00:05Il était 19h45 hier soir quand le budget de la sécurité sociale a été adopté d'un cheveu.
00:10On peut imaginer qu'il a poussé un ouf de soulagement.
00:12Le ministre de l'économie, Roland Lescure, est l'invité d'RTL Matin.
00:14Bonjour et bienvenue sur RTL.
00:15Bonjour, merci.
00:16Alors, heureux ?
00:18Non, heureux non, mais un peu soulagé, vous l'avez dit.
00:21Oui, hier, au fond, ce qu'on peut dire, c'est que l'improbable est devenu possible.
00:26Ça faisait des semaines qu'on disait, ils n'y arriveront pas, ça ne passera pas.
00:30Hier, 247 députés ont décidé que ça passerait et que c'était possible
00:35de se mettre d'accord sur un budget qui ne satisfait pleinement personne.
00:39On va y venir, on va y venir.
00:40Mais au fond, quand même, rassemble des voix communistes, des voix de la droite républicaine,
00:45des voix du Bloc central, aucune n'a manqué, notamment dans le groupe dont je suis issu,
00:50et des socialistes.
00:51Mais c'est gagné-gagni ou pas ? Parce qu'il va y avoir encore...
00:53Ça va revenir à l'heure. Le match est plié ou pas ?
00:56Non, alors, donc, on a une deuxième lecture qui a été votée à l'Assemblée nationale.
00:59On retourne au Sénat, très probablement, va rejeter le texte.
01:02Donc, il y aura un nouveau vote à l'Assemblée ?
01:03On reviendra pour ce qu'on appelle une lecture définitive dans les jours qui viennent.
01:06J'ai du mal à imaginer que le député X qui a voté pour hier vote contre demain,
01:10mais il faudra quand même...
01:11Il faudra être serein.
01:12En tout cas, hier, effectivement, l'Assemblée nationale, dans sa grande majorité,
01:16a montré qu'elle était pour ce budget de la Sécu.
01:19J'ai du mal à imaginer que dans une semaine, s'il ne bouge pas d'un iota,
01:22elle soit contre. On verra.
01:23Tout ça est fragile. Marc Ferraci, qui est macroniste comme vous,
01:25et ancien ministre de l'Industrie, a dit
01:26« J'ai voté pour un budget exécrable. »
01:29Et il a voté pour. Vous voyez, c'est une phrase...
01:31Vous trouvez exécrable aussi, vous, le budget ?
01:32Non, ce n'est pas mon budget idéal. J'ai eu l'occasion de le dire.
01:35D'abord, suspendre la réforme des retraites pour un macroniste historique,
01:39qui est rentré en politique en 2016-2017,
01:42dans la foulée d'Emmanuel Macron.
01:43Suspendre la réforme des retraites, ça fait un peu mal au ventre.
01:45Il faut le reconnaître.
01:46Mais est-ce qu'il fallait aller jusque-là ?
01:48Parce que si on faisait un raccourci, on pourrait dire que les macronistes,
01:50vous, vous avez sacrifié votre réforme majeure du quinquennat.
01:53On l'a suspendu.
01:54Celle dont vous nous avez dit depuis trois ans,
01:56en restant sourds aux manifs, qu'elle était vitale.
02:00Et au final, vous avez avalé vos convictions pour sauver vos places ?
02:03C'est ça ?
02:03Non, non, pas du tout.
02:04Alors vraiment, s'il y a bien quelque chose qui ne me fait pas rêver le matin
02:06quand je me laisse, c'est de sauver ma place.
02:09Je suis extrêmement heureux d'être ministre.
02:10C'est pas facile tous les jours.
02:11Non, non, c'est pas facile tous les jours, mais peu importe.
02:14Franchement, mon avenir personnel, mon cas personnel, n'importe en aucun cas.
02:19Aujourd'hui, c'est, un, on a des débats très importants qui s'avancent pour 2027.
02:26Et deux, en attendant, il faut bien gérer la boutique, si je puis dire.
02:29Ce qu'on fait aujourd'hui, c'est qu'on trouve des compromis entre des parlementaires
02:33qui sont d'accord sur pas grand-chose, si ce n'est sur une chose,
02:37qui est qu'il faut que la France ait un budget et que l'alternative est pire.
02:40Vous le savez, on l'a dit, 30 milliards de déficit si on n'a pas de budget de la Sécu.
02:43Mais là, ce n'est pas quand même la grande victoire de la dette.
02:45Il va être à combien le déficit de la Sécu l'année prochaine ?
02:48Alors, 19,5 milliards.
02:51C'est vrai, ça ?
02:52Avec, c'est important, 4,5 milliards de soutien de l'État.
02:55C'est-à-dire que l'État doit renflouer les caisses de la Sécu.
02:59Et ça...
02:59C'est-à-dire que sinon, ça serait 23, alors ?
03:00On fait 19,5 milliards.
03:01Ça serait à 24, en fait.
03:02On est à 24,5 milliards.
03:04Donc, c'est très au-dessus des engagements que vous aviez pris.
03:06Et ça veut dire que...
03:08Alors, des engagements, des engagements qu'on avait proposés au Parlement.
03:11Mais s'il n'avait pas été voté, on serait à 30.
03:13Mais ça veut dire qu'effectivement, puisque la prochaine étape, c'est le budget de l'État,
03:17que la barre est remontée d'un cran.
03:19Moi, j'avais parlé d'un 110 mètre A il y a 10 semaines, quand on a commencé.
03:22Un 110 mètre A, c'est 10 A.
03:24La dernière A, qui est celle du budget, elle vient de passer à 1,30 m.
03:27Il va falloir bien tirer...
03:29En tout cas, on est sur un déficit de la Sécurité Sociale de 24,5 milliards.
03:32Si on ne fait pas de la tambouille et des jeux d'écriture.
03:34Non, mais ce n'est pas de la tambouille.
03:35Non, non, attendez.
03:35Non, mais c'est des jeux d'écriture, quand même.
03:36Non, non, pas du tout.
03:37Ce qu'on fait, c'est...
03:38L'État renfloue les caisses de la Sécurité Sociale.
03:41Et donc, il va falloir trouver les 4,5 milliards dans le cadre de la discussion sur le budget.
03:44Et donc, on va nous emprunter de l'argent ailleurs ou creuser un autre déficit ?
03:47Non, non, non.
03:48Il va falloir faire des efforts.
03:49Moi, je reste extrêmement convaincu qu'il faut avoir un déficit de l'ensemble.
03:55Sécu, État, de 5%.
03:57Et donc, avec un déficit de la Sécu, vous l'avez dit, qui est plutôt de 24,5.
04:03Et demi, là où nous, on espère à 17,5.
04:05Il va falloir trouver des milliards ailleurs dans les comptes de l'État.
04:08Et ça, c'est la dernière haie qui nous reste à franchir.
04:11Et bien justement, ce projet de loi de finances, le budget général, comment ça va se passer les négociations ?
04:15Vous allez redevenir le ministre des marchands de tapis, Roland L'Esclure ?
04:18Non, ce n'est pas...
04:20Je comprends bien qu'on est en train de mettre en œuvre un espèce de changement de culture en France.
04:25On n'a pas cette habitude-là.
04:26En France, c'est le fait majoritaire.
04:28La majorité décide, l'opposition s'oppose sans aucun pouvoir.
04:32On est rentré dans un monde différent.
04:34Ou du fait de l'équation politique de l'Assemblée nationale, on doit négocier.
04:37Mais pas comme des marchands de tapis, comme des parlementaires et un gouvernement responsable qui cherchent des compromis.
04:43C'est différent aujourd'hui.
04:44Mais quelles sont les limites acceptables du compromis ?
04:46Vous êtes venu ici il y a un mois, presque jour pour jour.
04:48Vous aviez dit, j'entre en mêlée à 4,7% de déficit pour le budget.
04:52Est-ce que vous maintenez que le budget ne devra pas dépasser 4,7% ?
04:56Ou est-ce que c'est inatténuant ?
04:57Non, ce que j'avais dit depuis le début, c'est 4,7% c'est l'entrée en mêlée.
05:00Et je veux qu'on soit à 5% et pas au-dessus.
05:03Vous prenez l'engagement ferme, que vous ne ferez pas voter un budget au-dessus de 5% ou pas ?
05:07Dans le monde d'aujourd'hui, les engagements fermes n'engagent que ceux qui y croient.
05:11Non, moi je dis, il est essentiel qu'on ait un budget à 5.
05:15Mais on va évidemment...
05:16Vous n'y croyez pas donc ?
05:17Si, j'y crois, sinon je ne serais pas là.
05:19Mais ça va dépendre essentiellement, et c'est nouveau par rapport au budget de la sécu.
05:23Vous savez, le Sénat s'était opposé au budget de la sécu.
05:25Pas de réforme de retraite, on n'en veut pas.
05:27Là, on rentre dans une discussion entre sénateurs et députés.
05:30Il y a ce qu'on appelle la commission mixte par expérior.
05:32On en met cette de chaque côté, il essaie de sortir une copie commune.
05:35Donc c'est un processus qui existe depuis des années,
05:39et qui en général permet d'élaborer un compromis.
05:42A condition que chacun y mette du sien.
05:44Donc on a des sénateurs qui, j'espère, vont y mettre du leurre.
05:47Des députés qui, j'espère, vont y mettre du leurre.
05:49Pour trouver un compromis, qui ensuite devrait voter.
05:52Oui, alors justement.
05:53Hier matin, c'est François Hollande qui était assis à votre place.
05:56Ce n'est pas le plus radical des socialistes.
05:57Il a voté le budget de la sécurité sociale.
05:59Mais il a prévenu, je ne voterai pas le budget
06:02Parce que voter le budget c'est s'inscrire dans la majorité
06:04Donc il vous dit, utilisez le 49.3, on ne votera pas de censure derrière
06:08Gérard Larcher, le président du Sénat, vous dit, utilisez le 49.3, c'est le seul moyen que ça passe
06:12Bruno Retailleau vous dit, utilisez le 49.3
06:15Des socialistes vous disent, est-ce que vous allez l'utiliser ou est-ce que vous allez foncer dans le mur ?
06:18Non mais c'est trop facile, donc d'abord on ne va pas foncer dans le mur
06:21Parce que s'il y a un vote, ça ne passera pas
06:23Oui mais on verra, hier...
06:25Alors là je vous donne rendez-vous, venez le lendemain
06:27On viendra le lendemain
06:28Ce que je peux vous dire, c'est que ce week-end
06:30Il y avait beaucoup de gens, quand je leur parlais, qui me disaient, ça ne passera pas
06:34Et vous avez sans doute, vous aussi, eu ces échos
06:36Donc on a passé...
06:37C'était plus incertain
06:38Là, François Hollande, il est très ferme
06:40Mais la discussion n'a même pas commencé
06:42Moi je trouve ça...
06:43C'est un marqueur politique, vous le savez, c'est pas que l'économie, c'est de la politique
06:45Vous vous rendez compte ?
06:46Donc voilà, alors justement
06:48Donc il y a ceux qui disent, c'est de la politique, donc je ne voterai jamais un budget parce que je suis dans l'opposition
06:52Puis il y a ceux qui disent, ben regardons ce qu'il y a dedans
06:55La moindre des choses, quand même, c'est de regarder ce qu'il y a dedans
06:57Pourquoi vous ne voulez pas du 49 ?
06:59C'est fermé définitif, il n'y aura pas de 49-3 ou pas ?
07:01D'abord, le Premier ministre a renoncé à cet outil
07:04Parce qu'un certain nombre de leaders, notamment socialistes...
07:06Lui a demandé ?
07:07Lui a demandé ?
07:08Ils ont changé d'avis ?
07:09Ben, certains
07:09Oui
07:10Je pense que François Hollande, ça fait déjà quelques semaines qu'il disait ça
07:13Donc ça reste un non fermé définitif sur 49-3 ?
07:15Ça reste une croyance absolue dans une méthode inédite, c'est trop facile
07:20Mais croyance, ce n'est pas un fait
07:21C'est fermé définitif, il n'y aura pas de 49-3 où tout est possible
07:25Non mais on est dans une méthode qui consiste à dire, on collabore, on négocie, et vous, vous me dites
07:30Est-ce que vous allez déresponsabiliser tout le monde en disant, on va passer comme d'habitude en force ?
07:34La réponse est non, c'est trop facile
07:36Donc il n'y aura pas de 49-3, pardon mais j'ai besoin de comprendre parce que moi je suis perdu, je suis comme les français, on entend tout, on ne comprend plus rien
07:41Il n'y aura pas de 49-3 fermé définitif
07:42Mais ce que je peux vous dire, c'est qu'il n'y aura pas de carton rouge ou de pénalty, on joue le match jusqu'au bout et en espérant le gagner
07:48Il y en a un premier qui a été gagné hier, moi je ne vois pas de raison
07:50Sauf à déresponsabiliser tout le monde et dire, vous allez voir, on va y aller le 49-3 comme d'habitude
07:56Dormez tranquille, bonnes gens, n'allez pas négocier parce que le gouvernement va prendre toute la charge sur les épaules
08:02C'est ça la différence de méthode
08:03Aujourd'hui, on dit, on négocie, mettez-vous autour de la table deux bonnes fois et trouvez un accord, nous on l'est
08:09Juste pour 2025, on en est où des prévisions de déficit ? On est toujours sur 5,4% ?
08:12Alors non seulement on est en phase avec ce qu'on avait prévu, la croissance est plutôt meilleure
08:18On avait prévu 0,7, moi j'ai déjà eu l'occasion de le dire, je pense qu'on sera au moins 0,8
08:23Donc jusqu'ici tout va bien, jusqu'ici tout va bien
08:26Donc on est en phase avec ce qu'on avait annoncé il y a maintenant plusieurs mois
08:31Il faut en profiter, j'allais dire, pour faire les efforts qu'il faut pour l'année prochaine
08:36Sinon, là encore, c'est un peu trop facile
08:37J'ai une dernière question, Roland Lescure, François Langlais parlait des voitures électriques, des voitures thermiques
08:42Ça discute beaucoup en ce moment sur l'interdiction des moteurs thermiques dès 2035 dans l'Union Européenne
08:47Est-ce que vous vous dites, il faut reporter cette interdiction ?
08:52Ce que je dis et ce qu'on a officiellement signifié à la Commission hier, avec mes collègues de l'environnement et de l'industrie
08:58C'est, on est prêt à faire preuve de flexibilité
09:01Si vous voulez vendre encore un peu de moteur thermique en 2035, très bien
09:05Mais il faut qu'il soit fait en Europe
09:06Il n'y a aucune raison
09:08Vous êtes prêt à décaler pour des moteurs made in Europe ?
09:11Voilà, c'est ce qu'on appelle la préférence européenne
09:13Pendant combien de temps ? Sur quel délai ?
09:14Alors ça, ça fait partie des discussions qu'on a aujourd'hui avec nos partenaires européens
09:18Donc on parlerait de quelques années, mais c'est pas fait encore
09:20Nous, c'est non négociable si je puis dire
09:23Ok, pour la flexibilité, à condition que ce soit la préférence européenne
09:26Qu'on ait au moins 75% de la valeur ajoutée faite en Europe
09:30François Langlais l'a dit tout à l'heure
09:32On recommence à produire des véhicules en France
09:35Soyons-en fiers
09:36On va pas, à la première, je dirais, inquiétude, réouvrir les portes en grand
09:42Donc, de la préférence européenne, on est les seuls à ne pas le faire
09:45Les Américains achètent Américains
09:47Les Chinois, évidemment, achètent Chinois
09:49Et nous, on va continuer
09:50Donc non, l'analyté, c'est terminé
09:52On est extrêmement ferme sur le fait que, oui, on peut
09:55On peut décaler 2035, à condition que ce soit des moteurs européens
09:59Des voitures, faites en Europe
10:01Moteurs, batteries, etc.
10:03Mais qu'on ait l'essentiel de la valeur ajoutée
10:05Et donc de l'emploi qui vient de chez nous
10:07Je crois que c'est le 16 décembre que la commission se prononcera sur le sujet dans quelques jours
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