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  • il y a 4 jours
À quelques jours de la COP 30 qui se déroulera à Belém, au Brésil, Laurent Fabius était l'invité exceptionnel de RTL Soir. L'ancien Premier ministre et ancien président du Conseil constitutionnel était il a dix ans un des artisans de l'accord de Paris.
Regardez L'invité d'Anne-Sophie Lapix du 03 novembre 2025.

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Transcription
00:00Anne-Sophie Lapix, RTL Soir.
00:03C'est un petit marteau, mais je pense qu'il peut faire de grandes choses.
00:10C'était le 13 décembre 2015, le coup de marteau qui marquait l'adoption de l'accord de Paris pour le climat.
00:16Bonsoir Laurent Fabius.
00:16Bonsoir.
00:17Quel est le souvenir que vous gardez de la COP21 à Paris que vous présidiez ?
00:21Peu de sommeil, des négociations sans fin ?
00:24Oui, enfin sans fin, elles se sont finies.
00:26Elles se sont finies, bien finies, mais...
00:28Sans fin dans la nuit en tout cas.
00:29J'ai mille souvenirs, mais l'un des souvenirs les plus forts, c'est celui auquel vous venez de faire écho.
00:35Parce que jusqu'à la fin, je n'étais pas sûr que ça allait marcher.
00:38Il faut quand même avoir à l'esprit que quand on est rentré dans la COP,
00:42il y avait 1600 passages qui étaient, comme on dit, entre parenthèses.
00:47Il fallait passer de 1600 à zéro.
00:50Bon, donc oui, on a beaucoup travaillé.
00:52Et puis il y avait un climat, sans mauvais jeu de mots,
00:54enfin, des conditions qui ne ressemblaient pas du tout aux conditions actuelles, bien sûr.
00:59Ça veut dire que ce serait tout bonnement impossible, aujourd'hui, de conclure un accord Paris,
01:03au vu notamment des personnalités qui sont à la tête de l'État.
01:07Oui, moi j'ai coutu de dire que, pourquoi Paris a été un succès ?
01:10Alors je laisse de côté l'extraordinaire diplomatie française.
01:14Mais je pense qu'il y avait trois caractéristiques.
01:17D'abord, la science n'était pas attaquée.
01:20Et c'est elle qui a donné les bases.
01:22Deuxièmement, la société civile était au rendez-vous.
01:27Et puis, surtout, les États.
01:29Parce que les règles de la COP, comme on dit, c'est que tous les États doivent être d'accord.
01:34Bon, et à l'époque, on avait un climat entre Obama, le Premier ministre chinois, les Européens, moi-même et d'autres,
01:43qui faisaient qu'on pouvait avoir un accord.
01:45Aujourd'hui, évidemment, les choses sont tout à fait différentes, malheureusement.
01:48Alors, on évoquait cette diplomatie française qui avait été extrêmement efficace.
01:51Qu'allez-vous faire à Bellem ? Pourquoi allez-vous à la COP30 ?
01:55Parce que les Brésiliens, qui accueillent la COP30, m'ont demandé de reprendre du service, si je puis dire,
02:02et de présider le cercle des présidents de COP qu'ils ont créé.
02:06C'est-à-dire que tous les présidents de COP, depuis la COP de Paris, se sont réunis.
02:11Et donc, j'anime ce groupe.
02:13Et je pars d'ailleurs demain pour Bellem.
02:17Et à partir de jeudi, oui, il y a un certain nombre de réunions de ce qu'on appelle les leaders,
02:24chefs d'État et de gouvernement, plus quelques spécialistes internationaux, dont moi-même.
02:31Et donc, je vais rester là-bas jusqu'à dimanche.
02:33Et quels vont être les enjeux de la COP de Bellem ?
02:35Qu'est-ce qu'on peut obtenir comme progrès ou comme engagement ?
02:38Alors, l'idée que mes collègues et moi-même, nous nous faisons, c'est que cette COP doit être surtout la COP de la mise en œuvre.
02:49À Paris, peut-être on va revenir sur l'accord de Paris, on a décidé un certain nombre de choses.
02:55Je vous expliquerai pourquoi Paris a été au total positif.
02:58Mais, mais, mais, on est quand même très en dessous de ce qu'il faudrait faire.
03:02Oui, pour rappeler, donc, le principe, il fallait limiter l'augmentation de la température.
03:07Oui, à 2 ou si possible, à 1,5.
03:09Il y a déjà un cinquernier, en fait, depuis l'année dernière.
03:11Oui, alors...
03:12Enfin, il faut que ça dure, hein, pour le valider.
03:14Mais, a priori, on ne reviendra pas en arrière.
03:16Non, enfin, je vais être plus précis.
03:19L'accord de Paris, donc, c'est il y a 10 ans.
03:22Et à l'époque, le trend, comme on dit, d'évolution de la température,
03:27pour la fin du siècle, était prévu à plus 4 degrés, voire plus 5 degrés.
03:31Donc, c'est un marché, vous êtes en train de nous dire.
03:33Alors, aujourd'hui, c'est à plus 2,8.
03:36Donc, c'est mieux.
03:37Oui.
03:37Bon, la différence entre 2,8 et 4, c'est 57 jours de canicule en moins.
03:42Donc, ce n'est pas une petite chose.
03:43Bon, mais, 2,8, c'est quand même beaucoup trop.
03:46Puisque l'objectif qu'on poursuit, c'est 2 degrés, et même si possible, 1,5 degré.
03:51Et on n'est pas au bout du compte.
03:54Et donc, vous me posez la question, qu'est-ce qu'on peut espérer de Bélème ?
03:59Mes collègues et moi-même, nous espérons que Bélème ne va pas donner des objectifs nouveaux extraordinaires,
04:04parce que des objectifs, ils ont été fixés.
04:06Mais veillez à la mise en œuvre de ce qui a déjà été décidé.
04:12Alors, mise en œuvre, ça veut dire s'éloigner d'un certain nombre de gaz fossiles.
04:17Ça veut dire, par exemple...
04:20Accélérer la transition énergétique.
04:21Accélérer la transition énergétique.
04:23Lutter contre la déforestation.
04:26Limiter les émissions de méthane.
04:28Financer davantage, et notamment pour les pays en développement.
04:31Donc, l'idée principale, c'est, comme on dit en moyen français, implémenter.
04:37C'est-à-dire mettre en œuvre.
04:38Une autre idée, c'est développer ce qu'on appelle l'inclusion.
04:42D'habitude, dans les COP, ce sont les États qui interviennent.
04:46Mais on s'est aperçus, c'est une évidence, que les collectivités locales sont très très importantes.
04:52Les maires, les gouverneurs d'État, et aussi les entreprises.
04:55Donc, inclure tout le monde et ne pas raisonner simplement en termes de climat.
05:00Mais on s'est aperçus aussi, c'était pas aussi perceptible à Paris,
05:04que le climat, c'est pas séparable des questions de forêt, c'est pas séparable des questions d'espèces.
05:10Bon, donc on va essayer d'inclure tout ça.
05:12Vous disiez que le contexte a changé.
05:14Alors, on pense évidemment aux États-Unis, mais l'Europe aussi.
05:17L'Europe est en train de se demander comment revenir sur l'interdiction de fabriquer des voitures à moteur thermique à partir de 2035.
05:24Vous le regrettez ou vous comprenez que face à l'effondrement des ventes de voitures,
05:28on laisse du temps aux constructeurs automobiles ?
05:29Il faut à la fois être ambitieux, parce que sinon, la situation climatique va devenir de pire en pire,
05:35avec des conséquences absolument catastrophiques.
05:37Mais en même temps, être réaliste économiquement.
05:39Et l'équilibre à trouver n'est pas facile.
05:41Alors, l'Europe, traditionnellement, a été un leader dans ce domaine.
05:45Mais, avant de répondre à votre question sur l'automobile,
05:49l'Europe doit présenter, comme les autres pays ou les autres groupes de pays,
05:54une contribution nationale.
05:56Une contribution, c'est-à-dire, quel va être l'objectif qu'on se fixe pour 2035 ?
06:00Et pour le moment, au moment où on parle, lundi soir, l'Europe n'est pas encore arrivée.
06:05Bon, et la réunion de décision a lieu demain, précisément.
06:09Donc, si, ce que j'espère, l'Europe se met d'accord, elle va pouvoir continuer à avoir un certain rôle de leader.
06:14Sinon, ça veut dire qu'on va avoir de moins en moins important.
06:20Sur la question des automobiles, c'est vrai qu'il y a une concurrence extrêmement forte des Chinois,
06:26qui, eux, c'est le bulldozer.
06:28Et leurs voitures, et ils sont passés à l'électrique, ce sont les premiers,
06:34ce sont des voitures, paraît-il, qui sont bonnes et qui ne sont pas très chères.
06:37Donc, on voit bien la difficulté.
06:40Mais, je pense que ce serait une très, très grave erreur que l'Europe perde son leadership.
06:45Vous n'ignorez pas que les députés examinent en ce moment le budget 2026.
06:48N'est-ce pas le budget des renoncements en matière de transition énergétique ?
06:52Les crédits de MaPrimeRénov' sont en chute libre.
06:54Le Fonds Vert, qui doit aider les collectivités locales à réduire les émissions de CO2
06:58et à s'adapter aux changements climatiques, est divisé par deux.
07:01Les énergies renouvelables sont davantage taxées.
07:03Comment qualifier ce budget du point de vue de la transition énergétique ?
07:06Bon, alors, il est légitime que vous posiez cette question,
07:09et il est légitime, vous l'attendiez, que je ne sois pas très prolixe,
07:12parce que je me souhaitais totalement éloigner de la politique française.
07:16Oui, vous êtes le président du Conseil constitutionnel,
07:18vous n'avez plus de devoir de réserve, vous avez le droit de vous exprimer.
07:21Oui, mais je dois dire que je me suis éloigné de la politique,
07:24et j'ajouterai, c'est la seule confidence que je vous ferai, sans regret.
07:29Sans regret.
07:30Ça veut dire que c'est le bazar et que vous ne voulez pas le commenter.
07:33Je vous disais, juste avant cette émission,
07:35que j'ai vu un sondage qui demande aux Français
07:38quel est le premier sentiment que vous écroupez par rapport à la situation actuelle.
07:43Et les Français répondent, le premier sentiment, c'est la honte.
07:48Et vous le partagez ?
07:49Ça, c'est personnel.
07:51Non, mais vous êtes inquiet pour la situation en France ?
07:55Je dirais, me souvenant du moment où je dirigeais la diplomatie française,
07:59qu'il y a des marges de progression.
08:01Je vous évoquais, on évoquait le problème de la construction automobile il y a deux ans.
08:07Emmanuel Macron avait semé le trouble lui-même en demandant une pause
08:10dans la réglementation environnementale européenne.
08:13Au nom de la réindustrialisation, lutter contre le réchauffement climatique,
08:18c'est imposer des contraintes qui font fuir les industries ?
08:22Il y a évidemment cet aspect qui est très très important,
08:27parce qu'il faut que nos concitoyens puissent vivre et travailler.
08:31En même temps, il ne faut pas croire que les choses vont se faire toutes seules
08:39et qu'on peut lutter contre l'évolution.
08:44Mais vous parliez de Paris.
08:47Il y a aussi des éléments nouveaux qui sont arrivés auxquels on ne pensait pas.
08:49Je vais vous donner un exemple.
08:50A Paris, donc il y a dix ans, personne ne parlait de l'intelligence artificielle.
08:55Absolument personne.
08:56Aujourd'hui, je regardais la dernière étude qui a été faite.
09:00On estime que l'énergie supplémentaire qui va être nécessitée par les data centers,
09:07ça représentera en 2040 plus que la consommation d'électricité de l'ensemble de l'Union européenne.
09:18Donc vous voyez qu'à la fois, il y a des événements tout à fait regrettables.
09:23Vous parliez de la position du président américain.
09:26Mais il y a aussi des éléments qui évoluent et auxquels on ne pensait pas.
09:31Mais il reste que, à la différence d'un certain nombre de gens qui s'expriment,
09:37je considère, avec les scientifiques, que la question climatique est une question absolument majeure
09:44qui menace les conditions de vie de l'humanité.
09:46Rien de moins que ça.
09:47Merci beaucoup, Laurent Fabius, d'être venu sur notre plateau.
09:52Et bonne COP 30, donc, au Brésil.
09:54Elle débute lundi prochain.
09:56Dans un instant, on retrouve notre duo de 18h50.
09:59Florian Gazan repêchera l'info qu'on a failli manquer.
10:01Et puis, Sophie Orange nous parlera du prix Fémina dans la Tentation du Soir.
10:06A tout de suite.
10:08RTL Soir
10:08Avec Anne-Sophie
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