00:00Serafin Haouti passe son adolescence sur la corde raide dans son quartier de Belfort où nous sommes
00:21jusqu'à sombrer dans la délinquance.
00:23Mais sur son chemin chaotique, il croise aussi des adultes qui décèlent en lui autre chose.
00:28Aujourd'hui, il consacre sa vie et ses mots sur les routes de l'Est à une jeunesse désorientée
00:33en qui il se reconnaît.
00:34Suivez-nous, vous êtes dans votre quartier.
00:37Vous êtes prêts ? On passe à l'enregistrement ?
00:39Pour moi, l'écriture, elle a été très restauratrice.
00:41Bonjour, nous sommes en Tchiriac.
00:44Répétez, répétez un petit coup, vas-y.
00:46Bonjour, nous sommes en Tchiriac.
00:47Donc ça a été une petite thérapie aussi parce que j'ai regardé un peu dans le rétroviseur
00:51et ça m'a permis de mettre un peu des mots sur mes mots.
00:54Arrêtons de parler, ils sont là, je vais les laisser se présenter.
00:56Je suis Seraphaouti, actuellement, je suis animateur d'ateliers d'écriture et aussi auteur.
01:02Et avant ça, j'étais, on va dire, un peu délinquante en fait.
01:10Ensemble, on va faire un petit atelier sur la lettre de motivation.
01:13Vous êtes amenés à faire des lettres de motivation ?
01:16Oui, je vais en travailler.
01:17À Belfort, l'école de la seconde chance est devenue incontournable pour une jeunesse déscolarisée en recherche d'emploi.
01:24La première, c'est le poste.
01:27Orientation et formation, ils sont accompagnés six mois durant par des professionnels.
01:30La deuxième, la personne en elle-même.
01:32Donc du coup, c'est là où on parlera de soi.
01:35Cet après-midi, c'est la mission de Séraphin.
01:37Tous connaissent son histoire, notamment la directrice.
01:40L'idée, c'est vraiment qu'ils puissent s'identifier à une personne qui, initialement, ne leur paraissait peut-être pas accessible du fait de son titre d'écrivain,
01:48mais avec qui ils vont effectivement trouver des points communs.
01:53Vous mettez quoi en général sur les lettres de motivation ?
01:55On décrit nous.
01:57Oui.
01:57Le fait d'être issu d'un quartier du territoire de Belfort, le fait d'être parti d'en bas et se projeter vers demain.
02:05C'est vous qui l'avez fait ou c'est chat GPT parce que maintenant ça va ?
02:09Oui, oui.
02:16Séraphin grandit en bas des tours du quartier voisin des glacis du château.
02:19Donc c'est dans cet immeuble que tu grandis ?
02:22Oui, c'est ici que j'ai grandi, à la 29, dernier étage.
02:30J'ai passé 17 ans de ma vie, pour moi je suis encore chez moi ici.
02:35Je sortais de chez moi vraiment juste pour jouer au foot.
02:37Et puis après, de fil en aiguille, j'ai fait aussi des mauvaises rencontres.
02:42Je manquais de rien et c'est moi vraiment qui fantasmais ou pas cette vie,
02:46mais en tout cas c'est moi qui me suis dirigé là-dessus.
02:49Mais il y a des choses qu'on trouvera que dans les quartiers et qu'on ne trouvera pas ailleurs.
02:53La tentation elle est là, c'est sûr.
02:55Encore adolescent, le jeune homme revend des objets volés puis des contrefaçons
02:58et se laisse séduire par l'argent facile.
03:01Jusqu'à sa première condamnation, qu'il envoie en centre éducatif fermé à 17 ans.
03:05Il décroche son bac, son histoire lui inspire son premier livre,
03:08le récit d'Éden, futur avocat happé par la rue.
03:13Ce qu'il faut savoir sur ce livre, c'est que c'est des passages de ma vie,
03:16des passages de la vie de proche, d'histoires que j'ai entendues, de légendes,
03:20et puis du fictif, donc c'est le fruit de mon imaginaire.
03:23Déjà moi, depuis tout petit, j'ai toujours aimé l'écriture.
03:25J'avais une institutrice qui a décelé en moi quelques facultés
03:29et puis quand j'étais punie, au lieu de me mettre au coin
03:31ou de me donner des lignes à gratter, elle me disait
03:34« invente-moi une histoire » et puis j'écrivais des histoires comme ça.
03:39Très tôt, l'enfant turbulent trouve refuge à la bibliothèque du quartier.
03:46C'est Raphaël.
03:47Bonjour Marianne.
03:48De retour à la bibliothèque.
03:49Oui, comment tu vas ?
03:53Est-ce que tu as toujours le petit livre, mon petit livre préféré ?
03:57Ah !
03:58Tu l'as retrouvé du coup ?
04:01Oui, Arc-en-ciel.
04:03Moi, tu te souviens, j'avais ma petite place ici.
04:05Voilà, vous étiez quand même très très studieux à l'époque.
04:08Vous asseyez gentiment, vous écoutiez bien les histoires.
04:11Il n'y a qu'à la bibliothèque et avec ta voix,
04:13parce que sinon, malheureusement, ailleurs, c'était bien différent pour le coup.
04:18Là, vous voyez, on est en plein milieu du quartier,
04:20mais on n'entend aucun bruit.
04:21Et là, du coup, ça me calmait.
04:23Je me voyais à travers ces histoires et c'est ça que je me projetais, en fait.
04:26Je voyageais vraiment à travers ces histoires.
04:27Tout est évadé.
04:28Oui.
04:30Ce matin, c'est à Vesoul que l'auteur est attendu,
04:33petite ville rurale de l'Est français.
04:37Ton texte, il était pas mal, tu peux nous le dire, du coup ?
04:39Moi, nono, nono, toujours rigolo, jamais sans ma moto.
04:42Un cœur gros comme la mer, un peu tête en l'air.
04:45Au quartier du Mont-Marin, il a suivi une dizaine de jeunes en difficulté
04:48dans l'écriture collective d'un journal.
04:51Perdu sans la famille, les délires, les amis,
04:53l'Algérie mon repère et j'en reste assez fière.
04:56Papa.
04:56La jeunesse de 2025, je la vois pas tellement différente à la mienne,
05:00mais je trouve que les phénomènes sont vachement accentués
05:03par les réseaux sociaux.
05:04Vivant au rythme d'une guitare, les cordes chantent mon repère,
05:07la danse me guide, la musique m'inspire.
05:09Il y a de la créativité, donc on peut laisser exprimer plein de choses,
05:12mais à trop être dans sa bulle, on ne peut plus être compris par les autres.
05:15Je m'appelle Maïssa, j'ai eu 18 ans il n'y a pas longtemps.
05:18J'aime beaucoup jouer à des jeux vidéo, je fais de la guitare aussi
05:20et je fais de la danse.
05:22Atteinte de phobie scolaire, Maïssa a arrêté l'école en seconde.
05:25Et Imen est en formation d'animatrice.
05:28Moi des fois, je ressens les trucs forts,
05:29mais il n'y a aucun mot que j'arrive à poser dessus, rien du tout.
05:33Mes pensées, elles sont toujours bloquées
05:35quand il y a un gros truc qui arrive ou je ne sais pas.
05:38À la base, j'ai vraiment peur du social et tout,
05:42parler avec les gens.
05:43J'ai un peu peur de ce qu'ils vont penser de moi après.
05:45Et en vrai, ça m'a grave aidée la semaine dernière.
05:48Tout ce qu'on a fait, en vrai, ça m'a un peu libérée.
05:50Quand on va parler avec des personnes,
05:51des fois, elles peuvent se sentir agressées,
05:53alors que nous, on n'est pas en train d'agresser quelqu'un.
05:55Peut-être que c'est des tics de langage.
05:58Quand on est tous ensemble, on ne le ressent pas.
06:00Mais c'est vrai que des fois, quand je me remets en question
06:02et qu'on va discuter avec des personnes
06:04qui ne sont pas forcément des quartiers populaires,
06:06en fait, tu te dis, oui, il y a un travail à faire
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