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00:00On place maintenant à l'invité et au cœur de l'info.
00:03La 41e édition du Salon du Livre et de la Presse Jeunesse se tient depuis mercredi et jusqu'à lundi à Montreuil en Seine-Saint-Denis près de Paris.
00:112000 auteurs et autrices présents, 400 maisons d'édition, un rendez-vous absolument incontournable de la littérature jeunesse pour le grand public.
00:19200 000 visiteurs chaque année. La manifestation est placée cette année sous le signe de l'altérité et de l'empathie.
00:26A cette occasion, nous recevons ce soir l'écrivain Baptiste Beaulieu, par ailleurs médecin généraliste à Toulouse et véritable star des réseaux sociaux.
00:34500 000 abonnés rien que sur Instagram. Bonsoir Baptiste Beaulieu, merci beaucoup d'être avec nous ce soir sur France 24.
00:40Merci beaucoup de m'accueillir.
00:41Je vous en prie, c'est un véritable plaisir. Vous êtes par ailleurs auteur de plusieurs livres jeunesse, donc à succès.
00:48Dernière en date, les pansements invisibles aux éditions Les Arènes, illustré par King Lang,
00:52qui évoque avec beaucoup de délicatesse la notion du consentement chez les enfants.
00:58Alors les pansements invisibles, on va un peu donner la trame de l'histoire.
01:03C'est l'histoire d'une petite fille qui, à chaque fois qu'elle se sent contrainte par les adultes de faire quelque chose
01:08ou d'être obligée d'avoir un contact physique avec un adulte ou avec un enfant,
01:13elle voit apparaître sur son corps un pansement comme autant de blessures que les adultes ne voient pas.
01:18C'est ça le plus terrible pour elle, c'est qu'elle s'aperçoit qu'elle subit ça et que personne ne s'en rend compte
01:23et que ses pansements, personne ne les voit.
01:27Et ça me tenait vraiment à cœur de raconter ça et de raconter ça à hauteur d'enfant.
01:30Et aussi d'essayer de décaler un peu le regard, c'est-à-dire de se dire,
01:32et nous, en tant qu'adultes, comment est-ce qu'on réagirait ?
01:35Si par exemple là je me levais, je venais vous voir et que je touchais vos cheveux,
01:38par exemple que je prenais votre téléphone et que je commençais à regarder dedans,
01:41tout le monde trouverait ça inapproprié, malaisant.
01:43Pour ses enfants, oui, ça va être par exemple une caresse sur la tête de quelqu'un qu'on ne connaît pas
01:48ou quand on va l'obliger à partager son jouet.
01:50Moi je pense que c'est très important d'apprendre la générosité à un enfant.
01:53Mais comment est-ce qu'on se sentirait, nous, si on nous est obligés par exemple à partager notre jouet,
01:57notre téléphone par exemple, à quelqu'un qu'on ne connaît pas ?
02:00On trouverait ça évidemment hyper intrusif.
02:04Et je pense qu'il faut toujours essayer de se mettre à la place de l'enfant
02:06et de penser comme l'enfant et de dire comment je réagirais moi si je devais subir ces situations-là.
02:10Et c'est ce que j'essaie de rendre compte dans cet album.
02:13Et des pansements comme autant de blessures qui restent collées à la peau pendant parfois très longtemps ?
02:21Bien sûr.
02:22Vous savez, moi je suis aussi médecin généraliste, comme vous l'avez dit.
02:25Je crois que c'est très important, en tant que médecin, en tant que romancier, d'apprendre le consentement.
02:31Moi il n'y a pas une seule fois au cabinet médical où je ne sais pas,
02:34à chaque patient, les patients, les patientes, les adultes,
02:36je leur demande s'ils sont d'accord pour que je les examine.
02:39Parce qu'évidemment, en tant que médecin, c'est mon travail de toucher les gens,
02:42de les examiner, de les ausculter.
02:43Mais je demande aussi aux enfants, parce que ça me paraît hyper important.
02:46L'enfant, si je lui demande est-ce que tu es d'accord pour que je t'examine,
02:49ce que je crée dans sa tête, c'est qu'il va se dire
02:51mais si même le médecin dont c'est le métier me demande
02:54s'il a le droit de me toucher, de m'examiner,
02:57alors il n'y a aucune raison pour que quelqu'un qui n'est pas médecin,
03:00que je ne connais pas ou peu, ou même quelqu'un de mon entourage,
03:02ne me demande pas à son tour.
03:03Et donc, on crée un précédent dans sa tête
03:05et c'est à ça aussi que servent les albums jeunesse
03:08et que sert aussi mon travail de médecin, je crois.
03:10Donc, au cœur du lait, vous l'avez dit,
03:11la notion du consentement chez les enfants.
03:14Et peu à peu, on le voit dans ce livre,
03:17la petite fille prend conscience que son corps lui appartient à elle.
03:21Et qu'elle a le pouvoir de dire non aussi.
03:23Bien sûr.
03:23Et ça me tenait à cœur de rendre cet enfant agissant,
03:26c'est-à-dire de lui confier une certaine agentivité
03:29parce que je crois qu'on n'est jamais autant capable de dire
03:32ça je ne veux pas si on s'aperçoit qu'on est capable soi-même parfois
03:36de gêner les autres ou d'être malaisant avec les autres.
03:39Et je voulais vraiment rendre sa puissance à cet enfant
03:43pour que les enfants qui lisent l'album se disent
03:45ok, moi aussi j'ai cette puissance de pouvoir dire non.
03:47Et parfois il faut toute une vie pour apprendre à dire non.
03:50Moi j'ai 40 ans, j'ai encore du mal parfois.
03:52Parce qu'on a toujours peur que l'autre nous aime moins
03:53ou qu'on le blesse si on lui dit non.
03:57Alors que je me disais mais si on pouvait faire gagner
03:59des années de réflexion aux enfants sur ces sujets-là
04:01et leur permettre de prendre conscience très tôt
04:03que non est une phrase complète
04:04et qu'il n'a pas besoin de justification et d'explication
04:07et qu'on a le droit parfois de dire non
04:09sans donner de justification
04:10parce que non est une phrase complète.
04:12Mais faisons gagner des années de réflexion aux enfants.
04:14Pourquoi est-ce que vous avez choisi
04:16d'aborder cette question du consentement
04:18qui est quand même assez difficile ?
04:20Je crois que c'est au cœur des débats
04:23actuellement et souvent on a tendance
04:25à restreindre le consentement à la sphère intime
04:27mais moi je crois que c'est beaucoup plus large que ça.
04:30Ça va être oui, effectivement je parlais
04:31des espaces de jeux partagés,
04:33du jouet qu'on va obliger
04:34l'enfant à partager son jouet
04:38et je crois que c'est quelque chose
04:40qui doit s'apprendre dès l'enfance
04:42et qu'on peut désamorcer plus tard
04:44des situations qui seront bien plus douloureuses
04:47que de prêter son jouet ou pas.
04:48En fait je vais être clair,
04:49je pense que la littérature jeunesse
04:51c'est un moyen de pacifier la société de demain
04:53parce qu'en tant que médecin
04:54et en tant que romancier
04:55moi j'écris comme on soigne
04:57c'est-à-dire que je veux
04:58à la place de soigner des gens
04:59je veux soigner la société
05:01avec des albums jeunesse
05:02parce que ce qu'on apprend aux enfants
05:04c'est la manière dont ils seront
05:05des citoyens de demain.
05:06Et moi j'ai pas de meilleure promesse
05:08à faire aux gens que j'écris les albums
05:09que je veux lire à mon fils
05:11qui n'a que deux ans
05:11mais que je les lirai plus tard
05:14pour qu'il devienne
05:15entre guillemets
05:15pas un boulet en société plus tard
05:17qu'il soit quelqu'un de bien
05:18respectueux de lui-même
05:19des autres
05:19et qu'il gagne des années de réflexion
05:22par rapport aux grandes questions existentielles
05:24par rapport aux grandes douleurs intimes
05:25qu'on se trimballe tous.
05:28Et du coup à qui vous vous adressez au final
05:30aux enfants seulement
05:31ou à leurs parents aussi ?
05:32Je crois que c'est l'objet de ces livres
05:35et ça c'est tellement merveilleux pour moi
05:37quand je vois des parents
05:38qui viennent me dire
05:39l'objet
05:40cet album
05:41il a été un outil
05:43qui nous a permis
05:44d'établir une sorte de dialogue intergénérationnel
05:47avec notre enfant
05:48avec notre fils
05:48avec notre fille
05:49parce qu'évidemment
05:50un enfant
05:50on ne peut pas être frontal
05:51avec les enfants
05:52c'est-à-dire on veut dire
05:53comment c'est passé ta journée
05:53ils ne vont jamais nous répondre
05:54mais si on leur lit
05:56par exemple
05:56un album
05:57et que
05:58ah tu as vu ce qui est arrivé
05:59à cet enfant dans cet album
06:00et toi par exemple
06:01est-ce que tu avais
06:02là ils seront beaucoup plus enclin
06:03parce qu'on a été beaucoup moins frontal
06:05et je crois que c'est à ça
06:06que servent les histoires
06:07permettre de créer
06:08des outils pédagogiques
06:09et d'ailleurs
06:09c'est un honneur pour moi
06:11de savoir qu'énormément d'enseignants
06:13utilisent mes albums
06:14dans les écoles
06:15je me dis mais
06:15je suis content d'être né
06:18ça permet de faciliter la communication
06:19bien sûr
06:20bien sûr
06:21c'est vraiment ça
06:22quand je reçois un message
06:25de parents
06:26qui me disent
06:26mon enfant
06:27notre enfant est né
06:28avec une fente palatine
06:29il a été opéré très jeune
06:30et il a une cicatrice
06:32le premier jour de la rentrée
06:33on avait lu tous vos albums
06:34il s'est présenté
06:35tous les enfants devaient se présenter
06:37il s'est présenté
06:37il a dit son nom, prénom
06:38et après il a dit
06:38et moi quand je suis né
06:40j'avais une fente palatine
06:41on m'a opéré
06:41c'est pour ça que j'ai une cicatrice
06:42et à partir de ce moment-là
06:44il a désamorcé
06:45toute possibilité de harcèlement
06:46ça l'a libéré en fait
06:47bien sûr
06:47et surtout les autres
06:48ont vu qu'il n'y avait pas
06:49possibilité de prise sur lui
06:50ou d'emprise
06:51c'est-à-dire pas possibilité
06:52de se moquer
06:52puisque son histoire
06:53il en était fier
06:54et qu'il n'hésitait pas
06:54à la partager
06:55c'est très courageux au final
06:56mais bien sûr
06:57mais je
06:58vous savez
06:58je pense qu'il n'y a pas
06:59un seul spectateur
07:02ou téléspectatrice ici
07:03qui ne se débat pas
07:04silencieusement
07:05contre quelque chose
07:06qui le fait souffrir
07:07et dont on parle à personne
07:08on est tous pareils
07:09le matin on se regarde
07:10dans la glace
07:10parfois on se dit
07:11des choses terribles
07:12et on se débat tous
07:14contre un combat
07:16qui nous est propre
07:17et qu'on ne partage à personne
07:18mais
07:19et donc si quelqu'un
07:20nous avait parlé
07:22comme vous
07:23vous parlez aux enfants
07:24à travers vos livres
07:25on en serait pas là
07:26je crois que si on arrivait
07:27à dire ok
07:28raconte-moi ton histoire
07:29moi je vais te raconter
07:30la mienne
07:30peut-être qu'on
07:31vous savez un corps
07:32c'est parce que je suis médecin
07:33un corps ça vient jamais
07:34sans une histoire
07:35on trimballe toujours
07:36des bagages
07:36des bagages parfois
07:37très lourds
07:38et c'est ce que j'essaie
07:39d'apprendre aux enfants
07:40à travers ces albums
07:41c'est que quand on se moque
07:42d'un corps ou d'une personne
07:43on se moque aussi
07:44de son histoire
07:45dont on ne connait rien
07:46on n'a pas le droit
07:47de se moquer de l'histoire
07:47elles sont précieuses
07:48elles sont uniques
07:49vous l'avez évoqué
07:50à plusieurs reprises
07:50vous êtes donc médecin généraliste
07:52si je ne me trompe pas
07:53dans la région de Toulouse
07:55votre pratique
07:56ça a été une source
07:57d'inspiration
07:57depuis des années
07:58bien sûr
07:59pour les thèmes de vos livres
08:01bien sûr
08:01vous savez
08:05on est médecin
08:05on voit 20-25 personnes
08:07par jour
08:07c'est 25 histoires
08:09de vies différentes
08:10qui sont posées devant nous
08:11et je crois
08:12qu'il faut qu'on soit
08:13digne de ça
08:13comme moi j'essaye
08:14d'être digne
08:15quand j'écris des albums
08:16digne de cette responsabilité
08:17c'est-à-dire moi
08:18le soir je me couchais
08:19je vais me souvenir
08:20peut-être d'un ou deux patients
08:21mais si je me suis mal occupé
08:23des patients
08:23si je les ai maltraités
08:24si je ne les ai pas écoutés
08:25le patient lui
08:26il a vu qu'un médecin
08:26c'était moi
08:27et il s'en souviendra
08:28peut-être toute sa vie
08:28et donc il faut être digne
08:29de cette responsabilité là
08:31comment il faut être digne ?
08:32des parents qui nous disent
08:33on prend vos albums
08:34on les lit à nos enfants
08:35pour essayer de
08:35voilà
08:36de leur apprendre
08:37le respect de soi-même
08:37des autres
08:38et on ne peut pas
08:39on ne peut pas tricher
08:41on n'a pas le droit
08:42et dans le cadre
08:43de cette pratique médicale
08:44au-delà des actes
08:45purement médicaux
08:46j'imagine que vous écoutez
08:47du coup beaucoup
08:47les enfants
08:48à qui vous faites face
08:50par rapport à tout ce que
08:51vous êtes en train de nous dire
08:52j'essaye en tout cas
08:53je pense que vous savez
08:54que c'est les meilleurs poètes
08:56les enfants
08:56ils ont une capacité
08:57à décentrer le regard
08:58à faire un pas de côté
08:59et à nous dire
09:02la vérité du monde
09:03moi mon fils là
09:04il a deux ans
09:05et pendant des mois
09:06et des mois
09:06il s'est extasié
09:07de la porte du garage
09:08électrique qui s'ouvrait
09:09et là depuis quelques jours
09:10il arrête d'applaudir
09:11et de s'extasier
09:12je me dis ça y est
09:12là on a basculé dans autre chose
09:13et heureusement
09:14il ne peut pas passer
09:15toute sa vie
09:15à s'extasier
09:16devant une porte du garage
09:16mais ce que je voudrais
09:18parfois c'est
09:18en nous en tant qu'adultes
09:19retrouver le regard
09:20de cet enfant
09:21qui s'extasie
09:21même devant une porte
09:22de garage électrique
09:23toujours pour revenir
09:24sur votre pratique médicale
09:26en tant que médecin généraliste
09:28vous nous avez transmis
09:28une image d'archive personnelle
09:30à ma demande
09:30c'est la carte blanche
09:32d'Au coeur de l'info
09:33ce soir
09:34on va voir donc
09:35cette photo apparaître
09:36d'ici quelques instants
09:36voici vous-même
09:38donc lors de votre prestation
09:40de serment en tant que médecin
09:42qu'est-ce que vous vouliez
09:43nous raconter
09:44à travers cette image
09:44pour moi elle est forte
09:46parce que
09:46parce que c'est le couronnement
09:48aussi de plusieurs années
09:49d'études
09:49et surtout
09:50de véritables sacrifices
09:52qu'ont opéré mes parents
09:53mes parents viennent d'un milieu
09:54modeste
09:54ils se sont battus
09:55toute leur vie
09:55pour que leurs trois enfants
09:57aient un niveau de vie
09:58supérieur au leur
09:59ils se sont
10:00ils se sont
10:01oui ils se sont saignés
10:02ils ont fait tout ce qu'ils ont pu
10:03pour qu'on ait une vie
10:04plus facile que la leur
10:05et donc moi cette photo
10:06c'était aussi une manière
10:07de dire à mes parents
10:08je vous aime
10:09je suis fier de vous
10:11et je vous remercie
10:12infiniment
10:13pour tout ce que vous avez
10:14apporté à mes soeurs
10:15à moi
10:15et à tout ce que vous avez
10:16voulu pour nous
10:17que vous n'avez pas pu avoir
10:18et le message est donc
10:20passé ce soir
10:21pour revenir
10:22sur le message
10:23principal de votre livre
10:25donc votre objectif
10:26en gros
10:27c'est que l'enfant
10:28soit désormais vu
10:29comme un véritable sujet
10:30et comme un objet
10:32est-ce que vous pensez
10:33que les générations
10:33précédentes
10:34agissaient plutôt comme ça
10:35avec les enfants ?
10:37je suis content
10:38que vous me posiez
10:38cette question
10:39parce que c'est un véritable
10:40angle mort
10:41vous savez moi ça fait 10 ans
10:42que je milite contre
10:42les maltraitances médicales
10:43je n'avais jamais parlé
10:45des maltraitances médicales
10:46faites aux enfants
10:47j'ai parlé des femmes
10:47des personnes en situation
10:48de surpoids
10:49des personnes noires
10:49des personnes LGBT
10:51et je me suis aperçu
10:52en 10 ans
10:52je n'avais pas parlé
10:53des maltraitances médicales
10:54faites aux enfants
10:54c'est un véritable angle mort
10:55je me dis mais pourquoi
10:56tu n'as jamais parlé de ça
10:57il a fallu que je devienne père
10:58pour m'apercevoir
11:00que oui aussi
11:00ça existe
11:01et ce qui est terrible
11:03c'est de se dire
11:03les enfants représentent
11:05à travers le monde
11:06il y a des statistiques
11:06c'est pas moi qui dis ça
11:07c'est l'UNSEE
11:08les enfants représentent
11:10dans le monde
11:10la première population
11:11minorisée
11:12victime de violences
11:13évidemment psychologiques
11:15physiques
11:16sexuelles
11:17sauf que eux
11:18ne peuvent pas se regrouper
11:19en communauté
11:20ils ne peuvent pas
11:20se regrouper
11:22de quelconque manière
11:24que ce soit
11:24ils ne peuvent pas porter
11:25leur message
11:26et donc je crois que
11:27cette violence là
11:28il faut la dénoncer
11:29il faut en parler
11:30et nous en tant qu'adultes
11:31il faut qu'on soit
11:32de leur côté
11:33et qu'on dise
11:34ce n'est plus possible
11:37on ne peut pas
11:38faire comme si
11:38cette violence là
11:39n'existait pas
11:40et la passer sous
11:41le tapis
11:42on écoute quand même
11:43beaucoup plus les enfants
11:44aujourd'hui
11:45qu'à la génération précédente
11:46et j'espère
11:46et j'espère que ça va continuer
11:47et c'est aussi à ça
11:48que sert la littérature
11:51ça me paraît fondamental
11:52la littérature
11:53c'est donner des mots
11:54aux enfants
11:54et ces mots
11:56je parlais tout à l'heure
11:57de pacifier la société
11:58il y a des études
11:59qui montrent par exemple
12:00que plus le niveau
12:01de vocabulaire
12:01d'un enfant
12:02est développé
12:03moins il va avoir tendance
12:04à développer des comportements
12:05hétéro-agressifs
12:06ou auto-agressifs
12:07soit se faire du mal
12:07se scarifier
12:08ou avoir des comportements
12:09violents avec ses camarades
12:10tout simplement
12:11parce qu'il a les mots
12:12pour dire les émotions
12:13qui le traversent
12:14mais moi en tant que romancier
12:15quelle plus belle mission
12:17je peux avoir
12:17que de pacifier la société
12:18en offrant le plus de mots
12:19possible aux enfants
12:21pour autant
12:22est-ce que solliciter
12:23disons systématiquement
12:24l'avis de l'enfant
12:26est-ce que c'est réaliste
12:27parce que
12:28beaucoup de détracteurs
12:29notamment de la parentalité positive
12:30je dirais
12:31en pratique
12:33c'est pas vraiment
12:34ce que je vis
12:34bien sûr
12:35vous savez
12:36moi je suis jeune papa
12:37donc j'apprends aussi
12:38il n'y a pas de brevet
12:39de parentalité
12:40on apprend sur le temps
12:42moi je suis un universitaire
12:42j'espérais trouver
12:43dans les livres
12:44des solutions
12:44quand j'ai eu mon fils
12:45je me disais
12:46tiens je vais aller acheter
12:46des livres
12:47pour savoir comment
12:48je peux l'élever au mieux
12:49et tout
12:49et en gros
12:51ils disaient tous
12:51la même chose
12:52il faut les aimer
12:52pas les frapper
12:53merci 17 euros pour ça
12:54c'était mon côté universitaire
12:56je me dis
12:56je me rassure avec les livres
12:57et non
12:58en fait
12:58c'est une terre inconnue
13:00pour tout le monde
13:00pour tout le monde
13:01je suis pas sûr
13:02qu'il faille écouter
13:03quelqu'un
13:03qui dit moi j'ai la solution
13:04surtout s'il a quelque chose
13:05à vous vendre
13:06après
13:06tout ce que je sais
13:08c'est qu'effectivement
13:09peut-être
13:09il faut les aimer
13:10pas les frapper
13:10tout simplement
13:11ça c'est plutôt évident
13:13de plus en plus
13:14de livres jeunesse
13:15en tout cas
13:15abordent
13:16ces questions difficiles
13:18sociétales
13:19comme donc
13:19en l'occurrence pour vous
13:20le consentement
13:21ou encore l'inceste
13:23on l'a vu dans d'autres
13:24dans d'autres livres
13:25comment aborder ces notions
13:26quand même
13:26qui sont très très lourdes
13:27bien sûr
13:28sans faire perdre
13:29aux enfants
13:29leur innocence
13:30bien sûr
13:31vous mettez le doigt
13:33sur quelque chose d'important
13:34moi je crois
13:36qu'on peut parler de tout
13:37avec les enfants
13:38après il faut utiliser
13:39évidemment les bons mots
13:40mais ne pas parler
13:41de certaines choses
13:42avec les enfants
13:42ça ne règle pas le problème
13:44et surtout ça crée
13:44en une intranquillité
13:45parce qu'ils sentent
13:47qu'il y a là un sujet
13:48qui est tabou
13:50dont on parle pas
13:51qui est dans l'air
13:52comme ça
13:52et donc ça génère
13:53évidemment une angoisse
13:54ou en tout cas
13:55au mieux une intranquillité
13:56chez eux
13:57il vaut mieux aborder
13:58tout simplement le sujet
13:59avec des mots d'enfant
14:00et c'est là que
14:01la littérature
14:02notamment la littérature jeunesse
14:04elle a un rôle
14:05qui est fondamental
14:06vraiment fondamental
14:08c'est à ça
14:09que servent les mots
14:10sinon ils servent à quoi
14:11les mots
14:11L'an dernier
14:12votre troisième livre
14:14jeunesse
14:15Je suis moi
14:15et personne d'autre
14:16autre ouvrage
14:18qui m'a particulièrement touchée
14:19ça raconte l'histoire
14:21de Francisco
14:22un petit garçon
14:22qui n'aime pas le foot
14:23qui préfère
14:24la corde à sauter
14:24et la couleur rose
14:26mais qui pour tenter
14:28de ressembler
14:29et de plaire
14:30donc aux autres
14:31et notamment
14:31aux autres garçons
14:32se force à dire oui
14:34c'est un livre
14:35autobiographique
14:36Oui un peu
14:37on peut le dire
14:38mais parce que je crois
14:38qu'on a tous et toutes
14:39été cette petite fille
14:41ou ce petit garçon
14:42qui pour plaire au groupe
14:44ben va accepter des choses
14:47qui ne lui plaisent pas
14:48parce qu'il veut quand même
14:49avoir des copains
14:50des copines
14:50et au final
14:52jour après jour
14:53je voulais raconter
14:54l'histoire de cet enfant
14:54qu'on a peut-être été tous
14:55été un jour ou l'autre
14:58cet enfant qui se perd
14:59son prénom disparaît
15:01au-dessus de son porte-manteau
15:03là où sont accrochés
15:04les prénoms
15:04et chaque fois qu'il dit oui
15:05alors qu'il a envie de dire non
15:06il y a une lettre de son prénom
15:07qui disparaît
15:08à la fin de l'album
15:09il ne sait plus
15:10comment il s'appelle
15:10Et vous c'est ce que vous avez vécu
15:11enfant, adolescent
15:12Mais bien sûr
15:13Et je...
15:15Dans quelle mesure ?
15:16Bon
15:16c'est...
15:17Peut-être évidemment
15:20moi ça a été un peu compliqué
15:21parce que mon chemin
15:22vers mon homosexualité
15:24aussi a été quelque chose
15:24de compliqué
15:25mais comme toutes les personnes
15:26qui sont soumises
15:27à la différence
15:28quelle qu'elle soit
15:28et c'est ça qui est terrible
15:29c'est que je crois
15:30qu'on est tous
15:31plus ou moins
15:32l'autre
15:33ou en tout cas
15:34le différent de quelqu'un
15:35et donc
15:37pour se plaire
15:38on peut s'oublier
15:39et je crois qu'il faut
15:40des années
15:41et même à 40 ans
15:41aujourd'hui
15:42et même pour les spectateurs
15:44et les spectatrices
15:44je crois qu'il y en a
15:45beaucoup encore
15:46qui doivent parfois
15:46dire oui
15:47alors qu'ils ont envie
15:47de dire non
15:48et il faut
15:49peut-être toute une vie
15:51pour arriver à dire non
15:52et à s'en contenter
15:54c'est-à-dire
15:55à ne pas justifier
15:57son non
15:57et si on peut faire gagner
15:59encore une fois
15:59des années de réflexion
16:00au gamin
16:00sur ces sujets-là
16:01voilà
16:02c'est notre rôle d'adulte aussi
16:03Baptiste Beaulieu
16:04les jeunes
16:05aujourd'hui
16:06on le sait
16:06lisent beaucoup moins
16:08la faute
16:08notamment
16:09aux écrans
16:10on imagine que ça vous inquiète
16:11en tant que papa
16:12en tant qu'auteur
16:14et en tant que médecin aussi
16:15bien sûr
16:15vous savez
16:16les études
16:16elles le montrent bien
16:17puis
16:17plus le temps d'écran augmente
16:20et plus le niveau
16:21de vocabulaire diminue
16:22je parlais tout à l'heure
16:23de pacifier la société
16:24on la pacifie avec des mots
16:25pas avec des écrans
16:26et moi
16:27ce qui me terrifie
16:27c'est de voir aussi
16:28que c'est un outil
16:28de reproduction sociale
16:30les écrans
16:31qui est terrifiant
16:31je le vois au cabinet médical
16:32quand je lis les études
16:34qui montrent que les familles précaires
16:35ont plutôt effectivement
16:36un taux d'usage des écrans
16:38qui est supérieur
16:38aux familles CSP plus
16:40mais du coup
16:40quand je suis dans ma salle d'attente
16:41et que je vois
16:42le fils de prof
16:43qui est en train de lire son livre
16:44et à côté
16:45le fils d'artisan
16:46qui est sur l'écran
16:47je me dis ça y est
16:47dans 20 ans en fait
16:48la reproduction sociale
16:49elle est déjà là
16:49et nous
16:50notre rôle
16:51en tant qu'adulte
16:52c'est le même rôle
16:53que l'éducation nationale républicaine
16:54c'est à dire
16:55d'essayer d'effacer
16:56les déterminismes
16:56on n'efface pas les déterminismes
16:58si on reproduit socialement
16:59les inégalités
17:00à travers les écrans
17:01ou à travers les livres
17:02la littérature jeunesse
17:04c'est 13,4%
17:06du marché du livre
17:07pourtant
17:08sa visibilité
17:09on le sait
17:10est bien moindre
17:11que la littérature générale
17:12comment est-ce que
17:13vous l'expliquez ?
17:15alors je dirais
17:16quelque chose de très désagréable
17:17pour les hommes
17:17qui nous écoutent
17:18mais il suffit d'aller à Montreuil
17:19de se promener dans les travées
17:20et puis de s'apercevoir
17:21tout simplement
17:22que la littérature jeunesse
17:23n'intéresse pas les hommes
17:24elle intéresse les mamans
17:25les femmes
17:26quand on se promène
17:27dans une librairie
17:28même les papas
17:29de la nouvelle génération
17:29j'en ai eu trois aujourd'hui
17:31je suis content
17:31j'ai dû signer 200 livres
17:33en tout dans la journée
17:34j'ai eu trois papas
17:35je les remercie
17:35j'étais très heureux
17:36de les voir
17:36mais où sont les hommes ?
17:38moi c'est une vraie question
17:38que je pose
17:39où sont les hommes
17:39dans les librairies jeunesse
17:41où sont les hommes
17:41au salon du livre jeunesse
17:43de Montreuil
17:44vous n'êtes donc pas concerné
17:46par ce qu'on met
17:47dans la tête de vos enfants
17:49pourquoi ?
17:50quand il y a un homme
17:51j'en ai eu quelques-uns
17:52aujourd'hui
17:52en gros je sentais
17:53qu'ils accompagnaient leurs femmes
17:54ils étaient là un peu en mode
17:56ma femme fait ses courses
17:58en gros c'était ça
17:59mais en fait
18:00elle achète des livres
18:01pour vos enfants
18:01mais alors
18:03je ne sais pas
18:04c'est un peu de la même manière
18:06je ne sais pas comment expliquer
18:07pourquoi moi en tant que médecin
18:09quand un enfant a un problème
18:11c'est toujours la mère
18:11qui m'amène l'enfant
18:12au cabinet médical
18:13ou quand le père
18:14m'amène l'enfant
18:15et que je lui pose une question
18:15sur la santé de son enfant
18:17par exemple
18:17la date des dernières vaccins
18:18ou quoi
18:19il me dit attendez
18:19j'appelle ma femme
18:20voilà
18:20et ça c'est comme ça
18:22pour l'enfant
18:23mais c'est aussi pour les personnes plus âgées
18:25quand je demande à un homme
18:26qui a une hypertension
18:27depuis 30 ans
18:27quel est le nom
18:29de son anti-hypertenseur
18:30et qui me dit
18:30attendez j'appelle ma femme
18:32ça change quand même un petit peu
18:33très lentement
18:35très très lentement
18:35mais je vous assure
18:37qu'à Montreuil
18:37ça change
18:38mais très lentement
18:39bon en tout cas
18:41on peut s'y rendre
18:42à Montreuil
18:42jusqu'à demain
18:43merci infiniment
18:44merci à vous
18:45Baptiste Beaulieu
18:46d'être venu nous présenter
18:47donc votre dernier ouvrage
18:49je le rappelle
18:50Les pansements invisibles
18:52un magnifique ouvrage
18:53donc pour les enfants
18:54sur la notion de consentement
18:56que vous avez donc écrit
18:57avec les illustrations de Kinlang
18:59qui sont également magnifiques
19:01merci encore d'être venu
19:02sur France 24
19:03cet entretien
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