Dans son édito du 12/07/2025, Jules Torres revient sur la signification de l'expression «Nicolas qui paie», de plus en plus populaire sur les réseaux sociaux.
00:00Oui, il s'appelle Nicolas, il a 32 ans, un CDI, une fiche de paix bien remplie et la mère impression d'être le dindon ou plutôt le pigeon du système.
00:09Il ne frotte pas, il ne triche pas, il ne réclame rien, il paye pour les autres, pour tout le monde, tout le temps et de plus en plus.
00:15Bienvenue dans la peau du français moyen version 2025.
00:18Une France qui se lève tôt, rentre tard et regarde son salaire s'évaporer entre impôts, cotisations et taxes en cascade.
00:25Lui, c'est Nicolas qui paye, pas un homme réel bien sûr, mais un personnage inventé sur les réseaux sociaux, un avatar, une caricature,
00:32devenu en quelques semaines le porte-voix d'un ras-le-bol générationnel.
00:36Un prénom banal devenu slogan, un compte anonyme devenu exutoire parce qu'il dit tout haut ce que des milliers de jeunes actifs pensent en silence.
00:43Nicolas finance les croisières de Bernard et Chantal, il finance les arrêts maladie douteux, il les aide sociale à rallonge,
00:49l'audiovisuel public qui les méprise, les subventions absurdes, les privilèges hors sol, il finance aussi une politique migratoire incontrôlée
00:57et un état mammouth qui enfle à chaque crise mais qui ne règle plus rien.
01:01Il paye tout et ne profite de rien, il est la vache à lait de la République.
01:06Nicolas compte les jours jusqu'au 17 juillet, cette date où symboliquement le français moyen cesse de travailler pour l'état
01:12et commence à travailler pour lui.
01:14Nicolas est un type normal, un cadre, un actif, un français ordinaire.
01:17Il n'a qu'un tort, croire encore que l'effort mérite une récompense, en France c'est devenu une forme de naïveté.
01:23Alors les retraités, les impôts, les cotisations, Nicolas finance tout mais il est convaincu qu'il n'aura le droit à rien, c'est bien cela ?
01:30Oui, c'est là que réside le malaise.
01:32Nicolas cotise pour tous, pour tout et tout le temps mais il ne voit jamais rien revenir.
01:37La santé par exemple, les déserts médicaux, des délais interminables, des urgences saturées.
01:42La sécurité en recul malgré les budgets en hausse constante et à l'école il est déclassé dans tous les classements.
01:49Alors Nicolas se tourne vers le privé pour ses enfants mais là encore l'addition est salée.
01:53Pour garantir un bon niveau à ses enfants, il doit payer deux fois, une fois pour l'école publique, une deuxième fois pour s'en extraire.
01:59Il paye donc, il paye toujours et le sommet de l'absurde et ce qui énerve bien davantage Nicolas,
02:04et bien ce sont les retraites. Chaque fois Nicolas voit près de 28% de son salaire brut partir pour financer des pensions qu'il ne touchera peut-être jamais.
02:12Le système par répartition, imaginé pour une France jeune, est devenu une machine à transférer la richesse d'une génération à une autre sans garantie de retour.
02:21Moins d'actifs, plus de retraités, un équilibre devenu impossible.
02:24Il y a 50 ans, la France comptait 5 actifs pour 1 retraité.
02:28Et aujourd'hui, c'est presque 1 pour 1,5, autrement dit, une poignée de jeunes et d'actifs cotisent pour une armée de pensions.
02:34Résultat, les boomers partent avec des retraites pleines, parfois confortables, c'est ce que dénonce Nicolas.
02:40Les jeunes, eux, cotisent à l'aveugle pour un avenir flou.
02:43Un baby boomer touche deux fois plus que ce qu'il a versé, un trentenaire verse deux fois plus que ce qu'il recevra.
02:49Alors Nicolas doute de la justice du système, de sa soutenabilité, de ceux qui refusent de regarder les chiffres en face.
02:55Il s'est eu pendant des années, mais à force de financer un édifice à la dérive, Nicolas commence à parler et visiblement, il n'est pas seul.
03:03Alors Nicolas, j'ai envie de dire que c'est un petit peu le symbole de cette génération de jeunes actifs qui ont le sentiment de stagner, voire de reculer.
03:10Oui, c'est ça. On avait promis à Nicolas cet ascenseur social.
03:14Il a eu seulement l'escalier de service sans rampe, sans lumière et surtout avec des marches qui s'effritent.
03:19Nicolas n'est pas un tir au flanc. Il a coché toutes les cases.
03:21Il a fait des études, il a un diplôme, il a un CDI et il gagne 2400 euros net par mois.
03:27Alors ce n'est pas la misère, mais ce n'est pas la vie non plus.
03:29Impossible d'épargner, impossible d'acheter, de se projeter.
03:32À peine de quoi vivre, jamais de quoi avancer.
03:34Pour devenir propriétaire en France aujourd'hui, il lui faudrait s'endetter pour 40 ans ou attendre un héritage vers 65 ans.
03:40Autant dire jamais.
03:42Le pouvoir d'achat immobilier en France s'est effondré depuis 40 ans, divisé par deux depuis les années 2000.
03:47Les jeunes ont perdu 20 mètres carrés en 20 ans et pendant ce temps, les boomers ont acheté au bon moment.
03:53Dans les bons quartiers, ils ont vu les prix triplés, ils ont revendu leur plus-value, puis racheté au soleil.
03:58Eux sont montés, mais lui, Nicolas, regarde l'ascenseur bloqué à l'étage du dessus.
04:03Même l'héritage dont je parlais il y a quelques instants ne sauve plus.
04:06Le patrimoine aujourd'hui est complètement concentré.
04:0725% de la population détient 60% des richesses.
04:11Et comme on vit plus longtemps, les transmissions se font aussi de plus en plus tard.
04:15Entre retraités, un monde à l'envers.
04:17C'est donc pour ça que la révolte des Nicolas n'est pas idéologique, elle est existentielle, elle est générationnelle.
04:23Elle dit une chose simple et brutale.
04:24La France protège tout le monde, sauf ceux qui la font tourner, sauf ceux qui la font marcher.
04:29Et quand l'État-providence devient un État prédateur, il ne reste plus à Nicolas qu'une solution, se fâcher.
04:34Et visiblement, il commence à le faire.
04:36La France protège tout le monde, sauf ceux qui la font marcher.
04:41La France protège tout le monde, sauf ceux qui la font.