- il y a 2 jours
La guerre de Corée, la guerre oubliée ...! Qui n’a pas entendu ou lu cette affirmation concernant le conflit de haute intensité qui a dévasté la péninsule coréenne de juin 1950 à juillet 1953.
«Ah, la France a participé à cette guerre... ?» autre étonnement ou interrogation et beaucoup découvrent en effet la participation française à travers l’envoi d’un Bataillon d’infanterie dit le Bataillon Français de l’ONU en Corée. Autre découverte, la décision de l’ONU, tout juste née de la Seconde guerre mondiale, par un vote sur trois résolutions, corédigées par la France, membre du Conseil de Sécurité, de participer à la guerre de Corée en créant une coalition internationale, interarmées et sous un commandement unique et de refuser ainsi l’envahissement de la République de Corée par sa voisine communiste : la République Populaire Démocratique de Corée du Nord.
Cette guerre en premier lieu fratricide se transforme en un conflit international avec des caractéristiques politiques et idéologiques affirmées, la Corée du Sud étant soutenue par les pays dit de l’Ouest, la Corée du Nord communiste, par le bloc soviétique et la toute nouvelle République Populaire de Chine créée par Mao Tsé Toung en 1949.
La France va donc s’engager car la Liberté d’un pays est menacée et elle se doit de tenir son rang de membre du Conseil de Sécurité de l’ONU.
C'est cette magnifique page de l’histoire militaire des Armes de la France que Passé/Présent vous fait découvrir en compagnie de Jean-François Pelletier, descendant d’un ancien du Bataillon, collectionneur passionné, et auteur de "Les Français de la Guerre de Corée. BF/ONU 1950-1953" paru aux éditions Heimdal.
«Ah, la France a participé à cette guerre... ?» autre étonnement ou interrogation et beaucoup découvrent en effet la participation française à travers l’envoi d’un Bataillon d’infanterie dit le Bataillon Français de l’ONU en Corée. Autre découverte, la décision de l’ONU, tout juste née de la Seconde guerre mondiale, par un vote sur trois résolutions, corédigées par la France, membre du Conseil de Sécurité, de participer à la guerre de Corée en créant une coalition internationale, interarmées et sous un commandement unique et de refuser ainsi l’envahissement de la République de Corée par sa voisine communiste : la République Populaire Démocratique de Corée du Nord.
Cette guerre en premier lieu fratricide se transforme en un conflit international avec des caractéristiques politiques et idéologiques affirmées, la Corée du Sud étant soutenue par les pays dit de l’Ouest, la Corée du Nord communiste, par le bloc soviétique et la toute nouvelle République Populaire de Chine créée par Mao Tsé Toung en 1949.
La France va donc s’engager car la Liberté d’un pays est menacée et elle se doit de tenir son rang de membre du Conseil de Sécurité de l’ONU.
C'est cette magnifique page de l’histoire militaire des Armes de la France que Passé/Présent vous fait découvrir en compagnie de Jean-François Pelletier, descendant d’un ancien du Bataillon, collectionneur passionné, et auteur de "Les Français de la Guerre de Corée. BF/ONU 1950-1953" paru aux éditions Heimdal.
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00:04Bonjour à tous.
00:21Aujourd'hui, nous allons parler d'un épisode méconnu, voire inconnu,
00:25souvent relégué à la marge des manuels scolaires
00:28lorsqu'il y figure la guerre de Corée.
00:30Un conflit, le premier conflit chaud de la guerre froide
00:34qui a éclaté en 1950
00:36et qui a vu s'affronter deux blocs idéologiques
00:39dans une péninsule déjà meurtrie par l'occupation japonaise.
00:42Si l'engagement américain est bien connu,
00:45on sait beaucoup moins qu'un bataillon français
00:47constitué de volontaires a participé au combat sous l'égide de l'ONU.
00:51Ces hommes, près d'un milliard au départ,
00:53ont combattu dans des conditions extrêmes
00:55pour une cause qu'on leur avait simplement présentée comme celle de la liberté.
00:59Pour retracer leur histoire,
01:01nous recevons aujourd'hui Jean-François Pelletier,
01:03passionnier d'histoire militaire,
01:04qui publie aux éditions Endal un ouvrage remarquable
01:07qui fera date dans l'historiographie
01:09intitulé « Les Français dans la guerre de Corée »
01:13BF, bataillon français de l'ONU entre 1950 et 1953.
01:17Fruit de plus de 20 ans de recherche dans les archives,
01:20mais aussi avec des entretiens d'anciens combattants,
01:23ce livre documente avec précision l'engagement du bataillon français
01:26tout en redonnant un visage à ces soldats oubliés.
01:30Qui étaient-ils ? Pourquoi sont-ils partis ?
01:32Qu'ont-ils vécu là-bas ?
01:33Et surtout, pourquoi cette guerre et leur mémoire
01:35ont-elles été aussi vite effacées de notre récit national ?
01:39Autant de questions que nous allons aborder ensemble
01:41pendant cette émission.
01:43Jean-François Pelletier, bonjour.
01:44Bonjour.
01:44Merci d'être parmi nous.
01:46Donc, comme je le disais, vous êtes passionné d'histoire militaire,
01:50vous avez produit plusieurs ouvrages,
01:54principalement consacrés à l'uniformologie ou bien aux armes,
01:58souvent avec les éditions Endal.
02:01Alors, je le disais, ce livre, c'est 20 ans de recherche à peu près,
02:06dans les archives, à la Défense Nationale,
02:08avec les vétérans, dans les photos, etc.
02:11Il y a plus de 900 photos dans un livre qui fait 500 pages.
02:15Donc, c'est énorme.
02:17Et votre livre s'ouvre avec une dédicace poignante à Raymond Coujon,
02:22héros inconnu de cette guerre oubliée.
02:25Alors, pourquoi cette dédicace ?
02:27Que vous finissez la dédicace en écrivant
02:30« Les morts qui sont oubliés meurent une deuxième fois ».
02:33Alors, est-ce que Raymond Coujon était-il représentatif de ces hommes anonymes ?
02:37Tout à fait. Alors, Raymond Coujon, pour vous raconter brièvement l'histoire de ce combattant,
02:41c'est un jeune de l'assistance publique,
02:44comme beaucoup au sein du bâtiment de Corée, d'ailleurs, on en parlera peut-être tout à l'heure.
02:48Donc, Raymond Coujon est un assistant public.
02:50Il apprend le métier de minotier.
02:54Et lorsqu'il a 18 ans, il part à l'armée.
02:57Et là, il commence à trouver une première camaraderie.
03:02Et il se porte volontaire pour l'Indochine.
03:04Il part dans une unité aéroportée en Indochine.
03:06Il fait son temps.
03:07À l'issue, il revient.
03:09Et personne ne l'attend, en France, bien sûr.
03:12Donc, il a trouvé une famille.
03:13Et il se décide de repartir.
03:15Et il entend parler de la guerre de Corée, du bataillon français de l'ONU.
03:18Et il se porte volontaire pour le bataillon de l'ONU.
03:21Donc, sur le bateau qu'il emmène en Corée,
03:22il rencontre un autre soldat qui, lui, part pour l'Indochine.
03:27Il sympathise.
03:27Et il se trouve que ce soldat qui part pour l'Indochine a une sœur.
03:30Ils habitent du côté de Vichy, dans l'Allier, un petit village qui s'appelle Abré.
03:35Et les conversations aidant, Raymond Coujon lui demande
03:38si la sœur de ce camarade accepterait d'être sa marraine de guerre.
03:42Puisqu'il n'a personne.
03:43De l'écrire.
03:45Donc, je n'en sais pas plus au niveau des échanges de courrier.
03:48Mais on peut imaginer, au vu de ce qui a suivi,
03:50qu'il y a eu au moins un échange de courrier.
03:52Au moins un courrier de Raymond Coujon à cette dame.
03:55Raymond Coujon débarque en Corée, fin août.
03:59Et il est tué le 26 septembre, dans le combat mythique de Crève-Cœur.
04:03Dans un premier temps, son corps est inhumé à Pouzanne,
04:06où sont inhumés tous les soldats de l'ONU,
04:08avant d'être renvoyés dans les territoires qui les concernent.
04:12Et lui, il repose là un certain temps, jusqu'à ce qu'après la guerre,
04:16les services de l'armée retrouvent sa marraine de guerre.
04:21Et proposent à sa marraine de guerre de recueillir le corps de Raymond Coujon.
04:26Ce qu'elle accepte.
04:27Et quand le cercueil, le gros cercueil métallique américain, arrive à Abré,
04:31dans cette petite commune, on dit à cette dame,
04:34« Maintenant, c'est à vous de vous occuper des obsèques, il faut payer les obsèques. »
04:38Cette pauvre femme, elle n'est pas les moyens de payer les obsèques.
04:40Le cercueil va rester pendant un mois dans le dépositoire du cimetière.
04:46Finalement, on trouve une solution.
04:47Certainement, je crois que c'était le saunir français qui s'occupe des obsèques.
04:53Raymond Coujon est inhumé.
04:54C'est une petite tombe modeste, un tas de terre, une petite croix en bois.
04:58Sa marine de guerre, qu'il n'avait jamais rencontrée, s'en occupe.
05:01Et puis un jour, cette dame meurt à son tour.
05:04La tombe s'affaisse, la croix disparaît et la tombe elle-même disparaît.
05:08Ayant eu connaissance de cette histoire, j'ai recherché la tombe, j'ai retrouvé la tombe.
05:12Je vous ferai grâce de l'Odyssée.
05:15Et là, j'ai pu faire rénover cette tombe, recréer la tombe finalement.
05:21Et depuis, la mémoire de Raymond Coujon est honorée et on s'occupe de fleurir sa tombe.
05:25Et donc, vous ouvrez le livre ?
05:27J'ouvre le livre avec Raymond Coujon et je le termine.
05:30Et je le termine avec l'histoire de Raymond Coujon.
05:34Vous avez aussi, je crois, un grand-oncle qui a participé à la guerre.
05:37Est-ce que ça a été pour vous un déclencheur ?
05:39C'est l'effet déclencheur.
05:41J'ai effectivement un grand-oncle qui a participé à la guerre de Corée
05:44et qui est parti avec les tout premiers volontaires,
05:45qui a débarqué à Pouzanne en octobre 1950.
05:50et qui a participé au premier combat, c'est-à-dire Wanzhou, Tune Tunnel, Shippeong-ni, la cote 1037.
05:58Ensuite, là, il a été rapatrié en France.
06:00Il a été un taux d'invalidité à 80% et trois citations en si peu de combat.
06:07Donc, j'ai eu la chance de le connaître.
06:09Malheureusement, il est mort assez tôt.
06:11Mais il a pu me raconter quelques anecdotes, quelques souvenirs.
06:15Et c'est grâce à lui que je suis rentré dans l'association des anciens du bâtiment de Corée.
06:19Et là, alors là, c'était la révélation.
06:21J'ai pu rencontrer beaucoup d'anciens qui, à l'époque, étaient encore vivants.
06:25Et là, c'était pour moi merveilleux parce que j'ai pu avoir ce contact direct
06:30avec ces hommes qui avaient vécu les événements qu'ils m'ont raconté.
06:35Ce qui explique d'ailleurs ce travail sur ce temps long,
06:36parce que bien évidemment, vous avez rencontré ces vétérans.
06:39Voilà, et puis il a fallu que je compare les récits de ces gens-là,
06:42en qui j'avais une confiance absolue, certes,
06:44mais quand même par rapport au texte officiel.
06:46Donc, il a fallu que je plonge dans les JMO, dans les documents,
06:50et que je compare tout ça.
06:51Et voilà, c'était un travail assez long, il est vrai.
06:54Alors, comme je le disais en introduction, on connaît mal ce conflit en France.
06:59Ce serait intéressant de se replacer dans le contexte historique et politique.
07:03Donc, est-ce que vous pouvez nous rappeler comment ce conflit a éclaté ?
07:07On est cinq ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale.
07:10Quel est le…
07:11Je remonterai beaucoup plus tôt.
07:12Non, mais on peut remonter beaucoup plus tôt.
07:14Je remonterai beaucoup plus tôt.
07:14Je voudrais remonter aux sources du conflit.
07:16Voilà.
07:17Pour moi, la guerre de Corée commence en 1905.
07:19C'est-à-dire avec l'occupation…
07:20Alors là, on va faire vite parce que…
07:21Très très vite, avec l'occupation japonaise,
07:23qui annexe la Corée en 1910.
07:26Mais, donc, il a fallu, à la fin de la Seconde Guerre mondiale,
07:33les Américains se sont mis d'accord avec les Russes
07:35pour intervenir en Corée,
07:36de manière à chasser les Japonais de Corée.
07:39Mais les Russes sont allés beaucoup plus rapidement
07:42que ne le pensaient les Américains.
07:43Il a fallu, en urgence, dans l'urgence,
07:45tracer une limite, une ligne de démarcation,
07:47qui s'est avérée être celle du 38e parallèle,
07:50où les Soviétiques sont restés au nord
07:52et les Américains au sud.
07:53Les Soviétiques ont installé au pouvoir Kim Il-sung,
07:57qui était un communiste et qui était un résistant,
08:00ceci étant un résistant coréen vis-à-vis des Japonais.
08:03Et au sud, par contre, les Américains ont mis en place
08:05Singh Manry, qui était, lui, également un résistant coréen.
08:10Et voilà, donc, il y a eu ces deux blocs, déjà,
08:15qui existaient en Corée.
08:17Et ensuite, il y a eu le déclenchement de la guerre,
08:19donc le 25 juin 1950, lorsque les Nord-Coréens valissent.
08:21– Et là, vous parlez des Soviétiques, il y a également les Chinois,
08:24la Chine est...
08:24– Alors, les Chinois sont intervenus,
08:26ils sont intervenus, effectivement, avec le soutien aussi des Soviétiques,
08:29bien évidemment, mais ils sont intervenus, eux,
08:32directement, avec des troupes, ce que n'ont pas fait les Soviétiques.
08:36Il y a quand même eu à peu près 500 conseillers militaires soviétiques
08:39qui sont avérés comme ayant participé à la guerre,
08:44quelques pilotes de MiG également.
08:47Mais la grosse force humaine, c'était les Chinois,
08:52avec des millions d'hommes.
08:53– Là, on en parlera, mais alors, comment le conflit a éclaté ?
08:56Quelle a été, je veux dire, les versets ?
08:58– Il a éclaté, j'allais dire, tout simplement,
09:00par une invasion nord-coréenne du Sud.
09:04Le Sud ne s'attendait pas du tout à cette invasion.
09:06D'ailleurs, il y avait pas mal d'unités qui étaient en repos,
09:08beaucoup de militaires qui étaient en permission,
09:10quand l'armée nord-coréenne a déferlé sur le Sud,
09:16le 25 juin 1950.
09:18Et personne ne s'y attendait.
09:20Et c'était un repli jusqu'à Pouzanne,
09:24où là, il y a eu, disons, un abcès de fixation de résistance.
09:29– Et alors, quelle est la réaction des Coréens du Sud ?
09:32Il y a eu une première résistance ?
09:34– Ils se sont battus, ils se sont bien battus,
09:36mais ils n'avaient pas les moyens qu'avaient les nord-coréens,
09:39qui étaient soutenus par les soviétiques,
09:40qui leur aient fourni le matériel, l'armement, les chars,
09:43et les conseillers techniques.
09:44Alors qu'au Sud, il y avait surtout des forces de police
09:47et une armée qui était encore embryonnaire,
09:49qui était fourmée par les Américains.
09:51– Et cette invasion est décidée par les soviétiques,
09:53en accord avec les nord-coréens, est-ce que l'on sait ?
09:56– Je n'étais pas dans le secret,
09:58mais je pense que le petit père des peuples
10:01avait pour ambition de conquérir la péninsule, effectivement.
10:04– En forme de la Corée.
10:05– Et donc comment réagissent tout de suite ?
10:08Il n'y a que les Etats-Unis qui soient présents sur le territoire ?
10:11– Alors au début, il n'y a que les Sud-Coréens,
10:14avec quelques unités, quelques conseillers militaires américains.
10:18Bon, donc ces troupes sud-coréennes sont refoulées jusqu'à Pouzanne,
10:23et là, il y a l'appel des Nations Unies pour intervenir,
10:26et les premières unités, ce sont des unités américaines
10:28qui interviennent et qui finalement arrivent à repousser les nord-coréens
10:32jusqu'au Yalou, c'est-à-dire jusqu'à la frontière avec la Manchurie, carrément.
10:37– Et donc à quel moment l'ONU, qui est toute neuve ?
10:40– Au mois d'août.
10:41– Décide d'intervenir ?
10:43– Au mois d'août 1950, il décide d'intervenir,
10:47et il demande donc à tous les pays libres de participer.
10:50La France sort de la Seconde Guerre mondiale,
10:52bien qu'on soit cinq ans après, on avait abandonné
10:55les tickets de rationnement un an avant.
10:57– Oui, et puis on commence à être engagé en plus en Indochine.
10:58– En plus, on est engagé depuis 1945 en Indochine,
11:01on n'a pas les moyens de notre politique, j'allais dire.
11:04Et cependant, on veut revenir sur l'échiquier international,
11:10et il nous faut intervenir.
11:11Donc le problème, c'est qu'on ne peut pas démunir l'armée
11:14qui est en Indochine, donc il faut trouver une solution.
11:17Et là, on propose la création d'un bataillon formé de volontaires.
11:23C'est tout à fait innovant, et c'était également une crainte,
11:27parce qu'on s'est dit, les volontaires,
11:29ça va être des gens qui vont venir un peu de tous les horizons,
11:32et on va peut-être avoir un souci de cohésion.
11:34– Oui, alors ce recrutement, comment s'opère-t-il,
11:38et auprès de qui s'opère-t-il ?
11:39– Alors, bien évidemment, au sein de l'armée d'Activ,
11:43mais là, les chefs de corps rechignent à laisser partir leurs éléments,
11:47qui sont bien souvent les meilleurs éléments,
11:48qui veulent aller au baroude.
11:50Donc, au final, on a 50% des officiers qui viennent de l'Activ,
11:55et 50% qui viennent de la réserve.
11:58On a 70% des sous-officiers qui viennent de l'Activ,
12:0230% de la réserve,
12:03et là, c'est le point d'achoppement de ce bataillon,
12:07c'est qu'on a seulement 10% de la troupe qui vient de l'Activ,
12:10et 90% de la réserve.
12:12Et c'est là où était la crainte.
12:13– De la réserve, ou bien des gens qui…
12:15– Ah non, il fallait quand même que…
12:17– Il fallait quand même avoir une expérience.
12:18– Voilà, donc les plus jeunes avaient 18 ans,
12:21les plus anciens avaient une quarantaine d'années,
12:24et pour les plus jeunes, donc,
12:25ils n'avaient pas d'expérience militaire,
12:26mais eux, par contre, quand on dit qu'ils étaient issus de l'Activ,
12:29ils venaient du service militaire,
12:31ou ils finissaient, ou ils étaient en activité au service militaire.
12:33– Et le recrutement se fait par quelle voie ?
12:36– Par voie de presse, par messages diffusés…
12:39– Il y a des bureaux de recrutement dans certaines…
12:40– Les gendarmeries, les gendarmeries, les mairies,
12:43bon, mais à l'époque, bien évidemment,
12:45on placardait pas trop les affiches pour recruter
12:47pour le bâtiron de Corée,
12:48compte tenu de la politique et des problèmes…
12:50– Oui, mais c'est là, en 1950, surtout,
12:52on est dans une France avec un parti communiste très puissant.
12:56– Très puissant, très puissant,
12:57qui crache sur les blessés qui reviennent d'Indochine,
13:01qui balancent le matériel à l'eau,
13:03qui sabotent le matériel pour l'Indochine.
13:05Donc, il fallait être courageux, je pense, en 1950,
13:11pour s'engager au bâtiron de Corée.
13:13– Et c'est le premier mandat de l'ONU, finalement ?
13:16– C'est le premier mandat, oui,
13:17première intervention militaire de l'ONU.
13:21Ce qui, d'ailleurs, semble avoir un petit peu gêné l'ONU, longtemps,
13:24parce que c'est la première fois que l'ONU…
13:26Ben, quelque part, il faut le dire,
13:27c'est la première fois que l'ONU tuait,
13:29puisqu'il y a eu des combats.
13:30Donc, c'est resté une intervention,
13:34peut-être aussi la raison pour laquelle c'est une guerre un peu oubliée.
13:37– Alors, vous écrivez, le bataillon se veut sans peur,
13:40il sera en plus sans reproche,
13:42mais je voudrais savoir quel type de profil,
13:45surtout parmi la troupe, vous dites,
13:47il n'y a que 10% qui proviennent de l'actif.
13:49– Deux actifs, oui.
13:50– Quel type de profil rejoint ce bataillon ?
13:53– Tous les profils.
13:54– Vous parlez de goujon, en fond d'assistance.
13:56– Oui, alors, bon, il y a effectivement des enfants de l'assistance publique.
14:02À ce sujet-là, je travaille actuellement avec un ami,
14:05Jean-Michel Besson, et on travaille sur un autre livre,
14:07et on a pu établir qu'il y avait 3667 soldats français
14:13qui sont partis là-bas en Corée,
14:14et on a été impressionné par le nombre de jeunes issus de l'assistance publique.
14:18Et c'était pour eux la solution de sortir de cet état de misère à l'époque.
14:21– Autrement, hormis ces garçons, vous aviez des commerçants,
14:27vous aviez des rentiers, vous aviez des chefs d'entreprise,
14:31des pharmaciens, des dentistes, des avocats, des artisans,
14:37des barboudeurs, des gens qui partaient à l'aventure, bien évidemment.
14:42– J'ai même eu la confidence d'un ancien, qui était un homme exceptionnel,
14:51je tirais son nom parce qu'il m'a donné les raisons de son engagement,
14:55il m'a dit « moi je suis parti pour me faire tuer ».
14:57Il avait 22 ans, et sa fiancée s'était tuée dans un accident de circulation,
15:01et il était parti pour se faire tuer.
15:03Il est revenu avec trois citations, la médaille militaire comme deuxième classe,
15:07enfin, il a fait une carrière, et Dieu merci, il a survécu à tout ça.
15:10– Il a survécu, je le disais, nous sommes cinq ans après la guerre,
15:13est-ce qu'il y a aussi des profits de résistants,
15:15voire de gens qui voulaient échapper à la justice ?
15:17– Oui, bien évidemment, alors il y avait beaucoup,
15:20même parmi les réservistes, qui avaient fait la résistance,
15:25certains avaient déjà combattu en Indochine, la grande majorité d'ailleurs.
15:31Il y a eu quelques brebis galeuses qui ont essayé d'échapper à la justice en s'engageant,
15:37compte tenu du fait que ce bataillon a été créé dans l'urgence,
15:40il n'a pas toujours été facile au début de repérer ces gars-là,
15:44mais ils ont été rapidement repérés,
15:45et il y en a même qui ont été débarqués durant le premier voyage,
15:48qui ont été débarqués en cours de route.
15:51Mais il y a eu beaucoup de résistants, oui,
15:53on a accusé également qu'il y avait des collabos,
15:57mais il reste à savoir ce qu'on entend par collabos,
16:01il y avait de tout.
16:03Et pour avoir connu pas mal de ces anciens,
16:08je peux dire que chacun d'eux est un roman individuel.
16:12Ils ont tous des parcours incroyables.
16:14– Et alors, qu'est-ce que vous répondrez à ceux qui parlent d'une légion de repris de justice ?
16:19– Je ne vais pas être vulgaire, mais c'est une connerie.
16:23– Et alors, on a parlé de la troupe,
16:27et qu'en est-il des chefs, des officiers ?
16:30On va parler de la figure du central, du général, du général Monclar,
16:35mais l'état-major de ce bataillon,
16:38est-ce que ce sont aussi des volontaires, bien évidemment,
16:41mais est-ce que l'armée française a dit,
16:43voilà, c'est toi qui vas y aller avec tel ou tel état-major ?
16:45– Ils ont tous été volontaires, ils ont tous été volontaires.
16:47Et d'ailleurs, je pense que, moi, je n'y étais pas,
16:49mais je pense que, comme on dit, ça se bousculait un peu au portillon.
16:53C'était quand même la première intervention des Nations Unies.
16:55Donc, le général Monclar a été, lui, nommé par les uns,
17:00et le commandant Lemire, qui était le chef du bataillon,
17:02a été, lui, nommé par d'autres.
17:05– Le Montclar était quoi avec ?
17:06– Alors, il était général, il était général,
17:07mais lui, il était à la tête de l'état-major des forces françaises de l'ONU,
17:13des forces irrestes françaises de l'ONU.
17:15Et le commandant Lemire était, lui, à la tête du bataillon,
17:17ce qui a, d'ailleurs, créé un problème au sein de l'unité,
17:22parce que le général Monclar, qui était issu de la Légion étrangère
17:25et qui était un baroudeur, un combattant confirmé,
17:27et un homme exceptionnel,
17:29voulait toujours être au plus près de sa troupe.
17:31Et donc, il avait même accepté de quitter ses étoiles…
17:34– Oui, il retire ses étoiles de l'énéral.
17:36– Voilà, pour prendre les galons de lieutenant-colonel,
17:39de manière à pouvoir s'interposer entre le commandant Lemire
17:41et l'état-major du régime américain,
17:43dans lequel ils allaient être inclus.
17:45Mais tout ça, c'était pour la bonne cause, j'allais dire.
17:48Malheureusement, on allait se rendre compte
17:50que ça allait créer des problèmes de commandement
17:52et puis même de tensions au sein du bataillon.
17:55– Alors, ce bataillon français de l'ONU,
17:58est-ce qu'il y a d'autres volontaires étrangers d'autres pays ?
18:01À part les Américains, c'est une…
18:02– Ah oui, mais il y a eu les Belges, les Néo-Zélandais,
18:06des Italiens qui avaient une ambulance.
18:08Il y a eu des Indiens qui avaient une ambulance parachutiste.
18:12Il y a eu des Canadiens, il y a eu des Britanniques.
18:16Oui, tous les pays ont voulu participer et ont participé.
18:21– Donc, sur le terrain, qui commandait ?
18:23Monclat ou Lemire ?
18:25– Alors, qui commandait ?
18:27D'abord, c'était le commandant du régiment américain.
18:30Il faut savoir que quand le bataillon des premiers volontaires
18:33ont débarqué là-bas en Corée,
18:35aucun régiment américain ne voulait défoncer.
18:37– On va en parler, oui.
18:37– Voilà, parce que c'était les perdants de la Seconde Guerre mondiale.
18:42Et c'est les Américains qui nous avaient sauvés,
18:44ce qui n'est pas tout à fait faux.
18:47Donc, personne ne voulait défoncer.
18:48Et c'est le 23e régiment d'infanterie américain
18:51qui faisait partie de la 2e division d'infanterie.
18:54La 2e division d'infanterie, elle avait été créée en France en 1918.
18:58Donc, il y avait ce lien avec la France, déjà.
19:00Et qui a bien voulu accepter ces Français.
19:03Et dès qu'ils ont commencé à combattre,
19:07les Américains se sont rendus compte de la valeur de ces combattants.
19:10Et après, tout le monde voulait les Français à côté d'eux, sur le front.
19:16– Est-ce que cet appel aux volontariats rencontre un grand succès ?
19:19Il y a combien d'hommes ?
19:20– Oui, oui, oui.
19:21Il y a eu beaucoup, beaucoup de volontaires.
19:22Il y a même des volontaires qui écrivaient directement à l'ambassade,
19:26qui n'était pas encore en ambassade à l'époque, de Corée, en France.
19:29Non, non, il y a eu beaucoup de volontaires.
19:31Il a fallu faire un tri.
19:32Il a fallu choisir les 1042 premiers qui sont partis.
19:36– 1042 ?
19:37– C'est 1042 qui sont partis.
19:38– Le chiffre était fixé par l'ONU ?
19:40– Non, alors c'est un chiffre en fait qui était fixé par les Américains directement,
19:44puisque ce bataillon français devait s'insérer dans un régiment américain.
19:51Il était composé de trois bataillons et il devait former un quatrième bataillon.
19:56Et pour ce faire, pour que ce soit cohérent et que ce soit commandable,
19:58il fallait le structurer comme un bataillon américain.
20:01Et là, le bataillon américain, c'était 1017 normalement.
20:03Donc les Français ont mis 1017, mais ils ont rajouté un petit peu de manière à arriver à 1042.
20:08– 1042 volontaires qui partent en Corée.
20:11– Qui partent les premiers.
20:12– Les premiers, donc ils partent en bateau.
20:15Donc une première sélection est faite, il n'y a pas d'entraînement d'abord en France.
20:19C'est juste une sélection…
20:20– Très peu, ils n'ont pas le temps.
20:22Le message de création date du 25 août 1950.
20:25– Donc un mois après l'avance.
20:26– Et ils embarquent deux mois après.
20:29Donc le temps de rassembler les volontaires, de faire tout ce qui est des démarches administratives,
20:33les piqûres, les vaccins, l'équipement, le matériel.
20:35Il y a très très peu d'entraînement à Auvours.
20:37Ils sont regroupés au camp d'Auvours.
20:39C'est deux, trois marches, c'est deux, trois manœuvres.
20:42Mais c'est inexistant comme formation.
20:44Et ça a d'ailleurs été la crainte.
20:46On s'est dit, qu'est-ce qui va se passer ?
20:47– Donc ils partent en Corée en bateau ?
20:49– Ils partent sur la Tosse 2, un vieux bateau.
20:50– C'est une expédition ?
20:52– C'est un mois de voyage.
20:54Là encore, plein d'anecdotes.
20:56Je n'ai pas le temps de vous raconter plein d'anecdotes.
20:58– Une peut-être ?
20:59– Une peut-être, un jour, les hommes de troupes
21:05ont refusé d'aller manger au messe, au réfecteur,
21:10parce qu'ils en avaient marre du poids cassé.
21:11On leur donnait que du poids cassé, que du poids cassé.
21:13Donc ils ont manifesté quelque part,
21:15et puis on a changé le menu ce jour-là.
21:18– Donc ils arrivent en Corée.
21:22Alors vous avez dit que les Américains,
21:23comment ils sont perçus par les Américains ?
21:25– Je vous dis, personne n'en voulait.
21:28Et puis bon, les premiers soldats qui débarquent,
21:30ils voient les soldats américains commencer à discuter,
21:33puis ils disent, nous on est volontaires.
21:34Et les Américains les regardent avec des yeux écarquillés,
21:37vous êtes volontaires pour venir dans cet enfer,
21:39mais ce n'est pas possible, vous êtes fous.
21:41Ils ne comprenaient pas.
21:43Et d'ailleurs, une autre anecdote,
21:44quand les premiers volontaires sont arrivés dans le port de Pouzanne,
21:49je me rappelle, ils m'ont tous dit ça,
21:50ils m'ont dit, on a eu une drôle d'impression,
21:52parce qu'on était accueillis par une fanfare américaine et coréenne.
21:57Et puis il y avait des enfants, des petits-enfants coréens
21:58qui étaient là avec des chrysanthèmes.
22:00Nous, en France, le chrysanthème, c'est la mort.
22:03Alors qu'eux, là-bas, c'est le bonheur, c'est l'espérance, etc.
22:06– Est-ce qu'on peut parler d'un vrai choc, je dirais,
22:11logistique, climatique également ?
22:12Parce qu'on ne s'imagine pas, la Corée est un pays,
22:15enfin on en parlera dans les conditions de combat,
22:16un pays qui peut être très froid.
22:17– Tout à fait, alors ça a été, à l'origine,
22:21les volontaires étaient partis pour deux ans,
22:24le contrat était de deux ans,
22:25et on s'est vite rendu compte que les personnes tiendraient deux ans.
22:29Donc on a ramené, d'ailleurs le général Monclar est revenu entre-temps
22:32au mois de mai, non au mois de mars 1951,
22:35pour négocier justement ça avec les états-majors,
22:38il fallait absolument ramener le délai à un an,
22:41compte tenu des conditions climatiques.
22:43Alors en été, vous pouvez monter jusqu'à 42, 43 degrés,
22:46et en hiver ça a descendu jusqu'à moins 30,
22:50et quand on connaît les conditions des premiers volontaires,
22:53qui ont combattu donc de janvier à mars-avril,
22:57enfin ils ont combattu tout le temps,
22:58mais je veux dire les périodes hivernales c'était ça,
23:00de grand froid, et là ils avaient une couverture,
23:04pas le droit de fer de feu,
23:05pour ne pas attirer l'attention des ennemis,
23:08et puis une couverture, puis très peu de moyens.
23:12Tous m'ont dit, ça a été terrible, c'est le froid,
23:15ils ont tous souffert du froid.
23:16– Le froid, c'est dans la montagne également.
23:18– Oui, et puis bon, les combats alors, les combats…
23:20– Oui, ça on va en parler,
23:21mais leur équipement, ils sont équipés comme le fassin américain.
23:23– À l'américaine, oui, oui, c'est d'ailleurs,
23:25ils sont arrivés avec leur tenue française,
23:27la tenue 46 en drap,
23:29mais ils sont passés par le camp de Taegu, en Corée,
23:34et là on les a quipés à l'américaine,
23:36avec les snowboats, le casque américain,
23:39le matériel américain, et l'armement américain,
23:43munitions américaines, enfin tout à l'américaine.
23:45– À l'américaine, c'est un régiment d'infanterie ?
23:48– C'est un régiment d'infanterie,
23:49ils forment le quatrième bataillon,
23:51ils ont donc trois compagnies de voltiges,
23:53une compagnie d'accompagnement, un petit état-major,
23:57et ils sont rapidement, ils s'intègrent rapidement.
24:00Ils sont par contre surpris par le fait que les commandants,
24:04les lieutenants colonels, les adjudants,
24:07tout le monde mange avec la troupe,
24:08ce qui n'est pas le cas en France à ce moment-là.
24:11– Alors on va rentrer sur le terrain.
24:13– Oui.
24:14– Comment, donc vous allez nous raconter les engagements,
24:18peut-être les engagements les plus marquants,
24:20mais d'abord je veux savoir le baptême du feu de ce bataillon,
24:23quelle date ?
24:24– C'est Wenzhou, c'est le 10 janvier 1951 à Wenzhou,
24:32au centre de la Corée, là il faut bloquer une avancée nord-coréenne,
24:41et c'est les premiers combats, et c'est les premiers morts,
24:45c'est les premiers combats, c'est les premiers morts,
24:48et comment dirais-je, c'est un épisode emblématique de la guerre de Corée,
24:55les Français, une compagnie française n'a plus de munitions,
25:00ils ont épuisé les munitions parce qu'ils sont surpris
25:02par les assauts nord-coréens et chinois, par les vagues d'assauts.
25:05Et là, le lieutenant donne l'ordre de mettre la baïonnette au canon,
25:09de sortir des positions et de charger.
25:11– Et ça, ça a été raconté à toutes les troupes des Nations Unies en Corée,
25:19et à tel point que même les états-majors ont fait une note de service
25:23en rappelant que la baïonnette n'était pas utilisée,
25:25elle n'était pas utilisée uniquement pour ouvrir la boîte de conserve,
25:28mais qu'il fallait également s'en servir au combat.
25:30Et ça, c'est les Français et les Turcs qui ont utilisé la baïonnette en Corée.
25:34– Les Turcs aussi, j'ai aussi eu des Turcs aussi,
25:36qui étaient aussi de sacrés combattants.
25:38– Alors, à qui font-ils face ?
25:40Vous avez parlé de combattants coréens et de combattants chinois.
25:44– Alors, au début, ils sont partis pour combattre des nord-coréens.
25:47Et les premiers combats, c'est contre des nord-coréens.
25:50Mais rapidement, il s'avère que ce sont des troupes chinoises
25:53qui se confrontent aux forces de l'ONU.
25:57Ils ont une masse humaine qui est inépuisable.
26:01Et les communistes de l'époque, j'ai eu en ce moment aujourd'hui,
26:06puisqu'on voit la même chose en Ukraine,
26:08la vie humaine n'a pas beaucoup d'importance.
26:10Donc, on envoie des vagues de combattants, des vagues de combattants,
26:14et jusqu'à l'épuisement des munitions.
26:17Et je me souviens, mon grand-oncle m'avait dit qu'à Shipyongni,
26:21il était chef de pièce d'une mitrailleuse de 30,
26:23et il me disait, plus on en tuait, plus il en arrivait.
26:27Et il me disait, on avait un mur de cadavres devant nous,
26:30il fallait qu'on rehausse l'axe de tir de la mitrailleuse,
26:32parce qu'on tirait dans les cadavres.
26:33C'est inimaginable, c'est inimaginable, quoi.
26:37Ils ont été choqués par ça.
26:39Et ils ont été également choqués quand ils ont découvert que c'était des Chinois.
26:42Parce que beaucoup de soldats du bataillon, comme je vous le disais,
26:45avaient fait l'Indochine.
26:46Et en Indochine, ils avaient côtoyé des Chinois,
26:48qui leur faisaient la soupe, qui vendaient la soupe chinoise,
26:52qui étaient commerçants en Indochine.
26:53Et ils avaient d'excellents rapports avec les Chinois.
26:55Et quand ils se sont rendus compte qu'ils avaient tiré sur les Chinois,
26:59ils étaient un petit peu déboussolés, quoi.
27:01Au début, ils ne comprenaient pas.
27:03– Les combattants coréens en face ?
27:07– Très coriaces, très endoctrinés, très…
27:11j'allais dire très racistes, anti-blancs,
27:16mais d'une combativité impressionnante, d'un mordant…
27:21Et puis, quand ils tenaient une position, ils ne me lâchaient rien.
27:24C'était des combats d'une violence qu'on…
27:26Enfin, je raconte ça comme si je l'avais vécu, ce qui est faux, bien évidemment.
27:29Mais je l'ai tellement entendu, je l'ai tellement entendu de la bouche des témoins,
27:34ils m'ont dit que c'était d'une violence inouïe, quoi.
27:36Et ils étaient d'une ténacité, d'une férocité incroyable.
27:40– Et aux côtés des Français et des Américains, il y a des troupes sud-coréennes ?
27:43– Il y a des troupes sud-coréennes, alors, bien sûr, il y a des troupes sud-coréennes.
27:47Et à l'époque, l'armée ROC, la République of Korea, c'était donc les soldats sud-coréens.
27:55Les ROC avaient décidé d'essaimer quelques soldats sud-coréens dans les unités des forces de l'ONU.
28:01Donc, les Français en ont eu.
28:03Et les Français ont fait une chose que les autres ne faisaient pas.
28:08Les Américains, les Canadiens, tout ça, ils essaimaient les soldats ROC qui arrivaient
28:13par deux ou trois, par section, par compagnie.
28:15Alors que le général Monclar, lui, il a décidé de les garder en unité constituée.
28:22Il a vite compris qu'ils avaient une valeur au feu impressionnante.
28:25C'était d'excellents tireurs.
28:27C'était des gens d'une robustesse incroyable.
28:29Et puis, courageux, très courageux.
28:31Ils diffendaient leur pays.
28:33– Oui.
28:33– Et donc, au sein du bataillon, d'abord, on a constitué une petite compagnie
28:38qui n'avait de compagnie que le nom, puisqu'ils étaient une quarantaine au début.
28:41Et ensuite, au fur et à mesure des apports de Sud-Coréens dans le bataillon,
28:46ils ont fini par constituer une compagnie à part entière,
28:48dont l'ossature était française, mais dont la majorité de la troupe était Sud-Coréenne.
28:55Et ça a formé la deuxième compagnie, qu'on appelait également la compagnie ROC.
28:59Et il y a eu des liens qui se sont créés, qui étaient incroyables aussi.
29:04Quand les anciens me parlaient de leurs camarades ROC, ils avaient des larmes aux yeux.
29:09– Oui.
29:11Donc, ce baptême du feu est très meurtrier pour le bataillon français ?
29:14– Il est meurtrier. Il y a eu pire.
29:16Mais c'est le choc, c'est le premier choc.
29:19Donc, ils se rendent compte que là, ils vont élisser les camarades.
29:23Là, ils commencent à comprendre.
29:25– Vous avez parlé tout à l'heure de la bataille de Shipyong-Ni.
29:28Est-ce que c'est un tournant ?
29:30– C'est un véritable tournant.
29:31– Alors, racontez-nous cette bataille.
29:33– Pour plusieurs raisons, parce que jusqu'à présent, l'ONU s'imaginait
29:37que la force chinoise était incontrôlable et on ne pouvait pas arrêter les Chinois.
29:44Donc, il a été décidé de faire un point de fixation à Shipyong-Ni,
29:49qui a un petit village, un petit bourg.
29:50J'ai eu la chance d'y aller.
29:51C'est vraiment un petit village au milieu de nulle part, j'allais dire,
29:54mais qui était un nœud routier.
29:57Et là, l'État-major américain a décidé de mettre le 23ème régiment d'infanterie
30:01avec des unités d'appui, des Rangers, des chars, etc.
30:06et de faire un Dien Bien Phu.
30:09Et là, ça a marché à Shipyong-Ni.
30:12Le bataillon, avec leurs camarades du 23ème régiment d'infanterie américaine,
30:18ont résisté aux assauts chinois pendant trois jours et deux nuits.
30:24Et là, ça a été d'une violence incroyable.
30:29Et les Chinois descendaient des pitons qui entouraient…
30:33– Et nous sommes dans un pays…
30:34– Alors, oui, il faut dire que la Corée, c'est un pays très montagneux.
30:37Bon, les montagnes ne sont pas très hautes, mais il y en a partout.
30:40C'est ce qu'on appelle là-bas des pitons.
30:41Et Shipyong-Ni est dans une cuvette.
30:43C'est pour ça que je faisais un petit peu allusion à Dien Bien Phu.
30:46C'est une grande cuvette également, avec des pitons tout autour.
30:50Et là, donc, le régiment américain et ses appuis s'installent en position défensive.
30:54Et comme disait le commandant du régiment, la ligne de défense de son territoire,
31:01de son camp, était profonde d'un seul homme.
31:04C'est-à-dire qu'ils avaient fait des tranchées, mais il n'y avait qu'un homme derrière.
31:09Il n'y avait plus personne, quoi.
31:11Donc, c'était un cordon de défense avec très, très peu de réserve derrière.
31:15Très peu de réserve.
31:17Et donc, chacun avait un poste clé.
31:19C'est-à-dire que s'il y en a un qui cédait, c'était tout le périmètre qui cédait.
31:25Et là, ils ont résisté de façon incroyable.
31:28Et leur grande peur, c'était de tomber à un cours de munitions.
31:32Ce qui a failli arriver, ce qui est d'ailleurs arrivé,
31:36la dernière nuit, ils n'avaient plus de munitions, pratiquement.
31:39Très peu de buts de mortiers, peu de cartouches.
31:42Et là, quand ils ont vu les torches descendre des pitons,
31:49ils se sont dit, ça y est, c'est le dernier assaut, c'est terminé.
31:52Et en fait, ils ont vu les torches qui descendaient des pitons,
31:55qui s'agitaient au loin, mais il n'y a pas eu d'assaut.
31:59Et le lendemain, ils se sont rendus compte que c'était simplement des soldats chinois
32:02qui venaient ramasser leurs morts, ils ramassaient tous leurs cadavres,
32:05et ils se sont repliés.
32:06Et si les Chinois avaient attaqué cette dernière nuit,
32:10Chipioni, c'était une défaite, alors que c'était une victoire.
32:14– C'était une victoire.
32:16Est-ce qu'on peut dire que c'était un moment fondateur pour l'histoire du bataillon ?
32:19– Oui, parce qu'à partir de là, pour le bataillon, et puis même pour l'ONU,
32:21parce qu'à partir de là, Ridoué s'est rendu compte
32:26qu'on pouvait contenir la force communiste, et on pouvait même les repousser.
32:32Et à partir de là, il y a eu un nouvel élan.
32:34Les troupes de l'ONU ont commencé à remonter sur le nord,
32:39et le bataillon, c'est là où, j'allais dire, il s'est couvert de gloire pour la première fois,
32:47et c'est là où, dans les troupes de l'ONU, on a entendu parler des Français,
32:50et à partir de là, tout le monde voulait les Français à côté.
32:53– Alors justement, comment expliquer cette redoutable efficacité de cette unité
32:57qui est pourtant très hétérogène au départ ?
32:58– Voilà, alors c'était d'ailleurs, comme je vous le disais, la crainte.
33:01C'était d'avoir des gars de l'actif, des gars de la réserve,
33:06issus de tous les milieux, de tous les âges,
33:08et ils se sont dit, mais ils ne vont jamais pouvoir tenir ces gars-là,
33:11ils ne vont pas pouvoir résister.
33:12Et il faut quand même se dire, bon, moi, ce que j'en ai conclu en faisant mes recherches,
33:20c'est qu'il y a eu trois gros contingents, ceux qui sont partis en 1950,
33:25et qui ont fait l'année 51, avec quatre détachements de renforts.
33:28Ensuite, il y a eu le deuxième contingent qui a fait 52, et le troisième, 56,
33:31avec des détachements de renforts, pour chacun d'eux.
33:33– Mais tous ceux qui ont fait les combats de l'année 51, le ciment commun,
33:41c'était l'anticommunisme, et c'est ce qui les a motivés.
33:46Donc, eux, c'était vraiment des soldats politiques, j'allais dire.
33:51Mais ils étaient engagés pour ça, et on les avait enroulés pour ça,
33:56et on les avait entraînés pour ça.
33:57Donc, voilà.
34:00Ensuite, comme je vous le disais tout à l'heure,
34:02on s'est rendu compte que le temps de deux ans,
34:06ça serait beaucoup trop long, parce qu'il ne pourrait pas tenir,
34:08à cause des combats trop violents, à cause du climat, à cause du temps.
34:12Donc, il y a eu des relèves.
34:14– Il y a eu des relèves, et la durée d'engagement n'était que d'un an.
34:18Mais par contre, si les premiers détachements de renforts,
34:21jusqu'au détachement numéro 4, 5,
34:24il y avait encore des volontaires pour la Corée,
34:25à partir de là, quand les militaires, quand les volontaires
34:29regardaient les comptes rendus,
34:31ils se rendaient compte que c'était d'une violence inouïe,
34:33et il y avait moins d'enthousiasme pour aller en Corée.
34:36Donc, on a dû faire appel à des militaires
34:37qui étaient initialement prévus pour l'Intoshine,
34:40mais qui sont allés là-bas aussi, très courageusement,
34:42qui sont comportés de manière exemplaire également,
34:45et qui n'avaient rien à envier à leurs prédécesseurs.
34:48– Est-ce qu'il y a aussi d'autres anecdotes,
34:51d'autres coups de feu ?
34:55– Oui, alors…
34:57– Il y a la cote 1037.
34:58– Alors, la cote 1037, c'était une boucherie,
35:02c'était une boucherie, ça s'appelait une boucherie.
35:04Là, il y a eu un problème que j'aborde dans le livre
35:07et que je préfère laisser découvrir au lecteur.
35:11Il y a un problème encore de commandement
35:12et de relations franco-américaines.
35:15Le commandant du régiment avait changé,
35:17ce n'était plus le même commandant.
35:19Il ne portait pas trop les Français dans leur cœur
35:21et il leur a dit, la cote 1037, pour vous, les Français,
35:24c'est un challenge, donc vous allez la prendre.
35:26Et là, ça a été terrible, parce qu'il n'y avait pas de préparation d'artillerie,
35:29– Ils l'ont prise ?
35:30– Ils l'ont prise.
35:31Ils n'ont jamais…
35:32Les Français en Corée n'ont jamais failli, n'ont jamais reculé.
35:35– Ils n'ont pas connu de défaite ?
35:37– Ils n'ont pas connu de défaite.
35:38Et quand ils reculaient, c'était sur ordre.
35:40Et c'était tactique.
35:42Ils n'ont pas connu de défaite.
35:43– Donc, d'autres exploits que la cote 1037,
35:45c'est-ce qu'il y a d'autres endroits ?
35:47– Ah oui, alors vous avez Bashi-Pyong-Ni, 1037,
35:51Crève-Cœur.
35:52– Crève-Cœur, alors là…
35:53– D'où vient ce nom ?
35:55– Alors, il semblerait que ce soit un solde américain
35:58qui est interrogé par le commandant Lemire.
36:00Le commandant Lemire arrive avec le bataillon à Crève-Cœur
36:03en septembre 1951.
36:05Et puis, il voit des Américains descendre des positions.
36:08Et puis, il interpelle un gars, là.
36:10Il le décrit comme un grand blond.
36:12Et il lui dit, vous êtes d'où, là ?
36:14Il dit, on vient de cette côte, là.
36:15Il y en a marre, c'est un véritable Crève-Cœur.
36:18Il semblerait, c'est Lemire qui le raconte lui-même
36:21dans son livre, que le nom de Crève-Cœur
36:24aurait été donné à partir de là.
36:25– Et là, qu'est-ce qui se passe ?
36:27– Ah ben là, c'est un combat de position.
36:29C'est les premières…
36:29Là, on termine la guerre de mouvement
36:33et on rentre dans la guerre de position à Crève-Cœur.
36:35Et là, c'est une guerre de position,
36:37alors, d'une violence inuit, bombardement
36:39et assaut, assaut, assaut continuel
36:43pour essayer de prendre les positions
36:44qui sont sur les sommets.
36:46Et là, c'est là où est tué Raymond Goujon.
36:49C'est là où sont tués aussi plein de camarades,
36:52bien évidemment.
36:53Mais le capitaine Goupil,
36:54qui est une figure emblématique du bataillon.
36:56Et Miserie, le sergent Miserie,
37:01la troisième compagnie,
37:02qui sera le seul Français
37:03à recevoir la Distinguish Service Cross,
37:06qui est juste en dessous de la médaille d'honneur.
37:09Il la reçoit là-bas,
37:10enfin, il la gagne là-bas, Crève-Cœur.
37:12C'est un combat mythique.
37:13D'ailleurs, l'association des anciens
37:15de bâtons de Corée
37:15a pris cette date du 13 octobre
37:18comme date anniversaire
37:19pour faire ses assemblées générales
37:22et pour se réunir.
37:24Parce que c'est le combat mythique,
37:25c'est Crève-Cœur.
37:26Après, il y en a eu d'autres, bien évidemment.
37:28Et en 1952, il y a Aroed.
37:30Alors, Aroed, c'est un combat dantesque aussi.
37:35Incroyable.
37:36Je vais lui aborder en quelques mots.
37:40C'est le combat des pionniers.
37:43Les pionniers, c'est une petite section
37:45qui est positionnée bien au devant
37:48des positions françaises,
37:49à 500 mètres sur une petite crête.
37:52Et là, il y a 49 pionniers
37:53qui sont là, qui sont positionnés là
37:54et qui doivent servir de sonnette.
37:56Au début, c'est une position dite de sonnette,
37:58c'est-à-dire pour signaler quand l'ennemi va arriver.
38:02Et finalement, ordre est donné.
38:04Ça devient une position
38:05sans ordre de recul possible.
38:08C'est-à-dire qu'ils se savent sacrifiés.
38:09Ils savent qu'ils doivent rester sur place.
38:12Sur 49 pionniers, il y aura 17 tués.
38:14Tous ont été blessés.
38:15Il y a 3 disparus.
38:17Il y a 2 prisonniers.
38:18Et j'ai eu la chance de rencontrer
38:20des anciens pionniers.
38:22Salis, Bezama, Rib.
38:24Et Bezama, qui était devenu un ami,
38:28qui est paix à son âme, il est parti maintenant.
38:30Il a été fait prisonnier là-bas.
38:32Mais il m'a raconté Aroed.
38:34J'en ai des frissons quand je vous en parle actuellement.
38:38Et c'est sincère.
38:41Il me dit, imagine-toi,
38:42on était dans notre tranchée.
38:44Pareil, ils étaient les 49 l'un d'un côté de l'autre.
38:47Parce qu'il n'y avait personne derrière.
38:48Ils étaient à 500 mètres derrière.
38:50Et il me dit, il est 18h45, 19h.
38:55On n'y voit rien.
38:56Parce qu'en octobre, il fait nuit.
38:58Il y a la fumée des bombardements.
38:59Ils ont reçu des bombardements toute la journée.
39:00Et il dit, on ne voit qu'à 3-4 mètres devant nous.
39:04Après, c'est un brouillard.
39:05Il dit, là, on attend.
39:07Ça se calme un petit peu, le bombardement.
39:10Et on entend des cliquetis, les Chinois qui arrivent.
39:13Et il me dit, on les voit.
39:14On voit un mur de Chinois qui sort de la brume devant nous.
39:17Et là, il dit, on tire la mitrailleuse, on tire au fusil,
39:18on tire la mitrailleuse.
39:20Il dit, c'était un carnage.
39:21Ils se battent au couteau.
39:22Les gars se battent au couteau.
39:24Ils se battent à la grenade.
39:25Et un officier, le lieutenant Pierron,
39:27il est blessé 7 fois dans le combat.
39:31Bézama est blessé, fait prisonnier.
39:34Enfin, c'est un combat aussi mythique, mythique.
39:37Donc, le premier engagement, donc, début 51.
39:42La guerre va continuer jusqu'en 1905.
39:4443, juillet 53.
39:4553.
39:4627 juillet 53.
39:47Au fur et à mesure, donc, le bataillon s'aguerrit, il y a des relèves.
39:56Comment vivent ces hommes l'armistice ?
40:00Comment l'armistice arrive ?
40:01Alors, j'ai posé la question à un combattant qui a connu cette armistice, Charles Gonin.
40:09Il était aussi un ami, un homme exceptionnel.
40:12Lui, il a connu l'armistice.
40:13Il n'y croyait pas.
40:14Enfin, il s'est passé, comme j'allais dire, comme une lettre à la poste.
40:19Mais du jour au lendemain, on n'avait plus de canonnade, plus de bruit, un calme assourdissant.
40:26Il faut bien expliquer pour nos téléspectateurs que, finalement, le sud continue de grignoter, de remonter vers le nord.
40:32Alors, à partir de crève-cœur, à partir de crève-cœur, donc, à partir d'octobre 1951, le front ne bouge plus beaucoup.
40:39On gagne un petit peu, parce qu'il y a les pourparlers qui commencent à Pamungeon,
40:44puisque les communistes, voyant qu'ils perdent du terrain et qu'ils risquent de perdre la guerre,
40:48en pareille situation, ils utilisent leur meilleure arme, c'est-à-dire la ruse,
40:52et ils disent, là, on va essayer de faire des pourparlers de paix.
40:56Et donc, à partir de là, les forces de l'ONU ne cherchent plus qu'à limiter les avancées nord-coréennes et chinoises.
41:04Et quant à elles, les forces de l'ONU ne gagnent que peu de terrain
41:08et ne cherchent pas à en gagner tellement.
41:09Ils cherchent à maintenir le niveau.
41:11Et on reste là, peu au prou, au niveau du 38e parallèle.
41:15– Donc, Armistice, et là, c'est le retour en…
41:20– Pas tout de suite, non, parce que 27 juillet 1953, donc, Armistice,
41:24ça va très vite à partir de là.
41:27En quelques jours, les forces, les ennemis doivent reculer chacune de 3 km
41:31de chaque côté de la zone DMZ, la DMZ, donc…
41:35– Les militaires.
41:36– Qui se retrouvent pratiquement comme au début de la guerre.
41:39Grosso modo, le 38e parallèle.
41:41On recule, il faut démonter toutes les structures qui ont été bâties,
41:45les bunkers, les équipements radio, les barbelés.
41:50On ramène tout ça sur l'arrière, on refait des positions défensives,
41:52parce qu'on ne sait jamais ce qui peut arriver.
41:54Et là, on attend jusqu'au mois d'octobre le mouvement sur l'Indochine.
41:59Le bataillon quitte la Corée et part combattre, continuer son combat en Indochine.
42:06Et on laisse un petit groupe…
42:07– Les hommes sont dispersés dans différents régiments ?
42:09– Non, non, non, non, non, non, non, non, non, non.
42:12Certains retournent dans leurs armes d'origine.
42:17Mais sinon, le bataillon français de l'ONU devient le premier bataillon
42:24du régiment de Corée qui est créé en Indochine, à deux bataillons.
42:29Et là, ils restent, ils gardent cette cohésion.
42:32Quelques-uns sont versés dans le deuxième bataillon pour former, etc.
42:36Mais grosso modo, ce qu'on appelle maintenant le bataillon de Corée
42:39constitue l'ossature du premier bataillon du régiment de Corée.
42:43Et là, par contre, ils se font étrier en Indochine
42:47parce que les communistes savent que c'est le bataillon de Corée
42:50et ils leur en veulent, je vais dire à mort.
42:52– Et ils leur font payer.
42:54– Et ils leur font payer très, très cher.
42:55– Je demande, quel est le bilan de la guerre de Corée
42:58et le bilan, les pertes humaines pour ce bataillon français ?
43:01– Alors, pour le bataillon français,
43:03je le disais tout à l'heure avec Jean-Michel Besson,
43:05on a établi la liste à 3667 soldats qui ont mis le pied en Corée,
43:11qui ont combattu en Corée.
43:12Sur ces hommes-là, il y a 267 soldats français
43:16qui sont morts pour la France en Corée, dont 8 disparus.
43:22– Beaucoup de prisonniers également ?
43:23– Il y a eu 12 prisonniers.
43:25Ils sont tous revenus dans un État lamentable,
43:28comme on peut l'imaginer, mais ils sont tous revenus.
43:30Et pour la plupart, après un petit congé de fin de campagne,
43:37ils ont réintégré leurs unités,
43:38et puis ils ont continué à servir leur pays.
43:40– Tous ne sont pas retournés dans l'armée, j'imagine ?
43:45– Tous ceux qui viennent de la réserve, non.
43:47Il y en a quelques-uns qui sont entre bataillons
43:52pour se réactiver, justement, pour essayer de rentrer de nouveau dans l'armée.
43:55Il y en a qui ont continué une carrière militaire,
43:57mais il y en a beaucoup qui sont retournés à la vie civile.
44:00– Alors, ils avaient, j'imagine, tous le sentiment du devoir accompli.
44:03– Bien sûr.
44:04– En revanche, en France, c'est l'oubli, voire l'insulte, voire la différence.
44:09– En 1953, on est encore dans la guerre froide.
44:13– Peut-être mort, mais…
44:14– Ce que je ne vous ai pas dit, c'est que quand les premiers volontaires
44:18ont embarqué à Marseille pour partir en Corée,
44:22ils étaient applaudis sur la cannebière quand ils ont défilé,
44:27mais ils étaient également hués.
44:29Il a fallu des cordons de CRS.
44:31Une anecdote intéressante, c'est lors du départ du DR6.
44:36Donc, c'est-à-dire, c'est le deuxième gros contingent
44:38qui constitue la relève.
44:40Donc, ça, c'est en décembre 1951.
44:43Ils arrivent en février 1952.
44:44Quand ils partent de Marseille, le DR6, il y a 500 DR6,
44:51je ne sais plus, enfin, bon, peu importe, il y a 600 hommes à peu près.
44:56Ils montent sur le Skogum, qui est un navire norvégien,
44:59et ils partent, direction la Corée.
45:01Et, manque de peau, le bateau, il a une avarie,
45:03il faut qu'il revienne à Marseille.
45:05Sauf qu'entre-temps, la Marseillaise,
45:06qui est un journal communiste de Marseille,
45:09avait, vilipendait le bataillon,
45:12bande de mercenaires, etc.
45:13Donc, le bateau revient,
45:17les volontaires prennent connaissance de cet article,
45:21et là, il y a à peu près 200 gars,
45:23sous les ordres du lieutenant Barès,
45:25qui se dirigent vers la cellule du PC,
45:27et qui mettent la cellule à sac.
45:29Ils cassent toutes les machines à écrire,
45:30ils foutent tout en l'air.
45:32Les CRS essayent d'intervenir,
45:34mais ils se gardent bien, ils ne bougent pas.
45:36Et voilà, donc, pour vous dire que
45:38c'était quand même violent, même en France.
45:42Le bataillon n'était pas apprécié par tout le monde.
45:47On a dit tout un tas de choses sur ce bataillon.
45:49On a dit que les gars étaient partis pour l'argent.
45:52Alors qu'il faut savoir qu'encore une fois,
45:53je reprends toujours l'exemple des premiers volontaires,
45:55quand ils sont partis,
45:56ils n'ont connu le montant de leur solde
45:59que lorsqu'ils étaient sur le bateau.
46:01Et cette solde,
46:02elle était alignée sur la solde des soldats en Indochine,
46:05qui correspondait grosso modo
46:06au salaire d'un ouvrier à l'époque.
46:08Donc, ils ne sont pas partis pour l'argent.
46:13– Alors, la Corée du Sud, en revanche,
46:14leur rend hommage régulièrement ?
46:16– Alors, oui, oui, oui.
46:18J'ai eu une chance,
46:19j'ai eu une grande chance,
46:21c'est d'aller trois fois en Corée.
46:22Et chaque fois que je suis allé en Corée,
46:24c'était avec l'association des anciens du bataillon de Corée.
46:26Et la Corée nous met à disposition des bus,
46:29bien évidemment, etc., des hôtels et tout.
46:32Et sur les bus, vous avez des grands bandeaux,
46:34vétérans français.
46:36Et quand vous voyagez dans ces bus
46:38et que vous traversez la Corée,
46:39les Coréens vous envoient des baisers.
46:43Mais c'est inimaginable.
46:44En France, si, pour les joueurs de foot,
46:46mais pas pour les soldats.
46:48– Pas pour les soldats, non.
46:48– Écoutez, merci infiniment, Jean-François Pelletier,
46:53pour tout ce récit de la guerre de Corée,
46:58qui, c'est vrai, est complètement oublié.
46:59On en parle absolument très peu,
47:03du moins dans les livres scolaires.
47:04– Je voudrais dire une dernière chose ?
47:06– Oui, je sais ce que vous avez à dire.
47:08– Je vous laisse parler.
47:09– Je vais parler du livre,
47:11qui sort à l'heure à laquelle nous enregistrons l'émission.
47:13Le livre n'est pas sorti.
47:14– Tout à fait.
47:14– Il va sortir fin novembre.
47:16– Il doit sortir en…
47:17– Voilà, fin novembre.
47:18– Il est sous presse,
47:19donc je disais 500 pages,
47:21900 photos inédites,
47:24des cartes,
47:26c'est aux éditions Emdal,
47:27et là, vous allez le dire,
47:28c'est que les droits d'auteur du livre,
47:30ça n'ira pas dans votre poche, mais…
47:33– C'est ira, j'explique pourquoi,
47:35si j'ai encore une petite minute.
47:37– Allez-y.
47:37– Voilà, je souhaite faire donc mes droits d'auteur
47:39à un orphelinat en Corée.
47:41Tout ça parce que le bataillon français
47:43a entretenu toujours un lien
47:44avec les orphelinats en Corée.
47:46Quand ils étaient en permission,
47:47ils allaient là-bas, ils donnaient des bonbons aux enfants,
47:49ils ramenaient des victuailles,
47:51et ce sont les religieuses,
47:52ce qui était des religieuses françaises à l'époque,
47:54les sœurs de Chartres,
47:55qui ont brodé le premier fagnon
47:57qui a été arboré en Corée par le bataillon,
48:00c'étaient les sœurs de cet orphelinat.
48:03Donc, je me suis dit que ce livre,
48:06ce n'est pas mon livre,
48:07moi je n'ai fait qu'écrire,
48:09mais que rassembler les histoires de ces gars-là,
48:12et je pense que, vu ce qu'ils ont fait, eux,
48:15pour la Corée,
48:17et ce qu'ils ont fait pour ces petits Coréens,
48:18je me devais faire le minimum,
48:20c'était ma pierre à l'édifice.
48:22– Voilà, c'est un beau geste
48:24qui peut inciter nos téléspectateurs
48:27à se procurer ce livre sur les Français
48:29dans la guerre de Corée,
48:30paru, qui va paraître, aux éditions Endal.
48:34C'était Passé-présent,
48:35l'émission historique de TVL,
48:38réalisée en partenariat avec la Revue d'Histoire européenne.
48:41Avant de nous quitter,
48:42vous cliquez bien sûr sur le pouce levé sous la vidéo,
48:44et vous vous abonnez à notre chaîne YouTube.
48:46Merci et à bientôt.
48:47– Sous-titrage Société Radio-Canada
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