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00:00Bienvenue au coeur du crime, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:07Savez-vous que plus d'un tiers des crimes et délits commis en France sont traités par la
00:16gendarmerie nationale ? Je m'appelle Yann Kermadek, je suis commandant de gendarmerie.
00:25Je dirige une section de recherche dont la mission essentielle est une mission de
00:31police judiciaire.
00:40L'histoire que je vais vous raconter est une histoire vraie. Tous les faits sont réels et
00:47se sont déroulés en France. Seuls les noms des personnes et des lieux ont été changés.
00:55Vous me semblez une personne évoluée et pleine de bon sens, comme moi-même, même si vous n'êtes
01:06pas psychiatre, ce qui ajouterait encore à votre intuition et à votre sagesse. Voilà pourquoi je
01:11vais vous avouer à vous ce que j'ai refusé de reconnaître en présence de la police, qui n'est
01:19composé que d'imbécile borné et sans imagination, parfaitement incapable pour la plupart de comprendre
01:26la sensibilité et le raffinement d'un être tel que moi. Eh bien oui, je suis un assassin. Je
01:36reconnais le fait. Être un homme délicat n'empêche pas de pouvoir infliger une mort violente. Il ne s'agit
01:45pas là d'une disgrâce. Je ne vois pas d'ailleurs comment je pourrais espérer esquiver la peine qui
01:52m'a été infligée. Je ne conteste pas avoir tué, mais je voudrais seulement expliquer mon point de vue.
02:01Comment j'en suis venu à une telle action ? Toutes choses qui ont été totalement déformées dans le
02:08courant du procès. Voici ma vérité. Il faut d'abord que je vous parle d'Yvette, ou plutôt non. Non,
02:19parlons d'abord un peu de moi. Je suis non seulement un enfant bien né, mais j'appartiens à une excellente
02:29famille. Il est vrai qu'on peut se demander pourquoi un homme de ma condition a épousé Yvette, qui, outre mon
02:37aîné de neuf ans, était une femme d'allure plutôt rustique. Non, mais je continue, je continue ma
02:45propre histoire. J'ai grandi dans une solitude luxueuse. Mon père était trop occupé par ses
02:52affaires pour me consacrer grande attention. Ma mère, en revanche, d'un tempérament très artiste,
02:59s'était forcée de m'inculquer son amour de l'art, plus spécialement de la musique et de la poésie.
03:06Imaginez mon enfance entre Basten et l'Europe, où je l'accompagne régulièrement, les musées,
03:12les salons littéraires, les galeries d'art, ou alors la pension avec ses dortoirs sales,
03:19les atrocités juvéniles, les humiliations. Dieu merci, je n'y goûte pas longtemps. Je dois
03:27surtout mon éducation à une série de précepteurs m'enseignant les langues,
03:32l'art et la musique. Sans beaucoup de succès, je dois l'admettre. Non, je suis plus un connaisseur
03:39qu'un créateur. Je ne passe qu'un an à l'université. Je la quitte définitivement en deuxième année.
03:46Je ne supporte pas la nourriture que j'estime primitive. Peu importe cet échec, je reprends mes voyages
03:56en compagnies de ma mère. En matière culinaire, je suis devenu un expert. Mon jugement est parfait.
04:04Que ce soit à Paris, à Rome ou à Vienne, je suis passé maître dans l'art de dénicher de fameux
04:10petits restaurants où la cuisine est succulente. Je vise assez bien le décès de mon père,
04:17mais la mort de ma mère un peu plus tard, l'année de mes 25 ans, m'apporte un coup sévère,
04:25d'autant qu'elle s'accompagne de la révélation choquante que la fortune familiale n'existe
04:33pratiquement plus. Au fil de circonstances trop longues à raconter, j'échoue à New York pour me
04:41trouver bloquer dans un travail fastidieux qui me rapporte une misère. New York m'a toujours paru
04:48une ville froidement hostile. C'est loin d'être l'idéal pour un homme aussi délicat que moi.
04:57N'ayant jamais su me faire vraiment des amis, je me retrouve alors totalement seul. Le soir,
05:05je m'oblige à sortir. Je parcours les rues, espérant découvrir de bons petits restaurants où l'on me
05:13servirait une vraie cuisine. Généralement déçu, je sors de ces endroits en colère, ayant à peine goûté
05:22au plat. Jusqu'au jour où, tombant par hasard dans une petite rue tortueuse de Greenwich Village,
05:30sur une pancarte affichant « Chez Yvette ». J'ai la plus délicieuse des surprises.
05:38Le lieu, pourtant, est sombre et lugubre, avec ses petites tables en formica éclairées par des
05:45bougies plantées dans le col de bouteilles de Chianti. Le menu est bien en français, mais j'ai été
05:53trop souvent abusé par ce genre de détails pour en attendre quelque chose de bon, sans compter que la
05:59serveuse ressemble à une souillon. Je choisis des filets de sol au gratin, un plat simple que même un
06:08cuisinier inexpérimenté devrait être capable de préparer convenablement. Commence alors une
06:17attente interminable. Je tape du pied d'impatience dans ce restaurant presque vide, mais lorsque la
06:25serveuse reparaît avec son plateau, à peine ai-je soulevé le couvercle du plat qu'elle dépose devant
06:31moi, que je suis sûr d'avoir enfin trouvé ce que je cherchais depuis si longtemps. Un cuisinier ou une
06:41cuisinière émérite. Aucune seule ne saurait être meilleure. La sauce est un délice, la chair du poisson
06:53exquise, le vin une perfection. Conduit à la cuisine pour présenter mes compliments, je découvre Yvette, une femme
07:04énorme, aux cheveux noirs pendant sur un visage ingrat et luisant de sueur. Un corps informe, boudiné dans une
07:13espèce de sarreau usagé, s'arrêtant sur de grosses jambes variqueuses. Et pourtant, pourtant, dopée par mon
07:25extase gastronomique, je la trouve belle. Je l'embrasse sur les deux joues et je la serre contre
07:32moi. Yvette, pour sa part, est ravie de rencontrer enfin un connaisseur. Dès lors, je prends l'habitude
07:40d'aller dîner chez elle tous les soirs. Je n'ai jamais été aussi heureux de ma vie. Elle me prépare
07:46toutes sortes de bons petits plats. Ris de veau à la bonne Ilesco, homard à la nage, magrette canard. Yvette me
07:55tiens compagnie tandis que je déguste. Une fois le restaurant fermé, je lui offre un verre de vin ou un
08:03café qu'elle sert avec le plus délectable des gâteaux français. J'ai le sentiment d'avoir découvert
08:12un trésor. Mes réserves monétaires, hélas, commencent à s'épuiser rapidement. Le flair d'Yvette en matière
08:24culinaire s'accompagne d'un certain talent financier. Et bientôt, elle me propose à marcher
08:33un beau soir en me suggérant de passer la nuit chez elle en échange du dîner. Déjà son débiteur,
08:44je peux difficilement refuser. Je dois reconnaître que si j'accepte au départ avec une certaine
08:55répugnance, j'ai en réalité bien tort de m'inquiéter. Car ce que je découvre avec Yvette, que je n'avais
09:06encore jusque-là jamais expérimenté, c'est purement et simplement la passion.
09:15Quelques semaines plus tard, le temps de publier les bancs, nous sommes mariés. Et notre mariage au
09:23début est des plus heureux. Je reçois peu de temps après un petit héritage que j'investis aussitôt
09:31dans l'agrandissement du restaurant et de la publicité. Notre affaire prospère rapidement,
09:37les gastronomes affluent chez nous. Yvette cuisine toujours elle-même. J'aménage,
09:43pour ma part, une des pièces du premier étage où j'organise régulièrement des réunions de gourmets.
09:49Je planifie les menus avec Yvette. Généralement, je me charge des courses. Je parcours les marchés,
09:56des matinées entières en quête des ingrédients nécessaires. Le restaurant en soi devient rapidement
10:03le centre de mon existence. Il me confère à la fois dignité et statut. Plus j'aime mon restaurant
10:11et plus je m'attache à Yvette, tant elle fait intégralement partie de lui. Je connais enfin
10:20le vrai bonheur. Et puis, la tragédie frappe sans crier gare. Yvette se plaint de mots divers. Le soir,
10:35elle est épuisée. Je lui conseille de voir un médecin, mais son sens de l'économie est tel qu'elle répugne
10:42a dépensé en honoraires médicaux. Elle n'accepte de suivre mon conseil que le soir où elle tombe en
10:49syncope dans la cuisine. Elle revient de la clinique faisant grise mine, assez secouée. Je l'interroge.
10:57Voyons, que dit le médecin ? Son poids excessif a entraîné une mauvaise circulation dans les artères
11:05coronaires qui se compliquent d'un début de diabète. Le médecin prescrit une diète rigoureuse.
11:12Yvette a voulu s'insurger. « Vous n'avez pas le choix ! » lui a-t-il répondu. « Ou suivre un régime, ou mourir ! »
11:21Et c'est là que notre vie va basculer.
11:26Fils bien né d'une bonne famille, le narrateur, gastronome émérite, a épousé une cuisinière
11:42modeste, mais de génie, prénommée Yvette. Il raconte son histoire alors qu'il est en prison.
11:49Leur vie a basculé le jour où Yvette est rentrée à la maison après que le médecin lui ait
11:55prescrit un régime draconien.
12:01Yvette est une femme résolue. Une fois convaincue de la nécessité de suivre un régime,
12:09elle s'attaque au problème avec un courage et une volonté de faire. Elle ne déguste plus
12:15la vie chissoise quand elle la prépare, ne glisse plus jamais dans sa bouche un morceau
12:20de tarte du plateau. Elle perd rapidement du poids d'une manière phénoménale. Au bout
12:27de quelques mois, elle n'a plus rien de la grosse femme joviale et bonne vivante que
12:31j'ai épousée. Son corps est devenu mince et ferme, son visage désenflé et d'un
12:37ne valent parfait. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'elle est belle. L'expression « bien
12:43faite » conviendrait mieux. De toute manière, on la remarque, car, privée de son intérêt
12:50pour la nourriture, elle se met à s'intéresser à son aspect jusque-là négligé. Elle porte
12:56à présent des gaines, se coiffe avec soin et devient même une adepte du maquillage.
13:05Mes amis, naturellement, me félicitent de ce changement, mais je m'aperçois bientôt
13:12qu'ils viennent de plus en plus rarement chez Yvette. Tout simplement parce que ma femme
13:17est devenue indifférente à la préparation de ces plats qui ont fait la renommée de notre
13:23restaurant. Pour la remplacer, elle a engagé un chef au talent plus que médiocre, et son
13:32contrôle se limite à s'assurer qu'il prépare le menu du jour avec le maximum d'économie.
13:41Tous ces changements, dans l'apparence d'Yvette, s'accompagnent d'une modification complète
13:47de sa personnalité. Elle a toujours été économe, mais voici qu'elle fait preuve à
13:53présent d'une lamentable mesquinerie. Tenez, elle remplace par des champignons en
13:59boîte les frais indispensables à certaines préparations. Elle n'hésite pas à mettre
14:04du foie de porc dans le pâté de foie gras, ou, plus terrible encore, accommode les légumes
14:11à la margarine. Les protestations restent sans effet. Bientôt, elle se met à réduire
14:19les portions et à éliminer, un à un, les plats exigeant une longue préparation ou des
14:26ingrédients coûteux.
14:29Yvette ne s'inquiète en aucune façon de voir notre clientèle diminuer. Délaissant la
14:34cuisine pour la caisse, elle commande une étude sur les goûts d'un autre type de clientèle.
14:41touriste au palais barbare, employés et dactylos des bureaux du quartier, habitant des grands
14:48ensembles voisins. Le restaurant ne sert bientôt plus que des salades, des sandwiches, et affiche
14:58un menu express pour hommes d'affaires. Inutile de dire que nos rapports personnels se détériorent
15:08rapidement. Yvette, auparavant, s'en remettait à mes avis, et je la croyais heureuse d'avoir
15:15rencontré un mari au goût raffiné d'une situation sociale supérieure. Mais à présent,
15:20je ne lui sers plus à rien. Elle ne me fait plus confiance pour le marché et se charge
15:25elle-même de faire les courses. Notre mariage est en train de se désintégrer. Ma femme n'est
15:33plus ni souple ni docile. Au moment de se coucher, elle est généralement trop fatiguée
15:41par son travail de la journée et son régime rigoureux pour répondre à mes avances. Et
15:47dans les rares occasions où elle y répond, elle a tendance à être brutale et exigeante,
15:55allant même jusqu'à critiquer mes prouesses viriles. Bientôt, mon affection pour elle
16:04se change en haine. Je ne peux plus supporter son petit regard d'épervier. Ses yeux qui
16:12autrefois semblaient joyeux dans leur repli de chair ont maintenant une lueur rapace.
16:18« Mais, voyez-vous, madame, monsieur, tous ces défauts seraient supportables si la nourriture
16:26ne devenait pas simultanément exécrable. » Yvette fait preuve d'un véritable fanatisme
16:34en matière de régime. Telle l'ivrogne repentie, elle cherche à se reconvertir avec le zèle d'un
16:42croisé. La pièce que je m'étais réservée jusque-là pour réunir mes amis gourmets,
16:48est à présent transformée en salle de bar. Et puis, Yvette fait bien pire que ça.
16:57Elle me sermonne constamment à propos de mon intérêt excessif pour la nourriture, comme
17:03elle dit. Je n'ai plus droit désormais qu'au jus de carotte, au fromage blanc et aux flocons
17:08d'avoine. Que je me risque à les dédaigner et j'ai aussitôt droit à des remarques blessantes
17:13sur mon estomac soi-disant en expansion. Alors, je cesse de déjeuner ou de dîner
17:22chez moi pour partir en quête d'autres plaisirs gastronomiques. Sans grand succès, d'abord,
17:30je l'avoue, jusqu'au jour où je découvre le Coq d'Or et Germaine du Val. C'est un tout
17:40petit restaurant en sous-sol du côté de la soixante-dixième rue, un endroit minable
17:44devant lequel on peut passer cent fois sans le remarquer, mais où la cuisine est si raffinée
17:51que je crois de nouveau vivre un rêve. Germaine est encore plus grosse qu'Yvette lorsque je l'ai
17:59rencontrée, et je dois le reconnaître, de quelques années plus âgées qu'elle. Ses cheveux sont d'un
18:05incroyable blond oxygéné, mais ses joues sont rebondies comme des pommes et ses yeux bleus brillent de
18:14gaieté. Je ne peux pas vraiment dire que j'en tombe immédiatement amoureux, mais ce qui est sûr,
18:23c'est qu'une vraie sympathie née d'un intérêt commun s'établit entre nous. Au royaume de la
18:31gastronomie, Germaine est une prima donna qui sollicite les applaudissements d'un expert pour
18:38exploiter ses talents. Yvette, cependant, commence à se montrer difficile. Elle voit mes sorties d'un
18:48très mauvais œil. C'est elle qui tient les cordons de la bourse, et elle les tient nouées serrées. Bon gré,
18:56mal gré, quand je pourrais connaître une nouvelle fois le bonheur avec Germaine, je dois me contenter de
19:03la nourriture insipide de ma femme et de ses charmes déclinants. Yvette est bonne catholique, donc le
19:14divorce, hors de question. Il m'arrive de temps en temps de piocher dans la caisse pour passer une nuit
19:23avec Germaine, mais Yvette déploie un malin génie pour contrarier ses expéditions. Sans un sou en poche,
19:32je suis contraint de rester dîner à la maison. Est-il étonnant, je vous le demande, est-il étonnant
19:42dans ces conditions que mes pensées s'orientent progressivement vers le meurtre ? Comme vous avez
19:49pu le constater au fil de ce récit, je ne suis pas un homme violange. Je ne me suis jamais servi d'une
19:55arme à feu et la pensée d'utiliser un couteau ou tout autre objet coupant ou contondant m'impressionne
20:03énormément. Alors, alors je pense au poison, arsenic, cyanure. Mais comment administrer de
20:15tels produits sans laisser de traces ? Ou même comment les obtenir sans éveiller les soupçons ?
20:23Je remâche mon problème sans lui trouver de réponse jusqu'au jour où Yvette elle-même me fournit la
20:32solution que je cherche. Notre chambre a revêtu l'aspect d'une boutique d'apothicaires. Le dessus de la
20:40coiffeuse d'Yvette est couvert de peaux et fioles remplies de pilules et de comprimés pour maigrir.
20:46Parmi les dernières drogues apparues sur le marché, en vente libre au Mexique mais interdite chez nous,
20:52aux États-Unis, j'ai repéré la marque Yarubex. Une des amies d'Yvette lui a rapporté un pot de ces petits
20:59cachets blancs apparemment inoffensifs mais redoutables pour les diabétiques, selon un long article du New York
21:07Times. D'après le journaliste, ces petites pilules peuvent être mortelles, prises en quantité
21:13excessive. Je sais que, très en colère après avoir lu cet article, Yvette a négligé malgré tout de jeter
21:22ces pilules. Elle les a fourrées dans le fond du placard à pharmacie où, à la suite de patientes
21:30recherches, je finis par les découvrir quelques jours plus tard. Je les examine avec intérêt. Elles
21:38sont presque la réplique exacte de ces pastilles de saccharine qu'Yvette utilise quotidiennement.
21:47J'en verse aussitôt quelques-unes dans la boîte à saccharine d'Yvette, sans ressentir aucun sentiment de
21:54culpabilité, je l'avoue, tant la substitution se présente simplement. Le résultat ne se fait pas
22:03attendre. Deux jours plus tard, Yvette est morte. Je la trouve en rentrant un après-midi, étendue sur
22:13son lit, tout habillé. Après avoir vérifié que ni son cœur ni son pouls ne battent plus, je prends la boîte
22:21de pilule dans son sac, j'en vide le contenu dans les toilettes et la remplis à nouveau de saccharine.
22:27Enfin, je pose le flacon de Yaroubex sur la table de nuit et j'appelle la police. Un certain lieutenant
22:37Stevens est chargé de l'enquête. C'est un homme un peu frustre et assez soupçonné, mais il n'y a pas,
22:44il ne peut pas y avoir de preuve de forfait de ma part. Et l'affaire est bientôt classée.
22:53Les mois qui suivent sont très actifs. Je vends chez Yvette avec un coquet bénéfice et je passe
23:00mes soirées au coq d'or. Je récupère ainsi quelques-uns de mes amis et bien vite la clientèle
23:06du coq d'or grossit. Au bout d'une période raisonnable, Germaine et moi sommes mariés. Je
23:16goûte de nouveau à l'extase des premiers temps de mon mariage avec Yvette. Je devrais
23:24me douter que tout cela est trop beau pour pouvoir durer. Je vois Germaine arriver un jour
23:32les larmes aux yeux. Chéri, le médecin dit qu'il faut que je suive un régime.
23:41Monsieur, madame, si vous êtes une personne d'imagination, ce n'est pas la peine que je
23:48vous encombre l'esprit en vous racontant dans le détail la suite de mon histoire, n'est-ce
23:53pas ? Qu'il vous suffise de savoir que ma vie avec Germaine prend alors le même tournant
24:00désagréable que précédemment avec Yvette. Au fil des semaines, mon existence se transforme
24:08une seconde fois en cauchemar. Le même film se déroule tant Germaine et Yvette sont semblables
24:17dans leurs réactions. Et puis, naturellement, je rencontre Suzanne. Je me rends compte maintenant
24:27qu'il était complètement stupide de ma part d'employer deux fois de suite la même méthode
24:33d'assassinat. Je peux évidemment avancer pour ma défense. Le fait que la tentation de répéter
24:40un crime parfait est irrésistible. Et puis, comment pouvais-je savoir que le lieutenant Stevens
24:48venait d'être muté dans le quartier où j'habite à présent ? Tant pis. Je me console
24:56en pensant que le condamné a en principe le privilège de choisir son dernier repas. Il y a
25:05entre autres un plat qui est décrit par Alexandre Dumas et que je n'ai jamais goûté. Mais peut-être
25:12trop d'attendre de la nourriture d'une prison. Non, quelque chose de plus simple fera aussi
25:19bien l'affaire. Une omelette au kirsch, par exemple. La préparation n'en est pas compliquée.
25:24Je peux d'ailleurs donner la recette. Six œufs, une pincée de sel, trois cuillérées à soupe de sucre.
25:30Ah, oui, non. Je vois que votre intérêt décroît. Très bien, madame, monsieur, très bien. Nous
25:41discuterons de ces détails un peu plus tard.
25:45Vous venez d'écouter Au cœur du crime, un podcast issu des archives d'Europe 1. Réalisation,
25:58Julien Tarot. Production, Estelle Lafon. Patrimoine sonore, Sylvaine Denis, Laetitia Casanova et Antoine
26:05Reclu. Au cœur du crime est disponible sur le site et l'appli Europe 1. Écoutez aussi l'épisode
26:14suivant en vous abonnant gratuitement sur votre plateforme d'écoute.
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