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  • il y a 5 jours
Avec Anne Rosencher, directrice déléguée de la rédaction de L’Express, chroniqueuse sur France Inter. David Djaiz, essayiste et directeur général d’Ascend Partners. Et Alexandre Devecchio, rédacteur en chef des pages Débat et Idée du Figaro. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-mercredi-17-septembre-2025-4414710

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00:00Avec Benjamin Duhamel, nous vous proposons une table ronde à la veille de la journée d'action intersyndicale.
00:06L'exécutif anticipe une très forte mobilisation, 800 000 personnes de l'ordre de celles contre la réforme des retraites.
00:14On en parle Benjamin ce matin avec nos invités.
00:17Anne Rosencher, bonjour, merci d'être avec nous, directrice déléguée de la rédaction de l'Express, chroniqueuse sur France Inter,
00:23Alexandre Devecchio, bonjour, merci d'être avec nous, rédacteur en chef du service Débat du Figaro et du Figaro.
00:29Magazine, David Jaïs, bonjour, merci d'être avec nous sur Inter, essayiste et directeur général d'Ascène Partner.
00:35Soyez les bienvenus, crise politique, crise des finances publiques et donc peut-être ouverture d'un front social.
00:42Il faudra regarder de près l'ampleur des cortèges demain.
00:45Cette France qui s'apprête à descendre dans la rue, selon vous, on va vous poser la même question.
00:52C'est une France fatiguée, inquiète, pessimiste ou en colère à nos rechères ?
00:58Alors je pense que la France, de manière générale, elle est assez éprouvée par ces dernières années.
01:07Après, la question qui se pose, c'est les mobilisations auxquelles nous assistons depuis la rentrée.
01:11Et sans préjuger, bien sûr, de l'ampleur de la mobilisation de demain dont vous le disiez en introduction, les pouvoirs s'attendent à ce qu'elles soient importantes.
01:21L'impression quand même que ces mobilisations sont en décalage, voire font le grand écart parfois avec le désarroi qui travaille une majorité de Français.
01:30Après, pour le 10 septembre, bloquons-tout, on a vu la carte, la sociologie de cette mobilisation.
01:39Très à gauche.
01:39Était très militante, très homogène, très urbaine, très métropolitaine même, je dirais.
01:44Et en cela, presque symétrique à la mobilisation des gilets jaunes, première mouture.
01:51Et donc, à mon avis, aussi un peu plus limitée dans l'échetillonnage de France que ça pouvait représenter.
01:57Celle de demain, ça va être différent.
01:58C'est un exercice, on va dire, plus ritualisé, qu'on connaît, qui fait presque figure de patrimoine, si vous voulez.
02:05Mais je ne suis pas sûre que désormais, ça exprime le désarroi majoritaire.
02:14Et même au contraire, ce qui frappe quand on essaye de prendre un peu plus de recul, mais moi, je peux me tromper, mais moi, le sentiment que j'ai,
02:20c'est même le grand écart que ça fait parfois avec le sentiment, la nature du désarroi des Français, quand ça n'y ajoute pas, d'ailleurs, ces mobilisations.
02:31Alexandre De Vecchio, Anne Rosanchère disait mobilisation rituelle.
02:35Et c'est vrai que par rapport à celle d'il y a une semaine, cette journée bloquant tout, il y a une impression de symétrique bloquant tout.
02:41Les mots d'ordre étaient pour le moins nébuleux.
02:43Il y avait une forme de méfiance de la part des syndicats, notamment la CFDT.
02:48Là, c'est quelque chose de beaucoup plus traditionnel.
02:50On revient à des mobilisations qui ressemblent à celles autour du 1er mai, de la réforme des retraites ?
02:56Alors oui, Anne Rosanchère a raison.
02:57Le point commun, c'est que c'est quand même une manifestation plutôt de la France métropolitaine.
03:01Mais disons que la manifestation du 10 septembre était une manifestation de la gauche radicale.
03:06Là, on a une manifestation de la gauche institutionnelle et, je dirais même plus, des professions de la fonction publique, en réalité.
03:15Il fut un temps, moi, je me souviens, quand j'étais gamin en 1995,
03:19les syndicats représentaient la fonction publique, mais étaient capables d'entraîner avec eux le reste de la population.
03:27Ça me paraît aujourd'hui moins vrai.
03:29Ça fait bien longtemps que ce n'est pas arrivé.
03:32Et c'est sans doute le défi pour que cette mobilisation sociale s'installe dans le temps.
03:39C'est aussi le reflet, effectivement, d'une France fracturée,
03:42avec différentes Frances, différentes catégories qui ont chacune leur lutte.
03:47Le pays bouillonne, selon vous, David Jayes ?
03:52Je pense que si on branchait un sismographe sur les humeurs du pays,
03:55on alternerait entre désarroi, désespoir et colère rentrée.
04:01Je sens quand même, depuis quelques jours, une humeur générale qui ressemble beaucoup à l'automne de 2018.
04:06C'est-à-dire juste avant les Gilets jaunes ?
04:08C'est-à-dire juste avant les Gilets jaunes, même si ça ne donnera pas forcément la même mobilisation.
04:13Pour plusieurs raisons.
04:13On a une crise politique, une crise du personnel politique.
04:16On n'a pas réussi à s'entendre après la dissolution, à trouver des compromis,
04:20à trouver un programme de gouvernement.
04:21Mais ça, c'est la couche la plus superficielle.
04:23Il y a deux crises plus profondes, à mon avis.
04:25Une crise démocratique, qui est une crise de confiance du peuple dans ses élites,
04:29et en particulier dans ses élites politiques.
04:31Depuis sa création en 2007, le baromètre de la confiance politique du Civipof,
04:35il ne fait que mesurer des taux de défiance toujours plus importants.
04:38Et cette défiance peut se muer en haine, voire en désengagement complet vis-à-vis de la politique.
04:45Et puis, on a une autre crise, qui est plus grave, à mon avis,
04:48qui est une crise nationale.
04:49C'est-à-dire une crise de notre contrat social.
04:51Le sentiment de tout un peuple qui travaille, malgré les fractures dont parlait Alexandre,
04:56que le travail ne paie plus, et que, au fond,
04:59les contributeurs nets de la solidarité nationale payent toujours plus
05:03pour des bénéficiaires nets qui sont de plus en plus nombreux.
05:05Il y a un graphe qui est sorti il n'y a pas longtemps, qui a fait beaucoup débat,
05:08qui montrait que le niveau de vie moyen, je dis bien moyen,
05:12parce qu'il y a des écarts très importants, d'un retraité français,
05:15était supérieur au niveau de vie moyen d'un actif français.
05:18Et bien ça, pour moi, c'est...
05:19Et notamment par rapport à tous nos voisins européens.
05:21Et par rapport à tous les pays du monde, en fait.
05:23C'est une situation qui est unique au monde.
05:25Et donc, vous voyez bien que là, il y a quelque chose de notre contrat social
05:28qui a été inventé après 1945, qui est complètement déréglé.
05:31Et même si les gens n'en ont pas clairement conscience,
05:34je pense que dans le monde du travail,
05:35ces sujets de pouvoir d'achat traduisent cette exaspération.
05:38Je suis entièrement d'accord avec ce qui a été dit.
05:43Il y a un bouillonnement dans la France, en réalité, des actifs.
05:47Et j'ai fait quand même la distinction entre les actifs du privé et du public.
05:51Pas parce que je considère forcément que les uns sont mieux lottés que les autres.
05:55Mais pour le moment, cette France-là, justement, du travail dans le privé,
05:59n'a pas de structure pour exprimer, finalement, cette colère.
06:04Et elle l'exprime plutôt lors des élections et pas forcément dans la rue.
06:09Dans les manifestations, oui, c'est ça.
06:11Autre paradoxe de la situation,
06:13le pouvoir tente de convaincre sur la nécessité de s'attaquer aux problèmes de la dette
06:18et des déficits, de faire des économies.
06:20François Bayrou estimait ses économies à 44 milliards d'euros.
06:25Mais la pédagogie, entre guillemets, semble avoir échoué.
06:29La contestation s'exprimera donc demain dans la rue.
06:33Pensez-vous, Anne Rosanchère, que le sujet de la dette et des déficits
06:38soient abstraits pour les Français ?
06:41Et même qu'ils refusent d'en payer le prix ?
06:44Je pense que deux choses.
06:46D'abord, quand on demande aux Français,
06:48ça, désormais, ça arrive quand même comme préoccupation, la dette.
06:51Donc il y a quand même, je pense, cette idée
06:53que non pas parce que...
06:55En fait, ça peut nous rendre dépendants,
07:00notamment des marchés internationaux
07:02et nous enlever de la souveraineté économique.
07:05C'est quand même quelque chose qui préoccupe les gens,
07:07et je le comprends.
07:08Après, qu'il y ait eu un déni sur ces questions français,
07:11je pense que c'est juste.
07:12Et qu'aujourd'hui, on le paye, si vous voulez,
07:16en termes de...
07:17Où va l'argent ?
07:20C'est-à-dire qu'on ne peut pas être dans un pays
07:24où la pression fiscale et où la dépense publique
07:26sont quand même très élevées,
07:27parmi les plus élevées au monde en rapport du PIB.
07:31Les Français, généralement, sont un peuple
07:34qui est plutôt plus enclin à cette pression fiscale,
07:37parce que ça fait partie de notre contrat social,
07:39dont parlait David Jayce, culturellement, etc.
07:42Mais en revanche, il y a cette question de...
07:45Attendez, si on a cette pression fiscale
07:46et ce niveau de dépense publique,
07:47comment ça se fait que l'école s'effondre,
07:50l'école publique, qu'elle n'est pas au rendez-vous,
07:53qu'elle n'est pas les moyens d'accomplir ses promesses,
07:57que l'hôpital se soit à ce point dégradé ?
08:00C'est qu'il y a un problème dans la répartition de cet argent.
08:04Il peut y avoir un problème dans les recettes,
08:05ça, la gauche, appuie beaucoup dessus.
08:07Mais c'est là où je rejoins ce que disait David à l'instant.
08:12C'est quand on regarde aujourd'hui
08:13ce qui a monté dans la dépense publique
08:15et qui crée ce déficit chronique
08:18et cette dette chronique,
08:19ce n'est pas les dépenses de fonctionnement
08:21de l'hôpital ou de l'école.
08:22Ce n'est pas vrai.
08:23C'est le fonctionnement,
08:25le financement du vieillissement de la population.
08:27C'est comme ça, c'est démographique.
08:29Ce sont les retraites d'un côté,
08:30ce sont le système de soins.
08:32On veut garder ce qui fait le contrat social français
08:36et ce qui fait la valeur française.
08:38Mais il faut regarder les problèmes en face
08:41et après, éventuellement,
08:43s'écharper sur les méthodes.
08:45Mais ça, ça travaille la France.
08:47En effet, ça travaille la France en profondeur.
08:49David Jayes, est-ce qu'il n'y a pas pour autant
08:51une forme de décalage entre l'ampleur
08:53de la mobilisation prévue ?
08:54Je rappelle ce chiffre des autorités.
08:56800 000 personnes dans toute la France
08:58avec des mots d'ordre pour davantage
09:01de financement des services publics.
09:03Sur la justice fiscale, on en parlera dans un instant.
09:05Et la réalité concrète des finances publiques du pays.
09:08C'est-à-dire que la note de la France a été dégradée.
09:12La France dépense en proportion
09:13de ce qu'elle produit chaque année
09:14beaucoup plus que ses voisins européens.
09:17C'est quoi ?
09:17C'est du déni chez ceux qui s'apprêtent à manifester ?
09:19Non, mais le problème que j'ai avec tous ces discours sur la dette,
09:22que ce soit ceux qui veulent la purge pour la réduire
09:25ou ceux qui veulent taxer les ultra-riches.
09:27C'est qu'en fait, on oublie d'où vient la dette.
09:29C'est quoi le problème de la dette ?
09:30La dette, c'est quand on a une économie
09:32qui ne grandit pas aussi vite que le modèle social
09:35et les dépenses publiques.
09:36Si on veut garder, comme le disait Anne,
09:38notre contrat social, la qualité de notre contrat social
09:40qui fait notre fierté, notre solidarité nationale,
09:42eh bien il faut que l'économie se mette à grandir
09:44au moins aussi vite que notre modèle social.
09:47Et pour que l'économie grandisse vite,
09:49il faut retrouver de la productivité,
09:50il faut travailler plus à l'échelle du pays.
09:52Et après, évidemment,
09:53si on fait un plan pour retrouver une économie
09:56qui grandit plus vite que le système social,
09:58il faut que tout le monde contribue.
10:00Il faut que tout le monde fasse des efforts.
10:01Mais les discours, par exemple,
10:03sur le fait de taxer les riches,
10:04à mon avis, ils sont intéressants
10:06s'ils s'inscrivent dans une réflexion
10:08sur comment est-ce qu'on reconstruit
10:09un projet social dans lequel l'économie
10:12est capable de financer notre système social.
10:14Et je pense que c'est aussi ça qui exaspère les gens
10:16quand on tient un discours sur la dette.
10:17C'est comme si cette dette était tombée du ciel.
10:19Comme si elle n'était pas le résultat de choix
10:21ou plutôt de non-choix politiques et sociaux
10:24que nous faisons de manière absolument systématique
10:27depuis 30 ans, gauche, droite et centre confondu.
10:30Reconstruire un discours et une perspective,
10:33vous voyez ça où, chez qui et pour quand ?
10:36La réponse est dans la question.
10:39C'est-à-dire qu'on attend un peu le projet social,
10:42le projet national, un peu comme un attend Godot.
10:45Et j'ai peur qu'on l'attende longtemps
10:46parce que je ne vois personne aujourd'hui,
10:47effectivement, ni dans l'offre politique,
10:49ni dans le personnel politique,
10:50qui soit capable d'apporter une perspective.
10:52Mais attention, quand on va se taper la tête contre le mur,
10:56soit parce que le pays va imploser,
10:58soit parce qu'il y aura des événements extérieurs
11:00qui nous y obligeront,
11:01je suis certain que quelque chose va se passer.
11:03La France a toujours su mettre un coup de talon
11:05quand elle a touché le fond de la piscine.
11:06Je suis d'accord là-dessus.
11:09Je pense que ce qui est déprimant,
11:11et encore plus avec le contexte politique actuel,
11:14où malgré tout il y aura très peu de marge de manœuvre,
11:16pour Sébastien Lecornu,
11:18mais c'était pareil avant,
11:20c'est qu'effectivement on fait des politiques budgétaires,
11:22mais je crois qu'une politique budgétaire,
11:24là je suis tout à fait d'accord,
11:25et avant tout une politique économique,
11:27et j'allais dire une politique tout court.
11:29On a un problème de travail en France,
11:31et la vraie question,
11:32plutôt que traiter les symptômes,
11:34la dette est un symptôme,
11:35traiter la maladie,
11:36effectivement,
11:37et redresser l'économie du pays.
11:39Le problème c'est que ça ne peut pas se faire
11:40dans ce contexte-là,
11:42puisqu'effectivement les gens qui sont aux manettes
11:43auront très peu de marge de manœuvre,
11:45mais je crois aussi qu'on est dans une crise de régime,
11:47pas au sens institutionnel du terme,
11:48mais au sens où on a une classe politique,
11:50technocratique,
11:51qui justement n'a pas les solutions
11:53pour redresser le pays.
11:55Donc on est dans une situation de blocage absolu.
11:59Anne Rosancher,
11:59sur la question de la justice fiscale,
12:01s'est imposée dans le débat,
12:02la question de cette fameuse taxe Zuckmann,
12:05je rappelle,
12:05taxée à hauteur de 2% les super patrimoines,
12:08ceux de plus de 100 millions d'euros.
12:10Comment est-ce que vous analysez la place
12:12que prend cette mesure dans le débat public ?
12:15Avec, sous forme de contradictions,
12:16beaucoup de protestations du monde économique,
12:18d'un certain nombre de patrons de la French Tech,
12:21du patronat,
12:21et en même temps,
12:23immense soutien de la population.
12:25Ce matin, dans les colonnes du Parisien,
12:26on lit ce sondage pour l'IFOP
12:27commandé par le Parti Socialiste,
12:29plus de 8 Français sur 10 favorables
12:30à cette taxe Zuckmann,
12:31tous partis confondus.
12:33Comment ça s'analyse ?
12:34C'est que quand, généralement,
12:36on demande des efforts
12:38parce qu'il va falloir en faire
12:39pour réduire les déficits et la dette,
12:42il y a toujours cette question de,
12:43déjà, regardons qui contribue
12:45et à quelle hauteur,
12:46est-ce que chacun contribue
12:47à hauteur de ses capacités ?
12:49Et dans ces cas-là,
12:51bien sûr que les questions
12:52sur la justice fiscale se posent.
12:54Et je trouve intéressant
12:56le débat qu'il y a autour de la taxe Zuckmann
12:57parce qu'on voit bien
12:59que se pose aussi la question
13:00de, d'accord,
13:01mais si on fait de la justice fiscale,
13:03comment faire pour que ça ne grève pas
13:05la création de richesses d'industries
13:09dont la France a besoin
13:10puisqu'on parlait tout à l'heure
13:11avec David de la nécessité
13:13d'augmenter la production,
13:15les richesses,
13:16eh bien, il faut aussi faire attention
13:19que quand on prend des mesures
13:20de justice fiscale,
13:22voilà, le débat technique,
13:23il est autour de ça.
13:24Mais je dirais que le problème,
13:26il vient toujours du fait
13:27qu'on découpe comme ça les questions.
13:31C'est-à-dire qu'on parle
13:31de justice fiscale sans parler,
13:34par exemple, la gauche ne parle pas
13:35de ce dont j'ai parlé avant,
13:36à savoir que, justement,
13:38il y a une question aujourd'hui
13:39de...
13:40Où va l'argent ?
13:40Où va l'argent ?
13:41C'était, d'ailleurs,
13:42rappelons-le,
13:43presque le seul mot d'ordre
13:44des gilets jaunes,
13:45première mouture,
13:46on a eu du mal à savoir
13:47ce que ça représentait, machin,
13:49c'était le seul mot d'ordre,
13:50à l'époque, je crois que c'était
13:51même où va le pognon,
13:52mais c'était un mot d'ordre
13:54presque...
13:56qui peut rallier
13:59de la gauche
14:00jusqu'à Agnès Verdier-Molinier,
14:02si vous voulez,
14:03de savoir,
14:04à partir du moment...
14:05Où les gens sont rares,
14:05quand même.
14:05Où les gens sont rares,
14:06à partir du moment
14:08où on a une telle dépense publique
14:11et un tel besoin
14:12d'amélioration
14:14de notre promesse,
14:15quand même,
14:15les services publics en France,
14:17l'école et l'hôpital,
14:19c'est au cœur du modèle français,
14:21comment ça se fait
14:21qu'on n'y arrive pas mieux comme ça ?
14:23Sur la taxe Zuckman,
14:25David Jayes ?
14:25Je comprends le sentiment collectif
14:27autour de la justice fiscale,
14:28parce que depuis 40 ans,
14:30mondialisation et informatisation aidant,
14:32on a un top 1%
14:33ou un top 0,1%
14:36de la population
14:37qui a effectivement vu
14:38sa part dans la richesse
14:39des pays occidentaux
14:40augmenter très fortement.
14:41Par parenthèse,
14:42la France n'est vraiment pas le pays
14:43où les inégalités
14:44se sont creusées
14:45par rapport à la situation
14:46dantesque qu'on a...
14:47Parce que le modèle
14:48est très redistributif.
14:49Voilà.
14:49...qu'on a aux Etats-Unis.
14:50Je voudrais juste dire un mot
14:51sur la crise de régime.
14:52Parce que moi,
14:53je ne pense pas
14:53qu'on soit dans une crise de régime.
14:55Je trouve que les institutions
14:55de la 5e...
14:56J'ai des parts institutionnelles.
14:57C'est l'épuisement
14:58d'une classe politique.
14:59Elle n'a plus les solutions.
15:01Une crise politique.
15:01Parce que je trouve
15:02que les institutions
15:02de la 5e encaissent les coups
15:04avec la persévérance
15:05de Mohamed Ali sur le ring.
15:07On leur fait subir
15:08quand même des choses
15:09assez baroques
15:09depuis 12 à 18 mois
15:11et elles encaissent bien les coups.
15:13Je pense plutôt que...
15:14Vous savez,
15:14en sciences politiques,
15:15on dit
15:15que la crise de la démocratie
15:16dans les pays occidentaux,
15:17elle prend deux directions.
15:19Soit l'ultra-polarisation,
15:20c'est ce qu'on voit
15:20aux Etats-Unis
15:21après l'assassinat
15:22de Charlie Kirk
15:23avec une guerre civile culturelle
15:24qui se déroule
15:25entre deux camps
15:26d'une certaine manière.
15:27Soit l'ultra-fragmentation,
15:29c'est ce qu'on voit en Allemagne.
15:30On avait deux grands partis
15:31il y a 20 ans
15:31et là, vous avez
15:324, 5, 6, 7, 8 forces politiques.
15:34Eh bien, en France,
15:34je crois que malheureusement,
15:35on a fromage et dessert.
15:37C'est-à-dire qu'on a
15:37une vie politique
15:38qui se saucissonne de plus en plus.
15:40On parle de tripartition.
15:41C'est quand même ça
15:42qui nous empêche de gouverner.
15:48Puissance majoritaire.
15:49Et en même temps,
15:50un niveau de polarisation
15:51qui parfois n'a,
15:53alors, les armes à feu en moins,
15:54mais qui n'a rien à envier
15:56à celui des Etats-Unis.
15:57Sauf sur la taxe Zuckman
15:58à entendre le sondage.
16:00Que citer Benjamin ?
16:02La vérité, c'est que la taxe Zuckman,
16:04ça ne touche pas grand-être.
16:06Zuckman, le danger
16:07qui menace l'économie française.
16:08C'est le titre de une
16:09de votre journal, Alexandre.
16:11Je crois qu'Anne a dit les choses.
16:13C'est-à-dire que ça ne va pas résoudre
16:15le problème de la désindustrialisation.
16:17Ça risque même de l'aggraver.
16:19Ça ne résout pas aussi
16:20le problème de gestion.
16:22Parce que la question
16:22où va l'argent ?
16:23C'est qu'il y a un problème de gestion.
16:25Quand il y a autant d'impôts,
16:26pourquoi les choses fonctionnent aussi mal ?
16:27Il faudrait y répondre.
16:29Et ensuite, je pense que
16:30tout le monde y est favorable.
16:31Parce que tout le monde se dit
16:32qu'il ne sera pas impacté.
16:33On préfère quand même
16:34que ce soit les autres
16:34qui paient des impôts.
16:37Ça, je crois que c'est juste
16:37un réflexe humain.
16:39Mais moi, je veux rebondir
16:40sur est-ce que les mobilisations
16:42vont durer et s'installer ?
16:45Je pense que,
16:46comme c'est une crise politique,
16:47ça a été dit,
16:49si ça devient un enjeu politique
16:51autour de la mobilisation,
16:53c'est parce que,
16:54en gros,
16:55si ça devient la question
16:57de la dissolution
16:58ou de la démission
16:59d'Emmanuel Macron
17:00qui est posée,
17:01je pense que là,
17:02ça peut prendre.
17:03Parce qu'on se rend bien compte
17:04que si on veut avoir
17:06vraiment une politique
17:08de redressement économique
17:09un jour,
17:10il faudra un débat présidentiel.
17:12Et là, on est dans une situation
17:14d'arrêt pendant deux ans.
17:15Tout le monde le sait.
17:16Est-ce que le pays
17:17va vouloir attendre deux ans,
17:19si vous voulez,
17:21avant d'avoir ce grand débat ?
17:22Anne Rosanchère,
17:23décidément,
17:23on va beaucoup citer
17:24le Figaro ce matin.
17:25Voilà ce que disait
17:25Jérôme Fourquet
17:26dans vos colonnes,
17:27Alexandre Devecchio.
17:28À vous !
17:28Et il le disait à vous,
17:29d'ailleurs,
17:29dans cette interview.
17:30la vie politique
17:31est une pièce de théâtre
17:33totalement décalée
17:33se jouant devant
17:35une salle vide.
17:36Anne Rosanchère,
17:36quand on voit
17:36les premiers pas
17:37du Premier ministre
17:39Sébastien Lecornu,
17:40notamment cette décision
17:41de raboter
17:43les avantages,
17:44certains des avantages
17:45octroyés à vie
17:46aux anciens premiers ministres,
17:48est-ce que vous avez
17:48cette impression-là,
17:49effectivement,
17:49d'une pièce de théâtre
17:51jouée devant une salle vide ?
17:52Ou est-ce qu'au contraire,
17:52c'est une mesure
17:53pour raffermir le lien
17:55entre les politiques
17:55et les citoyens ?
17:56Les deux ?
17:57C'est-à-dire que,
17:58non, mais je pense
17:59que malheureusement,
18:00et David a employé
18:01l'expression
18:02de crise de confiance,
18:03c'est pas galvaudé,
18:05parce que parfois,
18:05on parle comme ça,
18:06confiance,
18:07comme si c'était un cliché.
18:08La confiance,
18:09c'est quand même
18:09à la base de la démocratie,
18:10puisque vous donnez mandat
18:12à quelqu'un
18:13pour qu'il agisse
18:14dans l'intérêt général.
18:15Et aujourd'hui,
18:16je pense que là
18:17où ce lien-là
18:19est grévé
18:19très profondément,
18:21c'est qu'il y a
18:22cette idée
18:22que finalement,
18:24les hommes politiques
18:26et les femmes politiques
18:27sont plus
18:29dans leur calcul personnel,
18:31dans leur agenda
18:33des partis,
18:34de qu'est-ce qu'on vise,
18:35à quelle échéance,
18:37etc.,
18:38que dans l'intérêt général.
18:40Donc,
18:40cette mesure
18:41qui avait d'ailleurs
18:42déjà été annoncée
18:43par François Bayrou
18:43est pour dire
18:44non mais vous voyez,
18:45on essaye de montrer
18:48qu'on n'est pas là
18:49pour notre intérêt particulier,
18:51tout le monde
18:51peut faire des efforts,
18:53je ne pense pas
18:53que ça va pouvoir
18:54résoudre la crise
18:55de confiance
18:56de manière générale
18:57et pour cela,
19:00je dirais,
19:01il faut qu'on ait
19:02le sentiment
19:03d'avoir des hommes
19:04et des femmes politiques
19:04qui s'enlèvent
19:06de l'écume
19:07et de la com
19:07parce que le truc terrible,
19:09c'est le mal
19:11qu'a fait la com
19:12à la politique en France.
19:13Cette notion
19:14de pièce de théâtre
19:15qu'a bien résumé
19:16Jérôme Fourquet,
19:17c'est une notion
19:17de chacun joue un jeu
19:19et n'est pas sincère
19:20et ne dit pas la vérité
19:22et se place
19:22ou dit des choses
19:26non pas parce qu'ils pensent
19:27que c'est bien
19:27pour le pays
19:28mais parce que ça leur permet
19:29d'être positionnés
19:31comme ci et comme ça.
19:32La politique,
19:33ce n'est pas ça.
19:33La politique,
19:34c'est de chercher
19:35le diagnostic majoritaire
19:37et d'essayer
19:37de convaincre une majorité.
19:39Or,
19:40depuis des décennies,
19:41maintenant,
19:42on a le sentiment
19:43que les partis traditionnels
19:44ont abandonné
19:45cette quête-là.
19:46Pourquoi ?
19:47Notamment par flemme
19:49parce qu'ils misaient
19:50sur un second tour
19:51contre le Rassemblement National
19:52pour l'emporter.
19:53Donc finalement,
19:54ils se sont dit
19:54il suffit d'atteindre 20%
19:57de mobiliser
19:58sur son électorat
19:59et sur son petit segment
20:01pour pouvoir l'emporter
20:02au deuxième tour.
20:03Sauf que c'est inconséquent
20:05parce qu'au fur et à mesure,
20:07ça a abandonné
20:08la vocation majoritaire
20:09de la politique
20:10et ça a mené
20:11le Rassemblement National
20:12où il en est.
20:13Vous savez,
20:14c'est Philippe Séguin
20:15qui était pourtant
20:15un très très grand combattant
20:18du Front National
20:20à l'époque
20:20qui avait dit
20:21cette stratégie cynique
20:23du Front Républicain
20:25mènera le RN à 40%.
20:26Il l'avait dit
20:27dans les années 90.
20:28On ne peut pas dire
20:29qu'il s'était trompé.
20:30La vie politique,
20:30pièce de théâtre décalée,
20:32se jouant devant une salle vide,
20:34on en est là,
20:35David Jayes ?
20:35Oui,
20:35je pense que les mauvais
20:36vaudevilles mènent toujours
20:38à des tragédies de racines.
20:39Et on a quand même
20:41l'impression
20:41d'avoir une fin de régime
20:44qui se joue
20:45sous nos yeux.
20:46Je relisais il n'y a pas longtemps
20:47le magnifique livre
20:48d'Emmanuel Berle
20:49qui s'appelle
20:49La fin de la Troisième République
20:50où il décrit
20:51les mœurs
20:52de ce personnel politique
20:53en décomposition
20:54à la veille de la catastrophe.
20:56Alors,
20:56on n'est pas du tout
20:56dans la situation,
20:58même si la situation géopolitique
21:00aussi aujourd'hui
21:00est inquiétante,
21:01mais je pense
21:02qu'il va falloir
21:02se ressaisir.
21:04Et j'espère
21:05qu'on va le faire
21:05collectivement
21:06et rationnellement
21:07plutôt qu'en subissant
21:08des événements extérieurs.
21:10D'un mot,
21:10Alexandre Devecchio,
21:12il y a un sujet
21:12qui apparaît
21:13comme une forme d'angle mort
21:14du moins du côté
21:14du Premier ministre.
21:16C'est la question
21:16de l'immigration.
21:17Plus d'1,3 millions de Français
21:18ont signé la pétition
21:19de Philippe De Villiers
21:20pour un référendum,
21:21pétition signée notamment
21:21par Laurent Wauquiez.
21:23Alors,
21:23les parallèles avec la loi
21:24Duplomb sont compliqués
21:25parce que la loi Duplomb,
21:26il fallait mettre
21:26sa pièce d'identité
21:27alors que là,
21:27on s'est rendu compte
21:28qu'à peu près
21:28pas mal de monde
21:29pouvait la signer.
21:30Il n'empêche
21:31cette question-là
21:32de l'immigration aussi,
21:34elle va être un enjeu,
21:35un des sujets
21:35dans l'expérience
21:36qui vient rapidement.
21:36C'est simple,
21:37oublions la pétition
21:38mais regardons les sondages,
21:39c'est une question
21:39qui fait consensus
21:40à peu près.
21:427 Français sur 10
21:43veulent une réduction
21:44drastique des flux migratoires
21:45et il n'y a pas
21:46de réponse politique.
21:47Donc là encore,
21:47on est dans une politique
21:48anti-majoritaire
21:50d'une certaine manière
21:51comme le disait
21:51Anne Rosenzscher
21:52avec une classe politique
21:53qui n'a pas
21:53la réponse
21:54à cette question-là.
21:57Donc oui,
21:58fin de régime
21:59pour une classe politique
22:01technocratique
22:02de centre-droit
22:02et de centre-gauche
22:03qui n'est peut-être
22:04plus adaptée
22:05aux défis d'aujourd'hui
22:07et pas forcément
22:07d'alternative
22:08ce qui rend
22:09la situation
22:10assez angoissante
22:11et vertigineuse.
22:12Merci à tous les trois,
22:13merci pour vos analyses
22:15Alexandre Devecchio,
22:16David Jayes
22:17et Anne Rosenzscher.
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