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02:32traducteur depuis des années.
02:35Quelqu'un manque cruellement ce soir,
02:38c'est Polo Tchakowsky-Lawrence, mon ami
02:40et éditeur français pendant 35 ans,
02:43disparu il y a 3 ans et demi.
02:46Personne ne le remplacera, mais
02:48Emeline Landon est là, qui est à la fois
02:50sa veuve, un peintre et une écrivaine
02:52merveilleuse, et ma meilleure amie.
02:56Notre maison d'édition, P.O.L., continue
02:58et continue bien, sous l'autorité de
03:01Frédéric Boyer et de Jean-Paul Hirsch, qui
03:03m'a fait l'amitié de venir avec son époux
03:05le jacinthe, ainsi que François
03:08Samuelson, mon agent et ami depuis tant
03:10d'années. Je les remercie et je remercie
03:14aussi Charline Bourgeois-Taquet d'être la
03:18femme qu'elle est, de réaliser les films
03:20qu'elle réalise et d'avoir consenti à
03:23partager ma vie. Voilà. Alors, j'ai écrit,
03:30j'avais écrit ce petit discours en pensant
03:34avoir, comme on dit, fait le job et je l'ai
03:37envoyé à la fondation Princesse des Asturies pour
03:40qu'il soit traduit à temps pour la cérémonie. Et
03:44quelques jours plus tard, j'ai reçu un mail de la
03:47fondation qui était vraiment un chef d'oeuvre de
03:49délicatesse. On me disait que mon petit discours
03:53était merveilleux, absolument merveilleux et ma liste de
03:56remerciements tout à fait légitimes, tout à fait
03:59bienvenus dans une telle circonstance, mais que dans
04:02cette circonstance, justement, comment dire ? On aurait
04:06pu attendre de moi quelque chose d'un peu plus, je cite en
04:09anglais, inspirational. Je ne sais pas quelle serait la
04:14traduction exacte de cet adjectif, inspirational, un peu
04:18plus inspirant, un peu plus inspiré, un peu les deux. Ce qui
04:24ressortais en tout cas de ce mail infiniment délicat, c'est
04:27que, pensant être dans la note, comme on respecte un
04:30dress code, j'avais écrit un discours convenu et même
04:34conventionnel. Un reproche qu'honnêtement, on ne m'a pas
04:37souvent fait. Alors, je ne voulais pas renoncer à mes
04:41remerciements, car les personnes que j'ai remerciées me sont
04:44très chères, infiniment chères, mais j'ai cherché pour les
04:47compléter quelque chose de plus inspirational et je n'ai pas eu
04:52besoin de chercher longtemps. Je n'ai pas eu besoin de chercher
04:55longtemps, car je m'occupe en ce moment de quelque chose d'extrêmement
04:59et même tragiquement inspirational, dont j'aimerais vous dire
05:03quelques mots. Le 8 septembre dernier, s'est ouvert à Paris le
05:08procès des attentats qui ont été commis le 13 novembre 2015, à Paris
05:12aussi, sur des terrasses de café et dans la salle de concert du
05:17Bataclan. Ces attentats ont causé 131 morts. Vous autres,
05:22Espagnols, vous avez dû en pleurer encore plus le 11 mars 2004,
05:2861 de plus si cette atroce comptabilité a un sens. Pour nous, ce sont les plus
05:33meurtriers jamais commis sur le sol français. Les tueurs ont été tués
05:38ou se sont eux-mêmes fait exploser. Les 14 racailles qui se retrouvent dans le
05:43box des accusés sont ce qu'on appelle en français des seconds couteaux et
05:47cela invalide la comparaison qu'on entend souvent avec le procès de
05:50Nuremberg, où était jugé de très haut dignitaire nazi. Mais le procès de
05:56Paris a en commun avec celui de Nuremberg son ambition historique,
06:00l'énormité de ses moyens et pour commencer sa durée, neuf mois.
06:04J'ai décidé de suivre ce procès intégralement, du début à la fin,
06:10tous les jours. Bien sûr, il ne se passe pas toujours quelque chose
06:13d'intéressant, mais on ne peut pas le savoir à l'avance.
06:17Quelquefois, des audiences que tout le monde prévoit passionnantes se révèlent
06:21parfaitement ennuyeuses et passionnantes en revanche, d'autres dont on
06:25n'attendait rien, comme des dépositions de médecins légistes ou d'experts en
06:29balistique. C'est une règle que connaissent tous les chroniqueurs
06:33judiciaires et qui ne souffrent pratiquement pas d'exception. Il suffit
06:37qu'on ne soit pas là pour qu'il se passe quelque chose. C'est pourquoi, si
06:42grand que soit pour moi l'honneur d'être ce soir devant vous, votre
06:46majesté, vos altesses, chers amis, une partie de moi reste encore un peu dans
06:52ce tribunal. Un grand procès, tous ceux qui en ont suivi savent que c'est une
06:59des expériences les plus addictives qui soit. Celui-ci est d'une ambition
07:03démesurée. Il vise à déplier sous tous les angles, du point de vue de tous les
07:09acteurs, en remontant le plus loin possible dans la généalogie des événements,
07:14tout ce qui s'est déroulé pendant ces terribles heures-là. L'anatomie d'un
07:18instant, pour citer le livre du puissant roman de Javier Cercas. Il est aussi ce
07:23procès extraordinairement éprouvant. Jour après jour, nous pataugeons dans le
07:29sang, les blessures physiques et morales, les morts atroces et les vies
07:34fracassées. C'est un bain d'horreur dont on se demande parfois pourquoi on
07:39se l'inflige. On se l'inflige parce que ce n'est pas seulement un bain d'horreur,
07:45parce que ces témoignages qui se succèdent semaine après semaine, à raison
07:49d'une quinzaine par jour, sont souvent d'extraordinaires moments d'humanité. Ces
07:54survivants, blessés dans leur corps et leurs âmes, se tiennent debout. Ils nous
07:58parlent de très loin, de lieux de l'expérience humaine que la plupart d'entre
08:02nous ne connaissons pas. Léon Blois écrivait « L'homme a dans son pauvre cœur des
08:08endroits qui n'existent pas encore, mais où la douleur entre pour qu'il soit ». Ce
08:15procès sert aussi à explorer cela. Collectivement, ces endroits-là
08:19de nos cœurs. Au fil de ces témoignages, on découvre autre chose qui surprend. Les
08:25histoires de novrages, de catastrophes, de sauf qui peut généraliser, révèlent en
08:31général le pire de l'humain. Lâcheté, chacun pour soi, cannibalisme. Ici, rien de
08:38tel. On ne peut pas imaginer que ce soit construite une fiction collective de noblesse et de grandeur
08:44d'âme. Or, il n'est pratiquement rapporté que des traits de solidarité, d'entraide,
08:50des gestes souvent héroïques. Beaucoup se reprochent d'avoir marché sur d'autres
08:54en cherchant à fuir. Aucun sur qui on a marché ne le reproche aux autres. Chacun a
08:59cherché à protéger celui ou celle qu'il aimait, mais certains ont fait plus. Au risque
09:04de leur vie, ils ont protégé des inconnus. C'est un mystère qui rend par moments l'abominable
09:10infiniment exaltant. Je vais terminer ce discours qui est maintenant devenu beaucoup trop long
09:16par deux autres citations. La première est de notre grande philosophe Simone Veil. Le
09:22mal imaginaire, dit-elle, est romantique, romanesque, varié. Le mal réel est morne, désertique,
09:32ennuyeux. Le bien imaginaire est ennuyeux. Le bien réel est toujours nouveau, merveilleux,
09:38enivrant. Donc, la littérature d'imagination est ou ennuyeuse, ou immorale, ou un mélange
09:46des deux. Elle n'échappe à cette alternative qu'en passant à force d'art du côté
09:51de la réalité, ce que le génie seul peut faire. La seconde citation est d'une rescapée
09:58du Bataclan. Quelques mois après les attentats, dit-elle, mon père est mort et juste avant
10:04de mourir, il m'a dit, toi et moi, on console les autres des malheurs qui nous arrivent.
10:12J'aurais préféré, ajoute-t-elle, ne pas avoir à vous consoler. Merci votre majesté,
10:18merci vos altesses, merci mes chers amis, merci Charline.
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