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  • il y a 9 heures
Personnage central du documentaire « Vertical Blue » actuellement diffusé sur L'Equipe Explore qui retrace ses deux derniers records du monde (125 puis 126 mètres en poids constant bi-palmes), Arnaud Jerald décrypte une de ses plongées à travers toutes les sensations qu'il éprouve.

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Sport
Transcription
00:00La première partie avant de plonger, c'est m'allonger sur le dos.
00:05Je vérifie que j'ai la longe qui est bien accrochée au câble parce que c'est la seule chose qui me
00:08relie à la surface. Je me mets sur le dos parce que c'est la position où je peux flotter. Et comme
00:12je flotte, je ne consomme pas vraiment d'oxygène pour me maintenir à la surface. Là, je ferme les
00:16yeux et j'essaye d'imaginer vraiment quelque chose de familial, quelque chose qui me plaît.
00:20Donc je m'imagine en train de faire du VTT dans les collines à Marseille, avec le bruit des cigales
00:24ou des hirondelles qui volent. Quelque chose qui n'a vraiment rien à voir avec le monde de l'apnée.
00:28À ce moment-là, je souffle tout mon air pour prendre le maximum d'air juste après. Donc,
00:32je gonfle le ventre, la cage thoracique. Et là, je fais une technique qu'on appelle la carpe. Donc,
00:37je mets un peu plus d'air dans les poumons que la normale. Et puis, une fois que je suis plein,
00:42je fais juste un virage avec les épaules pour me mettre face à la profondeur et je plonge.
00:47Les 30, 40 premiers mètres, c'est là où vraiment je vais caler mon rythme. C'est que de la partie
01:04technique. Je me concentre si la vitesse est bonne, si je suis bien détendu au niveau du ventre, des
01:08épaules, de la mâchoire, là où le stress peut s'accumuler. Et une fois que j'ai fait toute cette
01:13checklist, je vais petit à petit lâcher prise jusqu'à 80, 90 mètres où là, il va falloir que
01:20j'absecte ma condition d'aller au-delà de 120 mètres. Vers 95, 100 mètres, il y a cette question
01:26où je me dis qu'est-ce que tu fais là ? C'est tout noir autour de moi. J'ai une petite lampe sur
01:31la combinaison. Je vois juste le câble en face de moi. C'est tellement profond que je ne peux pas
01:35porter de masque. Sinon, le masque imploserait. J'y réponds à cette question en me disant, pendant
01:41un ou deux ans, tu t'es préparé pour aller à cette profondeur-là. Et petit à petit aussi,
01:45j'ai une musique en tête qui se met, que j'ai écouté cinq, six fois en boucle le matin. Dernièrement,
01:50c'était du Sofiane Pamar, le morceau Solitude. C'est ce moment-là clé que j'adore de la plongée,
01:56c'est le lâcher prise qu'on a du mal à faire des fois à la surface. Je suis concentré sur le moment
02:02présent, sur la température qui change, sur la pression sur mon corps. À ces profondeurs-là,
02:07je n'ai plus besoin de palmer parce que je coule entre trois et cinq kilomètres heure. Je coule
02:13comme une pierre. C'est un dialogue avec moi-même, un fil rouge que j'essaye de maintenir sur
02:17des pensées positives et éviter de penser à la surface, à l'envie de respirer. C'est
02:23quelque chose de mental, la descente.
02:32J'ai un ordinateur de plongée au niveau du cou. Il y a une alarme qui sonne cinq mètres
02:38avant l'arrivée du plomb. Je me freine petit à petit une fois que j'entends l'alarme. Et là,
02:42je serre fort le câble, ce qui me permet de faire un virage. Et avec ma main gauche,
02:47je prends le tag, je le cache dans la capuche. Et là, c'est le moment de la remonter. Ce moment-là
02:52n'a rien à voir. Il faut s'arracher du fond parce que si je ne parle pas à ces profondeurs,
02:57je continue de couler. Il y a comme une sorte de trou noir qui veut m'attirer vers le bas. Donc,
03:01j'ai le cœur qui bat à 15 pulsations minutes. Et d'un coup, je dois faire un sprint. Je consomme
03:06beaucoup d'oxygène très vite. Je palme sur les 20-30 premiers mètres, à fond. Et en face de moi,
03:12le câble ne bouge pas beaucoup. Vers les 40 derniers mètres, j'ai les cuisses en feu,
03:16j'arrive presque plus à palmer. J'ai des fourmis au bout des doigts à cause du froid, à cause du manque
03:22d'oxygène. On a l'impression de palmer dans la semoule. Et à un moment, on commence à voir le jour
03:27qui commence à revenir, l'eau qui se réchauffe, les apnées de sécurité qui reviennent vers moi.
03:32Les derniers mètres, c'est se dire, je ralentis. Si j'accélère, je vais manger le peu d'oxygène que
03:37j'ai. Sur les derniers mètres, je palme tout doucement, je me laisse flotter. Et à ce moment-là,
03:41je perce la surface. Donc, j'essaye de respirer un maximum pour regorger mon corps d'oxygène. Puis,
03:47je fais le signe OK pour prouver que tout va bien aux apnées de sécurité, aux juges. Et là,
03:52c'est la délivrance et le record.
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