- 03/02/2023
Professeur de Criminologie, Alain Bauer était l’invité de Romain Desarbres dans #LaMatinale sur CNEWS.
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00:00 Alain Boer est à l'expo. Bonjour Alain Boer.
00:02 Professeur de criminologie au CNAM et auteur des livres de nombreux livres,
00:07 mais notamment "Espionnage pour les nuls" et "Criminologie pour les nuls".
00:12 Merci d'être là ce matin dans la matinale CNews.
00:16 Beaucoup de questions à vous poser Alain Boer, comme d'habitude.
00:18 J'aimerais qu'on démarre avec ce qui se passe dans le ciel américain.
00:21 Il y a un ballon espion qui survole le ciel américain.
00:25 Ballon espion chinois, nous dit Washington.
00:28 Déjà, qu'est-ce qu'on sait de ces ballons espions et de ce ballon ?
00:32 D'abord, on les a inventés.
00:34 C'est le frère mongolfier qui a inventé les ballons espions qui servaient
00:36 à regarder les mouvements de l'ennemi en hauteur.
00:39 C'est une invention nationale dont il faut être fier,
00:41 qui a peu à peu disparu et qui a beaucoup servi pendant la Première Guerre mondiale,
00:44 moins dans la deuxième.
00:45 Il se trouve qu'en fin 2022, les États-Unis ont annoncé le programme HELIOS,
00:50 qui est un immense système de ballons de surveillance et de renseignement.
00:55 Mais il faut savoir que ces ballons ont aussi une autre activité
00:58 qui me permet de compléter ce que disait mon estimé collègue, le général Vermont.
01:03 C'est qu'ils servent aussi à permettre d'assurer l'arrivée précise
01:07 de missiles hypersoniques sur leur cible.
01:10 Ils ne sont pas que des appareils passifs.
01:13 Ils ont aussi une activité militaire précise.
01:16 Les États-Unis, la Chine et la Russie ont mis en place des outils de type ballon
01:21 qui permettent de garantir que la cible par un faisceau laser ou infrarouge
01:26 sera bien guidée lors de la rentrée dans l'atmosphère d'un missile hypersonique.
01:31 Donc il faut être beaucoup plus inquiet que ce qu'on sous-entend.
01:35 Deuxièmement, ils sont peut-être chinois, il ne s'est pas identifié.
01:38 Et troisièmement, il n'est pas dans l'espace aérien américain.
01:41 Il est au-dessus de l'espace aérien américain,
01:43 puisque l'espace aérien n'est pas illimité, il n'est pas infini.
01:47 Il s'arrête à quelle altitude ?
01:48 Il est contrôlé jusqu'à 5 800 m.
01:50 Il est considéré comme sous responsabilité jusqu'à 20 000 m.
01:55 Et puis après, on est dans l'univers qui peut aller jusqu'à 100 km,
01:59 mais on est dans une zone ouverte.
02:01 C'est-à-dire que c'est comme les eaux internationales,
02:03 il y a un espace aérien international.
02:05 Alors on est toujours très inquiet.
02:07 Et vous avez pu voir dans le communiqué du NORAD,
02:09 qui couvre à la fois le Canada et les États-Unis,
02:11 puisque le Canada était le premier concerné avec les îles haéléo-siennes,
02:15 il dit qu'il n'est pas dangereux, il n'est pas agressif.
02:18 Il vous donne la liste de tout ce qui fait qu'ils ne vont pas essayer de l'abattre,
02:22 qui créera un incident international majeur.
02:25 Donc il est supposément chinois, il n'est pas dans l'espace aérien américain,
02:28 mais il est au-dessus.
02:29 Et donc il y a un doute sur, non pas ses intentions,
02:32 tout le monde a compris ce qu'il était en train de faire,
02:34 mais sa capacité d'agressivité.
02:36 Enfin, je rajoute, parce que c'est important,
02:38 le scatardéta Blinken va en Chine dans trois jours, la semaine prochaine.
02:42 Et donc c'est aussi un message.
02:44 Ce ballon est un message.
02:46 Coucou, vous venez nous voir, vous allez nous dire des tas de choses
02:49 sur Taïwan, la Russie, etc.
02:50 Mais par ailleurs, vous n'êtes pas invulnérable.
02:53 Il est à, vous parliez de l'espace aérien.
02:57 Un avion de ligne, c'est 10 km, 10 000 m.
03:00 C'est 30 000 pieds, 10 000 m.
03:01 Oui, oui, oui.
03:02 Et lui, entre 27 et 30 000, peut-être plus.
03:07 En tout cas, ils ont annoncé qu'il était stratosphérique.
03:11 Et donc si les Chinois ont fait en sorte qu'il se voit,
03:14 ce n'est pas un hasard, ni une défaillance, ni un bug,
03:17 ni une erreur de pilotage.
03:18 Comment est-il piloté, justement, depuis une salle de commandement à Pékin ?
03:22 Il y a deux options.
03:23 Moi, je parie plutôt sur l'équipage.
03:25 Les Chinois ont quand même à cet égard un sujet qui est la formation.
03:29 L'équipage, ça veut dire qu'il y a des militaires chinois à l'intérieur ?
03:31 Si, ce sont des Chinois.
03:33 Mais ils ont en tout cas une capacité de formation.
03:35 Je rappelle qu'ils vont avoir la dernière station spatiale disponible
03:39 au cours de cette année,
03:40 puisque la station spatiale internationale,
03:42 vérifiée entre Russes et Américains et de son âge,
03:45 va peu à peu disparaître,
03:46 qu'elle n'est pas remplacée pour l'instant à vue d'hommes.
03:49 Ils ont investi massivement dans le spatial.
03:52 Mais par ailleurs, on peut aussi le télécommander
03:54 et le gérer par leur flotte de satellites,
03:56 qui est moins importante que celle des États-Unis ou des Occidentaux,
04:00 mais qui commence à avoir une ampleur non négligeable.
04:03 Sa fonction, vous nous expliquez qu'il peut aider à des tirs de missiles.
04:08 Oui, quand vous tirez un missile hypersonique,
04:10 il monte très haut dans la stratosphère, puis il redescend.
04:12 Mais au moment de la redescente,
04:14 sa précision est aléatoire, voire même relative.
04:17 Et donc, en général, quand on organise des attaques par missile,
04:21 les Américains ou les autres le font déjà,
04:22 mais à un niveau moins élevé,
04:24 on met des agents de guidage au sol avec des faisceaux laser.
04:28 On le fait aussi avec certains satellites.
04:30 Et il y a eu un certain nombre d'essais,
04:32 Américains et Chinois,
04:33 permettant de faire du guidage laser par ballon-sonde.
04:37 Alors, les ballons-sondes montent moins haut,
04:38 mais ils permettent cette donnée.
04:40 C'est une donnée à la fois de reconnaissance et de guidage.
04:42 Et le guidage n'est pas seulement de l'espionnage.
04:44 Il y a une partie active dans l'arrivée éventuelle d'un missile.
04:47 Et le parcours du ballon, selon les Américains,
04:49 couvrant des zones extrêmement sensibles,
04:52 notamment leur base de lancement sol-sol de missiles Minuteman III,
04:57 permet de considérer qu'il y a effectivement une tentative de repérer,
05:01 de créer des coordonnées et d'avoir cette option éventuelle.
05:05 Puisque ce que disent les Chinois comme les Russes,
05:07 c'est que nous avons désormais, grâce aux missiles hypersoniques,
05:09 la capacité de vous attaquer chez vous.
05:11 Vous n'êtes plus invulnérable, vous n'êtes plus la seule hyperpuissance.
05:15 Nous sommes là.
05:16 On va changer totalement de sujet.
05:18 On va revenir en France avec l'affaire SIEM,
05:22 la mort de la petite SIEM.
05:24 On parle beaucoup, évidemment, de ce qui s'est passé dans le Gard.
05:26 Elle avait 18 ans.
05:27 L'homme suspecté, et qui est passé aux aveux,
05:30 en tout cas qui a raconté sa version,
05:32 est suspecté et il est multi-condamné.
05:36 Vol, violence, conduite sans permis, saucissonnage.
05:40 Et là, il est suspecté de meurtre.
05:42 Il est sorti de l'école à 16 ans, sans diplôme.
05:45 Son activité de délinquant est montée crescendo.
05:48 C'est le profil type du délinquant ?
05:50 Ah non, non.
05:51 C'est un profil très particulier, du criminel.
05:54 Dans ce cas-là, il a dépassé le stade de la délinquance,
05:56 qu'il allait juger aux assises, je crois, aujourd'hui.
05:59 Hier.
06:00 Hier, pardon.
06:01 Donc, il est dans une catégorie très particulière,
06:04 de hyper réitérant, récidiviste.
06:06 Mercredi, mercredi, au temps.
06:07 Pardon.
06:08 Et donc, à quelques jours près, il s'est laissé aller à ce crime,
06:14 dont on ne sait pas si c'est un assassinat ou un meurtre,
06:16 s'il a été prémédité ou si c'est un effet d'une altercation,
06:20 s'il y avait ou pas une relation amoureuse,
06:23 puisqu'il y a un débat assez complexe sur la nature même du contenu de ses aveux.
06:28 Ce qu'aveu il y a, semble-t-il.
06:31 Par ailleurs, il a déjà fait l'objet de plusieurs études psychanalytiques ou psychiatriques,
06:35 dont une est révélée par la presse ce matin,
06:38 et qui montre un profil très violent, très déterminé, très irresponsable,
06:43 au sens de la non prise en compte du bien, du mal et des critères de responsabilité.
06:47 Alors, ça n'empêche pas le mensonge ou la dissimulation,
06:50 mais ça empêche le surmoi, ce qui vous empêche de faire des bêtises
06:54 ou de comprendre qu'il ne faut pas les refaire, de bien fonctionner chez lui.
06:59 Mais de ce point de vue-là, il appartient à une toute petite catégorie du milieu criminel.
07:05 On sait stopper les parcours délinquants de ces profils ?
07:09 On quitte l'école à 16 ans, on vole, on agresse, on trafique un peu la drogue ?
07:17 Alors le problème, c'est qu'on sait le faire, mais on ne sait pas bien comment le graduer.
07:21 C'est-à-dire que la France est un pays absolument merveilleux,
07:24 où entre rien et trop, on ne sait pas faire entre deux.
07:26 Et donc, on a toujours ce problème de "on va lui donner une deuxième chance",
07:29 ce qui est tout à fait normal.
07:31 Mais quand on arrive à la troisième, la quatrième, la cinquième, la cent-septième,
07:33 la cent-dix-huitième, la cent-vingt-cinquième, c'est arrivé une fois à Paris,
07:36 avec un multi, multi, multi, hyper...
07:39 - On est monté jusqu'à combien ?
07:40 - 117, je crois, si je me souviens bien.
07:42 - Condamnation.
07:43 - Donc, il y a un sujet dans la manière dont on...
07:47 Alors, pas condamnation, parce que nous, nous avons un dispositif très compliqué.
07:49 On a d'abord les alternatives aux poursuites, suivi des alternatives aux peines,
07:52 puis à la fin, de la fin, de la fin du système, on condamne.
07:56 Et à ce moment-là, il y a l'exécution des peines qui arrive.
07:58 C'est-à-dire que la France, n'ayant jamais réussi à trancher entre accusatoire et inquisitoire,
08:03 entre les deux systèmes, elle a choisi le contradictoire.
08:05 C'est-à-dire que le pire des deux systèmes, c'est aucune des qualités,
08:08 ni l'efficacité, ni la rapidité.
08:10 Mais ce n'est pas la faute des magistrats, c'est la faute des législateurs.
08:13 Les législateurs n'arrivent pas à se faire une raison
08:15 et à décider de ce qui doit être l'accompagnement psychologique, social, psychiatrique et répressif,
08:21 parce qu'ils considèrent toujours que c'est soit tout l'un, soit tout l'autre, et jamais assez vite.
08:26 Et donc, nous avons un problème majeur de réaffirmation de ce que doit être une politique pénale.
08:32 Et la France, c'est un pays où on ne peut pas faire de conférences de politique pénale,
08:35 puisque les juges sont supposés laxistes et les flics sont supposés racistes ou fascistes.
08:40 Et donc, on n'arrive jamais à discuter de rien.
08:42 Donc, on est dans des phases alternatives, contradictoires et extrémistes,
08:46 où on n'arrive jamais à traiter lucidement et pragmatiquement d'un problème,
08:50 puisque, je rappelle que d'abord, il faut commencer par sauver des enfants
08:53 avant qu'ils deviennent des délinquants, des criminels et qu'ils créent des victimes.
08:57 Mais le sauvetage n'est pas permanent ou indéterminé.
09:00 Il a des gradations et des degrés.
09:02 Et cette situation-là, est-ce que nous arrivons le plus mal à faire en France
09:06 sans nous ne sommes pas capables de nous parler de la question
09:10 et de nous en parler sans nous mettre sur la figure
09:13 entre les tenants de l'aile dite angélique et de l'aile dite réactionnaire ?
09:18 J'aimerais justement vous entendre sur une étude de l'IPJ,
09:21 l'Institut pour la Justice, qui m'a frappé.
09:25 C'était dans le Figaro hier.
09:27 Quatre condamnés à de la prison ferme sur dix n'y mettent jamais les pieds.
09:32 Les Français ne comprennent pas.
09:34 On est condamné à deux ans de prison ferme et on ne met pas les pieds en prison.
09:39 Le législateur ou les citoyens qui élisent leur législateur
09:42 devraient lire le Code pénal.
09:44 Le Code pénal a été mis en place selon un principe complètement étrange
09:48 qui est quoi que vous fassiez, c'est prison pour tout et pour tous.
09:51 Comme ça ne marche pas, tout le monde a inventé des dispositifs d'adaptation.
09:56 Alternative aux poursuites, on ne vous poursuit pas,
09:58 mais il faudrait faire ci ou il faudrait faire ça.
10:00 Alternative aux peines, on vous condamne, mais vous n'allez pas la faire,
10:03 vous allez avoir un sursis, sursis avec mise en execution.
10:06 Composition pénale, il y a toute une série d'outils qui ont été mis en place.
10:10 Et les voyous le savent.
10:11 Heureusement, mais c'est le Code pénal.
10:14 Nul n'est censé ignorer la loi et surtout pas les criminels.
10:16 C'est le côté curieux.
10:18 Et en fait, nous avons un système qui a atteint tel degré de complexité
10:21 qu'à la fin de la fin, au moment où c'est le plus tardif
10:25 et au moment où il n'y a plus d'autre solution que la prison,
10:27 on bourre nos prisons de gens dont une partie n'ont rien à y faire,
10:30 ils ne sont pas poursuivis pour des violences.
10:32 Et une autre partie devrait y être et n'y est pas parce qu'il profite
10:36 des complexités et des difficultés du système.
10:39 Et aujourd'hui, nous avons trop de prisonniers dans trop peu de prisons.
10:42 Et donc, il y a un rééquilibrage à faire.
10:44 Et ce rééquilibrage, il devrait passer par un truc simple.
10:46 Violence physique, la prison est la réponse naturelle au problème qui est posé.
10:50 Surtout quand il y a réitérance, réitération ou récidive.
10:55 Pour tout le reste, tout le reste peut se traiter par l'amende, le bracelet, etc.
10:59 Deuxièmement, dans la prison, il y a la prison, prison,
11:02 il y a la prison bracelet, il y a la prison à la maison,
11:05 il y a la prison à temps partiel, il y a des tas d'adaptations du système,
11:08 ce qu'on appelle le milieu ouvert, qui nécessitent d'être prises en considération.
11:12 Donc, il faut avoir certes une vision un peu choquée de l'inefficacité
11:16 ou l'ineffectivité du système, mais en contrepartie,
11:18 personne ne sait faire beaucoup mieux à la différence des Pays-Bas,
11:22 qui est le pays où on juge le plus vite, le plus fort, pour des courtes peines,
11:27 pour casser le rythme justement de montée en violence dans la société
11:32 et qui a donc des prisons vides et pas des prisons pleines,
11:35 et un taux de criminalité et de délinquance relativement sable,
11:37 à l'exception du crime organisé, notamment en matière de stupéfiants.
11:41 - Est-ce que le sentiment qu'on a, c'est qu'on assiste à cette montée en puissance
11:45 du délinquant et qu'on n'arrive pas à la stopper ?
11:50 - Oui, parce qu'on se dit toujours...
11:51 - On est spectateur, que ce soit la police, la justice, que tout le monde s'aperçoive...
11:54 - On va avoir une chance de...
11:56 - On connaît déjà la suite.
11:57 - Oui, mais on lui donne encore une chance parce que c'est un brave petit,
12:00 parce que famille, parce que racisme, parce que, parce que, parce que...
12:04 Et en fait, au lieu de traiter l'individualisation des cas,
12:07 on traite l'individualisation des peines.
12:09 C'est très étrange d'ailleurs.
12:10 On considère que la peine doit être individualisée pour sortir plus vite,
12:13 mais on ne traite pas de l'individu lui-même,
12:15 pour savoir si justement la réponse est bien la prison,
12:17 et si la prison est la réponse, quel est le quantum nécessaire et utile ?
12:21 On n'est pas arrivé à faire l'individualisation des sujets
12:24 et on est resté dans cette difficulté française
12:27 d'entre rien et trop, de ne pas savoir où est le bon curseur.
12:30 - J'interrogeais Mathieu Vallée, qui est policier, commissaire de police,
12:33 qui était à votre place il y a quelques semaines.
12:36 Il défend l'idée de créer des mini-peines.
12:39 15 jours en prison, mais effective, on y va.
12:41 - C'est le système des Pays-Bas.
12:43 - C'est une bonne idée ?
12:44 - Moi, je le recommande, qu'on casse le plus vite possible le processus...
12:49 Il faut savoir que sur 100 individus qui commettent pour la première fois
12:52 une infraction identifiée, 66 % ne recommenceront jamais.
12:56 Parce que papa, maman, c'est pas bien, faut pas le faire,
12:58 le regard des autres, le contrôle social.
13:00 34 vont recommencer au moins une fois.
13:02 Dans ces 34, il y a ceux qu'on peut intégrer dans un système
13:07 où on va éviter que ça se dégrade, environ 30,
13:11 si on le fait bien, si on le fait vite, si on le fait,
13:13 et 5, de toute façon, on n'y peut rien,
13:15 parce que le processus général de rationalisation de la violence,
13:19 comme "en fait, c'est normal, en fait, je suis content",
13:22 par la psychopathologie, par toute une série de maladies diverses,
13:26 par la rationalisation de "je veux aller le plus vite,
13:28 gagner le plus d'argent, et la violence est mon viatic,
13:30 et je vais faire plus vite", voilà.
13:32 Donc si on traitait bien des 5, on réduirait de 95 % l'activité,
13:38 la quantité de criminels, et seulement de 50 % l'activité criminelle,
13:42 parce qu'ils sont hyper productifs.
13:44 Mais enfin, déjà, réduire de 50 %, à la fois l'activité
13:47 et donc le nombre de victimes, serait un grand succès.
13:50 Donc il faut passer du prêt-à-porter aux sur-mesures.
13:53 Vous avez traité de la crise du prêt-à-porter,
13:54 et bien ça marche aussi en matière pénale.
13:56 – Je voulais vous entendre également Alain Bauer,
13:58 sur ce sondage CSA pour CNews qu'on révèle ce matin.
14:01 Un Français sur 7, 14 % se sent en insécurité là où il vit.
14:05 Alors on peut se dire "c'est très peu",
14:07 mais 14 %, c'est une part importante de la population
14:10 qui se sent en insécurité, non pas une fois par semaine,
14:15 une fois par an, une fois par mois, là où il vit, donc tous les jours.
14:18 Quel est votre commentaire ?
14:19 – Alors d'abord c'est un chiffre assez faible, il a été bien plus élevé.
14:23 On avait d'ailleurs dans les enquêtes de victimation
14:25 des indications plus précises, à la maison, dans son quartier,
14:28 dans sa ville, et l'élément le plus important, c'est les transports en climat.
14:32 Donc on pouvait visualiser de manière plus précise.
14:35 Vous avez hier un document qui a indiqué que le sentiment d'insécurité
14:39 était à un niveau relativement bas en France.
14:41 Alors moi je n'appelle pas ça sentiment,
14:42 ce symbole qui ne veut rien dire, le climat d'insécurité
14:45 était relativement bas en France, parce que les attentats ont été réduits,
14:50 que la question de la guerre est devenue un peu dans notre quotidien
14:53 plutôt que dans ce côté exceptionnel et terrible
14:56 qu'est-ce que vivent les Ukrainiens.
14:58 Mais c'est un chiffre qu'il ne faut pas sous-estimer,
15:00 parce qu'il peut remonter extrêmement vite.
15:02 Et quand vous regardez les préoccupations des Français,
15:04 quand vous faites la liste, et pas seulement ce sujet-là,
15:06 vous le voyez toujours en 1, 2, 3, ou 3, 2, 1, avec l'environnement,
15:09 le chômage, l'emploi, l'économie et l'insécurité,
15:11 la délinquance, la criminalité, la violence,
15:13 il suffit qu'il y ait un fait divers pour qu'il remonte.
15:16 Le problème c'est quand il s'installe dans la durée et la continuité.
15:19 Et il y a des territoires où le sentiment, le climat,
15:22 la réalité de l'insécurité est suffisamment fort pour qu'on ait peur
15:25 d'entrer chez soi, qu'on se sente sous contrôle chez soi.
15:28 C'est-à-dire la reconquête des cages d'escalier est un sujet plus important
15:31 en termes de insécurité vécue et réelle que celle dont on parle en termes de sondage.
15:38 Donc il y a des endroits où l'insécurité s'est enquistée
15:41 et qui nécessite des opérations extrêmement lourdes
15:44 de saturation du territoire et de contrôle du territoire,
15:47 ce qui nécessite là aussi de revoir non seulement les effectifs de police
15:50 mais les missions de la police qui ne sont pas seulement
15:53 démanteler un point de deal puis aller en démanteler un autre,
15:56 puisqu'il va se reconstruire, c'est revoir l'intégralité
15:59 de l'économie criminelle des stups et donc surtout de la saturation
16:03 du territoire, c'est-à-dire le retour à la civilité ou à la civilisation
16:06 par le service public et celui de la police.
16:09 Il y a un dernier point dont je voulais vous parler ce matin,
16:12 une dernière information dont je voulais vous parler ce matin,
16:14 les expulsions d'islamistes. C'est à la une du Figaro ce matin.
16:19 Depuis 2017, 704 islamistes ont été renvoyés vers leur pays.
16:23 Et 256 en attente.
16:25 Et 256 en attente. Vous avez évidemment lu ce dossier de mes confrères du Figaro.
16:31 Bernard Rougier, qui est professeur à la Sorbonne, dit,
16:34 interrogé par le Figaro, que c'est un combat entre la République
16:38 et les islamistes. Ce n'est pas rien. Est-ce que vous partagez ce constat ?
16:40 Ah oui, bien sûr. J'étais hier à l'association du corps préfectoral
16:43 où on traitait des Lumières et du retour des Lumières.
16:46 Mais le combat de la République, c'est parce que la République,
16:48 elle avait arrêté le combat. Ce n'est pas parce que les djihadistes...
16:50 Alors, je ne parle pas d'islamisme, parce que ce sujet me pose problème
16:53 dans son indéfinition. Le djihadiste, je sais ce que c'est.
16:56 Donc on va faire que c'est... Le djihad peut être social,
16:59 il peut être criminel ou il peut être guerrier.
17:01 Ce n'est pas seulement le contrôle de soi-même.
17:03 Le meilleur des djihadistes, le premier, celui que je recommande
17:05 à tous ceux qui voudraient faire autre chose.
17:07 Mais dans la réalité, oui, il y a un combat.
17:09 Mais la République, elle avait arrêté le combat parce qu'elle avait estimé
17:11 qu'elle était désormais neutre, notamment sur la question de la laïcité.
17:15 La laïcité n'est plus un combat ni une dynamique, c'était une neutralité.
17:18 Et en fait, on se parlait gentiment et les églises avaient décidé
17:22 unilatéralement que la République et la laïcité, c'était bien.
17:24 Ce n'est pas comme ça que ça s'est passé. Mais on a oublié.
17:27 Et la République s'est oubliée. Et depuis l'affaire des foulards de Creil,
17:30 et un certain nombre d'événements depuis, la République a conçu
17:33 qu'elle était neutre, qu'elle regardait ça de loin, un peu comme vous parliez
17:36 tout à l'heure des délinquants dans leur progression, leur échelle,
17:39 leur glissement vieillesse technicité. Eh bien, c'est exactement la même chose.
17:42 Et la République, tout d'un coup, elle s'est réveillée parce qu'elle a eu peur
17:44 pour elle-même. L'État a eu peur pour lui-même. Du coup, il s'est dit
17:48 que la République pouvait être mise en cause. Et ceci, effectivement,
17:52 amène un réveil généralisé. Et il faut souligner à quel point
17:55 il est, de ce point de vue-là, relativement efficace.
17:57 Alors, le nombre peut être discuté, mais vous avez vu aussi 63 pays différents,
18:03 dont des pays européens, la Belgique notamment, qui ne compte pas pour rien
18:06 dans ces affaires. Il y a toute une série d'éléments qui montrent la diversité
18:10 et l'ampleur des problèmes. Mais il y a une réaction.
18:13 Mais ce n'est qu'une réaction. Ce n'est pas encore une politique.
18:16 – Merci beaucoup Alain Bauer. Merci d'avoir été avec nous ce matin,
18:19 dans La Matinale. Voilà, on voit votre livre, "La Criminologie pour les nuls".
18:24 Il y a également "Espionnage pour les nuls". Voilà Alain Bauer,
18:27 professeur de criminologie au CNAM. Merci d'être venu ce matin
18:30 sur le plateau de La Matinale. Bonne journée à vous.
18:32 La Matinale qui continue tout de suite.
18:34 [Musique]
18:38 [SILENCE]
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