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00:00Bienvenue au Cœur du Crime, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:11Savez-vous que plus d'un tiers des crimes et délits commis en France sont traités par la Gendarmerie Nationale ?
00:19Je m'appelle Yann Kermadek. Je suis commandant de gendarmerie.
00:25Je dirige une section de recherche dont la mission essentielle est une mission de police judiciaire.
00:41L'histoire que je vais vous raconter est une histoire vraie.
00:46Tous les faits sont réels et se sont déroulés en France.
00:50Seuls, les noms des personnes et des lieux ont été changés.
00:55Par cette belle matinée agréablement ensoleillée, Amanda Juckston, installée sur la terrasse de sa grande maison, sourit au monde.
01:10Malgré ses cheveux d'une blancheur de neige tirée en arrière et dégageant sa petite tête ronde,
01:16ses lunettes avec leur monture de plastique bleu agrémentée de faux brillants lui donnent encore l'allure d'une femme d'âge moyen.
01:24Son corsage est un embrasement de jaune orangé.
01:29Elle ressemble à un professeur à la retraite qui aurait conservé des goûts jeunes en dépit des années.
01:35À ses pieds, somnolent un bon gros matou beige.
01:41Un plateau dans les mains, Sheila Benson apparaît à la porte-fenêtre et s'avance sur la terrasse d'allée.
01:47Au claquement de ses hauts talons, Amanda se retourne, comme si quelques mécanismes se déclenchaient en elle.
01:56Sheila sourit.
01:58« Voici, » dit-elle, l'air de nager dans le bonheur, « le petit déjeuner est servi. »
02:03« Tant mieux, » répond Amanda, « j'ai tellement faim que j'avalerai bien un cheval tout entier. »
02:10Sheila s'esclave.
02:12« Ne préférez-vous pas un bon jus d'orange, du bacon canadien et des œufs brouillés ? »
02:18« Eh bien, oui. Maintenant que vous m'en parlez, je crois que j'aimerais assez cela. »
02:23« Parfait ! » recoule Sheila en posant le plateau.
02:26« C'est justement ce que nous avons ce matin. »
02:30Le chat, qui d'un œil guette la scène, se redresse.
02:35Miaulant, il se détend et pose ses pattes de devant et son nez sur le bord de la table.
02:41Amanda lui caresse la tête.
02:43« Oui, Crème Pouf, veut aussi son petit déjeuner, n'est-ce pas, mon joli ? »
02:49Sheila, qui jusque-là faisait mine de l'ignorer,
02:52regarde le chat du coin de l'œil.
02:55Son sourire vacille, puis reprend tout son éclat.
02:59« Bien sûr, nous allons prendre une soucoupe et donner à manger au bon petit minou ! »
03:05Elle s'élance en hâte vers la maison, le chat sur les talons.
03:10Une fois à l'intérieur, elle cesse de sourire et se hâte vers la cuisine.
03:16La colère se lie sur ses traits.
03:18Elle pose un petit bol sur la table
03:20et sort un pot de crème du réfrigérateur.
03:23Elle n'a pas encore commencé de verser que le chat a déjà sauté sur la table.
03:27Furieuse, elle le chasse, sans ménagement, d'un revers de main.
03:32L'animal laisse échapper un miaulement de surprise et s'enfuit de la cuisine.
03:37Quand Sheila revient sur la terrasse,
03:39il est pelotoné sous la chaise de la vieille dame.
03:42Avec un sourire angélique, Sheila s'agenouille et pose devant lui le bol de crème.
03:49« Il a vraiment eu peur, ce pauvre Klimpouf ! »
03:53fait-elle, lui parlant comme à un bébé.
03:56« Vous êtes si gentille ! » remarque à son tour Amanda.
04:00« C'est presque comme si vous étiez ma fille ! »
04:04Elle pose sa main sillonnée de grosses veines sur celles de Sheila.
04:09« C'est un tel réconfort pour moi de savoir que Klimpouf vous aura,
04:14John et vous, pour l'aimer et prendre soin de lui quand je ne serai plus là. »
04:19Sheila se met à rire comme pour chasser l'humeur sérieuse de la vieille dame.
04:23« Faut pas parler ainsi, Amanda ! Il vous reste encore beaucoup, beaucoup d'années à vivre ! »
04:29« Allons, allons, Sheila ! Nous savons toutes deux que ce n'est pas vrai.
04:34J'ai soixante-dix-neuf ans et le docteur Marshall ne nous a cachés,
04:39ni à l'une ni à l'autre, qu'avec mon pauvre cœur, je peux mourir à tout instant. »
04:46Ça n'avance à rien de fuir la vérité.
04:49Je serais morte de solitude depuis longtemps si vous et votre merveilleux mari n'étiez venus vivre avec moi.
04:56« J'apprécie beaucoup ce que vous faites pour moi et je tiens à ce que vous le sachiez. »
05:04« Oh, c'est très gentil ! » dit aimablement Sheila.
05:07« Mais sachez que cette année passée en votre compagnie a été la plus heureuse de notre vie.
05:14Vous savez, Amanda, je vous aime autant que j'aimais ma pauvre maman. »
05:19Krimpouf cesse de l'aper sa crème, lance à Sheila un regard écœuré et, lui tournant le dos, s'éloigne dédaigneusement.
05:31Amanda met sa main devant sa bouche pour dissimuler un baillement.
05:36« Je crois que je veux aller m'allonger un peu. »
05:41L'issitude, Sheila l'y encourage.
05:43« Oui, c'est ça ! Vous avez besoin de repos ! »
05:47La vieille dame s'éloigne à petits pas, suivi de son chat.
05:53Ayant entendu la porte de la chambre d'Amanda se refermer,
05:57Sheila achève de débarrasser la table et retourne à la cuisine.
06:01Lorsque le téléphone sonne, elle se tourne vers l'appareil installé dans le hall,
06:08puis, entendant Amanda répondre, elle s'approche de la chambre de la vieille dame pour écouter.
06:16« Oui, oui, je vois, je vois, » dit Amanda.
06:20« 500 dollars ? Mon Dieu ! Et au porteur ? Oh, oui, oui, je vois.
06:27« Comment ? En veste de tweed, dites-vous. Oh, non, ce chèque, bien sûr, il est de moi. Oui, oui, parfaitement.
06:39Faut-il que j'ai vieilli pour oublier un chèque de 500 dollars ? Oui, c'est ça.
06:46Merci d'avoir appelé. Au revoir. »
06:50Dès les premiers mots, Sheila est devenue toute pâle.
06:54Elle se tord les mains et de fines gouttes de sueur perle sur son front
06:59lorsqu'elle entend Amanda s'asseoir sur son lit en disant
07:03« Mon pauvre crimpouf, nous voilà devant un gros problème. »
07:11Sheila se rend trompe de la maison et gravit quatre à quatre les marges
07:14qui conduisent à l'appartement qu'elle occupe avec son mari au-dessus du garage.
07:18John, affalé dans un fauteuil, en chaussette, lève les yeux du magazine sportif dans lequel il est plongé
07:26en l'entendant grimper l'escalier.
07:29« Ah, qu'est-ce qui t'arrive encore ? Me dis pas que t'as un pressentiment pour le couplet d'aujourd'hui. »
07:33« John, elle sait tout. »
07:36Il la dévisage soudain sérieux.
07:39« T'es sûr ? »
07:41« La banque vient de l'appeler au sujet du chèque que tu as touché ce matin. J'écoutais derrière la porte.
07:46Quand ils ont donné ta description, elle a dit que tout allait bien et que c'était elle qui l'avait signé. »
07:52« Ouais. Sur le moment, elle n'aura pas voulu accuser d'usage de faux son « cher petit ami », comme elle m'appelle.
07:59Eh bien, ça nous donne le temps de décider des mesures à prendre. »
08:02« Qu'est-ce qu'elle va faire, à ton avis ? »
08:05« Je pense que tout d'abord, elle va nous demander des explications au sujet de ce chèque.
08:08Il faudra inventer une excuse. Je ne sais pas, moi, que nous avions besoin de cet argent pour quelque chose de grave
08:14et qu'on n'a pas voulu le lui demander parce qu'elle est trop bonne et que nous avions l'intention de tout rembourser.
08:20On arrivera bien à s'en tirer, va ? »
08:22« Mais si ça lui donne l'idée de vérifier les relevés de son compte en banque ? »
08:26« Alors, mon cœur, je dirais que nous avons tué la poule aux œufs d'or. »
08:30« Pire encore, tu sais qu'elle est radin.
08:33Si elle découvre qu'on a touché pour plus de dix mille dollars de faux chèques, elle va nous faire arrêter. »
08:38Le front ridé, les lèvres serrées, John s'absorbe dans ses pensées.
08:46Sheila se demande une fois de plus comment un simple emploi d'infirmière a pu les conduire à cela.
08:54Quand l'agence lui a offert la place il y a un an, elle a tout d'abord refusé,
08:58mais John n'ayant pas de travail en vue, elle finit par accepter.
09:04Heureusement, Amanda lui a plu tout de suite.
09:07Une semaine plus tard, Sheila lui parlait de son mari au chômage.
09:12Amanda les invita alors à dîner tous les deux et, peu après, leur proposait de venir vivre auprès d'elle.
09:19Ils ne seraient pas traités comme des domestiques, leur avait-elle expliqué,
09:22mais plutôt comme des membres de la famille.
09:24Amanda leur proposant un salaire mensuel de 200 dollars, plus naturellement les dépenses courantes,
09:31il l'avait fait monter jusqu'à 275, mais n'avait pu obtenir plus.
09:36Par la suite, elle leur avait confié qu'elle s'était attendue à payer 250 dollars,
09:41mais que Krimpouf et elle étaient bien d'accord pour ne pas aller au-delà de 275.
09:49Ils savaient que son mari lui avait laissé beaucoup d'argent,
09:54mais ce n'est que beaucoup plus tard qu'ils apprirent qu'elle possédait plus de 2 millions de dollars en titres et propriétés.
10:03D'alors, ils n'eurent plus qu'une idée.
10:07Lui soutirait davantage d'argent.
10:09Bientôt, Sheila se mit à faire le marché et put mettre dans sa poche entre 50 et 100 dollars par mois,
10:18rien qu'en faisant danser l'anse du panier.
10:21Peu après, Amanda lui demanda de lui faire tous ses chèques de façon à ne plus avoir qu'à les signer.
10:27Poussé par John, Sheila s'arrangea pour être chargé aussi du contrôle des relevés bancaires.
10:33Puis, John ayant démontré qu'il serait facile d'imiter la signature d'Amanda,
10:37ils avaient encaissé pour plusieurs centaines de dollars de faux chèques, environ deux fois par mois.
10:44Quand les faux chèques revenaient avec le relevé de la banque,
10:47Sheila les retirait tout simplement de l'enveloppe et falsifiait le relevé avant de le communiquer à Amanda.
10:54« C'est ta faute ! » déclare Sheila.
10:57« Moi, j'ai toujours été contre cette histoire de chèques. »
10:59« Ah, foutue journée ! Il a fallu qu'un caissier fasse du zèle. Jusqu'ici, tout s'était bien passé. »
11:07« Mais c'est stupide de prendre tant de risques. Il suffisait de rester au petit soin pour elle et nous aurions hérité du magot. »
11:13« Maintenant, on va se faire virer. Encore heureux si on ne se retrouve pas en prison. »
11:18« Se levant d'un bond, John la gifle à toute volée. Ça suffit maintenant avec tes gérémiades ! »
11:23« De toute manière, rien n'est encore perdu. »
11:26« Le seul problème, c'est si elle agit avant nous. »
11:29« Puisque jusqu'ici, pour la banque, c'est elle qui a signé ce chèque. »
11:32« Et qui plus est, nous sommes toujours ses héritiers. Donc... »
11:36« Nous n'avons qu'une solution. »
11:38« Laquelle, John ? »
11:41« Le meurtre. Et encore, il faut se dépêcher. »
11:47« On ne peut pas dire que John et Sheila se laissent étouffer par les sentiments et les scrupules. »
11:55« Réussiront-ils à accomplir leur forfait ? »
11:59« La réponse, d'ici quelques instants. »
12:06Abusant de la confiance d'une vieille dame qui les aime comme ses propres enfants,
12:16John et Sheila ont réussi, en lui faisant signer des chèques,
12:21à s'emparer d'une partie de sa fortune.
12:24Ce qui est l'autant plus risqué et ridicule qu'elle avait fait d'eux ses héritiers.
12:30Elle vient de découvrir leur forfait.
12:33Sheila en a la preuve, par une conversation de la vieille dame,
12:36avec son banquier.
12:37Pour l'instant, elle les a couverts.
12:40Mais il faut la prendre de vitesse.
12:43Et pour cela, une seule solution dans l'esprit de John.
12:47Le meurtre.
12:49Encore doivent-ils se dépêcher.
12:51Tu plaisantes, John ?
12:59Non, je suis sérieux. Écoute.
13:01Il s'agit simplement de prévenir la nature.
13:04Enfin, de lui donner un petit coup de pouce, quoi.
13:07Amanda est susceptible de mourir d'un instant à l'autre.
13:10Le docteur Marshall a dit qu'il suffisait d'un choc pour la tuer.
13:13Maintenant, je suis certain que si je prélevais un peu d'arsenic dans les produits de jardinage
13:20et si t'en mettais une pincée dans son lait du soir,
13:23le docteur penserait simplement que son cœur a fini par lâcher.
13:28« Tu le crois vraiment, John ? »
13:33demande Sheila, les yeux écarquillés.
13:35« Naturellement, idiote.
13:38De toute façon, c'est ce qui va lui arriver.
13:42Et pour nous, mieux vaudrait que ça se produise maintenant.
13:44Aussi, on va agir ce soir même. »
13:48« Et demain, nous serons riches ? »
13:51murmure Sheila, songeuse.
13:53« Demain ? »
13:56« Si vite. »
13:58Un verre de lait chaud à la main,
14:02Sheila frappe à la porte d'Amanda.
14:05« Entrez ! »
14:07Souriante, Sheila pénètre dans la chambre.
14:10« Et voici une tasse de bon lait bien chaud
14:12pour vous faire faire de beaux rêves. »
14:15Klimpouf, qui sommeillait au pied du lit,
14:17ouvre les yeux, s'étire et pose sur le lait
14:21un regard de convoitise.
14:24« La journée a été longue
14:26et je suis affreusement fatigué. »
14:29dit la vieille dame.
14:30« Mais je ne peux arriver à m'endormir sans mon lait.
14:34C'est l'âge qui fait ça, sans doute. »
14:38« Mais mon enfant ne restait pas debout.
14:40Asseyez-vous et bavardons un peu. »
14:43« Volontiers ! » répond Sheila qui s'assied au bord du lit
14:46et fait mine de caresser le chat.
14:50Amanda remarque qu'elle lui lisse le poil à l'envers.
14:54« Sheila fait enrager le mignon petit chat ! »
14:59dit-elle en souriant après avoir bu une petite gorgée de lait.
15:04« Hein, le pauvre minou ! »
15:09Son sourire se fige, puis s'efface peu à peu.
15:15Elle se redresse, respirant à grand-peine,
15:19et tandis que Sheila la regarde,
15:22il lui semble que le temps s'éternise.
15:25Comme fasciné, Krimpouf s'approche du lit.
15:31Le visage d'Amanda se tord.
15:33On dirait qu'elle veut parler.
15:34Puis, avec un petit soupir,
15:40elle retombe contre l'oreiller.
15:43Le contenu de la tasse commence à se répandre
15:45et Sheila retire le récipient des mains inertes de la vieille dame.
15:49Krimpouf vient renifler le visage de sa maîtresse
15:51et se met à miauler comme s'il pouvait la rappeler à la vie.
15:56Sheila pose la tasse sur la table de chevet
15:58et court à la porte d'où elle appelle
16:00« John ! John ! Elle est morte ! »
16:03John escalade l'escalier 4 à 4.
16:05D'un coup d'œil, il enregistre la scène,
16:07puis, s'approchant du lit,
16:09tâte le pouls d'Amanda.
16:12« Oui, ma belle ! »
16:14« Tout ce qui est plus morte ! »
16:18Sheila contemple le corps.
16:22« C'était si facile ! »
16:25« On aurait dû le faire plus tôt ! »
16:27John acquiesce d'un murmure et décroche le téléphone.
16:32Il compose un numéro et demande à parler au docteur Marshall.
16:37Le chat miaule furieusement pendant que John parle au docteur
16:41d'une voix empreinte de tristesse.
16:44Sheila pose la tasse de lait à terre et dit
16:47« Tiens, sale bête ! Viens donc boire ! »
16:50Avec bonne grâce, le chat saute du lit
16:53et vient laper le lait.
16:56Quand John raccroche le téléphone,
17:00le chat pousse son dernier soupir.
17:04« Le médecin arrive tout de suite ! »
17:07John s'interrompt, pétrifié.
17:09« Espèce d'idiote ! »
17:11s'exclame-t-il d'une voix furieuse.
17:13« Il n'était pas venu à l'idée que si le chat mourait aussi,
17:16les gens penseraient poison !
17:18Il ne serait pas long à nous montrer du doigt ! »
17:20« J'y ai pas pensé ! »
17:23dit Sheila, comprenant soudain la colère de son mari.
17:27Elle a rarement vu dans ses yeux une telle rage furibonde.
17:32« Mais à quoi tu joues, idiote ! »
17:37« Ta bêtise peut nous mener droit à la chambre à gaz ! »
17:41« John, est-ce qu'on ne peut pas l'enterrer et dire qu'il s'est enfui ou... »
17:45« Je ne sais pas, moi... »
17:46« Personne n'y croirait ! »
17:48« Tous ceux qui connaissaient Amanda savent que ce dané chat ne la quittait jamais d'une semelle ! »
17:54Sheila sent la panique s'emparer d'elle.
17:57John fait claquer ses doigts comme, soudain, frappé d'une sublime inspiration.
18:01« J'ai trouvé ! »
18:03« Ça peut marcher ! »
18:05« Quoi, John ? »
18:07« Le chat et elle étaient inséparables.
18:10Si le chat s'était fait écraser,
18:13le choc aurait très certainement tué la vieille sorcière. »
18:19Sheila pousse un soupir de soulagement.
18:21« Tu veux l'écraser post-mortem, c'est ça ? »
18:27« Exactement ! »
18:29« Et personne pourra aller voir si cet animal écrabouillé a été empoisonné ! »
18:35Le docteur Marshall se redresse en hochant la tête.
18:43« La pauvre femme est bien morte ! »
18:48Sheila s'essuie les yeux.
18:50D'une voix brisée, elle murmure.
18:54« Elle disait qu'elle ne pourrait pas s'endormir tant qu'on n'aurait pas trouvé crimpouf.
18:58Alors, John et moi avons été voir sur la route,
19:02et il était là, dans le caniveau, écrasé, en sang.
19:08« Vous l'avez vu ? »
19:11« On ne voulait pas lui dire ? » dit John.
19:14« Mais elle a entendu Sheila crier,
19:16et elle est arrivée dans le hall,
19:18juste comme je rentrais avec le chat dans mes bras.
19:21En le voyant, elle a poussé un cri.
19:23Elle a voulu courir vers nous, et elle est tombée.
19:26Moi, je pense qu'elle était déjà morte quand nous l'avons transportée dans sa chambre. »
19:33Le docteur hoche la tête.
19:36« Elle avait cette bête depuis plus de dix ans.
19:38C'était sa seule famille avant que vous ne veniez.
19:42Je suis content que vous ayez été là.
19:45Au moins, la pauvre est-elle morte entourée de ceux qui l'aimaient. »
19:49« Oh ! » s'englote Sheila.
19:52« Elle était comme une mère pour nous.
19:54Une femme si merveilleuse, si bonne.
19:58Nous sommes désespérés. »
20:03Un groupe austère fait face au notaire George Martin.
20:07Sont présents les représentants de plusieurs œuvres de charité,
20:11la femme de ménage d'Amanda,
20:14deux jeunes livreurs de journaux,
20:16le laitier, le docteur Marshall,
20:19Sheila et John.
20:20Le notaire a lu d'un ton machinal le préambule
20:24et la liste des dons mineurs faits aux personnes présentes.
20:28Il n'a même pas changé de ton pour lire le passage
20:31concernant le leg de vingt-cinq mille dollars au docteur Marshall,
20:35à charge pour lui de les consacrer à l'œuvre
20:38qu'il jugera la plus digne d'intérêt.
20:42Puis, le notaire se racle la gorge avant de poursuivre.
20:46« J'arrive maintenant au leg le plus important.
20:53Depuis environ un an, dit ma cliente,
20:58j'héberge un couple que j'en suis venu à chérir comme mes propres enfants. »
21:05Sheila laisse échapper un discret soupir de soulagement.
21:09Maître Martin poursuit sa lecture.
21:12« Depuis quelque temps, je me rends compte que Sheila et John Benson
21:19prélèvent sur mon compte de petites sommes avec de faux chèques.
21:24J'ai autorisé le paiement de ces chèques
21:27comme s'ils étaient signés de ma main et je n'ai rien dit.
21:31Dans un tel climat de confiance,
21:34n'importe qui aurait agi de même.
21:37Connaissant ces enfants, je suis sûr qu'ils seraient venus d'eux-mêmes
21:41m'avouer ce qu'ils ont fait.
21:44Je ne veux surtout pas qu'ils aient de remords.
21:47C'est uniquement pour cela que j'en parle ici.
21:51Il est très possible qu'ils essaient de tromper la confiance
21:55que je vais maintenant leur accorder,
21:58mais je m'en remets à leur conscience.
22:01Je les nomme tous deux exécuteurs testamentaires
22:06sans restriction d'aucune sorte du restant de mes biens en totalité.
22:12Et enfin, je lègue ces biens à mon bien-aimé chat,
22:18Crimpouf, pour être administré pour lui par ses bons amis,
22:24les exécuteurs testamentaires, aussi longtemps qu'il vivra.
22:29Et à sa mort, ce qui restera de mes biens,
22:34je le lègue aux œuvres de bienfaisance dont la liste suit.
22:42Sheila reste sans bouger de sa chaise,
22:46comme frappée de paralysie,
22:49jusqu'à ce que John se tourne vers elle
22:52et d'un coup de poing l'envoie rouler à terre.
22:56Chacun, dans la pièce, les regarde en silence.
23:02Mais Sheila et John lisent déjà dans leurs yeux à tous
23:09leur condamnation.
23:11Vous venez d'écouter Au cœur du crime,
23:20un podcast issu des archives d'Europe 1.
23:23Réalisation, Julien Tarot.
23:25Production, Estelle Laffont.
23:27Patrimoine sonore, Sylvaine Denis,
23:30Laetitia Casanova et Antoine Reclut.
23:34Au cœur du crime est disponible sur le site et l'appli Europe 1.
23:38Écoutez aussi l'épisode suivant en vous abonnant gratuitement
23:42sur votre plateforme d'écoute.
23:43Sous-titrage Société Radio-Canada
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