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  • il y a 6 semaines
Dr Agnès Ricard-Hibon, médecin urgentiste, présidente honoraire et porte-parole de la Société française de médecine d'urgence est l'invitée de 6h20.
Retrouvez les invités de 6h20 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter

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Transcription
00:00C'est normal que tu souffres, c'est hormonal, mais non, t'as pas mal, c'est dans ta tête.
00:05Combien de femmes ont déjà entendu ce genre de phrases ?
00:07Leur douleur est souvent minimisée par rapport à celle des hommes,
00:11y compris de la part de médecins, ce qui conduit à des retards de diagnostic pouvant être lourds de conséquences.
00:16D'où la création des états généraux de la douleur des femmes.
00:20Et en ce lundi, journée mondiale contre la douleur,
00:23ils lancent une plateforme pour recueillir des témoignages.
00:25Bonjour Agnès Ricaribon.
00:27Bonjour.
00:27Vous faites partie du comité d'experts de ces états généraux, vous êtes médecin urgentiste,
00:32présidente honoraire et porte-parole de la Société française de médecine d'urgence.
00:36Le fait que les douleurs des femmes soient sous-estimées, c'est vieux comme le monde ?
00:39Alors ça fait très longtemps et c'est dommage parce qu'on a les moyens de les traiter.
00:44Pourquoi laisser les femmes souffrir alors que ça entraîne des retards diagnostiques ?
00:49L'exemple de l'infarctus du myocarde, il y a une augmentation de la mortalité chez la femme
00:53parce qu'elle est parfois minimisée, parfois non reconnue et en plus ça favorise les douleurs chroniques
01:00avec un vrai impact sociétal par la suite.
01:03Donc il ne s'agit pas forcément de douleurs spécifiques aux femmes, ça peut être des douleurs partagées par les hommes et les femmes
01:08mais il n'y a pas le même diagnostic, pas le même regard, pas le même vécu ou ressenti de la part des gens qui en souffrent.
01:15Tout à fait. Par exemple, l'infarctus du myocarde, un garçon va appeler le 15 très vite et va être pris en charge rapidement
01:22alors qu'une femme va dire « je vais attendre, je vais voir, ça va peut-être passer, je vais supporter ».
01:28Et c'est vrai que c'est sociétal, il y a des conséquences majeures
01:32puisque c'est une mortalité, chaque minute compte dans l'infarctus du myocarde
01:36et il y a des études qui ont très clairement démontré qu'il y avait une augmentation de la mortalité chez la femme
01:41parce qu'elles appellent plus tard, parce que ça va passer, parce qu'on ne veut pas se sentir faible ou stigmatisé
01:50et ça doit changer. Franchement, ça doit changer.
01:53Et on entend souvent dire que les femmes sont plus résistantes que les hommes à la douleur. C'est une idée reçue ?
01:58C'est une idée reçue, mais là aussi c'est parce qu'elles vont minimiser, parce qu'elles ne veulent pas être stigmatisées,
02:07parce que pendant longtemps on a dit « c'est normal d'avoir mal quand on a ses règles ».
02:13Non, en 2025, ce n'est pas normal d'avoir mal parce qu'on a les traitements qui permettent de soulager.
02:19Donc pourquoi ça existe encore aujourd'hui ? C'est parce que les femmes ont intériorisé tout cela ?
02:23C'est ça ce que vous nous dites ? Et qu'elles ont intégré la chose et qu'elles minimisent leur douleur ?
02:27Donc il y a une forme d'autocensure, c'est ça ?
02:29Il y a une autocensure et puis il y a une absence de reconnaissance de la douleur par les professionnels soignants également
02:35qui ont aussi tendance à ne pas le reconnaître à sa juste valeur.
02:41C'est multifactoriel, ce poids de l'histoire sur beaucoup d'études ont été faites plutôt pour les corps masculins,
02:53pas forcément les corps féminins, et parce que c'est très ancré dans la société que la femme résiste mieux à la douleur
03:01et que c'est sociétal.
03:05Et dans la formation des médecins aujourd'hui pendant leurs études, le sujet est abordé ou pas du tout par exemple ?
03:11Alors dans la formation des médecins, le sujet de la douleur est un peu en retrait par rapport au traitement de la pathologie.
03:19Les soignants sont un peu mieux formés à la douleur que nous le sont les médecins.
03:24Et le médecin se concentre sur traiter la maladie, mais pas forcément toujours le symptôme.
03:29Et on manque de recherche chez la femme, on manque de données également, de données scientifiques sur la douleur des femmes.
03:39Alors qu'on a les traitements qui s'appellent.
03:41Ça veut dire que les labos non plus ne participent pas à ce changement de société.
03:46Alors c'est pour ça que vous lancez aujourd'hui une plateforme qui s'appelle douleurdesfemmes.com.
03:51Elle s'adresse à qui ?
03:52Alors elle s'adresse au grand public, déjà aux femmes, pour qu'elles témoignent.
03:57C'est en quatre phases.
03:58Il y a d'abord les témoignages, ensuite on va aller en région pour identifier les solutions avec les professionnels de santé,
04:04une restitution des recommandations auprès de nos pouvoirs publics,
04:10et une grande campagne de sensibilisation de façon à ce qu'on améliore.
04:14Il y a des possibilités d'améliorer les choses,
04:18et c'est important d'emporter l'ensemble de la population et des pouvoirs publics.
04:24Donc ça c'est la première étape à cette plateforme.
04:26Donc c'est pour les femmes, mais pas qu'eux.
04:27Les hommes aussi peuvent participer, c'est ça ? Les proches, les médecins ?
04:31Oui, tout le monde peut participer.
04:32L'objectif c'est d'avoir des témoignages.
04:33Pour raconter une souffrance par exemple de son épouse ou de sa soeur.
04:37Ça fait partie des témoignages importants.
04:39montrer l'ampleur du problème qu'on a en France sur ce sujet.
04:44Et alors qui va recueillir ces infos ? C'est vous le comité d'experts ?
04:47Il y a le comité d'experts qui va les analyser, on va les utiliser,
04:51mais l'objectif surtout c'est de proposer des solutions.
04:55Et il y en a, beaucoup des solutions.
04:57Vous avez déjà des pistes ?
04:58Avant même de rédiger ce livret qui sera remis au ministre de la Santé dans quelques mois ?
05:02Ça fait 20 ans que je travaille sur la douleur en général en médecine d'urgence.
05:06Donc oui, on a des pistes et on sait que le traitement de la douleur,
05:10c'est ce qu'on appelle multimodal, ça associe, il n'y a pas un traitement.
05:14Souvent on en associe plusieurs en fonction des pathologies
05:17et de l'intensité des symptômes rencontrés.
05:20Mais pour que ça fonctionne, il faut que ce soit partagé
05:24avec des professionnels, avec les gens de la société civile,
05:28avec les associations qui s'occupent des douleurs chez la femme.
05:31Donc ça veut dire mieux former les médecins ?
05:33Ça veut dire développer davantage de centres contre la douleur en France ?
05:36Il y en a 270 aujourd'hui, il paraît, qui sont débordés, c'est vrai ?
05:39Oui, c'est vrai, mais ce n'est pas mieux former que les médecins.
05:42Il faut mieux former les soignants en général en équipe pluridisciplinaire,
05:47mais mieux sensibiliser et former la population,
05:49de façon à ce que les femmes ne minimisent pas la douleur
05:52et que l'entourage aussi le prenne vraiment en compte à sa juste valeur.
05:57Donc la première chose, c'est de libérer la parole.
05:59Il faut oser le dire, quand on souffre, ce n'est pas normal.
06:01C'est ça.
06:02C'est tout à fait ça.
06:02C'est vraiment le message le plus important à passer.
06:04Merci beaucoup Agnès Récari.
06:07Vous êtes donc médecin, porte-parole de la Société française de médecine d'urgence
06:11et vous faites donc partie du comité d'experts de ces états généraux
06:15de la douleur des femmes.
06:16Et pour la plateforme qui est lancée aujourd'hui, c'est tout simple,
06:18ça s'appelle douleurdesfemmes.com
06:20C'est tout simple, c'est tout simple, c'est tout simple.
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