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  • il y a 11 heures
Flavie Rault, secrétaire générale du syndicat national des directeurs pénitentiaires, était l'invitée du Face à Face ce vendredi 28 novembre.

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Transcription
00:00Vous êtes la secrétaire générale du syndicat national des directeurs pénitentiaires.
00:03Vous êtes l'ancienne directrice de la prison de la santé.
00:06Hier, 5h52, deux détenus sont partis de la prison de Dijon.
00:13Ils avaient scié leurs barreaux, noué leurs draps.
00:15Ils sont partis en tongs par les toits de la prison.
00:18Comment c'est encore possible aujourd'hui ça ?
00:20Je crois qu'il faut admettre que nous arrivons à un point
00:24qu'on pourrait définir comme un point de crispation.
00:26Le syndicat auquel j'appartiens fait désormais partie d'un regroupement
00:31qui réunit un autre syndicat et la conférence nationale des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation.
00:38Ce regroupement qu'on a appelé directeur en colère a communiqué il y a quelques jours
00:42en indiquant qu'on se retrouvait aujourd'hui dans la situation suivante.
00:47On a des établissements vitrines sur lesquels le ministre fait une communication maximale
00:52et qui donne sans doute de l'extérieur l'image d'une administration qui se rénove.
00:56La réalité c'est celle d'une administration au bord de l'implosion
01:00avec la plupart du temps des services, des établissements pénitentiaires,
01:04notamment exsangues, qui ne parviennent plus à faire face
01:07et qui sont confrontés à plusieurs phénomènes qui se combinent entre eux.
01:11D'une part une surpopulation qui est exponentielle
01:14et qui n'en finit plus de grimper.
01:16C'est un processus qui est complètement hors de tout contrôle désormais.
01:20Des carences en ressources humaines très fortes
01:22avec plusieurs milliers de surveillants manquant en compteur.
01:24Et là je ne parle que des surveillants.
01:26Et puis un parc immobilier de plus en plus vétuste et dégradé
01:31avec surtout de gros écarts entre des établissements récents
01:33qui sont avec une modalité de gestion qui mêle public et privé
01:38et puis des établissements anciens comme la prison de Dijon
01:41qui date du 19e siècle
01:42qui sont eux sous une forme de gestion exclusivement publique
01:46et qui finalement dans la répartition budgétaire
01:49on pourra peut-être en reparler après, c'est un petit peu technique
01:51se retrouve à être la dernière roue du carrosse.
01:53Je vous écoute, déversez ce qui ressemble à quelqu'un
01:59qui en a quand même gros sur la patate, pardon de vous le dire comme ça
02:02et vous n'êtes pas n'importe qui, vous êtes quand même l'ancienne directrice
02:04de la prison de la santé, vous représentez les directeurs pénitentiaires
02:09et au fond vous nous décrivez une réalité qui ne correspond absolument pas
02:14aux muscles, j'allais dire, que l'on nous vend du point de vue politique
02:18depuis plusieurs années en nous disant que l'on gère, que l'on crée des prisons de haute sécurité
02:23le contraste est saisissant.
02:25Le contraste est effectivement très saisissant
02:27et je crois que c'est effectivement comme vous le décrivez
02:29quelque chose qui est arrivé pour nous à son terme
02:32alors je vais parler uniquement au nom des directeurs pénitentiaires
02:35mais en réalité je pense que tous les personnels pénitentiaires pourraient partager mes propos
02:39je pense que nous en avons marre de ne pas être considérés dans nos remarques
02:44de ne pas être entendus quand nous disons que les priorités sont ailleurs
02:48que celles que fixe le politique
02:50et je vous les ai donnés il y a quelques minutes.
02:52Ça veut dire que ce qu'il s'est passé par exemple à Dijon hier
02:55ce qu'il s'était passé à Rennes il y a deux semaines
02:58avec cette sortie au planétarium et l'un des détenus qui s'était évadé
03:02celui-là a été retrouvé hier
03:04donc hier on en a perdu deux mais on en a retrouvé un
03:06ça ne vous surprend pas ?
03:09Nous ne sommes absolument pas surpris en effet de ce qui se passe
03:11malheureusement c'est des choses qui sont tout à fait prévisibles
03:16si on revient sur la double évasion
03:18on est sur un établissement qui est extrêmement vétuste
03:21pour lesquels il y avait effectivement un plan de rénovation
03:25qui venait d'être prévu
03:26mais c'est des choses qui sont à l'oeuvre depuis longtemps
03:29ce sont des dynamiques qui se travaillent sur plusieurs années
03:32nous avons aujourd'hui dans notre parc pénitentiaire
03:34beaucoup d'établissements dans cet état
03:37et en réalité moi je considère malgré tout
03:39que la problématique principale c'est cette histoire de surpopulation
03:43car dans ces conditions on est à 173% de taux d'occupation à Dijon
03:46et je pense qu'on peut s'estimer heureux
03:48quand on connaît le taux d'occupation de beaucoup d'autres maisons d'arrêt
03:50qui dépassent très largement les 200 parfois jusqu'à 250%
03:54comment dans ces circonstances
03:55comment rénover, comment dégager des budgets
03:57sachant qu'une partie des budgets est absorbée aussi par cette surpopulation
04:00comment travailler quand on est surveillant
04:02quand on est conseiller pénitentiaire d'insertion et de probation
04:05quand on est directeur
04:06quand on a deux fois, deux fois et demie la charge de travail qui nous incombe
04:09Je vais vous poser la question dans un instant aussi
04:11justement de ce que vous disent les surveillants de prison
04:14de leur vie quotidienne, de leur travail au quotidien
04:17mais si on s'arrête un instant sur ces deux évasions
04:20je le disais, c'est vrai qu'en fait on a quand même du mal à se dire
04:23qu'en France on peut scier ses barreaux
04:25ça veut dire déjà qu'il faut avoir trouvé l'outil
04:27qu'on peut ensuite sortir, nouer ses draps, partir en tongs
04:32avoir le temps de partir en tongs sur les toits d'une prison
04:34j'avoue que c'est même pas hollywoodien
04:38c'est bêtement comme dans une bande dessinée d'enfants
04:41on en est là quand même
04:43on en est là
04:44on en est là
04:45et quand on regarde, et là j'aimerais aussi comprendre ce qu'il se passe
04:48l'un des deux qui s'était évadé hier
04:52il était sur TikTok
04:54il était sur TikTok régulièrement
04:56parfois même en direct depuis sa cellule
04:59on le voyait sur son compte TikTok
05:01qui s'appelait la mafia 133
05:04depuis sa cellule fumée de la drogue
05:07proposer même des ventes de téléphones ou de drogues
05:12depuis son compte TikTok
05:15donc c'est un accès à la drogue
05:17c'est un accès au téléphone portable
05:19c'est un accès à internet
05:21tout ça à visage quasi découvert
05:23là pour le coup c'est pas une question de moyens
05:25vous regardez TikTok ?
05:27je suis pas très TikTok
05:28mais peut-être qu'il faudrait l'être
05:30je pense qu'en réalité
05:31cette problématique des téléphones portables
05:35en établissement pénitentiaire
05:36et de tous les autres objets
05:37qui peuvent rentrer de manière illégale
05:38c'est le cas évidemment des stupéfiants
05:40c'est aussi le cas des fameuses lames de scie
05:41qui ont aidé
05:42mais là il n'y a rien qui va dans cette histoire
05:43il y a les lames de scie, il y a le téléphone, il y a TikTok, il y a la drogue
05:46non il n'y a rien qui va
05:46on est tout à fait d'accord là-dessus
05:49il n'y a rien qui va
05:49et face à ce rien qui va
05:50on a deux possibilités
05:51soit comme le ministre
05:52on déclare à grand renfort
05:54de millions d'euros
05:55un plan zéro portable
05:57qui ne produira aucun effet
05:58parce que l'ensemble des dispositifs
06:00qui sont mis sur la table
06:01avec ce plan
06:01existe déjà
06:02et je pense que je n'ai pas besoin
06:03d'insister beaucoup
06:05sur le fait que ça ne fonctionne pas
06:06ça ne fonctionne pas
06:07parce que ces dispositifs
06:08ne sont pas opérants
06:09les brouilleurs de téléphones
06:10ne brouillent pas les téléphones portables
06:11mais donc on a mis
06:12des millions d'euros
06:14dans des brouilleurs de téléphones
06:15qui ne marchent pas
06:15tout à fait
06:16on a mis des millions d'euros
06:17dans des brouilleurs de téléphones
06:18qui ne marchent pas
06:18alors avoir engagé cette politique
06:20je pense que ça n'était pas une erreur
06:22je pense que c'est une priorité
06:23que de trouver
06:24des moyens technologiques
06:25qui vont nous permettre
06:26de lutter contre
06:28les téléphones portables
06:29les drones
06:29ce genre de dispositifs
06:30c'est ce qu'on a fait en 2017
06:31je pense que ça n'était pas
06:32foncièrement une erreur
06:33en revanche
06:34face à l'inefficacité
06:36des dispositifs
06:37qu'on avait déployés
06:38il aurait à mon avis
06:39très sérieusement
06:39fallu se poser la question
06:40d'un réajustement
06:41notamment
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