00:00Et Bernard Hinault, me direz-vous, il n'était pas au Tour des Flambres.
00:04Mais il sera au départ de Paris-Roubaix, après avoir été donné un autre départ, celui du Tour d'Amérique.
00:11La forme est bientôt là, le Tour du Midi-Pyrénées, où nous le retrouvons ici en témoigne.
00:18Ici précisément, nous sommes sur les pentes du col de Manté, qui rappelle de bien mauvais souvenirs à l'espagnol Luis Ocaña.
00:26Hinault gravit la difficulté en faisant la grande lessive.
00:28Personne n'a pu prendre le relais.
00:32Mieux, il a accéléré et accéléré, et bientôt au commandement, seul le petit Jérôme Simon a pu rester dans son sillage.
00:39Hinault a voulu savoir où il en était, ses supporters sont rassurés.
00:43Il grimpe ici sur un 21 dents, les autres ont sur le 23.
00:46Il fait ainsi la différence en tirant du grand braquet dans les montées.
00:49C'est un indice que la forme revient peu avant le Tour d'Espagne.
00:52Hinault paraissait nerveux, irritable, mais nous l'avons retrouvé à Hoche, un soir d'étape, dans le bureau de l'un de ses conseillers, José Alvarez.
01:00Bernard Hinault, vous voici derrière un bureau.
01:03Est-ce déjà le profil d'une reconversion ?
01:04Non, je crois que ce n'est pas déjà le profil d'une reconversion.
01:09Je pense que ma place n'est pas derrière un bureau, mais plutôt ailleurs.
01:14Oui, précisément, on parle dans la presse d'une ferme que vous avez achetée à Dinan.
01:20C'est vers là que vous allez vous orienter, sans doute.
01:22Beaucoup plus, oui. Je pense que derrière un bureau, je n'ai jamais eu cette idée.
01:29Être dans la nature, je crois que ça a toujours été mon rêve.
01:34On vous sent un petit peu, non pas ici, derrière un bureau, mais enfin, en course peut-être,
01:39ou avec vos équipiers, avec tout le monde, avec les journalistes, un petit peu plus nerveux qu'à l'ordinaire, que les autres saisons.
01:44Est-ce précisément cette reconversion qui vous tient à cœur, ou c'est lié à d'autres problèmes ?
01:49Ça peut lier à beaucoup de choses. Je crois que les années se suivent ne se ressemblent pas toujours.
01:55Il est certain qu'il y a eu des problèmes, mais ces problèmes ne sont pas pour être évoqués ici.
02:01Oui, vous disiez toujours, moi, on s'occupe de mes affaires, moi, je n'ai pas de problème, je vis tranquille.
02:06Oui, quand je dis qu'il peut y avoir quelques problèmes, ce ne sont pas des problèmes vraiment de...
02:12Comment dire ?
02:14De reconversion, par exemple.
02:15De reconversion, ou de gestion d'affaires, ou de gestion financière, ce n'est pas du tout ça.
02:21Je pense que c'est d'autres problèmes qui ont une importance et qu'il faut régler, et qui, je pense, maintenant sont réglés,
02:27et c'est pour ça que peut-être que le coût de pédale revient.
02:30Oui, parce que chaque année, précisément, vous êtes l'homme des objectifs bien précis.
02:35Cette année, le premier objectif, c'est le Tour d'Espagne.
02:38Non ?
02:39Le premier objectif, c'est sûr, c'est le Tour d'Espagne, bien sûr, et après, il y a d'autres belles courses, donc le Dauphiné, le Tour de Luxembourg, le Tour de l'Aude et le Tour de France.
02:49Mais s'il est possible d'épingler une classique, on fera tout pour le faire.
02:53Mais vous avez l'air toujours d'être un petit peu fâché avec les classiques. Paris-Roubaix, par exemple. Rien n'est fait.
02:57Non, je ne suis pas fâché avec les classiques. Les classiques sont les classiques, mais c'est une course d'un jour, et il est très difficile de préparer une course d'un jour.
03:05On peut être le plus fort de ce jour-là et ne pas gagner.
03:08Alors qu'un Tour de France ou un Tour d'Espagne ou une course par étapes, c'est une course qui se déroule sur plusieurs jours,
03:13et on peut être médiocre un jour et être super bon le lendemain, donc renverser la vapeur complètement.
03:21D'une année à l'autre, bien entendu, on prend de l'âge.
03:24Est-ce que vous sentez véritablement dans le peloton que vous avez des années de plus ?
03:30On le sent un petit peu au début de saison, mais je crois que le métier fait beaucoup après et c'est là-dessus qu'on compense.
03:36Est-ce que vos jeunes équipiers, je pense à Jules, au Fignon, au Salomon, etc., viennent vous demander quelques conseils ?
03:44Ils me demandent des conseils et je leur donne des conseils sans qu'ils me le demandent.
03:47Je pense que c'est quand même un petit peu mon rôle maintenant.
03:50C'est vrai que je ne sois pas encore fini, je ne pense pas.
03:54Et j'essaye de faire en sorte que ce soit surtout l'équipe qui gagne.
03:59Lorsque vous étiez jeune, je veux dire jeune débutant, jeune professionnel,
04:03vous aviez un certain nombre d'attitudes un peu belliqueuses, etc., propres d'ailleurs à tout jeune.
04:08Est-ce que vous observez les mêmes défauts, si j'ose dire, entre parenthèses, chez les jeunes qui sont dans votre formation ?
04:14Il y en a, il y en a, comme dans toutes les équipes.
04:18Je pense qu'il faut avoir du tempérament pour gagner, autrement, ce n'est pas la peine de courir.
04:22Mais je crois qu'il faut, pour moi, mon rôle peut-être est de leur dire,
04:26bon, ça, il faut le dire, ça, il ne faut pas le dire, ça, il faut le faire, ça, il ne faut pas le faire.
04:30Je crois que c'est un petit peu, maintenant, avec une équipe comme nous avons actuellement,
04:33qui, je pense, est l'une des meilleures, mon rôle est un rôle de capitaine,
04:37et de faire attention à ce que tout le monde marche bien.
04:40Est-ce que vous admettez parfois que vous n'avez pas toujours raison ?
04:44Bien sûr que, je pense qu'on n'est jamais parfait,
04:47donc il y a toujours des moments où il faut savoir prendre et faire attention à ce qu'on fait.
04:53Donc, je crois que quand quelqu'un vous dit que vous n'avez pas raison, que vous avez fait ça mal,
04:58sur le coup, on n'est peut-être pas obligé d'accepter d'avoir fait mal,
05:02mais je crois qu'il faut réfléchir, et c'est surtout après, quand on est seul, qu'on réfléchit le mieux.
05:08Est-ce que vous quitterez les pelotons cyclistes sans regret ?
05:13Sans regret, je ne sais pas encore, mais une chose est certaine,
05:18c'est que j'ai préparé ma reconversion, et que le jour où je devrais arrêter,
05:21je pense que ce moment-là, j'arrêterai.