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  • il y a 4 jours
Cour d'appel de Caen - Audience de la cour d'assises du Calvados (Caen)

« Justice en France » filme un procès exceptionnel. Pendant deux jours, la cour d'assises du Calvados, à Caen, va examiner dans les moindres détails l'histoire d'un fils qui a tué son père. Lors d'un premier procès, l'accusé a été condamné à six ans de détention pour coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Le parquet, ayant estimé que cette peine n'était pas à la hauteur du crime commis, a fait appel. L'accusé risque 20 ans de réclusion criminelle.

LCP diffuse cette série documentaire en immersion au coeur de la justice française, présentée par le chroniqueur judiciaire Dominique Verdeilhan.
Une Coproduction France.tv Presse, Morgane Production et France Télévisions, avec la participation de LCP-Assemblée nationale.

Pour cette série documentaire, une première en France d'abord diffusée sur France Télévisions, les réalisateurs ont filmé des audiences pénales, civiles, commerciales ou prud'hommales dans les Tribunaux et Cours d'Appel de France, afin de faire découvrir au téléspectateur la réalité et le fonctionnement de la justice, sans artifice technique ni mise en scène.

A chaque moment clé des audiences, le journaliste Dominique Verdeilhan, ancien chroniqueur judiciaire, accompagné d'un magistrat et d'un avocat, vient expliquer les points de droit et de justice, en alternance des séquences réalisées au coeur de l'affaire.

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Transcription
00:00Bienvenue dans Justice en France.
00:14L'homme que vous allez découvrir dans un instant
00:16reconnaît avoir tué son père,
00:19sans jusqu'à présent avoir pu expliquer,
00:22justifier son geste.
00:24Pour ce parricide, il a été condamné
00:26en première instance à six ans de prison,
00:28considérant le verdict trop clément au regard des faits,
00:32l'accusation a fait appel, d'où ce second procès.
00:36Alors cette fois-ci, va-t-il parvenir à relater
00:39plus précisément ce qui s'est déroulé le soir du crime ?
00:43Expliquer la vingtaine de coups mortels
00:45constatés par le médecin légiste.
00:48Nous sommes donc devant la cour d'assises d'appel
00:51à quand les neuf jurés ont été sélectionnés
00:54et la présidente commence par interroger l'accusé
00:58qui comparaît libre.
00:59Bonjour à toutes et à tous.
01:25L'audience est ouverte.
01:26Nous pouvons nous asseoir.
01:35Alors si vous voulez bien vous avancer,
01:38monsieur à la barre, je vous prie.
01:41Alors aujourd'hui, monsieur, votre positionnement,
01:45est-ce que vous plaidez coupable ou non coupable ?
01:49Oui, je plaide coupable et je suis responsable du décès de mon papa.
01:54Je regrette énormément, je m'en voudrais tout le reste de ma vie.
01:58Depuis que le fait s'est passé, je passe un jour sans y penser.
02:02Lors de son premier procès, l'accusé a été condamné à six ans de prison
02:09pour couébler sur volontaire ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
02:15Le parquet a fait appel, donc remis en liberté.
02:19Il comparaît libre lors de ce second procès.
02:23Il va devoir à nouveau s'expliquer sur les événements de la soirée tragique
02:27qui s'est déroulé en 2020 et qui ont conduit au décès de son père.
02:33Âgé de 34 ans, l'accusé en cours, 20 ans de réclusion criminelle.
02:41Sur le banc des partis civils, le frère de la victime.
02:48Alors, monsieur, comme je l'ai dit,
02:51on va commencer par parler de la personne que vous êtes, de votre parcours.
02:56Comment vous étiez quand vous étiez petit ?
02:58Quels sont les souvenirs marquants de votre enfance ?
03:02Comment étaient vos parents ?
03:05C'était l'alcool, c'était la violence, c'était les insultes.
03:13Du plus loin que vous vous souvenez, c'était ça ?
03:16Oui, toujours, ça a toujours été.
03:18Et c'était de la part de qui, les insultes, les violences ?
03:21À mon papa qui tapait sur ma maman.
03:23Moi, j'ai été insulté, toute mon enfance, bon à rien.
03:30Mongols, t'étais moche, fils de pute, bâtard, tous les gros mots.
03:40Ce qu'on sait, c'est qu'au moment où les faits vont se produire,
03:44d'une part, votre mère était partie, après, je ne sais pas, 30 ans de vie commune.
03:48Vous étiez aussi, vous, dans une rupture et donc vous êtes arrivé chez votre père, on est d'accord ?
03:55Oui.
03:55Cet homme dont à la fois, vous dites, il m'a insulté, rabaissé, humilié, frappé depuis l'enfance,
04:03comment, en fait, vous êtes resté en lien avec lui pour arriver jusqu'à lui demander de vous héberger,
04:09finalement, à un moment où vous êtes...
04:11Parce que malgré tout, c'était mon papa et je restais très protecteur.
04:16Protecteur ?
04:16Oui.
04:17C'est-à-dire ?
04:19Je prenais soin de lui, j'y faisais à manger,
04:23je disais qu'il fallait qu'il aille se laver et tout, il se laissait y aller.
04:29Je faisais le ménage dans la maison aussi, tout le ménage.
04:32Il se détruisait, mais de plus en plus, et après le départ de ma maman, il serait encore plus détruit, de plus en plus.
04:43Ça faisait très mal de le voir comme ça.
04:45Et je ne pouvais pas le dire, je ne savais pas comment faire pour le dire.
04:51À partir de quel âge, vous-même, vous avez commencé à consommer de l'alcool ?
04:57J'ai commencé, je dirais, 13 ans.
05:0013 ans ?
05:00Oui, 13 ans.
05:01Avec votre père ?
05:04Non, pas avec mon père, 13 ans, avec des potes, des copains.
05:11Quel est votre degré d'instruction ? C'est-à-dire que vous avez arrêté l'école, finalement ?
05:16J'ai arrêté l'école en troisième.
05:17Troisième, donc vous n'avez pas eu de diplôme ensuite ?
05:20J'ai juste le brevet d'école, je sais tout.
05:22D'accord.
05:23Et est-ce que vous êtes dépendant de votre compagne pour tout ce qui est papier ?
05:27Non, non.
05:28Non ?
05:29Non, non, non, maintenant j'essaye de...
05:31Elle m'a fait voir, maintenant je me débrouille tout seul.
05:34Je ne vous ai pas demandé, avec elle, vous n'avez pas eu d'enfant ?
05:37Non, plus du tout.
05:38En revanche, vous avez un enfant, vous pouvez en parler, avec qui vous avez eu votre enfant ?
05:44Oui, avec mon ex que j'ai connu quand j'avais 20 ans.
05:50Alors, vous pouvez nous en dire un peu plus ?
05:53Mon fils, je l'ai vu jusqu'à l'âge de 3 ans et après, à l'âge de 3 ans, je n'ai plus eu de contact.
06:00Vous pouvez expliquer pourquoi ?
06:02À part ma faute aussi à moi, après je buvais, donc je ne voulais pas qu'il me voie dans ces états-là, aussi.
06:09Plutôt pour eux, plus pour sa sécurité.
06:12Qu'est-ce que vous en pensez de ça ? Qu'est-ce que ça vous fait ?
06:16De ne pas le voir, ça me fait mal, vraiment mal.
06:20Mais après, j'attends que toute mon histoire soit finie, pour après également reprendre contact avec lui.
06:28Ça me ferait très plaisir.
06:32Et vous avez décrit votre père, sa façon d'être à lui.
06:37Et votre mère, elle était comment ?
06:39Elle était plutôt... Elle était bien.
06:41Elle était bien, mais c'est qu'à cautionner tout ce qu'il faisait.
06:44Elle aurait dû partir bien avant, pour pas que son enfant voie ça, ses enfants.
06:51Et non, elle est toujours restée.
06:55Mais ça, je l'ai enlevé aussi, de ça.
07:00J'avais mon père tapé sur ma mère, j'étais tout petit, je ne pouvais rien faire.
07:03Moi, je me prenais autant, des insultes.
07:08Bon, très bien.
07:09Alors, vous allez rejoindre votre place pour l'instant, monsieur, si vous voulez bien.
07:12Et on va faire venir, donc, notre premier témoin, madame...
07:18Bonjour, madame.
07:24Vous êtes la sœur de l'accusé.
07:26Oui.
07:28Donc, est-ce que vous pouvez nous parler, tout simplement, de votre frère,
07:32de la personne que c'est, tel que ce que vous avez connu, de la personne de votre père ?
07:39Voilà, vous avez la parole librement.
07:41Mon frère, c'est que ça a toujours été quelqu'un de perturbé, entre guillemets, depuis tout petit.
07:53Donc, après, qu'est-ce que je peux vous dire ?
07:55Après, le week-end, oui, c'était un peu le désastre entre mon père et lui, à cause de l'alcool.
08:04Après, c'est des souvenirs que je n'ai pas envie de me rappeler du tout, donc...
08:13Je ne sais pas, posez-moi des questions, au pire.
08:15Préférez ?
08:16Oui, oui.
08:16Quand vous dites perturbé, est-ce que vous pouvez être plus précise ?
08:21Pour moi, il a toujours eu un problème dans sa tête, je trouve.
08:28Et je crois que, oui, il y a un psy, il ne lui aurait pas fait de mal.
08:33Vraiment.
08:35Quand il buvait, il n'aurait dit un psychopathe, quoi.
08:38Moi, j'en avais peur.
08:39Quand il buvait, mais peut-être qu'il y a un moment dans sa vie,
08:42enfin, on peut espérer quand même, où il n'a pas bu.
08:44Par exemple, vous, 10 ans, lui, 12 ans.
08:46Vous avez des souvenirs ?
08:47Non, c'est très vague, mais oui, on s'entendait bien, on jouait ensemble et tout.
08:51Mais c'est vrai, c'est vague.
08:54Donc, vous, surtout, vos souvenirs les plus vifs, c'est plus grand,
08:59quand il a commencé à boire ?
09:00Oui.
09:01C'est ça.
09:01Et qu'il a eu un comportement, vous dites, de psychopathe,
09:04c'est-à-dire qu'il pouvait être très violent ?
09:07Oui, ben oui.
09:09Il y a des fois, je ne le reconnaissais pas.
09:12Donc, oui, il me faisait peur.
09:15Il faisait peur aussi à ma mère, à mon père.
09:21Vous confirmez ou pas que votre père était lui-même quelqu'un de très particulier, on va dire ?
09:31C'est-à-dire ?
09:31Ben, violent aussi, et avec son problème d'alcool aussi.
09:36Oui, il avait des problèmes d'alcool, oui, c'est sûr.
09:38Mais est-ce que vous faites un...
09:39Est-ce que c'est pareil ?
09:41Est-ce que vous diriez que votre frère ressemble à votre père ou ressemble plein ?
09:44Non.
09:44En quoi ils étaient différents ?
09:46Ben, à mon père, de mes souvenirs, quand il buvait, il était calme, il était posé dans son canapé, il dormait.
09:52Mais dès que j'avais mon frère, il fallait tout le temps qu'il y ait des ventes pour lui.
09:57Et les violences sur votre mère ?
09:59Oui, il a eu des violences sur ma mère quand j'étais petite, oui.
10:01Donc ça, c'était quand même pas lié à la présence de votre frère ?
10:04Non, non, non.
10:06Ah oui, il a été violent, ça, c'est sûr.
10:07Je n'ai pas de mon frère.
10:09Mais vous ne diriez pas de votre père qu'il vous faisait peur et qu'on aurait dit à un psychopathe ?
10:13Vous ne diriez pas dit ça de lui ?
10:14Non, mon père ne faisait pas peur.
10:23Vous avez appris par votre frère le décès de votre père.
10:29C'est lui qui vous a envoyé un message ?
10:32Oui.
10:33Tu sais que papa est mort.
10:35Oui.
10:35Le lundi soir, est-ce que vous avez eu l'occasion d'entendre de la bouche de votre frère en face à face ce qui s'était passé ?
10:44Oui, quand j'ai appris ça, je suis parti voir ma mère et il y avait mon frère, justement.
10:50Je me rappelle, il y avait des scellés partout sur les portes.
10:52Et on avait bu un café et puis c'est là que lui, il nous avait expliqué qu'il était parti à ***, qu'il s'était fait taper par des gars.
11:01Et c'est comme ça qu'il était décédé, entre guillemets.
11:04Il vous a dit que votre père avait été agressé à l'extérieur ?
11:08Voilà.
11:08C'est ça.
11:09D'accord ?
11:11Alors, il savait très bien que c'était lui.
11:14Bon, voilà.
11:14Vous avez dit, je suis en code D484.
11:24J'espère savoir très vite si c'est mon frère ou pas.
11:27Pour ma part, je n'ai plus de père, mais je n'ai plus de frère non plus.
11:32Ce que vous aviez dit dès le départ.
11:38On vous remercie, madame.
11:39Merci.
11:40Au revoir.
11:40Au revoir.
11:45Donc, on va entendre madame ***.
11:56Bonjour, madame.
11:57Bonjour, madame.
11:58Donc, madame, vous allez prêter serment de parler sans haine et sans crainte,
12:03de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.
12:07Vous levez une main et dites, je le jure, s'il vous plaît.
12:09Je le jure.
12:10Merci.
12:11Bon, donc, vous êtes la compagne actuelle de monsieur.
12:15Qu'est-ce que vous pouvez nous indiquer sur sa personnalité ?
12:19Avant, moi, quand je l'ai rencontré, c'était une personne qui était dans une famille toxique
12:23où il n'y avait que de l'alcool.
12:24Donc, moi, quand je l'ai connu, j'ai essayé de le sortir de ça.
12:29Donc, c'était très difficile parce que le papa était toujours dedans.
12:33Donc, à chaque fois, il retournait dans sa famille parce qu'ils avaient besoin de lui.
12:37Donc, moi, j'ai essayé de le sortir d'un côté et de l'autre côté, la famille le remettait dans ce milieu.
12:43Et donc, après tout ça, après cette histoire qu'il y a eu, c'est plus le même.
12:49Il touche qu'une goutte d'alcool.
12:50C'est plus le même garçon, quoi.
12:55Finalement, ce qui s'est passé entre lui et son père, ça ne vous a pas fait peur ?
13:01Non, ça ne m'a pas fait peur parce que moi, je le connais.
13:04Et puis, je sais qu'avec moi, il n'y a pas de problème.
13:09Et pourquoi il n'y a pas de problème avec vous ?
13:11Je suis tout pour lui, quoi.
13:13Je suis son père, je suis tout.
13:14J'ai appris beaucoup de choses.
13:16Je lui ai toujours donné l'amour qu'il n'a jamais reçu.
13:19Donc, c'est vrai que moi, moi, non.
13:21Moi, il ne fera jamais de mal.
13:22Il n'a jamais levé la main sur vous ?
13:23Non, jamais.
13:26Il a peur de vous ?
13:28Je ne sais pas, il faut lui demander.
13:31Non, il y a de la pression qu'il vous donne.
13:33Non, je pense qu'il me respecte.
13:36Il ne fera pas de mal, il me respecte.
13:38Et quand vous dites que vous lui avez appris des choses, c'est quoi ?
13:42J'ai appris, déjà, à s'exprimer, à ne pas garder tout pour lui,
13:49à avoir confiance en lui,
13:52des choses à faire et à ne pas faire.
13:56Une forme d'éducation, on va dire.
14:00Il n'y avait aucun repère.
14:03Le repère, c'était parler mal poliment, l'alcool.
14:09Voilà, c'était la destruction.
14:12Destruction complète.
14:14C'était une autre personne.
14:17Voilà.
14:18On vous laisse repartir, madame ?
14:20D'accord, merci.
14:21Merci.
14:27Alors, on va terminer par notre expert psychologue qui est arrivé, je crois.
14:33Bonjour, monsieur l'expert.
14:36Bonjour, madame la présidente.
14:38La juge d'instruction vous avait demandé, donc, de procéder à l'expertise psychologique,
14:43donc, de la personne mise en examen,
14:45qui était à ce moment-là en détention provisoire.
14:49Donc, nous vous écoutons pour votre rapport, monsieur l'expert.
14:52Merci, madame la présidente.
14:56Donc, quand je vais le questionner précisément sur les faits,
15:00il va dire, je cite,
15:02« Je regrette vraiment, je ne me le pardonnerai jamais,
15:05j'aurais pas dû boire et rester chez ma femme et rien ne serait arrivé. »
15:10Tout ça, il dit, avec un minimum d'émotions,
15:13on pourrait s'attendre à plus d'émotions,
15:15mais on sent, en même temps,
15:17c'est quelque chose qui est compliqué pour monsieur
15:19de laisser sortir véritablement son émotion.
15:24Quand on questionne quand même un petit peu sur ses souvenirs,
15:26il dit qu'il se souvient d'une chose, des deux claques,
15:32et puis, pour le reste, il arrive à se souvenir de rien.
15:34Voilà.
15:35Il dit, il m'insultait, il revoulait de l'alcool,
15:37je refusais, c'est pour ça que je lui ai mis deux gifles.
15:39Voilà.
15:40On ne peut pas dire qu'il est dans le déni,
15:42il n'est pas à nier les choses.
15:44D'ailleurs, à un moment,
15:45je lui demanderai s'il est au courant
15:47de ce qu'ont pu dire d'autres témoins.
15:49Il ne remettra pas en cause ce que ceux-ci ont pu dire.
15:51Il lui dit, s'ils l'ont dit, ils doivent savoir mieux que moi,
15:54parce que moi, c'est le trou noir.
15:56Je vais lui poser la question très précise de lui demander
15:59s'il considère que la mort de son père soit de sa faute.
16:02Il aura ses propos, je cite,
16:06« Bien sûr que c'est de ma faute », ajoutant,
16:09« Mais franchement, je n'ai jamais voulu qu'il meure,
16:12ni lui faire du mal. »
16:13Et il présentera à ce moment-là une émotion absolument authentique.
16:18On peut penser qu'il a une personnalité
16:21qui s'est construite, tant bien que moi, je dirais,
16:26par du refoulement.
16:28Il gardait tout en lui.
16:30Il le dit lui-même, je pense que c'est assez juste,
16:31il gardait tout, il ne disait rien,
16:33parce qu'il était habitué depuis tout petit
16:34à garder en lui, à se taire, à ne rien dire.
16:37Par contre, quand l'alcool était de mise,
16:42les chevaux étaient lâchés.
16:44Et là, toute la violence qui était visiblement en lui,
16:48parce que tous ces coups qu'il avance,
16:51dont je n'ai pas raison de douter de sa parole à première vue,
16:56font que la violence est en lui.
16:58Et quand un des inhibiteurs apparaît,
17:00que ce soit de la drogue, des stupéfiants,
17:03de l'alcool,
17:04tout est possible, tout est permis.
17:08Merci pour ces explications.
17:11Alors, y a-t-il des questions à poser à M. l'expert
17:14sur ses travaux ?
17:17Oui, bonjour M. l'expert.
17:20C'est une question qui n'est pas simple.
17:24Parce que je me pose moi-même des questions
17:26depuis que j'ai étudié ce dossier.
17:30Il est fait de l'allusion à plusieurs reprises
17:32et devant plusieurs personnes, notamment devant vous,
17:36à ce trou noir.
17:39La question que je me pose et que je vous renvoie,
17:44à partir du moment où on a la conscience
17:46d'avoir donné uniquement deux claques
17:48et aucune conscience du reste, si c'est réel,
17:53pourquoi irait-on inventer
17:57l'agression
17:59du père
18:02par des tiers ?
18:04Pourquoi irait-on inventer
18:06le fait que le père serait tombé, retombé, retombé, retombé
18:09au cours de cette nuit-là ?
18:12Pourquoi irait-on inventer
18:14qu'il a avalé une tablette complète de médicaments
18:16quand on appelle le salut ?
18:18Moi, je me pose cette question-là
18:20parce que ça me triture, voyez-vous ?
18:22Si on a un trou noir,
18:24on a un trou noir.
18:26Pourquoi est-ce qu'on invente des mensonges
18:28et qu'on en parle à tout le monde ?
18:30Oui.
18:34Je crois que je vais me faire l'avocat du diable.
18:40Ce qu'il ne faut pas oublier en ce que vous dites,
18:42mais aussi l'avocat général,
18:44c'est que cet homme,
18:46ses histoires avec son père de violences,
18:48de débats violents,
18:49existent depuis des années.
18:51Et je pense,
18:53pour essayer de trouver une explication plausible,
18:56c'est que certainement que le jour
18:58où il se rend compte
18:59que son père est décédé,
19:01il a peur.
19:03Parce que c'est un homme
19:03qui, profondément,
19:04il pétrit de peur
19:05quand il n'a pas bu.
19:09Et je pense que sur le moment,
19:12certainement que la peur,
19:13quand on lui dit que son père est mort,
19:15certainement que la peur
19:15lui fait raconter tout
19:16et n'importe quoi, n'importe comment,
19:18parce que c'est trop douloureux à suivre.
19:20Voilà.
19:20C'est comme ça que je serais tenté de comprendre.
19:22Mais voilà, c'est une hypothèse.
19:24Merci beaucoup, M. l'expert.
19:26À une prochaine fois.
19:28Au revoir.
19:30Il est 13h11.
19:32On va suspendre l'audience.
19:33Elle reprendra à 14h15.
19:36L'audience est suspendue.
19:49L'audience reprend.
19:50Nous pouvons nous asseoir.
19:54Donc là, ce que j'envisage
19:57dans un premier temps,
19:58c'est de faire entendre
20:01l'appel aux pompiers.
20:05Alors, pour entendre
20:06notre appel aux pompiers,
20:08la technique étant ce qu'elle est,
20:11c'est un petit peu
20:12archéologique comme façon de faire.
20:15Pas archéologique, mais...
20:16Mais je n'ai pas trouvé autre chose.
20:19Le pompier, bonjour.
20:24Allô, bonjour.
20:25J'ai mon ex.
20:26Il ne se réveille pas du tout.
20:29Il ne fait que de vomir et tout.
20:32Il a pris des cachets.
20:34Il a pris des cachets, pourquoi ?
20:36Ben, parce que je ne sais pas.
20:38Parce que je suis parti d'avec.
20:39Il a pris des cachets.
20:40Et puis voilà.
20:41Il a allongé sur le côté ?
20:43Non, il est droit dans le canapé,
20:45mais là, il n'arrête pas.
20:47Il ne fait que de dormir.
20:48Il ne se réveille pas du tout.
20:49Il faudra l'allonger sur le côté
20:50s'il vomit et qu'il dort.
20:52Il faudra l'enlever sur le côté ?
20:54L'allonger sur le côté.
20:55Il faut l'enlever et le mettre comment, là ?
20:56L'allonger sur le côté.
20:58Ben, il faudrait plutôt que quelqu'un vienne
21:00ou on ne sait pas faire ça.
21:01Non, mais il faut d'abord le faire
21:02pour ne pas qu'il s'étouffe avec son vomi.
21:04Donc, il faudrait l'allonger.
21:04Oui, il faudrait l'allonger
21:06pour ne pas qu'il s'étouffe.
21:08Mais il faudrait que vous venez en urgence
21:10parce que là, il est en train de...
21:12Non, non, mais d'accord,
21:13mais il faut l'allonger sur le côté.
21:14Je vous ai dit, s'il veut...
21:15Oui, mais on ne peut pas l'allonger sur le côté.
21:17Il faut l'allonger dans le canapé.
21:19Vous le mettez sur le côté dans le canapé,
21:21qu'il soit allongé sur le côté dans le canapé.
21:23Oui, mais non, c'est un petit canapé.
21:24On ne peut pas du tout.
21:26Eh ben, il faut le mettre au sol.
21:27Il faut l'allonger au sol.
21:29Ah, mais on ne peut pas, mais je...
21:31Il faut le prendre et l'allonger au sol.
21:33Il ne vomisse pas.
21:34Il faut que ce soit sur le côté
21:35qu'il ne vomisse pas dans sa gorge
21:37et qu'il avale le vomi, qu'il s'étouffe.
21:38D'accord ?
21:39Il faudrait que vous venez en urgence,
21:41s'il vous plaît.
21:41Ah, mais il ne faut pas se déplacer,
21:42mais il faudrait faire ça avant.
21:44Eh, parce que moi, quand je me...
21:46Parce que moi, je dormais, je me suis levé
21:47et j'ai vu qu'il avait pris
21:48carrément une plaquette de cachet, carrément.
21:52D'accord.
21:53Mais il ne se réveille pas du tout.
21:54Là, je commence à avoir peur.
21:56Ouais, je comprends.
21:59Il en est où, là, la personne ?
22:00Il réagit ou pas ?
22:02Non, il ne réagit plus.
22:02C'est trop peur.
22:05D'accord.
22:06Vous avez réussi à l'allonger,
22:07à le mettre sur le côté ?
22:08Non, je n'arrive pas du tout.
22:10Vous venez en urgence, s'il vous plaît.
22:12Oui, il va falloir le faire.
22:15Il ne faut pas que ça m'émane.
22:15L'acquittez pas.
22:16Oui.
22:18Merci de patienter.
22:19Papa.
22:20Papa.
22:25Papa.
22:27Papa.
22:29Papa, non.
22:31Je sors.
22:32Alors, docteur.
22:52Bonjour, madame l'expert.
22:53Alors, je voudrais juste préciser que je vais devoir montrer, pour la compréhension des choses,
23:03quelques photos du visage de la personne.
23:06Donc, si vous préférez, à moins que vous les ayez déjà vues au niveau de la famille.
23:12Non ?
23:12Je vais garder la gueule.
23:15Oui.
23:16Peut-être baisser un petit peu la lumière, monsieur le greffier.
23:20Alors, vous êtes intervenu en qualité de médecin légiste.
23:24Donc, nous vous entendons pour vos travaux personnels.
23:27Alors, ce qui marque d'emblée, c'est l'importance des traces de contusions qu'il présente sur le corps.
23:37Si on comptabilise l'ensemble des lésions constatées, rien qu'à l'examen externe du corps, on est environ sur plus d'une vingtaine de lésions cutanées.
23:49Donc, il y en a au niveau du front, de l'œil droit, du nez.
23:55Il y a aussi la mandibule droite, il y a la face interne des lèvres.
23:59Après, on va avoir d'autres lésions qui sont visibles au niveau du tronc,
24:04notamment l'étymose qui se situe au niveau de la hanche gauche, donc sur cette partie-là du corps.
24:10Donc, ça, ce sont les lésions visibles externes au niveau cutané.
24:15Et puis après, on va procéder à l'autopsie et là, on va voir qu'il y a des lésions internes très importantes.
24:21Donc, on a un traumatisme crânien qui est d'ailleurs vraisemblablement à l'origine du décès.
24:26On a également un traumatisme thoracique fermé.
24:31Donc, on appelle ça fermé parce qu'il n'y a pas de plaie.
24:34Mais par contre, il y a beaucoup de fractures de côte.
24:38Donc, à gauche, une fracture de l'arc antérieur de la deuxième et de la troisième côte.
24:43Une double fracture de l'arc antérieur et latéral de la quatrième, cinquième, sixième et septième côte gauche.
24:50Et une fracture de l'arc latéral de la huitième, neuvième et dixième côte gauche.
24:55Et puis, on a aussi un traumatisme abdominal fermé avec une fracture du foie et on a une fracture de la rate.
25:03Alors, ce qui est peut-être important de dire, c'est qu'il présentait déjà des séquelles de fractures de côte.
25:11C'est-à-dire qu'il avait des fractures de côte qui avaient consolidé, déjà.
25:14Et puis, on a retrouvé également des étymoses marrons.
25:21Donc, des traces de contusions sur la peau qui n'étaient pas du jour des faits.
25:26Mais qui traduisaient également d'autres traumatismes vraisemblablement quelques jours auparavant.
25:34Merci beaucoup pour votre disponibilité.
25:40Alors, si vous voulez bien venir à la barre, monsieur.
25:46Nous vous écoutons pour votre déclaration concernant le déroulement des faits.
25:53D'accord.
25:54Donc, mon papa est parti avec un copain à ***.
25:59Il était 17h30.
26:03Et donc, après, il est rentré.
26:07Et de là, il avait le côté de l'œil qui était rouge.
26:11J'ai dit, qu'est-ce qui s'est passé ? T'as eu quoi ?
26:13Et il m'a dit qu'il s'était fait taper avec un gars qui devait de l'argent.
26:19Et donc, j'ai dit, c'est qui ce gars-là ? Il n'a jamais voulu me dire.
26:21C'était qui ?
26:22Et donc, après, il commençait à m'insulter.
26:26Fils de pute, bâtard, jeter ta mère.
26:29Du coup, moi, je suis parti.
26:30J'étais dans la chambre et je pleurais.
26:31D'accord.
26:33Voilà.
26:33Et c'est de là, après, que je m'y suis mis à voir.
26:37Et je me souviens, juste quand il était dans son fauteuil, que j'ai mis une ou deux gifles.
26:43Et après, je ne me souviens plus du tout de la soirée.
26:45C'est le trou noir.
26:46Non, il va falloir quand même essayer d'éclairer un peu.
26:52C'est un peu le trou, monsieur, là.
26:56Vous avez entendu ce que votre père a vécu ?
26:58Oui.
26:59Au niveau du corps.
27:01Bon, ce n'est pas dans la rue qu'il s'est fait ça.
27:03Non.
27:03Bon.
27:04Cette scène de violence, là.
27:07Oui.
27:09Vous voulez la mettre en dehors de vous, c'est ça ?
27:12Non, du tout.
27:13Bon, alors racontez-la, nous.
27:15Cette scène de violence...
27:16Ce n'est pas deux gifles qui ont tué votre père, monsieur.
27:18Non, non, je sais très bien.
27:19Je sais très bien.
27:20J'ai essayé pendant quatre ans de me refaire la scène.
27:23J'ai essayé de travailler.
27:24Vous voyez, c'est impossible de me rappeler.
27:27Vous ne vous revoyez pas dans une forme d'acharnement violent sur votre père ?
27:31Non, non, du tout.
27:31Du tout, du tout, du tout, du tout.
27:32Vous avez appelé votre mère à quelle heure ?
27:35Je me suis levé, il était midi 30.
27:37Non, non, non, avant ça.
27:39Midi 15.
27:40Non.
27:40Vous avez appelé votre mère bien avant, monsieur.
27:44Ça, je ne me rappelle plus du tout non plus.
27:45Une heure au téléphone avec votre mère ?
27:48Je ne me rappelle plus du tout.
27:49À partir de 23h53.
27:52Oui, mais ça, comme je vous dis, je ne me rappelle plus du tout de l'appel.
28:04C'est...
28:05Alors, bon, entre les...
28:06Enfin, j'avoue que vous pourriez aussi nous dire, je refuse de...
28:11Vous avez le droit au silence.
28:12Vous avez peut-être le droit à l'amnésie aussi, après tout.
28:14Mais dans ces conditions, on ne va pas pouvoir aller tellement plus loin.
28:20Vous vous connaissez, monsieur ?
28:22Vous savez que vous pouvez être violent sous alcool ?
28:25Oui.
28:25Bon.
28:27Alors, c'est quoi cette consommation d'alcool, là, ce soir-là ?
28:30C'est pour faire quoi ?
28:33Parce que j'étais à bout tout, j'ai...
28:36Mon ami m'insultait, j'étais ta mère.
28:40J'étais à bout, je rebio.
28:42Mais vous ne restez pas dans votre chambre à picoler, monsieur ?
28:44Vous êtes à vous endormir.
28:45Vous retournez au contact avec votre père.
28:48Est-ce que ça pouvait bien se passer ?
28:53Est-ce que ce n'était pas évident qu'il allait y avoir de gros problèmes ?
28:57Si.
28:58Bon.
28:59Pourquoi vous y retournez ?
29:01Je fais une grosse erreur de...
29:03Vous y retournez ?
29:05Vous le reconnaissez ?
29:06Vous y retournez pour le violenter ?
29:08Vous reconnaissez ?
29:09Ah non, je ne retourne pas pour le violenter.
29:11J'ai retourné pour...
29:12Parce que je buvais un poids à table.
29:14C'est après, avec tout ce que j'ai vu, je n'en ravi plus de rien.
29:17Donc vous en restez là, c'est votre première déclaration sur ce qui s'est passé ?
29:32Oui.
29:33Alors, pour l'instant, asseyez-vous, monsieur.
29:37On va faire venir, donc, madame...
29:40Bonjour, madame.
29:49Bonjour.
29:49Un petit quart d'heure, peut-être, pour vous permettre de nous réexpliquer, madame, ce que vous avez su de ce que votre fils avait fait à votre ex, puisqu'on a, notamment, dans les investigations téléphoniques, je suis en code D412, on a la trace d'un appel qui a duré une heure.
30:09Qu'est-ce qu'il vous dit, votre fils, à ce moment-là ?
30:12Ben, il me dit, ben, papa va mal, je ne sais pas ce qu'il a, il n'est pas bien, tout, il n'arrive pas à se réveiller, voilà ce qu'il me sort.
30:20Ben, moi, je pensais que c'était sous l'effet de l'alcool, qu'il, voilà, il y a eu un malaise, ça se passe, ça.
30:26Et puis ?
30:27Et puis, il me dit, ben non, maman, il faudrait que tu viennes et tout, mais je ne pouvais pas, parce que je n'étais pas là.
30:31J'étais chez mon copain.
30:34Mais pendant une heure, qu'est-ce que vous lui dites et comment il est, pendant une heure ?
30:37Ben, il est mal, il n'est pas bien, il pleure, tout.
30:41Est-ce que vous lui avez dit d'appeler les pompiers ?
30:44Ben, oui, je lui avais dit d'appeler les pompiers, oui.
30:46Et puis, il a dit, ben, je vais attendre, on va bien voir, ça se trouve, il est...
30:49Voilà, il a voulu attendre.
30:53Nous, on pensait qu'il dormait, qu'il était en plein sommeil.
30:57Mais on ne se met pas à pleurer, on se met à pleurer quand on a fait quelque chose et qu'on s'inquiète.
31:03On ne se met pas à pleurer quand on voit son père juste dormir.
31:07Je ne sais pas, parce qu'il me disait, ben, il est mal, je ne sais pas ce qu'il a, il n'est pas bien, tout ça.
31:10Alors, moi, je n'étais pas là, je ne pouvais pas savoir.
31:13J'ai dit, ben, on verra ça demain, le dimanche.
31:17Donc, je suis venu vers midi.
31:21Et quand vous arrivez, qu'est-ce que vous dites à votre fils ?
31:25Je lui pose des questions, je lui demande qu'est-ce qu'il a eu.
31:28Il m'a dit, ben, je ne sais pas, il s'est trouvé mal, tout.
31:30Il m'a même dit qu'il avait pris peut-être des cachets, c'est peut-être pour ça qu'il était comme ça.
31:34Il vous a, à aucun moment, il vous a dit qu'il l'avait frappé ?
31:39Non, non.
31:39Vous ne lui avez pas posé de question ?
31:40Ben non, moi, je croyais qu'il l'avait frappé, mais non, moi, il n'a pas parlé du tout.
31:44Vous avez pensé quoi, au fond, madame ?
31:46Connaissant, vous êtes certainement dans cette salle, la personne, et au monde, la personne qui le connaît le mieux.
31:52Est-ce que vous avez pu douter une seule seconde de ce qui s'était passé ?
31:56Ben, moi, je sais qu'ils se prospétaient souvent quand ils avaient bu l'un comme l'autre, mais bon, je n'aurais pas pensé que, voilà.
32:05Mais qu'est-ce que ça pouvait être d'autre, madame ? Il y a des traces de sang par terre.
32:10Il y a votre fils qui vous a appelé dans la nuit.
32:12Qu'est-ce qui avait pu se passer d'autre que ce qui s'est passé quand vous arrivez sur place ?
32:18Ben, moi, quand je suis arrivé sur place, il était inconscient. Ben, voilà.
32:21Alors, le soir, dans vos auditions, ben, peut-être des questions, d'abord.
32:28Monsieur le cas général, des questions, madame ?
32:30Oui, madame. Lorsque vous avez votre fils pendant près d'une heure au téléphone dans la nuit du samedi au dimanche,
32:39est-ce qu'il vous dit qu'il a frappé son père ?
32:41Non. Ben, j'avais dit qu'il avait frappé son père.
32:43Ah bon ?
32:44Ah, non.
32:44Vous êtes sûr ?
32:45Non.
32:45Code 182, vous êtes entendu par les gendarmes une deuxième fois.
32:52Question, que vous a-t-il dit réellement au téléphone ?
32:55Réponse, il a dit que son père était méchant.
32:58Oui, il a été méchant, mais...
32:59Laissez-moi finir.
33:01Qu'il a essayé de le maîtriser.
33:03Qu'il lui a mis une claque et un petit coup de pied.
33:06Je ne sais pas où, dans les jambes, je pense.
33:08Oui, bonjour.
33:09Alors ?
33:10Oui, il m'a dit ça, mais...
33:11Ben, pourquoi vous dites non ?
33:12Je ne m'en rappelle plus tellement.
33:13Quand on ne se rappelle pas, on dit je ne me rappelle pas, on ne dit pas non ?
33:17Ben, rien.
33:18Moi, je n'étais pas là, alors je ne peux pas...
33:20Mais ce n'est pas le problème, madame.
33:21Je vous demande s'il vous a dit au téléphone qu'il avait frappé.
33:24Vous dites à la cour, là, en nous regardant dans les yeux.
33:26Non, non, il n'a jamais dit ça.
33:28Vous mentez, madame ?
33:29Ben, non, je ne m'en...
33:29Et si, vous mentez ?
33:32Lors de cette audition chez les gendarmes, le 7 janvier, vous êtes beaucoup plus précise.
33:40Vous avez dit, je lui ai demandé ce qu'il avait fait, il m'a dit qu'il l'avait tapé.
33:44Il m'a dit qu'il l'avait fait tomber et qu'il l'avait frappé.
33:46Il m'a parlé d'un coup de pied et de la claque.
33:48Il m'a demandé si je pouvais venir.
33:50Je lui ai demandé pourquoi.
33:51Il m'a dit qu'il avait frappé et qu'il n'était pas bien.
33:55Il m'a dit qu'il était abîmé et qu'il avait un peu de sang.
33:58J'ai dit que j'espérais qu'il n'avait rien au visage.
34:04On comprend, madame, ce qu'il n'a pas été entre votre fils et son père.
34:09On comprend la colère et la haine qu'il pouvait avoir contre son père.
34:11Il ne faut pas nous raconter une histoire.
34:19Je ne raconte pas une histoire.
34:21Est-ce que vous n'êtes pas encore en train de le protéger, madame ?
34:25Non, je ne veux pas le protéger, non.
34:28Je ne vois pas pourquoi je le protégerais, déjà.
34:30Parce que vous êtes sa mère.
34:32Oui, c'est sa mère.
34:32Et parce que vous avez beaucoup souffert de la part de M. ***
34:35et parce qu'il a souffert aussi de la part de M. ***.
34:37Sauf qu'il y a des lois qui font quand même que
34:41ce n'est pas parce qu'un père a été maltraitant, etc.,
34:44que la justice ne va rien faire le jour où il est battu à mort chez lui.
34:48C'est normal qu'on réagisse.
34:51Moi, je comprends.
34:52Vous pouvez aller vous asseoir, madame.
35:01Merci.
35:05Donc, il est 18h53.
35:08On va s'interrompre maintenant.
35:10À chacun et à chacune, une bonne soirée.
35:13Et rendez-vous demain, 9h.
35:14L'audience est suspendue.
35:16Bonjour à toutes et à tous.
35:33L'audience reprend.
35:34Nous pouvons nous asseoir.
35:35Donc, on va entendre M. ***.
35:47Bonjour.
35:48Bonjour, monsieur.
35:49Voilà, donc vous étiez trois frères.
35:50Oui, c'est ça.
35:51Écoutez, on vous écoute sur ce que vous souhaitez dire, monsieur, aujourd'hui.
35:56Oui.
35:56Donc, je voudrais dire déjà, c'est que mon frère, c'est vrai qu'il consommait de l'alcool.
36:02Ça, on ne va pas le renier, que ce n'était pas forcément le meilleur des pères et le meilleur des hommes.
36:08Mais de là à dire qu'il buvait tous les jours, on ne se rappelle que des trois derniers mois, en fait.
36:12On ne se rappelle pas de la vie d'avant.
36:14On ne se rappelle pas quand même qu'il a élevé ses enfants.
36:16Il a donné à manger à tout le monde.
36:17sans rien demander à personne, en fait.
36:21Ça, on l'oublie un peu, quoi.
36:23Il n'y a que mon frère qui allait au boulot.
36:26Je ne pense pas qu'ils ont manqué de beaucoup de choses.
36:30Sinon, avec moi et mon frère, on s'entendait bien.
36:34Mais c'est vrai que quand il consommait de l'alcool, j'évitais de le croiser, quoi.
36:39C'était un système un peu spécial, quoi, on va dire.
36:43Surtout les week-ends.
36:44Je vous parle des week-ends.
36:45Que moi, la semaine, je ne sais pas trop, quoi.
36:47Mais les week-ends, c'était un peu rock'n'roll.
36:50Alors aujourd'hui, oui, c'est vrai.
36:51On peut y cracher dessus.
36:52On peut dire ce qu'on veut.
36:53On a le droit.
36:54Mais quand même, il n'y avait pas que ses mauvais côtés-là.
36:59Quand même.
37:00Dans quel état d'esprit vous êtes vis-à-vis de votre neveu ?
37:05Vis-à-vis de mon neveu.
37:07Pour la première fois, hier, il est venu s'excuser dehors.
37:10Par rapport à moi, ouais.
37:11Je l'ai pris.
37:12Je lui ai dit tout simplement que c'est un peu tard.
37:17Évidemment, de venir me parler aujourd'hui.
37:20Que leur mieux fait de le faire, il y a bien plus tôt que ça.
37:23Et qu'aujourd'hui, que la justice va faire son travail.
37:27Et puis, il va payer pour ce qu'il a fait.
37:30Et puis, après, on verra.
37:31Pour l'instant...
37:33Merci beaucoup, monsieur.
37:38De rien, madame.
37:39Alors, la parole est à la partie civile.
37:43Donc, vous avez la parole, maître Le Tourneuf.
37:45Merci, madame la présidente.
37:46Mesdames de la Cour.
37:47Mesdames et messieurs les jurés.
37:50J'interviens aujourd'hui pour monsieur...
37:52Et ce qu'il veut encore aujourd'hui, c'est comprendre.
37:57Donc, il y a cet alcool, effectivement, qui est présent.
38:02Mais il y a les conditions de cette nuit du 4 au 5 janvier.
38:06Et monsieur, il n'aurait jamais pensé perdre son frère dans des conditions pareilles.
38:11Et il se pose les questions.
38:14Pourquoi un tel acharnement ?
38:16Cette extrême violence.
38:19Et il n'y a pas eu qu'un seul coup, manifestement.
38:21Extrême violence qui ont fait penser à monsieur pendant un temps,
38:25parce qu'il a cheminé lui aussi,
38:27à se poser la question de savoir si l'accusé n'avait pas, à un moment donné, voulu tuer son père.
38:33Alors, c'est des questions qu'on peut légitimement se poser
38:36quand on voit l'état du corps de son père.
38:38Ce n'est pas ce qui est retenu aujourd'hui, dont acte, on n'a pas de problème avec ça.
38:43Mais c'est une question qu'on s'est posée malgré tout.
38:46Et la question, également fondamentale,
38:49et c'est surtout sur celle-là pour laquelle on ne comprend pas de notre côté,
38:55pourquoi attendre 13 à 14 heures pour appeler les secours ?
39:01Parce que si sur le moment, il y a ce fameux trou noir,
39:05pour lequel on ne comprend pas non plus très bien,
39:07mais enfin, admettons, à une heure du matin, on en parle avec maman,
39:11elle dit « appelle les pompiers », il ne le fait pas.
39:14À 10h30, il va boire un verre dans la cuisine,
39:16il voit son père dans le fauteuil, il ne réagit pas.
39:20À midi, quand même, ça devient surprenant,
39:22mais il n'appelle toujours pas les secours,
39:23il voit le visage de son père, on l'a tous vu, le visage de son père, là.
39:28Il n'appelle pas les secours, il appelle sa mère.
39:30Et on attendra, effectivement, quasiment 14 heures,
39:34alors que les faits se sont manifestement produits vers minuit,
39:37pour appeler les secours.
39:39Et ça, ça, c'est insupportable pour la famille.
39:44Aujourd'hui, le message qu'il veut que je vous transmette,
39:47c'est effectivement, vous demander de rendre à chacun sa place,
39:50c'est-à-dire à son frère, celle de victime.
39:56Parce que, quoi qu'il en soit,
39:58il n'aurait pas dû mourir dans ces conditions-là.
40:01C'est bien lui la victime aujourd'hui.
40:04Et donc, c'est ce qu'il vous demande aujourd'hui de déclarer.
40:08Merci, Maître.
40:16Monsieur l'Avocat Général, vous avez la parole pour vos réquisitions
40:19dans l'intérêt de la société.
40:23Madame la Présidente, Mesdames de la Cour,
40:26Mesdames et Messieurs les jurés,
40:29j'ai quelques années d'exercice dans la magistrature,
40:33donc des coups mortels, des dossiers de coups mortels.
40:36J'en ai connu des dizaines et des dizaines,
40:40qui consistent, par exemple,
40:43à donner un coup de poing pour frapper,
40:46simplement pour frapper,
40:47à quelqu'un qui va partir à la renverse,
40:50qui va aller se ficher l'arrière du crâne
40:52dans un angle vif
40:54et qui va en décéder.
40:58Dans ces configurations-là,
41:01vous avez
41:02un écart énorme,
41:05énorme,
41:06entre le coup porté
41:09et la conséquence,
41:12qui est la mort.
41:12nous ne sommes pas dans ce registre-là.
41:22Nous sommes dans une configuration
41:25qui a été qualifiée d'acharnement,
41:31que je qualifie d'extrême violence,
41:33d'extrême violence au pluriel,
41:36évidemment.
41:36vous avez quelqu'un
41:40qui va frapper
41:43une fois,
41:47deux fois,
41:49trois fois,
41:50quatre fois,
41:52cinq fois,
41:53six fois,
41:55sept fois,
41:56huit fois,
41:58neuf fois,
41:59dix fois,
42:00onze fois,
42:02douze fois,
42:03treize fois,
42:04quatorze fois,
42:06quinze fois,
42:07seize fois,
42:09dix-sept fois,
42:10dix-huit fois,
42:12dix-neuf fois,
42:13vingt fois,
42:13je m'arrête là.
42:14Je m'arrête là, pourquoi ?
42:16Parce que je ne vais pas ajouter
42:18à ce qui a été objectivé,
42:20c'est-à-dire prouvé
42:21par le médecin légiste.
42:23Elle vous dit,
42:24à la barre hier,
42:26qu'elle a recensé
42:27au moins,
42:28au moins,
42:29vingt coups.
42:30on est bien loin
42:32de ce que j'évoquais
42:33tout à l'heure,
42:34c'est-à-dire
42:34le coup volontaire,
42:37mais quasi accidentel
42:38dans ses conséquences.
42:41On est dans un acharnement,
42:42je reprends le terme,
42:44de coups extrêmement violents,
42:47portés
42:47pour partie
42:50sur des parties vitales.
42:52la face,
42:55la tête,
42:56le foie,
42:58la rate,
43:00tout cela
43:01est de nature
43:02à entraîner
43:02des conséquences
43:03mortelles.
43:07Alors que dans ce contexte-là,
43:09on vient de vous dire,
43:11je ne m'en rappelle pas,
43:12mais je m'excuse.
43:14Je ne m'en rappelle pas,
43:14mais je suis désolé.
43:16C'était mon trou noir,
43:17peut-être que oui,
43:18mais voilà.
43:20Alors ça a un côté
43:20un peu facile,
43:21je ne suis pas psychologue.
43:22Cependant,
43:23j'ai l'impression quand même
43:24que l'accusé
43:26met systématiquement
43:28en avant
43:29cette notion
43:30de trou noir
43:31pour éviter
43:32d'avoir à parler
43:33de ce qui fâche
43:34et des problématiques
43:36pointues.
43:38Alors on va vous dire
43:39que l'accusé
43:40a eu une vie
43:43extrêmement
43:43pénible,
43:45complexe,
43:46difficile.
43:48Je suis d'accord ?
43:49D'accord.
43:51Je veux bien
43:52lui reconnaître ça
43:53et vous lui reconnaîtrez ça.
43:55Mais en aucun cas,
43:56en aucun cas,
43:58ça ne doit venir
43:59en excuse
44:01de ce qui a été commis.
44:04En aucun cas.
44:06Alors,
44:07certes,
44:08il y a cette problématique
44:09de faillite éducative,
44:13de faillite en termes
44:14de prise en charge,
44:15parentale,
44:16mais il n'y a pas
44:18que ça.
44:21Ça vient en conjonction
44:23avec une personnalité
44:25qui est prête
44:27avec l'alcool
44:29à partir
44:31complètement en vrille.
44:32Et le problème
44:33dans tout ça,
44:35c'est qu'il le sait
44:35très bien
44:36à chaque fois
44:38où il picole.
44:39Il sait très bien
44:40quel va être
44:42son comportement
44:43lorsqu'il aura bu.
44:44il sait qu'il est violent.
44:47Il le sait,
44:48il recommence.
44:50Alors moi,
44:50je ne suis pas là
44:51pour venir
44:53demander
44:54des peines
44:55invraisemblables.
44:57Je suis là aussi
44:58pour vous donner
44:59mon sentiment.
45:02Il est que
45:03une peine
45:04doit être juste
45:05et correspondre
45:07au drame,
45:11aux souffrances,
45:12aux gestes répétés.
45:14aux personnalités,
45:16victimes,
45:17auteurs.
45:19Et je ne vois pas
45:19de justesse
45:20dans une peine
45:21de 6 ans.
45:23Je vous rappelle
45:23qu'il encourt
45:2420 ans
45:24de réclusion criminelle.
45:27Et moi,
45:27dans la justesse
45:28qui m'habite,
45:30ça fait 40 ans
45:32que ça m'habite,
45:34moi,
45:34je vais vous proposer
45:35justement,
45:37justement,
45:38en ayant tout pesé,
45:39de condamner
45:40monsieur
45:41à une peine
45:42de 11 ans
45:43de réclusion criminelle.
45:44Ça m'apparaît être
45:45tout à fait
45:46en adéquation
45:47avec ce déchaînement
45:49de violence
45:51et avec
45:53les conséquences
45:55et sa personnalité
45:57qui doit encore
45:58évoluer.
45:59Et j'espère
46:00qu'elle évoluera
46:01parce que je suis
46:02quand même
46:02un peu inquiet.
46:04Je vous remercie
46:04de votre attention.
46:06Merci,
46:07monsieur l'avocat général.
46:07Maître Luriette,
46:11vous avez la parole
46:12pour la défense
46:13de l'accusé.
46:16Madame la Présidente,
46:18Mesdames de la Cour,
46:20Mesdames,
46:21Messieurs les jurés,
46:23j'ai l'honneur
46:23aujourd'hui
46:24de défendre
46:26monsieur...
46:27Défendre pour moi,
46:30c'est expliquer.
46:31Expliquer les faits,
46:34expliquer une personnalité,
46:36celle qu'il a été,
46:40celle qu'il est
46:40aujourd'hui
46:41et celle
46:42qu'on espère tous
46:44qu'il sera.
46:46D'abord,
46:48sur les faits,
46:49justement.
46:51Monsieur l'avocat général
46:52est revenu
46:53et s'est beaucoup inquiété
46:56sur cette question
46:56du trou noir.
46:59Je vais vous le dire sincèrement,
47:00ce trou noir,
47:01je n'en sais rien.
47:02Je sais très bien
47:03que mes clients
47:04peuvent mentir
47:05y compris à moi.
47:08Est-ce que monsieur...
47:09ne se souvient pas sincèrement ?
47:12Est-ce qu'il veut
47:13cacher des choses ?
47:16Est-ce qu'il veut
47:16diminuer sa responsabilité ?
47:19Sa responsabilité,
47:21il l'assume parfaitement.
47:23Donc,
47:23à ce niveau-là,
47:25ça n'est pas un axe
47:26de défense
47:26pour venir
47:27diminuer sa responsabilité.
47:30Mais ce moment-là
47:31et ce contexte,
47:32il faut aussi justement
47:34le mettre
47:35en lien
47:36avec le passé.
47:39Monsieur l'avocat général
47:40vous balaye
47:41la personnalité.
47:44C'est pour moi
47:45impossible
47:46dans un tel dossier.
47:49Son passé,
47:49il est terrible.
47:50Comment voulez-vous
47:51grandir
47:52de manière sereine
47:54quand
47:54vous êtes dénigré
47:56depuis tout petit,
47:57que vous
47:57grandissez
47:59avec cette haine ?
48:02J'aurais aimé,
48:04je ne vous le cache pas,
48:06qu'il montre
48:06ses émotions.
48:08Et il en est incapable,
48:10justement,
48:10par son histoire de vie.
48:12Je lui ai dit,
48:13monsieur,
48:14je ne vous demande pas
48:15de mentir
48:16parce que je sais
48:17que ses regrets
48:18sont sincères,
48:19mais montrez
48:21votre émotion.
48:23Montrez
48:23ce que vous ressentez
48:25parce qu'on vous juge tous
48:27aussi par rapport
48:28à un extérieur.
48:30Et malgré ça,
48:31il n'est pas capable.
48:33Il n'y arrive pas
48:34à montrer
48:35ses émotions.
48:36Mais les experts
48:37ont pu vous dire,
48:38justement,
48:39la sincérité
48:40des regrets.
48:41Et moi,
48:42je n'ai aucun doute
48:43sur le fait
48:45qu'il regrette
48:45véritablement
48:46d'avoir tué
48:47son père
48:48et qu'il ne voulait pas
48:49en arriver là,
48:51à ce moment-là.
48:52Et tout ça,
48:53c'est des éléments
48:54que vous devrez
48:54prendre en considération
48:56pour condamner
48:58monsieur
48:58à une peine juste.
49:00Mais je considère
49:01que la peine,
49:03même encore aujourd'hui
49:04sollicitée
49:04par le ministère public,
49:05est une peine
49:06qui est très haute,
49:08qui ne prend pas en compte
49:09ce parcours de vie.
49:11Et c'est la raison
49:12pour laquelle,
49:12je vous demanderai
49:13dans tous les cas
49:14de réduire
49:16la peine
49:16qui vous est sollicitée
49:18du côté du ministère public.
49:21Merci, maître.
49:22avancez à la barre,
49:25s'il vous plaît,
49:26monsieur.
49:31Avez-vous quelque chose
49:32à ajouter
49:33pour votre défense ?
49:34Oui.
49:35Donc, je tenais déjà
49:36premièrement
49:37à encore m'excuser
49:39envers la famille.
49:41Je demande pardon
49:42à la famille
49:42pour les faits
49:43que j'ai pu faire.
49:46Et pour ce que j'ai fait,
49:48je regrette sincèrement
49:50et je ne me le pardonnerai
49:52jamais.
49:52Et je vivrai avec ça
49:53tout le reste de ma vie.
49:54Vous pouvez vous asseoir, monsieur.
50:01Les débats sont clos.
50:02Mesdames et messieurs les jurés,
50:04nous allons nous rendre
50:04dans la salle des délibérations.
50:07Nul ne pourra y pénétrer
50:08sous quelque cause que ce soit
50:10sans mon autorisation.
50:11L'audience reprend.
50:29Nous pouvons nous asseoir.
50:34La Cour et le jury réunis
50:36après en avoir délibéré en commun
50:39et voté au scrutin secret
50:40dans les conditions prévues
50:42par la loi.
50:43Déclare
50:44d'être coupable
50:45de violences volontaires
50:46surascendants
50:47ayant entraîné la mort
50:48sans intention de la donner.
50:50Le condamne
50:51à la majorité absolue
50:52à la peine de 11 années
50:54de réclusion criminelle.
50:57À 5 ans
50:57d'interdiction
50:58de détenir
50:59et de porter une arme
51:01soumise à autorisation.
51:03Fixe
51:04à la majorité absolue
51:05à une année
51:06la durée
51:07de la peine obligatoire
51:09de privation du droit
51:10d'éligibilité.
51:13Ainsi se termine
51:14l'audience criminelle.
51:15Il n'y aura pas...
51:17Alors cette fois-ci
51:21les jurés ont suivi
51:22les réquisitions
51:22de l'avocat général
51:23pour tenter
51:24de comprendre
51:24pourquoi la justice
51:25s'est montrée
51:26moins clémente
51:27qu'en première instance.
51:28Retrouvons
51:29nos deux invités.
51:30D'abord
51:30Michel Lernou
51:31magistrat
51:32avocat général
51:33à la cour d'appel
51:34de Paris
51:35et maître
51:36Hubert Delarue
51:37avocat honoraire
51:38ancien bâtonnier
51:39au barreau
51:40d'Amiens.
51:41Alors ceux
51:41qui viennent
51:42de nous regarder
51:43doivent se dire
51:44mais qu'est-ce qui se passe
51:45à la fin de l'audience ?
51:46La cour se lève
51:47l'accusé
51:48est tout seul
51:49qu'est-ce qui se passe
51:49pour lui ?
51:50Il se passe
51:51qu'en fait
51:52en matière criminelle
51:53il n'est pas nécessaire
51:54que le président
51:55dise suivant
51:55la formule habituelle
51:56je décerne
51:57mandat de dépôt
51:58le seul fait
51:59de prononcer
51:59une peine
52:00de réclusion criminelle
52:01fait que
52:01l'intéressé
52:02est immédiatement
52:04incarcéré
52:04alors effectivement
52:05on ne voit pas ça
52:05dans le documentaire
52:06je veux dire par là
52:07qu'on ne voit pas
52:08la police arriver
52:09mais il va passer
52:10sa première nuit
52:11en détention.
52:13Et il va faire
52:13les 11 ans ?
52:14Non en fait
52:14je ne pense pas
52:15qu'il fera les 11 ans
52:16puisqu'il va bénéficier
52:17d'un certain nombre
52:19peine ordinaire
52:19exceptionnel etc
52:21et tout ça
52:22va peser progressivement
52:23dans la peine
52:24à effectuer
52:24et va amener
52:25à la réduire
52:26évidemment.
52:27Alors on dit
52:27qu'en matière criminelle
52:28je ne sais pas
52:28si monsieur
52:29l'avocat général
52:30sera d'accord avec moi
52:31mais enfin
52:31on fait à peu près
52:32la moitié de sa peine
52:33voire un peu plus
52:34de la moitié de sa peine
52:34si les choses
52:35se passent convenablement.
52:36Comment expliquer ça
52:37à un jury populaire
52:39d'abord
52:40qui vient de prendre
52:40une décision
52:41et à une opinion publique
52:42qui dit
52:42alors il est condamné
52:43à 11 ans
52:44il n'en fera que
52:445,5,6 ?
52:45Alors en plus
52:46des réductions de peine
52:48comme l'on dit
52:49il va bénéficier aussi
52:50le temps qu'il aurait
52:51éventuellement fait
52:52en détention provisoire
52:53va être défalqué
52:55de la totalité
52:56alors c'est toute la difficulté
52:57pour le président
52:58de leur dire
52:59vous allez le condamner
53:01à 10
53:02mais en réalité
53:02il ne va ne faire
53:03que 5
53:03et parce que
53:04ce n'est pas une science exacte
53:05vous avez des condamnés
53:07qui ne présentent
53:09aucune garantie
53:10qui ne cherchent pas
53:11de travail
53:11qui n'indemnissent
53:12pas la partie civile
53:13on va pas prendre le risque
53:14de les remettre dehors
53:15mais c'est pour
53:15vous savez
53:16ces libérations conditionnelles
53:17c'est pour éviter
53:18ce qu'on appelle
53:18les sorties sèches
53:19il vaut mieux préparer
53:21quelqu'un qui a été condamné
53:22à sa sortie
53:23que de le lâcher
53:24comme ça
53:25du jour au lendemain
53:26dans la nature
53:26et il est important
53:27de préciser
53:28ça pour les téléspectateurs
53:30que certains condamnés
53:32à de très lourdes peines
53:33vont faire
53:34toutes leurs peines
53:35ou quasiment
53:36toutes leurs peines
53:37notamment sur les peines
53:38de réclusion criminelle
53:39voilà
53:40et donc
53:41habituellement
53:42c'est vrai
53:43qu'on fait
53:43un peu plus
53:44de la moitié
53:44de sa peine
53:45si tout se passe bien
53:47si la réinsertion
53:47est en cours
53:48etc
53:48si tous les clignotants
53:50sont au vert
53:51mais il est vrai
53:52également
53:52que pour un certain
53:53nombre de peines
53:54prononcées
53:55pour un certain
53:55nombre de criminels
53:56peut-être jugés
53:57particulièrement dangereux
53:58ou autres
53:58ça ne s'applique pas
54:00de cette façon-là
54:01comment on peut expliquer
54:02que la peine
54:03soit plus lourde
54:04c'est son comportement
54:06à l'audience
54:06le fait qu'ils reconnaissent
54:08certes les faits
54:09tout en disant
54:10oui mais j'avais
54:12un trou noir
54:13il aurait fallu
54:14être dans le délibéré
54:15pour le savoir
54:16il aurait fallu
54:17moi j'ai été un petit peu surpris
54:18qu'on passe évidemment
54:19de six quasiment
54:20qu'on double la peine
54:21au regard du comportement
54:23tel qu'il apparaît
54:24dans le film
54:24de cette ambiance
54:25de ce climat
54:26d'alcoolisme partagé
54:27entre le père et le fils
54:28enfin toutes ces difficultés
54:30familiales accumulées
54:31tous ces problèmes
54:31d'enfance
54:32qu'il a rencontrés
54:33donc il avait été
54:34dans un premier temps
54:35c'est l'alchimie judiciaire
54:37de la cour d'assises
54:38les jurés avaient considéré
54:40que ça ne méritait
54:41pas plus de six ans
54:42le parquet général
54:43n'a pas été satisfait
54:44de la décision
54:44il en a fait à peine
54:45mais c'est vrai
54:46que ça paraît quand même
54:47au regard de ce que
54:48nous avons pu voir
54:50ça paraît quand même
54:51assez sévère
54:52voire même très sévère
54:52de mon point de vue
54:53de passer comme ça
54:54du simple au double
54:55parce que ça veut dire
54:56que les premiers
54:56n'ont rien compris
54:57et c'est un peu désobligeant
54:59pour la première juridiction
55:00alors pour moi
55:01à mon sens
55:01ce qui a été déterminant
55:02alors je ne devrais pas
55:03parler de ça
55:04parce qu'on parle
55:05d'une affaire de coup mortel
55:05mais ce qui m'a vraiment
55:06mis un coup à l'estomac
55:08ce sont justement
55:09les réquisitions
55:09de l'avocat général
55:10qui à mon avis
55:11était extrêmement pédagogue
55:13extrêmement pertinent
55:14qui a bien expliqué
55:15la différence entre
55:16vous donner un coup
55:18malheureusement
55:19la personne
55:19heurte un mur
55:20et meurt
55:21et là
55:22il a ponctué
55:24toutes ses réquisitions
55:26en disant
55:26premier coup
55:27deuxième coup
55:28troisième coup
55:30jusqu'au
55:31vingtième coup
55:31je pense que ça a eu
55:32un impact considérable
55:34sur le jury
55:34qui peut expliquer
55:35la différence
55:36et alors là aussi
55:36vous êtes bien placé
55:37pour savoir
55:38puisque la justice
55:39est une justice humaine
55:40et suivant qu'on est jugé
55:42ici ou là
55:43les jurés
55:44ne sont pas les mêmes
55:45vous savez
55:46être entre jugé
55:47par des jurés
55:48de la cour d'appel
55:48de Paris
55:49et jugé par des jurés
55:51de la cour d'appel
55:51de Douai
55:52les peines
55:53ne sont pas du tout
55:53les mêmes
55:54donc là
55:55peut-être qu'ils ont été
55:56trop indulgents
55:57en première instance
55:58en première instance
55:59c'était dans l'ordre
56:00c'était à l'ensemble
56:00oui mais je pense
56:01que la sociologie
56:02du jury
56:03évidemment
56:03est extrêmement importante
56:04selon qu'on peut être jugé
56:05par exemple à Bobigny
56:06ou en région parisienne
56:07ou bien dans la France profonde
56:09les résultats sont différents
56:11alors ce qui a pesé
56:12ce que vous nous dépeignez
56:13c'est une loterie
56:13c'est-à-dire
56:14ce que vous venez de dire
56:15selon l'endroit
56:16où on commet le crime
56:17et on est jugé
56:18on n'a pas le même résultat
56:19oui mais
56:19si vous voulez
56:20c'est une affaire d'hommes
56:22la justice est imparfaite
56:25sinon si elle ne l'était pas
56:26on le saurait tous
56:27alors ce qui revient également
56:28assez souvent
56:29au cours du débat
56:29et d'ailleurs aussi évidemment
56:31dans l'expertise psychiatrie
56:32c'est ce fameux trou noir
56:34c'est quoi
56:34c'est un argument de défense
56:35ou c'est quelque chose
56:36de réel
56:37ce trou noir
56:38ça veut pas dire qu'il nie
56:39ça veut dire qu'il est submergé
56:40par l'horreur
56:41de ce qu'il a fait
56:41la difficulté est telle
56:43de se confronter
56:44à l'horreur du crime
56:44qu'on vient de commettre
56:45qu'on préfère
56:46on ne le nie pas
56:48mais je ne m'en souviens plus
56:50je ne me souviens plus
56:51vous avez porté
56:51combien de coups
56:52quelques-uns
56:53alors que le légiste
56:54vient dire
56:55il y en a 8, 10, 12, 15, 20
56:56mais ça n'est pas
56:58qu'il ment
56:58mais c'est qu'il n'est pas
57:00en capacité
57:01en fait
57:01d'assumer
57:03en réalité
57:04ce qu'il a fait
57:04et les conséquences
57:05de ses actes
57:07alors
57:08dernière question
57:09on entend
57:10la présidente
57:11des assises
57:12poser comme première question
57:14en s'adressant
57:15donc à l'accusé
57:16vous plaidez coupable
57:17ou pas
57:18on a l'impression
57:19d'être devant
57:19une Syrie américaine
57:20c'est quoi
57:21c'est une dérive
57:22moi je pense
57:23que progressivement
57:25est-ce que c'est une dérive
57:27je ne sais pas
57:27si il faut appeler ça
57:28une dérive
57:28ou une évolution
57:29mais le droit
57:31anglo-saxon
57:31marque des points
57:33chaque jour
57:34un peu plus
57:35le plaidé coupable
57:36en France
57:36en matière criminelle
57:37ça n'existe pas
57:38non je pense
57:39que c'est une formule
57:40pour la présidente
57:40d'aller à l'essentiel
57:41bon monsieur
57:42il est acquis
57:44lui dit-elle
57:46en résumé
57:46que vous ne remettez pas
57:47en cause
57:47votre responsabilité
57:48et on voit ça
57:49tous les jours
57:50aussi même en correctionnel
57:51on leur dit
57:51monsieur pourquoi
57:52vous avez fait appel
57:53est-ce que vous faites appel
57:53parce que vous contestez
57:54votre culpabilité
57:56ou est-ce que c'est simplement
57:57parce que vous contestez
57:58la peine
57:59donc ça permet
57:59de gagner
58:00du temps
58:02je pense que
58:02le plaidé coupable
58:04criminel
58:05est quelque part
58:07à la réflexion
58:07aujourd'hui
58:08on a le plaidé coupable
58:09correctionnel
58:09et le plaidé coupable
58:11criminel
58:12alors là
58:12ça fait partie
58:13donc de cette évolution
58:15entre guillemets
58:16à l'anglo-saxonne
58:17que d'aucun
58:19auquel d'aucun aspire
58:20et qui en inquiète
58:23aussi beaucoup
58:23merci à vous deux
58:24pour vos éclairages
58:26merci à vous
58:27de nous avoir suivis
58:28et à très bientôt
58:29pour un nouveau
58:29Justice en France
58:31bonsoir
58:32merci à vous
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