Sept ans après la révélation du scandale des Cum Cum, le Crédit Agricole a reconnu que ces transactions financières étaient bien une fraude fiscale. Mais selon la cellule investigation de Radio France, d’autres banques françaises y ont aussi participé : 13 sont sous le coup d’enquêtes fiscales.
Vidéo produite par la cellule investigation de Radio France. Direction : Benoît Collombat
► Les enquêtes de la cellule investigation de Radio France : https://www.radiofrance.fr/cellule-investigation
► La page Facebook de la cellule investigation de radio France : https://www.facebook.com/InvestigationRF
► Le compte Twitter de la cellule investigation de Radio France : https://twitter.com/InvestigationRF
00:00Qui a participé à la fraude des koum koum et pourra-t-on un jour récupérer les milliards perdus pour les finances publiques ?
00:08Les koum koum, ce sont ces montages financiers organisés pour éviter la taxe sur les dividendes.
00:14En fait, quand un actionnaire étranger d'entreprise française perçoit un dividende, il doit payer une taxe au trésor public.
00:21En général, entre 15 et 30%.
00:24Sauf qu'il y a une faille. Les banques françaises, elles, ne sont pas taxées sur les dividendes.
00:28Il suffit alors à l'actionnaire de prêter ses titres à une banque pour une courte durée.
00:34Cela se voit même avec des pics de transactions à la bourse, juste avant le versement des dividendes.
00:39En général, entre avril et juin. Et hop, le tour est joué.
00:44Cela permet à l'actionnaire étranger de toucher plus d'argent que s'il avait payé la taxe.
00:49Et à la banque de lui prendre au passage une commission pour le service rendu.
00:55Gagnant-gagnant, koum koum, sauf pour le fisc.
00:58Selon un calcul de l'université de Mannheim, en Allemagne, ses opérations auraient fait perdre 33 milliards d'euros aux finances publiques françaises en 20 ans.
01:08Alors prenons un exemple pour être plus clair.
01:11Comme dans ce catalogue de Natixis pour investisseurs professionnels.
01:15Là, on voit que la banque propose à ses clients, non résidents français, de faire de l'amélioration de rendement.
01:23Comment ? En leur empruntant leurs actions du groupe Total, juste entre le 20 avril et le 20 mai.
01:30Tiens, c'est justement la saison des dividendes.
01:32Comme ça, au lieu de payer 15% de taxes au fisc français, le client ne perdra que 2% de son dividende.
01:39Pourquoi 2% ? Eh bien parce que c'est la commission que se garde Natixis pour le service rendu.
01:45Koum koum, gagnant-gagnant.
01:47La fédération bancaire française explique qu'il n'y a rien d'illégal à prêter ses titres à une banque.
01:52Et même si ça se passe au moment du versement du dividende.
01:55Ce n'est pas forcément pour contourner l'impôt.
01:57Pour elle, il n'y a pas de fraude.
01:59Enfin, pas de fraude systémique.
02:00Mais le Crédit Agricole vient de reconnaître les faits et a même écopé d'une amende de 88 millions d'euros pour blanchiment aggravé de fraude fiscale aggravée.
02:105 autres banques sont sous le coup d'une enquête pénale.
02:13HSBC, BNP Paribas, Hexan, Société Générale et Natixis.
02:18On a appris également qu'elles étaient une dizaine à être poursuivies par le fisc, dont l'une pour plus de 800 millions d'euros de redressement pour une année.
02:27Alors, pas systémique cette fraude ?
02:29Dans notre enquête, nous avons de nombreux témoignages de salariés, de traders, mais aussi de courtiers et gestionnaires de patrimoine
02:36qui nous ont expliqué que ces opérations ne servaient en fait qu'à contourner le fisc.
02:41Oui, j'ai fait des coum-coum. On savait que c'était borderline.
02:45Ça ne nous semblait quand même pas faire plaît vis-à-vis du fisc.
02:48Face aux parlementaires qui voulaient lutter contre cette fraude, les banques ont expliqué qu'elles ne pouvaient pas tricher
02:54parce que sur le marché, tout est anonyme.
02:56On ne sait pas de qui, on emprunte les titres.
02:59Et même les intermédiaires, comme les courtiers, ne donnent pas l'identité de leurs clients.
03:05Quand il y a un intermédiaire, ce qu'on appelle le broker, le courtier, il peut lâcher des indices.
03:09Ça peut être la taille, des surnoms.
03:11Je me rappelle, pour appeler JP Morgan, on pouvait entendre Jean-Pierre, par exemple.
03:15Ces opérations vont se sophistiquer pour être toujours plus compliquées à repérer.
03:20Mais le principe reste toujours le même.
03:22Si vous voulez tout comprendre sur le scandale des coum-coum, écoutez Révélation, l'émission de la cellule investigation de Radio France.
Écris le tout premier commentaire