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Anne Fulda reçoit Julia Clavel pour son livre «L’âme de fond» dans #HDLivres

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Transcription
00:00Bienvenue à l'heure des livres, Julia Clavel.
00:03Alors on est ravis de vous recevoir parce que vous êtes primo-romancière, comme on dit,
00:07et c'est quelque chose qui est toujours appréciable.
00:11Vous travaillez, vous avez écrit ce premier roman,
00:14mais vous êtes aujourd'hui, comme il est écrit en quatrième de votre livre,
00:17au comité exécutif d'un grand groupe français spécialisé en santé mentale.
00:21Une précision qui peut avoir son importance, étant donné le livre que vous avez écrit.
00:26Vous avez été aussi conseillère économique auprès du président de la République et du Premier ministre.
00:32Et votre premier roman a un très joli titre, ça s'appelle L'âme de fond.
00:37L'âme comme en deux mots.
00:39C'est publié aux éditions de l'Observatoire.
00:41Alors c'est une espèce de roman d'anticipation qui en fait pose une question.
00:47En fait, si ce mal-être assez fort et croissant des gens,
00:53et particulièrement peut-être des populations occidentales,
00:55n'étaient pas le symptôme finalement d'une société qui va mal.
01:00C'est un peu la question en filigrane de votre livre.
01:03Alors ce qui est amusant, c'est que, étant donné votre parcours,
01:07on aurait pu se dire que vous écriviez sur autre chose,
01:10même si l'un des personnages de votre livre est un ministre de la Santé.
01:16Comment ce sujet s'est imposé à vous ?
01:20Pour être tout assez franche, moi j'ai toujours écrit, et j'ai toujours écrit de la fiction.
01:23Je suis une lectrice de fiction, j'ai toujours eu plaisir à lire vos biographies,
01:27mais dans l'absolu, j'aime lire le roman et je suis assez persuadée que pour le coup,
01:31le roman a, pour faire passer des idées, une force que n'ont pas les autres types de littérature.
01:37On incarne mieux les choses et je pense que l'homme, comme en politique, finalement,
01:41est fait d'affect et on ne le convainc jamais, on ne l'intéresse jamais autant
01:44qu'en parlant à ses émotions.
01:45Donc d'une part, j'ai toujours eu cette idée que si on voulait véhiculer quelque chose,
01:49la littérature était, je trouve, l'outil le plus intéressant.
01:53Par ailleurs, à titre professionnel, comme vous le mentionnez,
01:56j'ai eu la chance de passer quatre ans à l'Elysée et à Matignon,
02:00notamment pendant la période du Covid.
02:01et donc, par nature, ça a nourri pour moi, surtout dans l'après-coup,
02:06beaucoup de réflexions sur le rapport entre la société et la vérité,
02:11entre la société et le danger, entre la société et la politique.
02:17Donc tout ça avait un peu immergé dans ma tête,
02:20mais un petit peu de temps d'ailleurs à ressortir sous la forme d'un livre.
02:23Et puis à titre très personnel, j'étais un peu de celle,
02:26d'ailleurs on le retrouve dans des personnages du roman,
02:28qui n'avaient jamais consulté de psychologue dans ma vie,
02:30avec l'idée non pas que j'allais mieux que les autres,
02:32mais que je me connaissais bien,
02:35je ne pouvais pas exercer notre réflexion comme une grande.
02:38Et puis un peu par une suite de hasard,
02:39j'ai eu l'occasion de rencontrer une psychologue
02:40et en fait j'ai découvert un monde,
02:43et puis une théorie, une réflexion d'ailleurs,
02:45que je trouvais extrêmement forte.
02:47Et en fait c'est la rencontre de ces trois sujets,
02:49le goût pour la fiction,
02:50la réflexion, on va dire, sociétale,
02:52que j'avais eu l'occasion de mener dans ma vie professionnelle,
02:55et puis cet intérêt pour ce sujet de la psychologie
02:57qui a fait émerger assez naturellement la problématique.
02:59Alors dans votre livre, on retrouve quatre personnages,
03:03dont effectivement une qui est le personnage central pivot,
03:07dirons-nous, Caroline, qui est psychologue,
03:11et qui est trois de ses patients,
03:14qu'on retrouve Adrien, avocat brillant,
03:19Michel, qui est ministre de la Santé,
03:22et Sophie, mère au foyer.
03:24Alors pourquoi ce choix, cet échantillon,
03:26est ce choix de la narration,
03:28où il y a les échanges entre eux,
03:30et puis des coups de projecteur sur leur vie aussi ?
03:35– Tout à fait, l'âme de fond a une construction
03:37un peu particulière,
03:39qui se coupe en deux parties,
03:41puisqu'on suit, comme vous le disiez très justement,
03:42les personnages à la fois dans leur vie
03:44par une narration très classique,
03:46qui permet pour moi de vraiment apprendre à les connaître,
03:48d'être dans leurs chaussures,
03:50si vous me permettez l'expression,
03:51et de rentrer dans leur intimité.
03:53Et en parallèle, on suit aussi les échanges
03:55qu'ils vont avoir avec ce personnage, Caroline,
03:57qui est leur psy à tous les trois,
03:58et qui permet de mettre quelque part en exergue
04:00ce qu'ils disent et ce qu'ils disent pas
04:02à leur psy,
04:04et donc la réalité de ce qu'ils assument,
04:05ce qu'ils n'assument pas,
04:06ce qu'ils ressentent, ce qu'ils ne ressentent pas,
04:07et qui place aussi le lecteur dans un autre format,
04:10puisqu'il devient spectateur de cet échange.
04:12Moi j'ai choisi ces quatre personnages,
04:14parce que l'idée, comme vous l'avez peut-être compris,
04:16dans mon objectif,
04:17c'était de, via la petite histoire,
04:20enfin c'est-à-dire les petites histoires,
04:21celles de quatre personnages,
04:23qui sont chacun à des moments assez charnières
04:26de leur vie pour des raisons différentes,
04:28ça racontait la grande histoire,
04:30celle d'une société qui est de plus en plus violente,
04:33avec de plus en plus d'instructions contradictoires,
04:35de moins en moins de repères,
04:36et puis assez peu de place finalement
04:38pour la fragilité, pour la vulnérabilité.
04:40Et donc je voulais que ces personnages,
04:42malheureusement on ne peut jamais représenter
04:43dans un seul roman l'intégralité
04:45du panel des difficultés humaines,
04:47entre guillemets,
04:48mais que chacun expérimente
04:50un type de difficulté particulière.
04:52Donc Adrien, il a plutôt des difficultés
04:53dans ses relations amoureuses,
04:54c'est quelqu'un, c'est un personnage
04:55qui est assez dur en surface,
04:57mais qui en réalité a été très marqué
04:58par l'abandon de sa mère,
04:59et il a beaucoup de mal à se lier amoureusement,
05:02et on va dire un peu à se laisser aller
05:03dans les relations sentimentales.
05:05C'est plutôt sur ce volet-là
05:06qu'on va l'explorer.
05:06Sophie, c'est une mère au foyer
05:10qui vient d'un milieu très modeste,
05:12qui est un peu transfuge de classe
05:13par la volonté et par le mariage,
05:16et qui maintenant,
05:16qu'elle se retrouve dans la situation,
05:17enfin qu'elle s'est hissée un peu
05:19dans une situation très favorable,
05:21elle est mariée à un énarque
05:23qui fait une très belle carrière,
05:24elle a deux enfants, etc.
05:25Elle se rend compte qu'en réalité,
05:27rien de tout ça lui appartient vraiment,
05:29et elle est un peu interrogative
05:31sur si c'est vraiment ça qu'elle voulait,
05:32et en même temps,
05:32elle n'a pas forcément le courage
05:33de se réinventer,
05:34donc c'est plus le rapport à soi,
05:37à son évolution,
05:38au fait de grandir aussi.
05:39Et puis le dernier, Michel,
05:41c'est un haut fonctionnaire,
05:42très intègre,
05:43Sévenol, pardon je dis ça,
05:44mon père est Sévenol,
05:45donc je peux me permettre de le dire,
05:46assez austère,
05:47mais avec un rapport très fort à la morale,
05:49et qui se retrouve ministre de la Santé,
05:52un peu par le hasard
05:53d'une intérance politique,
05:54on sait que ce sont des choses
05:55qui peuvent arriver,
05:57et qui va découvrir la brutalité
05:59du monde politique,
06:02les compromis un peu permanents,
06:03et se retrouver face à une vraie crise
06:04de conscience dans le cadre
06:05de cette épidémie
06:06sur laquelle on se questionne
06:08un peu tout au long du roman,
06:10et ça me permettait aussi,
06:11d'une part,
06:12de plutôt confronter
06:13au monde professionnel
06:14et au rapport au travail,
06:16et aussi, bien sûr,
06:17comme j'ai un peu d'expérience,
06:19j'ai vécu un peu cet environnement,
06:21de donner aussi au lecteur
06:22un peu de contenu à cet écart.
06:25Oui, parce qu'alors,
06:26sans dévoiler l'intrigue,
06:28Caroline,
06:28donc la psychologue,
06:30découvre qu'étonnamment,
06:31un certain nombre de ces patients
06:33décèdent.
06:34Donc,
06:35elle s'interroge,
06:37elle commence à mener l'enquête,
06:38et effectivement,
06:39sur ce qui,
06:40d'une certaine façon,
06:41ressemble à une forme d'épidémie.
06:43Tout à fait,
06:44et vous avez raison,
06:45les personnages sont,
06:46les quatre personnages principaux,
06:47mais c'est elle,
06:48le personnage central,
06:49puisque Caroline,
06:50c'est une jeune psy,
06:51elle est très investie,
06:52elle est très rigoureuse,
06:54elle a perdu son papa
06:54qui s'est suicidé
06:55quand elle était très jeune,
06:56et elle a fait un peu
06:57de cette blessure
06:58une forme de vocation
06:59et elle va avoir,
07:00dès le tout début du livre,
07:01donc c'est facile de le dire
07:02sans spoiler la fin,
07:04découvrir un certain nombre
07:06de morts dans sa patientèle,
07:07donc de patients
07:08qui ne reviennent pas,
07:09dans des circonstances
07:10un peu étranges,
07:10des gens qui n'avaient pas de raison,
07:12qui étaient plutôt
07:13en bonne santé,
07:13etc.
07:14Et ça va réveiller
07:15quelque chose en elle
07:16et ça va tourner un peu
07:16à l'obsession
07:17et elle va se lancer
07:18dans cette espèce d'enquête
07:19dont on va se demander
07:20un peu une bonne partie
07:21du roman
07:21si c'est elle
07:22qui projette ses angoisses
07:24et en fait il n'y a rien
07:25ou si en réalité
07:27elle a raison
07:27et qu'il y a peut-être
07:29quelque chose
07:29de lié au fait
07:30que tous ces patients
07:31avaient des problématiques
07:32fortes dans leur vie
07:32et que leur mort
07:34n'est pas vraiment un hasard.
07:36Et on va le suivre
07:36à travers son enquête à elle
07:37et puis à travers
07:38les personnages
07:39qui eux-mêmes
07:39sont un peu
07:40sur une ligne de crènes.
07:42Oui, ce qu'elle peut se demander
07:43c'est s'il n'y a pas
07:43une lame de fond
07:44parce que là
07:45on peut jouer
07:45sur le titre
07:47qui est l'âme
07:48elle, c'est une personne
07:50qui scrute
07:51le fond des âmes
07:52qui tente en tout cas
07:53et il y aurait peut-être
07:55une forme de lame de fond
07:57telle une vague puissante
07:58qui submerge la société
08:00en fait.
08:01C'est tout à fait ça
08:02et c'est effectivement
08:03le jeu de mots du titre
08:04la lame de fond
08:06c'est un phénomène naturel
08:07qui va se faire au loin
08:08et puis qui va être
08:09tout à fait imperceptible
08:10au début
08:10qui va prendre de la force
08:11de la vitesse
08:11et puis au moment
08:12où elle s'abat
08:13elle emporte un peu tout
08:14dans son passage
08:15et l'idée qu'on suit
08:16c'est que peut-être
08:16qu'il se passe dans les âmes
08:18pardon le mot est un peu fort
08:19mais ce genre de phénomène
08:21souterrain
08:22et qu'au moment où il s'abat
08:23il est peut-être déjà
08:23un peu trop tard.
08:25En tout cas
08:26c'est vraiment très intéressant
08:27une question
08:27puisque c'est votre premier roman
08:28vous travaillez déjà
08:30sur un deuxième ?
08:31Tout à fait
08:32pour être tout à fait franche
08:33j'ai toujours écrit
08:35c'est le premier
08:35qui passe la barrière
08:38de le faire lire
08:38à des humains
08:39non captifs
08:41on va dire
08:42mais j'ai continué à écrire
08:43je me suis un peu astreinte
08:44à écrire un peu moins
08:46pendant la période
08:46de relecture
08:48et de lame de fond
08:48pour lui donner
08:49tout son potentiel
08:50mais j'ai déjà
08:51un sujet
08:52très différent
08:53mais toujours avec
08:53cette dimension sociétale
08:54que je commence
08:56dans les moments
08:56d'interstice
08:57à griffonner.
08:59Alors en attendant
08:59ce deuxième roman
09:01je vous conseille
09:01vraiment de lire
09:02L'âme de fond
09:03donc c'est paru
09:04aux éditions de l'Observatoire
09:05merci beaucoup Julia Clavel
09:07Merci à vous
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