- il y a 4 heures
La postérité a légué de Jean-Paul II l’image d’un pape moderne, champion des libertés. Et pourtant, privilégiant les tenants de la morale traditionnelle sur les progressistes, le Saint-Père a étouffé les scandales qui auraient pu entacher une institution qui se voulait exemplaire. Des zones d’ombre jusque-là effacées par sa canonisation précoce…
Jean-Paul II (1978-2005) aurait contribué à la chute du mur de Berlin et restauré l’image d’une Église en perte de vitesse. La canonisation rapide qui a suivi sa mort a-t-elle participé à effacer les zones d’ombre de son héritage ? Jusqu’au bout, le prélat polonais, qui avait su avec le syndicat Solidarnosc galvaniser la résistance de son peuple au totalitarisme soviétique, fut aussi le héraut d’une offensive conservatrice, condamnant tour à tour la "théologie de la libération" latino-américaine, l’avortement et, en pleine pandémie du sida, l’usage du préservatif. Allié discret des dictateurs argentin et chilien soutenus par Washington, il a aussi en 2003 permis à l’archevêque de Boston, accusé d’avoir couvert durant des décennies des prêtres pédophiles, d’échapper à la justice américaine.
Jean-Paul II (1978-2005) aurait contribué à la chute du mur de Berlin et restauré l’image d’une Église en perte de vitesse. La canonisation rapide qui a suivi sa mort a-t-elle participé à effacer les zones d’ombre de son héritage ? Jusqu’au bout, le prélat polonais, qui avait su avec le syndicat Solidarnosc galvaniser la résistance de son peuple au totalitarisme soviétique, fut aussi le héraut d’une offensive conservatrice, condamnant tour à tour la "théologie de la libération" latino-américaine, l’avortement et, en pleine pandémie du sida, l’usage du préservatif. Allié discret des dictateurs argentin et chilien soutenus par Washington, il a aussi en 2003 permis à l’archevêque de Boston, accusé d’avoir couvert durant des décennies des prêtres pédophiles, d’échapper à la justice américaine.
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00:00L'histoire n'est pas une science exacte.
00:06Elle n'est jamais gravée dans le marbre.
00:17Au fil du temps, la connaissance du passé s'affine et évolue.
00:21Mais les idées reçues ont la peau dure et les a priori restent tenaces.
00:33Pour saisir les vérités du monde, il faut parfois bousculer les certitudes et décrypter les faits en proposant un autre regard.
00:58La postérité tient Jean-Paul II pour un pape moderne, un champion des libertés.
01:22Le champion des libertés.
01:27Et pourtant...
01:2822 octobre 1978.
01:45Pour la première fois de son histoire, le Vatican intronise, sous le nom de Jean-Paul II, un pape polonais.
01:52En pleine guerre froide, son élection surprise à la tête de l'Église catholique lui donne les moyens de son ambition.
02:04S'attaquer au communisme, symbole de l'athéisme.
02:08Dès cette messe inaugurale, il défie Moscou.
02:18Le nouveau souverain pontife se pose publiquement en leader politique.
02:40Jamais ses prédécesseurs n'avaient fait preuve d'une telle liberté de temps.
02:46Deux mois plus tard, le Saint-Père met en œuvre son programme.
03:10Mais sans attaquer l'Union soviétique de front.
03:15C'est en Amérique latine qu'il va livrer sa première bataille.
03:19Alors que le continent compte la moitié des catholiques de la planète, l'Église y est profondément divisée.
03:25Dès ce premier voyage, Jean-Paul II prend des libertés inédites avec le protocole.
03:34Il commence par s'affranchir de la réserve des autres papes.
03:38Au moment où nous nous y attendions le moins, le pape est venu à l'arrière de l'appareil discuter familièrement avec les journaliers.
03:52Fascinés par son naturel, les envoyés spéciaux tombent sous son charme.
03:57Dès son arrivée à Mexico, il offre à la presse en trance un geste symbolique sans précédent.
04:17En un instant, la fonction papale va descendre de son piédestal.
04:22Cet acte d'humilité devient son image de marque.
04:43Au lieu de gouverner depuis le Vatican, comme ses prédécesseurs,
04:48Jean-Paul II s'affiche en homme de terrain.
04:52Fort de la ferveur populaire qu'il inspire,
05:14le nouveau pape aborde avec une légitimité renforcée le bras de fer qu'il est venu livrer.
05:19Selon lui, l'église latino-américaine est au bord du gouffre.
05:31Il pense qu'elle est en train de devenir un cheval de troie du communisme
05:35depuis qu'un grand nombre de prêtres a rallié un courant progressiste baptisé,
05:40la théologie de la libération.
05:49Ils ont choisi de défendre les droits des plus démunis
05:52pour lutter contre les inégalités criantes du continent.
05:55C'est le cas de don Helder Camara, surnommé l'archevêque des pauvres.
06:07Le plus important de travailler pour le peuple, c'est de travailler avec le peuple.
06:14Ou encore du théologien Léonardo Boff, un des chefs de file du mouvement.
06:19Maintenant, on voit l'évêque, le prêtre, avec le peuple, au milieu des opprimés.
06:24Alors cette politique, c'est une politique qui est faite dans l'intérêt des pauvres.
06:34Ils aident les plus humbles à créer des syndicats ou à revendiquer leurs droits à la terre.
06:39Pour ces prêtres, la mission de l'église est compatible avec les analyses de Karl Marx et sa lutte des classes.
06:47Des actions concrètes qui se heurtent dans la plupart des pays, aux dictatures en place.
06:52Deux jours plus tard, à Puebla, Jean-Paul II condamne très vigoureusement ce mouvement.
07:14Devant les plus hautes autorités catholiques latino-américaines, il déclare
07:18« Cette notion d'un Christ politicien, révolutionnaire et dissident, n'est pas conforme à l'enseignement de l'église. »
07:33Un silence pesant lui répond.
07:37« Désavoués officiellement, ces prêtres ne seront pas protégés par le pape.
07:41Ils continueront d'être torturés et exécutés par les dictatures militaires,
07:46comme tous ceux qui luttent pour leurs droits, de l'Argentine au Chili. »
07:55Au nom du combat contre le communisme,
07:57le Vatican se contentera de protestations formelles face à ces exactions.
08:02A Moscou, les propos du Saint-Père inquiètent.
08:17D'autant qu'il ne compte pas s'en tenir là.
08:22Ses conversations privées avec des réfugiés polonais,
08:25interceptées par le KGB au Mexique, le prouvent.
08:28Ils ont discuté de renforcer la lutte du catholicisme contre les pays du bloc de l'Est.
08:43Pour le pape, la tête de pont de cette offensive doit être la Pologne.
08:48Léonide Brezhnev, le secrétaire général du Parti communiste,
08:54saisit l'urgence de la situation.
08:56Jean-Paul II s'apprête à passer à l'action.
09:00En effet, il doit se rendre en Pologne dans les prochaines semaines.
09:07Aussitôt, le leader soviétique appelle son homologue polonais.
09:10« Ne le recevez pas, il va nous causer des problèmes. »
09:20Mais Edouard Guérec résiste.
09:23« Le sens politique me dicte de maintenir sa visite. »
09:30Le 2 juin 1979, l'enfant du pays est accueilli solennellement.
09:42Gérec est convaincu d'avoir la situation bien en main.
10:08Il pense que le nouveau pape va poursuivre la politique d'apaisement,
10:11que le Vatican mène vis-à-vis du bloc de l'Est depuis 10 ans.
10:16Surtout, il a aussi renforcé la surveillance étroite de la population
10:20à 90% catholique.
10:29Pour éviter tout débordement,
10:32la police a arrêté les opposants les plus virulents.
10:34Les autorités sont bien conscientes que cette toute première visite d'un pape
10:45dans un pays communiste est historique.
10:48A quelques heures de la première messe de Jean-Paul II,
10:57la télévision d'État reçoit l'ordre de minimiser son impact sur la population.
11:03Interdiction de montrer la foule immense venue l'accueillir.
11:06Mais Jean-Paul II connaît bien les méthodes du régime
11:19et sait comment les contourner.
11:24Il a fait embaucher une équipe de caméramen
11:26qui va le filmer librement tout au long de son voyage.
11:30Il possède aussi un atout que les autorités ne peuvent pas contrôler.
11:38Sa parole, qui sera diffusée en direct.
11:43Elle sera portée par son charisme.
11:45Lui qui a hésité à devenir acteur.
11:47Sous la croix monumentale, le pape ouvre les hostilités
12:11sous couvert du langage de la foi.
12:13Sous-titrage Société Radio-Canada
12:43D'un regard, il sait que la foule a compris son message.
12:50Il vient d'appeler la puissance divine à balayer le pouvoir communiste.
13:01Certains ont osé enregistrer sur des magnétophones
13:04ce réquisitoire lyrique, malgré la surveillance policière.
13:09Diffusé sous le manteau, il va se répandre comme une traînée de poudre.
13:13Les polonais ont trouvé en Jean-Paul II le porte-parole idéal.
13:18Celui que le pouvoir ne peut faire taire.
13:26Jamais la Pologne n'a connu d'aussi grand rassemblement
13:29depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
13:31près de 10 millions de personnes, soit un tiers des polonais,
13:36viennent écouter leur pape.
13:37A Cracovie, sa dernière étape, il leur dit adieu.
13:52Jean-Paul II ne veut pas laisser la flamme s'éteindre.
14:17Caché dans l'avion pontifical,
14:21les images tournées par ses caméramens personnels sont rapatriées à Rome.
14:28Le film terminé reviendra discrètement en Pologne
14:31pour être projeté dans l'enceinte protégée des églises.
14:36Au nez et à la barbe des autorités.
14:38Magnifiant la relation directe du pape avec ses compatriotes,
14:44il va poursuivre le travail de ça
14:47que mène Jean-Paul II contre le régime.
14:49A Moscou, Brezhnev est furieux.
15:08La situation a totalement échappé au pouvoir polonais.
15:12Il faut riposter à grande échelle.
15:14Il fait adopter des mesures de contre-propagande
15:17pour discréditer le pape,
15:19aussi bien dans le bloc de l'Est qu'à l'extérieur.
15:22Mais cette parade est impuissante face à la contestation sociale
15:48qui se réveille en Pologne.
15:49A l'été 1980,
15:53les chantiers navals de Gdansk
15:55ont rejoint une grève dure
15:56provoquée par la hausse des prix de la viande.
16:01Sous la menace d'une paralysie totale du pays,
16:04le gouvernement est contraint de négocier.
16:08Le 31 août,
16:10le leader des grévistes,
16:11un électricien du nom de Leshvalessa,
16:14obtient des libertés sans précédent
16:15dans le bloc de l'Est.
16:19Pour la première fois,
16:22des syndicats indépendants sont autorisés.
16:25Leshvalessa devient un héros national.
16:27Lui, qui avait lu un appel à l'action dans le message de Jean-Paul II,
16:46a signé des accords avec un stylo à l'effigie du pape.
16:49Six mois plus tard,
16:57sous les ors du Vatican,
16:59le souverain pontife adaube son compatriote.
17:03Avec Valézard,
17:04désormais à la tête du syndicat libre
17:06Solidarnosc,
17:07le pape compte un allié de poids
17:09dans sa terre natale.
17:10Il peut enfin profiter de la ferveur populaire
17:21lors des audiences Place Saint-Pierre.
17:25Mais le 13 mai 1981,
17:27il s'effondre,
17:32victime d'un attentat.
17:33Il est grièvement blessé,
17:38mais contre toute attente,
17:40il parvient à se rétablir.
17:44Dès lors,
17:45le Saint-Pierre est convaincu
17:46que sa survie est un miracle.
17:49La Vierge Marie l'a sauvée.
17:5363 ans plus tôt,
17:55en 1917,
17:57elle serait apparue au Portugal,
17:59près du village de Fatima.
18:00Elle aurait annoncé qu'un pape
18:02allait périr au cours d'une guerre
18:04opposant l'Église
18:05à la Russie devenue athée.
18:11Jean-Paul II
18:12voit dans cette prédiction
18:14le signe d'une mission divine.
18:17S'il est encore en vie,
18:18c'est pour abattre le communisme.
18:20Mais pour l'heure,
18:32c'est le communisme
18:32qui écrase les rêves
18:33de Jean-Paul II.
18:38Le 13 décembre 1981,
18:41le général Jaruzelski,
18:43le nouvel homme fort
18:43du régime polonais,
18:45suspend les libertés
18:46tout juste acquises.
18:47Solidarnoche
19:04qui est dissous.
19:07Lech Valesa,
19:08son dirigeant,
19:09est arrêté
19:10comme 10 000 militants
19:11du syndicat.
19:13Des milliers d'autres
19:14passent dans la clandestinité.
19:17Les frontières sont fermées.
19:23Les seules images
19:24qui sortent du pays
19:25sont filmées en caméra cachée.
19:30La surveillance policière
19:32est omniprésente.
19:34L'armée poste ses chars
19:36à chaque carrefour.
19:37A Varsovie,
19:41la place centrale
19:42où Jean-Paul II
19:42avait bousculé
19:43le régime
19:44deux ans plus tôt
19:44n'accueille plus
19:46que les défilés militaires.
19:47Le 23 décembre,
20:08l'intervention du président américain
20:10Ronald Reagan
20:11redonne confiance au Saint-Père.
20:13En écho,
20:41lors de la veillée de Noël,
20:42le pape allume un cierge
20:45à la fenêtre
20:45de ses appartements.
20:48Puis,
20:49il appelle
20:49à poursuivre le combat.
20:54Enfant Jésus,
20:56montre le chemin
20:56aux Polonais
20:57vers un avenir meilleur,
20:59dans la justice
21:00et dans la liberté.
21:01Ces deux allocutions
21:08si proches
21:09ne sont pas
21:10une coïncidence.
21:17En coulisses,
21:19une alliance secrète
21:20s'est nouée
21:20entre les deux dirigeants.
21:24Viscéralement anticommuniste,
21:26lui aussi,
21:27Reagan partage
21:28l'objectif du pape.
21:29faire vaciller
21:31le régime polonais,
21:32maillon faible
21:33du bloc soviétique.
21:36Pour assurer
21:37la survie
21:37de Solidarnosc,
21:39la Maison-Blanche
21:40fournit au syndicat
21:41des fonds secrets
21:41et du matériel
21:42d'imprimerie.
21:46À charge
21:47pour le Vatican,
21:49de les faire entrer
21:49clandestinement
21:50en Pologne
21:50par ses circuits
21:52ecclésiastiques.
21:52Les églises polonaises
22:02deviennent les seuls
22:03lieux publics
22:04d'opposition du pays.
22:06En chair,
22:08bravant les intimidations
22:09de la police politique,
22:11on fait ouvertement
22:11allusion
22:12à Solidarnosc.
22:15Ces messes
22:16pour la patrie
22:17rassemblent
22:18plusieurs milliers
22:18de personnes.
22:19L'hymne polonais
22:37revisité
22:38traverse le rideau de fer.
22:42Solidarnosc
22:43et l'opposition
22:44clandestine
22:44deviennent
22:45le symbole
22:46international
22:46de la lutte
22:47pour la liberté.
22:49En Amérique latine,
23:00la première terre
23:01de croisade
23:01de Jean-Paul II,
23:03son alliance
23:03anticommuniste
23:04avec le président Reagan
23:05se révèle moins glorieuse.
23:09Washington,
23:10qui finance
23:11et arme
23:11les dictatures
23:12conservatrices,
23:13aurait aussi payé
23:14les prélats anticommunistes
23:15et fourni au Saint-Siège
23:17des écoutes téléphoniques
23:18de la CIA.
23:19Dans leur viseur,
23:29les prêtres
23:30de la théologie
23:30de la libération
23:31qui luttent
23:32pour les droits
23:32des plus pauvres.
23:35Affaiblis
23:35par l'offensive
23:36de Jean-Paul II
23:36au lendemain
23:37de son élection,
23:38ils sont désormais
23:39deux fois moins nombreux.
23:42Et le pape
23:43est bien décidé
23:44à leur donner
23:44le coup de grâce.
23:45En mars 1983,
23:55ils se rendent
23:56au Nicaragua.
23:58La destination
23:59a été choisie
23:59à dessein.
24:01Des prêtres
24:02de la théologie
24:02de la libération
24:03ont été nommés
24:04ministres du régime
24:05révolutionnaire
24:06sandiniste.
24:07fidèle à sa stratégie,
24:10Jean-Paul II
24:11va porter le fer
24:12dans la plaie.
24:12« C'était comme
24:17un saut périlleux »,
24:18confiera-t-il
24:19après coup.
24:22Toujours attentif
24:23au pouvoir
24:24de l'image,
24:25il a négocié
24:25avec les autorités.
24:27Pas de prêtres
24:28ministres
24:28en sa présence.
24:30Mais,
24:31comme un défi,
24:33se tient face à lui
24:34le plus médiatique
24:35d'entre eux,
24:36Ernesto Cardenal.
24:38Alors que le prêtre
24:41en civil
24:42s'agenouille
24:42en signe d'allégeance,
24:44le pape le sermone
24:45sèchement.
24:47« Régularisez
24:48votre situation
24:49vis-à-vis de l'Église. »
24:52En clair,
24:53il lui ordonne
24:53de choisir
24:54entre la politique
24:55et son sacerdoce.
24:58Par cette humiliation
24:58devant les caméras
24:59du monde entier,
25:01l'autorité pontificale
25:02est rétablie
25:03temporairement.
25:08Le soir même,
25:11le régime
25:12prend sa revanche.
25:14Des agitateurs
25:15couvrent la voie
25:15du Saint-Père
25:16avec des slogans
25:17marxistes.
25:21Jean-Paul II,
25:23d'ordinaire
25:23six mètres de lui,
25:25laisse éclater
25:25sa colère.
25:26L'heure est aux sanctions.
25:47C'est un fidèle collaborateur
25:49de Jean-Paul II,
25:50le cardinal Ratzinger,
25:51qui s'en occupe.
25:52En février 1985,
25:59Ernesto Cardenal
26:00est interdit
26:01de sacerdoce.
26:03Il n'a plus le droit
26:04de célébrer la messe.
26:08Quelques mois plus tard,
26:09le théologien
26:10Leonardo Boff,
26:11un des chefs
26:12de file du courant,
26:13est condamné
26:14au silence
26:15et à l'obéissance
26:16pour 18 mois.
26:17Enfin,
26:25Don Helder Camara,
26:27l'archevêque des pauvres,
26:28atteint par la limite d'âge,
26:30est remplacé
26:31par un conservateur
26:32comme partout
26:33sur le continent.
26:36Fidèle à la ligne
26:36du Vatican,
26:38son successeur
26:39détruit méthodiquement
26:40son œuvre.
26:42Il ira jusqu'à bloquer
26:43l'action de l'association
26:44qui aide les familles
26:45de militants catholiques
26:46assassinés
26:47par la dictature militaire.
27:03Au même moment,
27:05les dictatures
27:06sont renversées
27:06et les sociétés civiles
27:08demandent des comptes
27:09à Jean-Paul II.
27:10Comme en Argentine
27:11en 1987
27:12où des manifestants
27:14dénoncent
27:14les compromissions
27:15de l'Église
27:15avec le régime militaire.
27:22Ici comme ailleurs
27:22en Amérique latine,
27:24les droits de l'homme
27:25ont été
27:25la première victime
27:26collatérale
27:27du combat
27:27anticommuniste
27:28du pape.
27:38Le très respecté
27:40Mgr Miguel Hessein
27:41l'interpelle
27:42s'emménagement.
27:43En estos últimos años,
27:48querido Juan Pablo II,
27:50en la Argentina,
27:52ser fiel
27:53al Evangelio
27:53fue una audaz aventura
27:55que llevó
27:56a dar la vida
27:57a muchos hermanos
27:59en la fe.
28:00Que nunca más
28:01tengamos que lamentar
28:03muerte de jóvenes
28:05ni desaparecidos,
28:07ni torturados,
28:09ni gente con hambre
28:10y sin trabajo.
28:12a la vida
28:13a la vida
28:13a la vida
28:14a la vida
28:15a la vida
28:15a la vida
28:16Mais Jean-Paul II
28:17reste muet,
28:19coupé d'une société
28:20qui réclame réparation.
28:21Il ne rencontre pas
28:28les associations
28:29de défense
28:30des victimes.
28:32Officiellement,
28:33il n'a pas le temps.
28:36Mais cette excuse
28:37ne trompe personne.
28:39Quand le pape,
28:40héros des libertés
28:41en Pologne,
28:41refuse de s'exprimer,
28:43tout le monde comprend
28:44que c'est volontaire.
28:45Même pour la postérité,
28:57Jean-Paul II
28:57ne sait de rien.
28:59Ainsi,
29:00pas question
29:01de célébrer
29:02l'engagement exemplaire
29:03de Mgr Romero.
29:10L'archevêque
29:11de San Salvador
29:12a pourtant été
29:13assassiné
29:13en pleine messe
29:14par les escadrons
29:15de la mort
29:16au service
29:17de la dictature
29:18protégée
29:19par les Etats-Unis.
29:31L'opinion publique
29:32demande de reconnaître
29:33la sainteté
29:34de Mgr Romero.
29:39Mais le pape
29:40s'y opposera obstinément
29:41jusqu'à la fin
29:42de son pontificat.
29:44Il canonisera pourtant
29:46plus de personnes
29:47que durant
29:48les cinq siècles précédents.
30:05Pour l'heure,
30:06en Europe,
30:07le rêve de Jean-Paul II
30:08devient soudain réalité.
30:10Le 9 novembre 1989,
30:14la chute du mur
30:15de Berlin
30:15inaugure
30:16un monde nouveau.
30:32En Pologne,
30:34le régime du général
30:35Jaruzelski
30:36a été balayé
30:37quelques mois plus tôt
30:38et Lech Walesa
30:39s'apprête à devenir
30:40le premier président
30:41de la Pologne post-soviétique.
30:43Les jours du communisme
30:53en Europe
30:54sont comptés.
31:05Trois semaines après
31:06la chute du mur,
31:07Jean-Paul II reçoit
31:08le nouveau leader
31:09de l'Union soviétique.
31:13Le régime est à l'agonie
31:14et Mikhail Gorbachev
31:16tente à tout prix
31:17de sauver
31:18ce qui peut encore l'être.
31:21Sa politique d'ouverture
31:22s'étend jusqu'à la religion.
31:24son ministre des Affaires étrangères
31:32Édouard Shevardnadze
31:33avoue au conseiller
31:35du pape
31:35sans le Vatican
31:38rien de tout cela
31:39n'aurait eu lieu.
31:43Sa confidence
31:44sera reprise
31:45par Gorbachev
31:46lui-même.
31:46Une fois la liberté
32:00de culte proclamée
32:01en Europe de l'Est,
32:03des évêques
32:03sont nommés
32:04quasiment partout.
32:09L'église du silence
32:10retrouve sa voie.
32:17Aux yeux du monde,
32:18Jean-Paul II
32:19est le grand vainqueur
32:20du communisme.
32:24Il incarne désormais
32:25le combat
32:26contre le totalitarisme
32:27au nom de la liberté.
32:32Son aura
32:33s'étend bien au-delà
32:35des catholiques.
32:35Le pape
32:51devient un personnage
32:52historique
32:53de son vivant.
32:55Sa popularité
32:56se mesure dorénavant
32:57à l'aune
32:58des produits dérivés
32:59qu'il inspire.
33:03Son image
33:04se multiplie
33:05à l'infini.
33:06Sa voie aussi
33:07commercialisée
33:08par le Vatican.
33:10Une opera prestigiosa
33:11en cui
33:11il santo padre
33:12t'invita
33:13personnellement
33:13à pregare
33:14insieme a lui
33:15il rosario.
33:16L'élegante confezione
33:17custodisce
33:17insieme a un rosario
33:18una fotografia
33:20del pontefice.
33:21Un doppio cidio
33:22con la viva voce
33:23del pape.
33:25De la hi-fi
33:26à l'aspirateur,
33:27le Saint-Père
33:28est à présent
33:28une icône
33:29de la publicité.
33:31la fonction pontificale
33:36descend un peu plus
33:37de son piédestal
33:38au corps défendant
33:41de Jean-Paul II.
33:41Superstar,
33:56le Saint-Père
33:57est la cible
33:57des paparazzis.
34:01Il traque sa vie
34:02jusque dans l'intimité.
34:03Un pape sportif,
34:06c'est un scoop.
34:09Les photos
34:10se vendent
34:10à prix d'or.
34:13Lui qui avait su
34:15utiliser les médias
34:15à son profit
34:16depuis le début
34:17de son pontificat
34:18voit son image
34:19lui échapper.
34:23Désabusé,
34:24il confie
34:25à ses proches.
34:27Ils acclament
34:27Jean-Paul II
34:28quand moi
34:29je viens leur parler
34:30de Jésus.
34:33En réalité,
34:50le combat du pape
34:51contre le communisme
34:52n'était qu'une étape
34:53de son pontificat.
34:55Il est temps
34:55pour lui
34:56de restaurer
34:57l'influence
34:57de l'Église
34:58dans le reste du monde.
35:01Quitte à sacrifier
35:02son image moderne,
35:03sur l'autel
35:04de ses convictions.
35:08En juin 1991,
35:10le pape décide
35:11de lancer son offensive
35:12dans son pays natal.
35:14Mais la foule
35:15a rangé les banderoles
35:16et les applaudissements
35:17sont discrets.
35:21La Pologne
35:22est devenue
35:23une démocratie pluraliste
35:24et l'Église
35:25autrefois
35:25simon nationale
35:26une force politique
35:28comme les autres.
35:28Sous un ciel
35:36qui tourne
35:37à l'orage,
35:38Jean-Paul II
35:39prend position
35:39sur une question
35:40qui divise profondément
35:42la société polonaise.
35:44L'avortement.
35:48Avec le même sens
35:49de la provocation
35:50qui avait fait des miracles
35:51contre le régime communiste,
35:53il rapproche
35:54l'interruption volontaire
35:55de grossesse
35:55et la Shoah.
35:56de la Shoah.
36:26Autre courant de l'évolution des mœurs, il affirme clairement un conservatisme rigoriste qu'il défend en réalité depuis les années 50.
36:38C'est une douche froide pour ceux qui voyaient en lui un pape moderne.
36:43Sa déclaration provoque un tollé, en Europe comme aux États-Unis.
36:56Comme Heinz Galinsky en Allemagne, les représentants des communautés juives s'indignent.
37:18En France, la secrétaire d'État aux droits des femmes, Véronique Neyertz, ne mâche pas ces mots.
37:24Je trouve que le pape insulte aussi bien les femmes que la communauté juive.
37:31Elles n'ont de leçon à recevoir de personne.
37:37Mais la levée de bouclier n'entame pas sa détermination.
37:42Pour faire prévaloir ses convictions, il fait pression.
37:47Y compris au niveau international.
37:51Il convoque au Vatican nafis sadique.
37:54La gynécologue pakistanaise organise la conférence mondiale pour la population.
38:00Au programme de ce temps fort de l'année de la famille, décrété par l'ONU, figurent notamment la contraception et l'avortement.
38:08Le pape ouvre les hostilités.
38:14Pour une année de la famille, je crois, madame, que c'est plutôt l'année de sa désintégration.
38:21Nafis sadique lui tient tête.
38:24200 000 femmes meurent chaque année en avortant toutes seules.
38:26Jean-Paul II.
38:30Mais l'enjeu véritable, c'est l'avenir de l'humanité.
38:37La pression papale s'exerce en pure perte.
38:41Le programme d'action issu de la conférence ne condamne pas l'avortement.
38:44Mise en échec sur la scène internationale,
39:07Jean-Paul II garde le dernier mot dans l'Église catholique.
39:09Alors que les Anglicans ouvrent la prêtrise aux femmes pour pallier le manque de vocation,
39:16le pape, lui, refuse catégoriquement cette évolution.
39:21Son veto prend même un caractère définitif.
39:27Jamais ses successeurs ne pourront revenir dessus.
39:32Pour le Saint-Père, ses principes ne souffrent aucune exception,
39:37y compris dans les situations critiques.
39:39Alors que le préservatif est le seul moyen de prévention du sida,
39:44il le condamne systématiquement.
39:55En 1993, à Kampala, la capitale ougandaise,
40:00où 25% des habitants sont séropositifs,
40:03le Saint-Père déclare
40:04La chasteté est l'unique façon sûre et vertueuse
40:09de mettre fin à la plaie tragique du sida.
40:19Au plus fort de l'épidémie mondiale,
40:21les scientifiques, les institutions internationales,
40:24tout comme les associations de malades,
40:26s'insurgent contre les conséquences de cette rigidité morale.
40:34À la tribune du Parlement européen,
40:38le docteur Léon Schwarzenberg s'écrit
40:40« Ces déclarations sont irresponsables
40:43et rendent celui qui en est l'auteur
40:45coupable de non-assistance à personne en danger. »
40:48En France, en Allemagne et aux Etats-Unis,
41:02ces visites provoquent immanquablement
41:04des protestations incendiaires.
41:12« Le message pour lui est de garder la religion
41:14et de regarder ses propres. »
41:16L'intransigeance de Jean-Paul II,
41:28qui faisait merveille contre le totalitarisme soviétique,
41:31suscite à présent un rejet massif.
41:36Mais le pape s'obstine
41:38et coupe court à tout dialogue.
41:40Ainsi, en France,
41:45où la pratique religieuse
41:47est déjà la plus faible d'Europe de l'Ouest,
41:49il révoque Mgr Gaillot.
41:52Surnommé l'évêque rouge
41:53pour son engagement en faveur des sans-papiers
41:55et des droits des homosexuels,
41:58il est régulièrement rappelé à l'ordre
41:59par sa hiérarchie,
42:01agacée par ses sorties médiatiques.
42:02« Nous n'avons pas d'autre moyen
42:12de nous préserver de l'épidémie du sida
42:15que d'utiliser les préservatifs. »
42:18En 1995,
42:20lassé de n'être jamais obéi,
42:22Jean-Paul II révoque l'évêque rebelle
42:24pour le nommer à Parthénia,
42:26un diocèse disparu
42:27depuis le VIe siècle.
42:29Le pape moderne
42:43qui avait su se rendre
42:44si proche des gens
42:45paraît totalement défasé.
42:49Sa volonté de renforcer
42:50l'influence de l'Église
42:51s'inscrit à contre-courant
42:53de l'évolution des sociétés.
42:56Sa reconquête
42:57sera conservatrice
42:59ou ne sera pas.
43:08Il compte sur des mouvements nouveaux,
43:10aussi conservateurs que lui,
43:12comme le renouveau charismatique.
43:15Cette mouvance
43:15attire de nombreux fidèles
43:17en prônant le dialogue direct
43:18avec Dieu.
43:21Pour le Saint-Père,
43:23la relève du catholicisme
43:24est entre leurs mains.
43:25et ils se tiennent prêts
43:27à répondre à son appel.
43:37Puisque la France
43:38résiste à son offensive,
43:40Jean-Paul II impose à Paris
43:41les douzièmes journées mondiales
43:43de la jeunesse.
43:45C'est un vrai défi.
43:47À peine 2% des jeunes français
43:49sont catholiques pratiquants.
43:50Le 24 août 1997,
44:00sur l'hippodrome de Longchamp,
44:02la même où les Rolling Stones
44:03ont triomphé,
44:05le Saint-Père reçoit l'ovation
44:06d'un million de jeunes
44:07venus du monde entier.
44:08C'est un immense succès.
44:20L'espace d'une grande messe,
44:23il est redevenu
44:23le fédérateur charismatique,
44:25le pasteur planétaire.
44:31Pour la première fois,
44:33les jeunes croyants
44:34ont l'impression
44:35d'appartenir
44:36à un mouvement global
44:37plutôt qu'à la religion
44:38de leurs parents.
44:40Même s'ils ne partagent pas
44:41tous les convictions du pape.
44:50La sexualité, la morale,
44:53quand on est jeune,
44:53on ne peut pas être
44:54trop trop d'accord
44:55avec ce qu'il dit.
44:57Comment on peut rire de tout ?
44:59Vous voulez me rire du papa ?
45:00Oui, surtout du papa.
45:07L'unité autour de lui
45:09n'est qu'une façade.
45:11Mais en réalité,
45:12Jean-Paul II
45:13a largement gagné la partie.
45:15Cette démonstration de force
45:17prouve que le catholicisme
45:18est toujours vivant
45:19et qu'au seuil de l'an 2000,
45:21il est prêt à entamer
45:22son troisième millénaire.
45:23Mais auparavant,
45:39le pape veut solder
45:40le passé criminel
45:40de l'Église,
45:42les persécutions
45:43et les erreurs
45:44dont elle s'est rendue coupable.
45:48En mars 2000,
45:50sa visite à Jérusalem
45:51est le point d'orgue
45:52de cette repentance.
45:56Jean-Paul II
45:57rend sobrement hommage
45:59aux victimes de la Shoah,
46:01loin de ses provocations
46:02sur l'avortement.
46:05Puis il demande
46:06solennellement pardon
46:07pour les crimes
46:08commis par l'Église
46:09contre les Juifs,
46:10devant le mur
46:11des lamentations,
46:12le lieu le plus sacré
46:13du judaïsme.
46:22Avec cette démarche,
46:24le pape fait l'unanimité
46:25pour la première fois
46:28depuis longtemps.
46:38Mais la maladie
46:39de Parkinson
46:39ronge celui
46:41qu'on surnommait
46:41l'athlète de Dieu.
46:43A 80 ans,
46:51il livre aux yeux du monde
46:52son affaiblissement inéluctable.
47:01Les dernières années de sa vie
47:03seront un chemin de croix
47:05revendiqué.
47:06Son état de santé
47:20va le protéger
47:20de la lame de fond
47:21qui s'apprête
47:22à submerger l'Église.
47:28En 2002,
47:30la presse américaine
47:31révèle que le cardinal
47:32Bernard Lowe,
47:33archevêque de Boston,
47:34a couvert pendant 30 ans
47:36plus de 80 prêtres
47:38qui ont abusé
47:38de plusieurs centaines
47:39d'enfants.
47:42Mais l'archevêque
47:43de Boston
47:44est protégé
47:44par le pape.
47:46Jean-Paul II
47:47refuse sa démission
47:48jusqu'à ce que le prélat
47:49soit expressément cité
47:50à comparaître
47:51devant la justice.
47:58Nommé opportunément
47:59à Rome,
48:00Mgr Lowe
48:01sera couvert
48:02par l'immunité
48:03vaticane
48:03et échappera ainsi
48:05à toute poursuite.
48:09L'affaire de Boston
48:11provoque une déflagration mondiale
48:12et révèle l'impunité générale
48:14dont bénéficient
48:15les prêtres pédophiles.
48:16Pourtant,
48:33au milieu du scandale,
48:34le Saint-Père
48:35avait décrété
48:35la tolérance zéro.
48:39Il n'y a pas de place
48:40dans l'Église
48:41pour ceux
48:41qui agressent
48:42la jeunesse.
48:43ces paroles fortes
48:46marqueront les esprits
48:47faisant oublier
48:49que le Saint-Père
48:50a protégé
48:50le cardinal Lowe.
48:51Le 2 avril 2005,
49:07Jean-Paul II
49:08rend son dernier souffle.
49:11Ses funérailles
49:11rassemblent
49:12un tiers
49:12de la population mondiale.
49:13L'hommage planétaire,
49:19unanimement élogieux,
49:21efface sans bruit
49:21ses compromissions
49:23en matière de droit
49:23de l'homme,
49:24son omerta
49:25sur la pédophilie
49:26ou sa croisade
49:27conservatrice.
49:31Seule brille
49:31l'icône moderne
49:32dont le charisme
49:34a électrisé
49:34les foules.
49:37Une figure
49:37hors normes,
49:39auréolée
49:39de sa victoire
49:40contre l'Union soviétique.
49:41Le cardinal Ratzinger
49:47qui lui succède
49:47ouvre la voie
49:49à sa canonisation
49:50expresse.
49:53Nimbée d'éternité,
49:55la mémoire
49:55de Saint-Jean-Paul II
49:57échappe désormais
49:58à la critique
50:00des simples mortels.
50:01et la mémoire
50:15de Saint-Jean-Paul II
50:16et la mémoire
50:18de Saint-Jean-Paul II
50:18et la mémoire
50:19de Saint-Jean-Paul II
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