 Mais c'est sûr que de temps en temps, on aura des abus.
22:55 Vous avez parlé tout à l'heure de votre appartenance et de la mienne.
23:01 D'accord, mais quand on arrive dans un cabinet ministériel, par exemple,
23:06 qui est dirigé, disons que vous l'avez dit, par M. Yan,
23:10 et qu'on trouve une succession de Yans
23:14 à des postes divers ou des gens du village,
23:18 est-ce que c'est normal, est-ce qu'il n'y a pas moyen,
23:23 au niveau, par exemple, de la primature,
23:26 de prendre une décision qui annule ce genre de procédés?
23:30 Mais si ça arrivait comme ça, le Premier ministre peut annuler ça.
23:36 Voici comment ça se passe dans la réalité.
23:39 La plupart des nominations, d'un certain niveau, en fait,
23:44 sont les plus bases.
23:48 Les services du Premier ministre regardent ça,
23:52 pour s'assurer qu'il n'y a pas d'abus.
23:55 Et si on trouve qu'il y a des cas où on risque d'avoir des abus,
23:59 on attire l'attention du ministre là-dessus.
24:02 Et c'est constamment ça.
24:05 Même les nominations par le Premier ministre,
24:08 le directeur du conseil technique,
24:11 ils font le feu vers la présidence.
24:14 Et l'une des raisons, c'est pour tout faire,
24:17 pour que l'on ne nomme pas tous les directeurs d'un seul village.
24:21 Un ou deux mots sur la crise dans les régions du nord-ouest et du sud-ouest.
24:27 Il se dit que le calme revient,
24:30 mais pourquoi, malgré les efforts de l'État
24:33 et le soutien de certains pays amis, comme les États-Unis,
24:36 le banditisme et la criminalité continuent?
24:39 Est-ce que, honnêtement, les séparatistes n'ont pas des soutiens de l'intérieur parmi vous, les élites?
24:46 Non. C'est possible, mais ce n'est pas probable.
24:52 En fait, je dis ceci parce qu'il y a des gens à l'extérieur
24:57 qui sont méchants, qui financent le séparatisme.
25:01 Ce qu'on peut appeler communément la sécession, le projet de sécession.
25:06 Je ne peux pas dire que ces gens sont tous à l'extérieur.
25:11 Il peut y avoir des gens ici à l'intérieur qui le font.
25:15 Mais ce ne sont pas tous des malfaiteurs, ce ne sont pas des gens biens.
25:19 Parce que le séparatisme n'est pas bien, ce n'est pas un bon projet.
25:23 D'ailleurs, c'est un crime, parce que l'article 64 de la Constitution
25:30 dit que tout ce qui est séparatisme, qui détruit l'unité du pays,
25:36 l'intégrité territoriale de la nation, est à bannir.
25:41 Ce n'est pas permis, ce n'est même pas une option.
25:45 Donc, je pense que si les séparatistes n'ont pas cessé de faire ce qu'ils font,
25:50 de commettre les crimes, ce n'est pas parce que l'État ne fait rien.
25:56 C'est parce que les malfaiteurs sont méchants et continuent à faire du mal.
26:01 Donc, je dis qu'il y a des gens à l'extérieur qui financent ça.
26:05 Mais je ne peux pas dire, je ne peux pas savoir tout ce qui se passe.
26:09 Il peut y avoir des malfaiteurs ici au Cameroun qui financent aussi ça.
26:14 On va poursuivre ce sujet dans un instant.
26:17 Mais petite question, M. le Premier ministre,
26:19 vos bureaux actuels sont au palais de l'unité,
26:23 mais vous vous y êtes rendu quand même hier pour la réception.
26:27 Vous ne vous lassez pas d'aller au palais de l'unité?
26:30 Non, pas du tout, puisque ça fait partie de ma vie.
26:34 J'ai d'abord travaillé au palais de l'unité quand je suis rentré du Canada.
26:39 J'ai fait 4 ans et demi là-bas.
26:41 Et puis je suis parti au service du Premier ministre.
26:45 Et depuis 3 ans, je travaille encore au palais de l'unité.
26:50 Et j'ai un autre poste, je suis grand chancelier.
26:53 Donc je mire tous les jours de lundi à vendredi.
26:57 Sans gêne, ça ne me gêne pas.
26:59 Très bien, sauf que hier c'était pour la fête et non pour le travail.
27:03 Et nous allons replonger dans l'atmosphère de la journée d'hier.
27:07 Le film du défilé civil et militaire au boulevard du Vemey,
27:12 mais aussi cette réception au palais de l'unité.
27:15 Voici le récit de Yves-Marc Meuzot.
27:19 Dès les premières heures de cette matinée du 20 mai 2023,
27:23 l'esplanade du palais de l'unité offre un spectacle très coloré.
27:27 On chante et on danse avec comme à l'accoutumée des acteurs joyeux.
27:31 Un spectacle interactif auquel il est difficile, très difficile de résister.
27:36 Un grand moment de fraternité qui ne va pas tarder à connaître son pic
27:40 avec la sortie du président de la république Paul Biya,
27:43 précédée par une escorte d'honneur et de sécurité des grands jours.
27:47 Les honneurs rendus ici sont de type A, les plus relevés en pareille circonstance.
27:53 En route pour la grande communion, le cortège présidentiel est l'objet d'une grande fascination
27:58 le long des artères de la cité capitale, joliment pavoisées pour l'occasion.
28:03 Comment ne pas se laisser émerveiller par ce beau spectacle fait de sirènes et de chants.
28:09 Un spectacle qui sera bientôt enrichi par l'entrée en scène de la cavalerie
28:13 aux 24 motocyclettes de l'escadron-moto de la garde présidentielle
28:18 va se greffer désormais une belle chorégraphie de la cavalerie.
28:22 Symbole de puissance, de noblesse et de gloire,
28:26 les 60 chevaux qui viennent étoffer le cortège présidentiel offrent des clichés inoubliables.
28:33 A son arrivée au boulevard du Vemey, le président Biya est accueilli à sa descente de voiture
28:37 par le ministre délégué à la présidence chargée de la défense, Joseph Betty Assomont,
28:42 avant de s'incliner devant le drapeau de la République.
28:45 Le passage des troupes en revue qui va suivre et qui s'effectue en voiture
28:59 offre l'opportunité au chef de l'état, chef des forces armées, d'entrer en totale immersion avec la troupe.
29:05 Et c'est rassuré des capacités opérationnelles des forces de défense et des sécurités camerounaises
29:10 que Paul Biya va regagner la tribune officielle où il a été précédé par la première dame Chantal Biya
29:16 tout le gratin diplomatique, administratif, sociopolitique et militaire de notre pays.
29:22 En bonne place également, les invités spéciaux.
29:25 Ce 20 mai 2023, Paul Biya est celui vers qui convergent tous les regards.
29:30 C'est lui qui rassemble tout ce tailleur au page,
29:33 c'est lui le symbole de notre attachement à notre pays et à son unité.
29:38 Le passage en ouverture du contingent de symphonie militaire de la République arabe d'Egypte
29:43 offre des clichés très plaisants avec notamment la reprise des airs musicaux bien connus.
29:48 Le passage des différents carrés de défense spécial est tout aussi plaisant.
30:01 La garde présentielle toujours parée, le bataillon d'intervention rapide,
30:05 les troupes aéroportées et de coups de tabac offrent un spectacle des plus relevés.
30:09 De même que la gendarmerie nationale, les soldats de la loi, l'école militaire interarmée
30:14 et toutes les autres composantes de notre armée, terre, mer, air, la douane,
30:20 l'administration pénitentiaire, les anciens soldats et la police cambrounaise complètent le tableau.
30:26 Attentifs d'un bout à l'autre de la parade, aussi bien des troupes à pied que des troupes motorisées,
30:31 le président de la République ne va pas tarder à adresser ses chaleureuses félicitations à la fin du défilé
30:36 au commandant des troupes, le général de brigade Mouba Doubekriou.
30:40 Au passage des différents carrés du défilé civil, c'est un pôle billet très décontracté
30:55 qui voit passer les défilants en leur adressant à chaque fois ses encouragements.
30:59 Les mouvements d'ensemble, les messages portés par les banderoles,
31:03 renseignent à suffire sur l'attachement des Cambrounais à l'unité de notre pays et à celui qu'ils incarnent.
31:09 Près de deux heures se sont déjà écoulées lorsque le président de la République quitte la tribune pour regagner son véhicule.
31:15 Un dernier salut aux officiels et voilà le cortège qui s'ébranle à nouveau en direction du palais de l'unité
31:21 alors que de part et d'autre, des artères de l'itinéraire, les rues ont de nouveau été garnies de troupes d'animation,
31:27 de militants de formation politique et de citoyens ordinaires qui tiennent tous à vivre jusqu'au bout cette célébration du 20 mai 2023.
31:37 Quel commentaire vous inspire ces images?
31:42 Ce sont de très belles images. C'est un signe que nous sommes un pays stable.
31:49 Je suis ça depuis de longues années, depuis les années 70 et chaque fois ça me rappelle le fait que nous sommes un grand pays,
31:59 un pays qui évolue et qui a de grandes ambitions, chaque fois que je vois ça.
32:05 Monsieur le Premier ministre, nous parlions tout à l'heure du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
32:10 Certains pensent que la lettre de démission du RDPC de John Goufoncha du 9 juin 1990
32:17 contient les vrais problèmes et les vraies revendications qui ne sont pas celles des sécessionnistes.
32:24 A-t-on souvent relu cette lettre-là quand on propose des solutions au chef d'État?
32:31 Disons que la lettre de démission, je ne l'ai pas lu ici à l'époque, j'étais au Canada,
32:40 mais ce sont des revendications qui reviennent constamment.
32:46 Je crois que la plupart de ces revendications ont trouvé des solutions.
32:51 Il se pourrait qu'il y ait des revendications qui ne peuvent pas trouver de solution, comme à l'heure actuelle.
32:58 La sécession, ce n'est pas une option. Il faut trouver autre chose.
33:03 Mais je pense que chaque fois qu'un responsable démissionne ou donne une liste de revendications,
33:10 il faut les étudier pour trouver une solution.
33:14 Je peux prendre un exemple. En 1977 ou en 1978, il y a eu un groupe de Kameneos aux États-Unis.
33:23 Il s'appelait le Cameroon Action Movement, qui réclamait énormément de choses.
33:31 Par la suite, un comité a été créé par le président Ejo, présidé par le père Mouna.
33:38 J'ai fait partie de ce comité. L'actuel chef de l'État était là-bas en tant que premier ministre.
33:45 On a donné des conseils, on a tiré des conclusions, et on continue à travailler là-dessus.
33:53 Par la suite, en 2007, il y a eu un groupe de Kameneos qui a envoyé beaucoup de lettres ici
34:01 en disant que c'était le SNC et que les Nations Unies allaient donner l'indépendance aux deux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
34:10 Donc il y a constamment ça. Mais je crois qu'il est important de savoir, M. Ngoc,
34:16 que nous ne pouvons pas changer notre passé. C'est impossible. Nous ne pouvons que façonner l'avenir.
34:22 Et souvent, il y a des revendications qui sont intelligentes, logiquement,
34:28 mais dans la réalité, ça ne peut pas trouver de solution.
34:33 Ce pays vit une situation difficile à l'heure actuelle à cause des séparatistes.
34:39 Mais je crois qu'il faut toujours être ouvert pour construire un pays. Ce n'est pas facile.
34:44 Ce n'est pas pour les séparatistes, qui très souvent sont intelligents, mais manquent de l'expérience dans ce qui est pratique.
34:53 Pensez-vous que ce soit le désir profond et le souhait des populations, des concitoyens et concitoyennes du Nord-Ouest et du Sud-Ouest,
35:03 de revenir au fédéralisme?
35:06 Non, je ne crois pas. Peut-être qu'avant mon absence de la décentralisation, on aurait pu imaginer ça.
35:13 Mais à l'heure actuelle, je crois que la décentralisation, d'après ce que je comprends,
35:19 beaucoup de gens voient déjà venir ça et sont ambitieux et souhaiteraient avoir tout ce qui vient avec la décentralisation.
35:28 La décentralisation met en place un système qu'on n'a jamais eu dans ce pays.
35:33 Il y a trois types de gouvernements. Le gouvernement national, à Yohandé,
35:38 le gouvernement régional au niveau de la région, et un gouvernement au niveau de toutes les municipalités.
35:47 C'est très bien pour ce pays.
35:49 Et puis, on est en train de décentraliser non seulement les responsabilités, mais aussi les moyens.
35:55 Ça aussi, ça ne peut pas se faire du jour au lendemain. C'est un processus.
36:00 Je suis convaincu que quand on aura le temps d'expliquer à tout le monde
36:05 et de faire voir tout le monde ce que la décentralisation peut faire,
36:09 les gens ne vont pas aller chercher un fédéralisme qui n'a pas d'avenir.
36:14 Pourquoi est-ce qu'on a laissé tomber le fédéralisme?
36:17 Je ne crois pas que ce soit une formule qui va satisfaire tout le monde.
36:22 J'étais au Canada, mais je crois que dans les années avant la constitution de 1996,
36:31 il y a eu des arguments partout.
36:34 Et le Parlement a retenu la décentralisation, enfin, l'état unitaire décentralisé.
36:41 Donc, c'est la solution qui nous convient.
36:44 Il ne faut pas insister comme font certains partis politiques.
36:48 Si ce n'est pas le fédéralisme, c'est fini. Ce n'est pas correct.
36:52 Et dans un pays, la démocratie doit avoir un sens.
36:55 Du moment où le Parlement a arrêté que c'est la décentralisation, il faut suivre ça.
37:01 Parce que le Parlement représente le peuple.
37:03 Absolument. Le Parlement est l'incarnation du peuple.
37:08 Le Parlement représente un peuple qui, chaque fois, vote.
37:13 Donc, il fait confiance au Parlement.
37:16 Donc, je pense que la solution à l'heure actuelle, c'est la décentralisation, et non pas le fédéralisme.
37:23 D'ailleurs, l'État est déjà en train de reconstruire.
37:27 Et sur cette reconstruction-là, est-ce que les conditions sont vraiment réunies?
37:32 Vous qui connaissez mieux le terrain.
37:34 D'ailleurs, qu'est-ce qu'il faut reconstruire? C'est l'état d'esprit des gens par rapport à la République, ou alors les infrastructures?
37:42 Il y a énormément de choses. Il y a les infrastructures.
37:46 Mais la première des choses, c'est de construire les gens psychologiquement.
37:50 C'est sûr que la plupart des gens ont perdu confiance en eux-mêmes.
37:55 Il faudrait travailler là-dessus.
37:58 Mais je fais confiance à la commission qui a été mise en place, qui est supervisée, qui est gérée par le Premier ministre, chef du gouvernement.
38:08 Je crois que, directement, c'est son directeur de cabinet.
38:12 Je crois que cette commission va tout faire pour que l'on puisse procéder à tous les niveaux.
38:18 Il y a les êtres humains, il y a les infrastructures, et puis, en général, les écoles, les enfants.
38:24 Et puis, notre développement dans ces régions-là, en ce qui concerne la politique, l'économie et la culture, on ne devrait rien négliger.
38:35 Mais je suis convaincu que, comme c'est un processus, on finira par trouver des solutions.
38:41 Mais je ne pense pas que ce soit un événement du jour au lendemain. Non, c'est un processus.
38:48 Ce ne sera pas par une baguette magique.
38:50 Il n'y a pas de magie dans ce type de domaine.
38:52 Et je suis content de dire que ce que j'ai vu, c'est déjà un bon début.
38:57 Mais il y a un problème de fond.
38:59 Qu'est-ce que vous avez vu, M. le Premier ministre ?
39:01 En fait, il y a déjà des gens qui parlent de ça, et c'est un bon signe.
39:05 Qui parlent de cette reconstruction et qui sont convaincus que ça va tout changer.
39:11 Mais je voulais ajouter, je suis convaincu que l'un des plus grands problèmes, c'est comment trouver des moyens pour reconstruire.
39:21 Parce que ça demande d'énormes sommes d'argent.
39:25 Et nous sommes un pays qui a d'autres problèmes, et on ne peut pas, du jour au lendemain, trouver tous les moyens dont on a besoin.
39:32 Mais je suis convaincu qu'avec le temps, on va y aller, on va trouver des solutions.
39:38 La reconstruction ne peut pas se faire du jour au lendemain.
39:42 M. le Premier ministre, si vous le permettez, revisitons maintenant quelques souvenirs de votre parcours.
39:49 Quand vous sortez magistrat en 1974 de l'École nationale d'administration et de magistrature, vous avez été, me semblait-il, major de votre promotion.
40:01 Oui.
40:02 Alors, partagez-nous un peu votre recette pour vous imposer de cette façon-là, étant anglophone, dans une école marquée par la prédominance du français et des francophones.
40:16 Nous avons eu la chance, quand j'étais plus jeune, d'avoir des enseignants du français qui étaient de français à l'école secondaire,
40:29 et des américains, des volontaires de la paix, qui nous enseignaient l'anglais.
40:35 Et par la suite, je suis devenu étudiant à l'université, et j'ai réfléchi, et je me suis dit que le français est une langue dont on a besoin, dont je n'ai pas de choix.
40:49 Donc, j'ai commencé à travailler, j'ai continué à travailler à l'ENAM, et je crois que j'ai eu le résultat que j'ai eu à cause de ce travail.
40:58 Je trouvais qu'à l'époque, la plupart de nos enseignants à l'université et à l'ENAM étaient de français.
41:05 Donc, je n'ai pas de recette spéciale, c'est simplement le travail.
41:10 Et puis, je n'avais pas de choix parce que je me suis dit, si je veux faire ma petite contribution en tant que Camonnet, en travaillant soit au village ou dans le tribunal, il faut d'abord apprendre à l'école.
41:23 C'est ce que j'ai dit, et j'ai pu le faire.
41:26 Et à propos du travail, vous vous êtes toujours investi aux côtés d'un homme, le chef de l'État Paul Biya.
41:33 Je voudrais vous proposer de le réécouter sur la question centrale qui concerne l'unité nationale, dans un extrait de son message à la nation le 31 décembre 2017.
41:47 Nous écoutons le chef de l'État.
41:50 Le Cameroun a, dans un contexte difficile, confirmé aux yeux du monde la solidité de ses institutions, la résilience de son économie et son attachement à l'unité nationale.
42:11 Notre pays a en effet démontré une formidable capacité à relever les multiples défis auxquels il a été confronté au plan sécuritaire, économique ou social.
42:31 Cette performance, c'est d'abord à vous qui la doit, Camerounaises et Camerounais.
42:39 De nombreux défis interpellent notre nation.
42:43 Nous devons les relever ensemble, dans la fraternité, dans le respect des institutions et dans l'esprit de concorde nationale.
42:55 Dans cette optique, le Cameroun est pour chacun d'entre nous un précieux héritage.
43:04 Sachons rester dignes de l'héritage reçu, ce Cameroun uni qui va debout, fier et jaloux de sa liberté.
43:18 Monsieur le Premier ministre, racontez-nous un peu votre rencontre avec cet homme, comment il vous a recruté finalement.
43:28 J'ai rencontré le président Paul Biya pour la toute première fois le 28 juin 1975. C'était un samedi.
43:42 J'ai passé deux heures avec lui. Il a été très gentil, on a beaucoup causé, il m'a servi à boire.
43:56 Et par la suite, je suis parti. Et deux jours après, je suis devenu vice-ministre de l'administration territoriale.
44:06 C'était donc ce que vous appelez dans votre jargon une consultation.
44:10 Je ne sais pas, une conversation ou une consultation, je ne sais pas.
44:18 Mais c'était une bonne conversation. Mais deux jours après, je suis devenu vice-ministre de l'administration territoriale, nommé par le président Madou Aïdjo.
44:28 Et quand vous devenez premier ministre, comment ça se passe? Vous le rencontrez également la veille?
44:38 Non. J'étais à la présidence et j'avais pas mal d'audience auprès du président de la république.
44:53 Il m'appelle, je viens et puis on parle. Ça peut être un sujet sur lequel il m'a demandé de réfléchir ou ça peut être des conversations.
45:06 Et puis par la suite, un jour il m'a dit, vous serez premier ministre.
45:14 J'ai sûrement dit oui parce que j'ai lui expliqué que tout ce qui me permet de servir le pays est bon pour moi.
45:24 Et puis il m'a nommé premier ministre. Et c'était le 30 juin 2009.
45:32 Et premier ministre donc, on apprend que certains ministres ne font pas toujours allégeance au chef du gouvernement,
45:42 estimant qu'ils n'ont de compte à rendre qu'au chef de l'état. En 10 ans de vie, de séjour à la primature,
45:50 est-ce que vous avez eu ce genre de situation dans vos équipes successives? Et si oui, comment vous avez tranché?
45:58 Non, je crois qu'on peut tout raconter, il peut y avoir beaucoup de rumeurs, mais ça c'est dans la rue et aussi dans les journaux.
46:08 Mais la plupart des ministres, je ne sais pas ce qu'ils pensent ou ce qu'ils disent quand ils sont dans leur vie privée,
46:17 la plupart des ministres respectent le premier ministre.
46:21 La plupart, c'est-à-dire qu'il y a souvent des répercussions. Je peux imaginer qu'il y a des répercussions, oui, il peut y avoir ça.
46:31 Mais il ne m'intéresse pas. Ce n'est pas la pratique de tous les jours comme ça.
46:36 Mais je voudrais dire ceci, la constitution est claire là-dessus. La constitution dit que le premier ministre dirige l'action du gouvernement.
46:46 Il y a aussi un mot qu'on peut utiliser, et je crois que dans certains pays on utilise ça, "cordonne".
46:53 Ça dit que lui, il est entre le président de la république et les ministres.
47:00 Le président de la république peut donner des instructions au premier ministre et il les donne aux ministres.
47:08 Ou le président de la république peut faire autrement, il n'est pas obligé de toujours passer par le premier ministre.
47:15 Mais le travail est bien organisé.
47:19 Et le travail que fait le premier ministre est de loin beaucoup plus important que ce que l'on voit.
47:28 Il a des unions, il a des audiences auprès du chef de l'État, il le consulte, il lui envoie des notes,
47:36 et souvent les notes reviennent avec des annotations, et souvent les notes reçoivent les accords du chef de l'État.
47:44 Donc c'est un travail bien organisé.
47:48 Il ne faut pas imaginer que le premier ministre, on a dit ceci dans la rue, ça devient la réalité. Je ne crois pas.
47:57 Il y a la collaboration entre le premier ministre et le ministre.
48:01 Il préside un conseil de cabinet et il donne des instructions aux ministres.
48:07 Dans un pays comme le Cameroun où les gens aiment particulièrement le pouvoir et les honneurs,
48:15 est-ce qu'il n'est pas difficile et peut-être gênant, ne serait-ce qu'au plan protocolaire, de mener une vie d'ancien premier ministre ?
48:23 Non, dans ce pays non.
48:27 Dans ce pays non, parce qu'on respecte l'ancien premier ministre.
48:35 Il est obligé de respecter le monde. Mutuellement, il est respecté.
48:42 Et le premier ministre a reçu sa vie, et au moment où on l'a nommé premier ministre, il savait qu'un jour ça allait finir.
48:51 Et qu'il ne peut pas être premier ministre éternellement.
48:55 Donc je ne trouve pas de difficultés particulières.
48:59 Surtout dans le cas d'un premier ministre, comme dans mon cas, je parle de mon cas,
49:05 qui après avoir été premier ministre, travaille à la présidence.
49:14 Dans un ouvrage intitulé "Le deuil du pouvoir",
49:19 Edith Cresson, premier ministre de François Mitterrand, du 15 mai 1991 au 2 avril 1992,
49:27 confie à des journalistes que les plus beaux jours à Matignon, c'est le jour où on arrive et le jour où on part.
49:36 Le reste c'est l'enfer. Pour vous, quels sont les plus beaux jours à l'immeuble Étoile ?
49:42 Les plus beaux jours à l'immeuble Étoile, c'est le travail de tous les jours.
49:50 Parce qu'on a le sentiment, et d'ailleurs Edith Cresson vit dans un pays qui est développé.
49:57 Dans notre pays, nous sommes un pays en développement, nous sommes un jeune pays.
50:03 Il y a énormément de choses qui font plaisir au premier ministre quand il est complètement engagé.
50:10 C'est vrai qu'il célèbre le jour où il est nommé, mais aussi c'est important d'imaginer que s'il est vraiment engagé,
50:18 il travaille bien, il aura énormément de choses à se dire tous les jours que voilà du bon travail que j'ai fait.
50:26 C'est sûr qu'il y a des jours où il peut avoir des difficultés, où il peut avoir des dossiers qui sont difficiles à régler,
50:34 mais je ne pense pas que c'est l'enfer.
50:37 Si je termine par vous, Philippe Mouyang, et par l'avenir du Cameroun, le vôtre également.
50:44 Les deux chefs d'État qui ont connu le Cameroun jusqu'ici ont été d'abord premier ministre, vous avez occupé aussi cette fonction.
50:53 Est-ce que lorsque vous parcourez souvent les photos de votre collaboration avec l'un et l'autre président,
51:00 vous vous dites le troisième sur la liste, ce sera moi ?
51:05 Jamais. Ça n'a jamais traversé la tête. Pas du tout.
51:12 Même pas dans la perspective de certaines nations qui prétendent qu'après le président actuel, il faut un président anglophone ?
51:24 Non. Je peux vous poser une question délicate. Je crois qu'il ne faut pas aller déterminer qu'un président sera un président francophone,
51:37 ou anglophone, ou foulanifone. Ce n'est pas la bonne formule.
51:45 Les circonstances que nous vivons dans ce pays, c'est celui qui va être capable de faire le travail dans ces circonstances
51:56 qui devrait être président, et non pas quelqu'un qui devient président à cause de la langue qu'il parle.
52:03 Ce n'est pas bien. Je crois que c'est une mauvaise solution.
52:07 Il y a des pays qui ont tenté ça et ça n'a pas marché.
52:11 Je ne souhaiterais pas que quelqu'un devienne président plutôt que ce soit un personnage qui devienne président
52:17 parce qu'il peut gérer les problèmes que le pays a.
52:21 Je ne souhaiterais pas que quelqu'un puisse dire "je suis francophone ou anglophone, ou je parle la langue barmélicaine ou la langue de Ngel Médouka
52:32 et je deviens président". Ce ne serait pas la meilleure solution.
52:36 Notre pays fonctionne bien. Ce sont des pays où on devient chef ou président de la République parce que les circonstances se déroulent
52:47 de façon à ce que cette personne est la meilleure personne à ce moment-là.
52:53 Monsieur le Premier ministre, vous ne parlez pas beaucoup à la presse, c'est certainement votre attitude,
52:59 et c'est pour ça que je voudrais vous remercier d'avoir accepté de nous recevoir ici dans votre résidence et d'accorder cet entretien à la CRTV.
53:10 Merci beaucoup. Je suis content de vous avoir reçu ici. Je vous souhaite une bonne soirée.
53:18 Merci. Merci mesdames et messieurs.
53:21 C'était donc Philemon Yang, grand chancelier des ordres nationaux et ancien Premier ministre qui était notre invité ce dimanche.
53:31 Merci d'avoir regardé cette livraison d'actualité hebdo.
53:35 Faites attention à vous et prenons grand soin de notre cher et beau pays, le Cameroun. Bonsoir.
53:41 (Musique)