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La série BFM Business « Les théoriciens de l’économie » revient sur les théories économique de grand penseurs du XXème siècle, Friedrich von Hayek, John Maynard Keynes, et Karl Heinrich Marx.

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Éducation
Transcription
00:00...
00:00Cette gigantesque centrale solaire construite au fin fond du désert de l'Arizona
00:12fait partie du plus grand plan de sauvetage économique de l'histoire.
00:16...
00:16Face à une économie toujours vacillante,
00:26le gouvernement américain a décidé de mettre 750 milliards de dollars sur la table
00:31pour tenter de sortir le pays du maras.
00:35Et le gouvernement britannique, même s'il est bien décidé à réduire les emprunts,
00:39dépense des milliards pour relancer la croissance.
00:42Est-ce vraiment la bonne solution ?
00:44Après la crise de 2008, on dit aujourd'hui que le monde est à court d'argent.
00:49Or, plutôt que d'arrêter les frais,
00:51les gouvernements dépensent des sommes colossales dont ils ne disposent pas.
00:54C'est à n'y rien comprendre.
00:57En fait, tous s'inspirent des idées extraordinaires de cet homme,
01:01l'économiste britannique John Maynard Keynes.
01:04Pour faire court, il a changé le monde.
01:07C'est indéniablement l'un des plus grands hommes du XXe siècle
01:10et à bien des égards du XXIe siècle.
01:14Keynes pensait que le capitalisme était une idée brillante,
01:17mais que sans contrôle adéquat, il pouvait aussi avoir des conséquences désastreuses.
01:21Pour lui, c'est au gouvernement d'intervenir pour remettre l'économie sur les rails.
01:24C'était l'archétype du monsieur je-sais-tout de Whitehall, Westminster ou Cambridge.
01:29La pensée de Keynes n'a jamais semblé plus pertinente ou controversée qu'aujourd'hui.
01:36Car pour la première fois depuis les années 30,
01:38nous sommes confrontés au même problème que ce auquel il a dû faire face à l'époque.
01:42Faillite bancaire, crise internationale, possibilité d'une longue récession.
01:46Dans notre saga sur les théoriciens de l'économie,
01:52vous allez découvrir la vie et les théories révolutionnaires de trois hommes aux idées radicalement différentes.
01:57Karl Marx, Friedrich Hayek et aujourd'hui Keynes.
02:03Grâce à eux, nous sommes maintenant conscients de l'incroyable pouvoir de l'argent,
02:07du bien que les marchés et le capitalisme peuvent apporter,
02:09mais également des énormes dégâts qu'ils peuvent causer.
02:13Ces penseurs radicaux pourraient-ils nous permettre de comprendre le marasme dans lequel nous nous trouvons ?
02:17Et surtout, leurs idées pourraient-elles nous aider à en sortir ?
02:20Nous sommes dans les paisibles collines du nord-ouest de l'Angleterre.
02:40L'économie est à l'œuvre.
02:50Ces pilotes courent le rallye de Cumbry.
03:08Leur sponsor, une célèbre marque italienne de pneus,
03:11est l'un des bénéficiaires d'un fonds d'aide gouvernemental
03:13destiné à encourager la croissance et l'emploi dans la région,
03:16doté de plus de 2 milliards de livres.
03:18Et c'est surtout cet ancrage local de l'entreprise qu'ils veulent mettre en avant.
03:28Il s'agit de l'un des plus grands fabricants de pneus au monde.
03:31L'entreprise a des usines en Angleterre depuis près d'un siècle.
03:36Elle souhaite mettre en valeur le haut de gamme
03:38et renforcer la recherche et le développement.
03:44Mais l'entreprise manque d'argent.
03:48Cette fabrique est l'un des principaux employeurs de la ville de Carlyle.
04:02Elle compte près de 750 ouvriers
04:04qui produisent une dizaine de milliers de pneus par jour.
04:08Il y a peu, les employés craignaient que l'entreprise délocalise à l'étranger
04:11pour réduire les coûts de production.
04:12Une subvention gouvernementale de 2 millions de livres
04:16a convaincu le fabricant de pneus de plutôt investir au Royaume-Uni.
04:21Quand on investit massivement,
04:25les gens sont plus enclins à dépenser leur salaire,
04:27ce qui profite à l'économie locale.
04:30Et ça ne concerne pas uniquement les employés de la fabrique de pneus.
04:33Des centaines de fournisseurs et de prestataires dépendent de l'usine
04:38et tirent profit de l'augmentation des dépenses de l'entreprise
04:41qu'ils finissent par réinjecter dans l'économie locale.
04:44A première vue, on pourrait trouver curieux
04:49que le gouvernement renfloue une entreprise privée
04:51alors qu'il est si inquiet au sujet de la dette publique
04:54qui ne cesse d'augmenter
04:55et dépasse aujourd'hui les 1000 milliards de livres.
04:58Mais Keynes est très clair.
05:00Parfois, si on veut que le capitalisme aille dans notre sens,
05:03nous sommes obligés d'agir,
05:05même si ça implique de dépenser de l'argent que nous n'avons pas.
05:08Selon Keynes, il est possible pour un gouvernement
05:11d'intervenir et d'améliorer la situation des marchés.
05:17Certains disent qu'il a sauvé le capitalisme des capitalistes.
05:25Mais pour les détracteurs de Keynes,
05:27ce sont les erreurs des gouvernements
05:28qui sont à la base du problème.
05:32Presque à chaque fois qu'une économie
05:33se retrouve fortement déséquilibrée,
05:36c'est à cause d'une erreur de politique.
05:39Pour Keynes, même en période d'instabilité,
05:41l'intervention du gouvernement peut s'avérer plus bénéfique
05:46que si on laissait l'économie se rétablir toute seule.
05:50Je ne suis pas très convaincu.
05:57Qu'il soit le sauveur de l'économie
05:59ou celui qui l'a mené à sa perte,
06:01Keynes fait toujours autant débat qu'il y a 80 ans.
06:04Ce sont les seules images
06:12où l'on voit Keynes parler.
06:21Il s'agit d'une émission sur l'économie
06:23et la façon de répartir les ressources de la planète.
06:25Mais pour Keynes, il ne s'agit pas de donner une simple leçon de science,
06:30mais de faire du monde un meilleur endroit.
06:33Quand on pense aux Anglais qui ont laissé leur empreinte sur le 20e siècle,
06:38le premier nom qui vient à l'esprit,
06:40c'est bien sûr celui de Winston Churchill.
06:42John Maynard Keynes n'est pas loin derrière.
06:44C'est dans cette maison de Londres
06:50que pendant des années, Keynes a élaboré des idées
06:53qui ont contribué à façonner certains des événements majeurs du siècle dernier.
06:57Sauver le capitalisme de la Grande Dépression,
07:00financer la guerre contre les nazis
07:01et bâtir un nouvel ordre économique d'après-guerre
07:04qui a ouvert la voie à des décennies de croissance et de prospérité.
07:08Il était respecté par tous ceux qui comptaient,
07:11président, premier ministre,
07:13tous écoutaient ce qu'il avait à dire,
07:16bien que ce ne soit qu'après sa mort
07:18que tout le monde a véritablement commencé à suivre ses conseils.
07:22Je me suis inscrit à l'université en 1965.
07:25L'idée qui dominait le climat intellectuel de l'époque,
07:28pas uniquement en termes économiques,
07:30mais également en politique,
07:31c'était que Keynes avait résolu le problème économique.
07:35Vers la fin des années 60,
07:37la pensée de Keynes a imprégné le tissu économique
07:39de près de l'ensemble du monde occidental.
07:41Mais il s'avère que Keynes est impuissant
07:43face à la forte inflation des années 1970.
07:46Après cette période,
07:48sa popularité est en perte de vitesse
07:49et les idées de libre-échange commencent à gagner du terrain.
07:52Mais en 2008,
07:53lorsque le monde sombre dans la tourmente,
07:55Keynes est de retour.
07:56Ce sont les idées qui mobilisent le monde,
07:59à tous les niveaux,
08:01en bien comme en mal.
08:03Et selon moi,
08:04personne n'a jamais eu de meilleures idées que Keynes
08:06sur la façon de penser le capitalisme.
08:10Et si ça, ça compte,
08:11alors lui, il compte.
08:13Quelles sont donc ces grandes idées
08:26qui ont dominé notre paysage économique
08:28pendant si longtemps ?
08:29Et d'où viennent-elles ?
08:31Keynes est né en 1883
08:37pendant l'apogée de l'Empire britannique
08:39dans une famille de classe moyenne.
08:42Ses parents l'envoient étudier
08:43à Eton et à Cambridge.
08:45Jusque-là, rien d'extraordinaire.
08:47Mais à l'université,
08:49il commence à fréquenter un groupe
08:50peu conventionnel,
08:51le Bloomsbury Group.
08:53Le jeune homme passe la majeure partie
08:55de son temps ici,
08:56dans leur maison de campagne
08:57de Charleston, dans le Sussex.
08:59C'était une sorte de communauté
09:01réunissant des artistes,
09:03des écrivains et un économiste.
09:05Ils se considéraient comme des marginaux.
09:10Ils vivaient selon un concept
09:11plutôt indéfinissable,
09:14la bohème.
09:22Ils étaient très en avance sur leur temps.
09:27C'était des précurseurs
09:28en matière de comportement sexuel,
09:30de politique
09:31et dans les domaines esthétiques,
09:33artistiques et littéraires.
09:37Le Bloomsbury Group
09:39lui a permis de sortir
09:40des sentiers battus
09:41et de concevoir l'inconcevable.
09:44Le contact de tous les intellectuels
09:46lui a donné le courage
09:47de se jeter dans le vide,
09:48comme s'il avait des ailes.
09:50C'est un peu comme s'il n'y a pas de l'inconcevable.
10:04Keynes a toujours baigné
10:06dans le monde de la culture,
10:07collectionnant les œuvres d'art,
10:09les livres
10:09et ouvrant même un théâtre à Cambridge.
10:14Ce n'est peut-être pas un hasard
10:15qu'un homme au centre d'intérêts
10:16si variés
10:17finissent par développer
10:18une école de pensée économique
10:20radicalement nouvelle,
10:21le keynesianisme,
10:23qui prône un contrôle
10:24de l'économie
10:24par le gouvernement.
10:35Les Grecs s'indignent
10:37contre l'austérité
10:37qui leur est imposée
10:38par leurs voisins européens.
10:39Cette situation
10:43semblerait sans doute
10:44familière à Keynes.
10:46Il a lui-même
10:46été témoin
10:47des ravages
10:47que peuvent causer
10:48certains gouvernements
10:49en imposant une politique économique
10:50à un pays en difficulté.
10:55Ça lui a permis
10:56de développer
10:57sa première grande idée.
10:59Dans un monde
10:59interconnecté,
11:00la politique
11:01du chacun pour soi
11:02est vouée à l'échec.
11:03Cette idée
11:12lui est inspirée
11:12par les horreurs
11:13de la Première Guerre mondiale.
11:16Fidèle
11:16à ses idéaux bohèmes,
11:18Keynes refuse
11:19de partir au front.
11:22Mais il accepte
11:23de mettre
11:23son génie économique
11:24au service
11:24du financement
11:25de la guerre
11:25en travaillant
11:26pour le trésor britannique.
11:31À la fin de la guerre,
11:33Keynes réalise
11:34que la haine
11:34des vainqueurs
11:35pour les Allemands
11:36pourrait leur faire
11:36commettre
11:37une terrible erreur.
11:41La fin de la guerre
11:4214-18
11:43est marquée
11:43par une hostilité
11:44manifeste
11:45à l'égard de l'Allemagne.
11:47Ça avait été
11:47une guerre désastreuse
11:48en termes de pertes humaines
11:50mais également
11:50d'un point de vue économique.
11:52Dans l'esprit des gens,
11:53il fallait que l'Allemagne
11:54paye.
11:56Au château de Versailles,
11:58lors de la ratification
11:59du traité
11:59du même nom,
12:00le premier ministre
12:01britannique
12:02Lloyd George
12:03et ses alliés français
12:04et américains
12:05savourent leur victoire.
12:07Keynes fait partie
12:07de la délégation britannique.
12:09Contre son avis,
12:10l'Allemagne est astreinte
12:11à de lourdes réparations
12:12financières
12:13en compensation
12:14des dommages
12:14et des souffrances
12:15causées pendant la guerre.
12:16Comment l'Allemagne
12:19aurait-elle pu s'acquitter
12:20de cette dette ?
12:22Pour créer de l'argent,
12:23de la richesse,
12:24il faut une économie
12:25en état de marche.
12:26On ne peut pas rembourser
12:27une dette
12:27à partir de rien.
12:37Keynes est tellement
12:38scandalisé
12:39qu'il démissionne
12:40et part trouver refuge
12:41à Charleston
12:41où il rédige
12:43sa première oeuvre majeure,
12:44Les conséquences économiques
12:45de la paix.
12:48Très vite,
12:48le livre devient
12:49un best-seller,
12:51même si certains diront
12:52que sa compassion
12:52pour le peuple allemand
12:53lui aurait valu
12:54la croix de fer.
12:56Le leitmotiv
12:57de Keynes,
12:58c'est que le traité
12:58de Versailles
12:59n'est pas seulement injuste,
13:01mais également stupide.
13:03Pour lui,
13:03mettre l'Allemagne
13:04à genoux
13:04constitue une menace
13:05pour le maintien
13:06de la paix en Europe
13:06et ne va sûrement pas
13:08contribuer à la prospérité,
13:09puisque le pays
13:10n'aura plus les moyens
13:11d'importer
13:12de produits britanniques
13:13et ainsi aider
13:14la Grande-Bretagne
13:14à se remettre
13:15de la guerre.
13:16C'est un argument
13:17qu'il défendra
13:17jusqu'à sa mort.
13:18Pour lui,
13:19nous sommes tous
13:20dans le même bateau.
13:21Le traité de Versailles
13:23a saigné à blanc
13:24l'une des plus grandes
13:24puissances européennes.
13:28Comme Keynes l'avait prédit,
13:29l'économie allemande
13:30sombre dans le chaos.
13:33La dette publique
13:34est tellement mirobolante
13:36que le pays est obligé
13:37d'émettre plus de monnaie,
13:38menant inexorablement
13:40à l'hyperinflation
13:41et à l'effondrement
13:42du Marc.
13:44L'hyperinflation
13:45ne ravage pas
13:45uniquement l'économie,
13:47mais détruit également
13:47le tissu sociétal
13:48du pays
13:49et avec lui,
13:50les espoirs
13:51du peuple allemand.
13:52Lorsque Keynes
13:53avait annoncé
13:53que le traité de Versailles
13:54mènerait droit
13:55à la catastrophe,
13:56même ses partisans
13:57pensaient qu'il exagérait.
13:59Mais ils finissent
13:59vite par changer d'avis.
14:00A peine 14 ans
14:08après la ratification
14:09du traité,
14:10Hitler arrive au pouvoir.
14:15La Seconde Guerre mondiale
14:16n'est plus très loin.
14:23Comme Keynes l'avait prédit,
14:25la dégradation
14:26des relations économiques
14:27a des conséquences
14:28catastrophiques.
14:29Keynes savait
14:31que les réparations
14:32financières
14:32étaient beaucoup
14:33trop lourdes,
14:34qu'elles seraient
14:35à l'origine
14:35du prochain conflit
14:36européen
14:36et que les alliés
14:38ne voyaient pas
14:38plus loin
14:39que le bout
14:39de leur nez.
14:40Et il avait raison.
14:46Que penserait Keynes
14:47de l'Europe actuelle ?
14:50Il verrait encore une fois
14:51les forts dicter
14:52leurs lois
14:52aux plus faibles.
14:53Sauf que cette fois-ci,
14:55les gouvernements
14:55puissants,
14:56notamment l'Allemagne
14:57elle-même,
14:58imposent des réductions
14:59budgétaires aux nations
15:00en crise,
15:01comme la Grèce
15:01en échange
15:02de plans de sauvetage.
15:05À l'heure actuelle,
15:07la pensée dominante
15:07en Europe
15:08tente à répéter
15:09les mêmes erreurs
15:10qu'à la fin
15:10de la Première Guerre mondiale,
15:12notamment en ce qui
15:13concerne la Grèce.
15:14À force d'imposer
15:15à un pays
15:15des objectifs intenables,
15:17ça va mal finir.
15:18quand on observe
15:20ce qui se passe
15:21actuellement
15:21dans la zone euro,
15:23les émeutes
15:24en Grèce,
15:24les grèves
15:25généralisées
15:26en Espagne
15:26et au Portugal,
15:28on a l'impression
15:28que l'histoire
15:30ne nous a rien appris.
15:34Je pense
15:35qu'il aurait voulu
15:36qu'on consolide
15:37l'économie grecque
15:38pour que le pays
15:38puisse rembourser
15:39sa dette.
15:41Tant que le débiteur
15:42paye,
15:42le créancier
15:43est content.
15:43Mais quand un gros débiteur
15:45commence à rencontrer
15:46des difficultés,
15:47le créancier
15:48se retrouve lui aussi
15:49dans la panade
15:49parce qu'il peut dire
15:50adieu à son argent.
15:54Keynes aurait sans
15:55nul doute trouvé
15:56une solution à la crise
15:57que rencontrent
15:57les pays européens
15:58aujourd'hui.
16:02D'ailleurs,
16:03quelques années
16:03après la ratification
16:04du traité de Versailles,
16:06il dévoile un plan
16:07expliquant comment
16:08optimiser les relations
16:09économiques.
16:10Mais avant tout,
16:11il répond à une question
16:12plus basique.
16:12comment diriger
16:13l'économie.
16:17Pour Keynes,
16:19si nous voulons
16:19dompter l'économie
16:20et nous en servir
16:21en notre faveur,
16:23nous devons avant tout
16:23comprendre comment
16:24elle fonctionne.
16:25Mais plus facile
16:26à dire qu'à faire.
16:27Keynes arrive à la conclusion
16:28que l'économie
16:29est imprévisible.
16:31Il remarque d'ailleurs
16:32que c'est souvent
16:33lorsque le futur
16:34de l'économie
16:34semble tout tracé
16:35que les désastres
16:37arrivent.
16:42Et l'histoire
16:45lui donne raison
16:46en 2008
16:46lorsque le système
16:48financier mondial
16:48implose
16:49après l'une des plus
16:50longues périodes
16:50de croissance
16:51de l'histoire.
16:52Après coup,
16:53nombreux sont ceux
16:54qui prétendent
16:55l'avoir vu venir.
16:56Mais avant la crise,
16:58presque tous
16:58agissaient
16:59comme si le boom
16:59durerait éternellement.
17:01trop présumé
17:07du futur
17:07de l'économie
17:08est une autre erreur
17:09contre laquelle
17:10Keynes nous a mis
17:10en garde
17:11il y a près
17:11de 80 ans.
17:14Parce qu'il s'est
17:15lui-même
17:15fait prendre au piège.
17:26À la fin
17:27de la première
17:27guerre mondiale,
17:28il quitte
17:29le trésor
17:30et trouve refuge
17:31au King's College
17:32de Cambridge,
17:33son ancienne
17:34université.
17:40Il devient
17:41maître de conférences,
17:43puis intendant.
17:44C'est lui
17:44qui supervise
17:45les finances
17:45de l'université.
17:52Il porte
17:53un intérêt
17:53tout particulier
17:54aux probabilités.
17:56Une branche
17:56des mathématiques
17:57qui tente
17:58de prédire
17:58le futur
17:59en se basant
18:00sur le passé.
18:01Quand il n'est pas
18:02en train
18:02d'écrire
18:03ou d'étudier,
18:04Keynes
18:04s'essaye
18:05au boursicotage.
18:06Il a besoin
18:07d'argent
18:07et pense que
18:08la spéculation
18:09est un bon moyen
18:09d'arriver
18:10à ses fins.
18:11Par ailleurs,
18:12c'est une excellente
18:12façon de tester
18:13sa théorie
18:14selon laquelle
18:14les probabilités
18:15et les statistiques
18:16peuvent permettre
18:17de prédire
18:17les variations
18:18du marché.
18:19Les résultats
18:20sont très mitigés.
18:22À ses débuts
18:23d'investisseurs,
18:24Keynes
18:24s'asseyait
18:25dans son lit
18:25tous les matins
18:26et noircissait
18:27des pages
18:27et des pages
18:28de statistiques
18:29sur les devises,
18:30les actions,
18:31les obligations
18:32et les commodities.
18:34Quand il était sûr
18:34d'avoir déterminé
18:35dans quel sens
18:36le marché
18:36allait évoluer,
18:37il investissait.
18:43David Chambers,
18:45diplômé
18:45de l'Université
18:46de Cambridge,
18:47a longuement étudié
18:48les stratégies
18:48d'investissement
18:49de Keynes.
18:52Il pensait
18:53que grâce
18:53à ses connaissances
18:54économiques
18:55et sa passion
18:56pour les chiffres
18:56et les statistiques,
18:58il était en mesure
19:00de définir
19:01le cycle économique
19:02et par conséquent
19:05de déterminer
19:06à quel moment
19:07il fallait investir
19:08et acheter des actions
19:09et à quel moment
19:11il fallait les échanger
19:12contre des liquidités
19:13ou des obligations,
19:16notamment des titres
19:16d'État.
19:19Mais malgré
19:24tous ces calculs savants,
19:26Keynes n'a pas senti
19:27la catastrophe arriver.
19:31Avant le krach
19:32de 1929,
19:34Wall Street
19:34ressemblait beaucoup
19:35à la fin
19:36de notre boom.
19:37Les actionnaires
19:38pensaient que les beaux jours
19:39ne finiraient jamais.
19:40Armés de tous
19:41les derniers modèles
19:41mathématiques,
19:43ils croient
19:43que rien ne peut arriver.
19:45C'est alors
19:45que la bulle éclate.
19:47Les marchés mondiaux
19:48s'effondrent.
19:49Et Keynes,
19:50ainsi que des millions
19:51d'autres,
19:51perdent de l'argent,
19:52marquant le début
19:53de la Grande Dépression.
19:55Ils se rendent à l'évidence,
19:56nul ne peut prédire
19:57l'avenir.
19:58Il s'en est terriblement voulu
20:01de ne pas avoir vu arriver
20:02la Grande Dépression.
20:03Il en conclut que
20:04personne ne peut savoir
20:06avec certitude
20:07de quoi demain sera fait.
20:09et que les prévisions
20:11qui se révèlent exactes
20:12sont plus le fruit
20:13du hasard
20:14que de la réflexion.
20:17Il change alors
20:18de stratégie d'investissement
20:19et devient un homme riche.
20:22Contrairement à nous,
20:24il a retenu la leçon.
20:25L'économie est intrinsèquement
20:30incertaine
20:31et est faite de gens,
20:32pas de chiffres.
20:36Plus que n'importe qui d'autre,
20:37Keynes voulait que l'économie
20:39soit reconnue
20:39comme une science moderne,
20:41même si elle ne peut pas
20:41se réduire à une série
20:42d'équations
20:43et de prévisions infaillibles.
20:45Car il existe
20:46un facteur supplémentaire
20:47que les économistes
20:47devront toujours prendre en compte.
20:50La nature humaine.
20:51Puisqu'on ne peut pas
20:53prédire l'avenir,
20:54le seul moyen
20:55de comprendre
20:55ce qui se passe,
20:56c'est de s'en remettre
20:57à la masse.
20:59Si la masse évolue
21:00dans un certain sens,
21:01on est en droit
21:01de se dire
21:02qu'elle a raison.
21:03La masse achète.
21:04Pourquoi fait-elle ça ?
21:06Moi aussi,
21:06je dois acheter.
21:07Elle vend ?
21:07Alors moi aussi.
21:08C'est un réflexe animal.
21:10On suit le troupeau.
21:15Dans tous les manuels
21:16d'économie,
21:17du temps de Keynes
21:17comme aujourd'hui,
21:19il est dit qu'en temps normal,
21:20plus une chose
21:20devient chère,
21:21moins les gens l'achètent
21:22et vice-versa.
21:24Mais en cas de bulle,
21:25c'est différent.
21:27Car un autre aspect
21:27de la nature humaine
21:28entre en jeu.
21:29Et ça,
21:30Keynes l'a bien compris.
21:32En période de bulle,
21:33lorsque le cours
21:34d'une action
21:34ou d'un bien immobilier
21:35augmente,
21:36les gens achètent plus,
21:37pensant que leur investissement
21:38va continuer
21:39à prendre de la valeur.
21:41Et bien sûr,
21:42c'est le cas.
21:43Car tout le monde
21:44pense la même chose.
21:45Seulement,
21:45la bulle finit toujours
21:46par éclater.
21:47Les années
21:52qui ont précédé
21:53la crise,
21:54avions-nous oublié
21:55ce que Keynes
21:56nous avait enseigné
21:57sur la mentalité
21:57de troupeaux,
21:58les bulles
21:59et le caractère
22:00incertain de l'économie ?
22:02Les banquiers,
22:04les investisseurs
22:04et nous-mêmes,
22:05nous sommes nous laissés
22:06aveugler par cette croissance
22:07que nous pensions éternelle.
22:09Dans la mesure
22:12où l'on a pris le temps
22:13d'évaluer les risques
22:14et les incertitudes,
22:16je pense que beaucoup
22:16de gens ont agi
22:17à la légère.
22:20Quand on n'a aucune idée
22:20de ce que l'on fait,
22:22il ne faut pas s'étonner
22:23que la situation
22:23vous explose à la figure.
22:26Et c'est exactement
22:26ce qui s'est passé.
22:27La mise en garde
22:40de Keynes
22:41contre l'imprévisibilité
22:42du marché
22:42et son rejet
22:43de la politique
22:44du chacun pour soi
22:45sont tous deux
22:46issus de son expérience
22:47personnelle.
22:48Et l'arrivée
22:48de la Grande Dépression
22:49va donner naissance
22:50à l'une de ses plus
22:51grandes idées
22:52et ajouter un caractère
22:53urgent à son besoin
22:54de contrôler l'économie.
22:56Il réalise
22:57que le rétablissement
22:57du marché
22:58après un effondrement
22:59n'est pas automatique.
23:07Au début des années 30,
23:09le monde est plongé
23:10dans l'amorosité.
23:12Le nombre de chômeurs
23:13augmente
23:13et partout,
23:14des usines ferment.
23:15Mais Keynes, lui,
23:17coule des jours heureux.
23:20Il est devenu célèbre
23:21et a même réussi
23:22à choquer ses amis
23:23avant-gardistes
23:24du Bloomsbury Group
23:25en épousant
23:26une ballerine russe
23:27alors qu'il n'avait
23:28jamais caché
23:28son homosexualité.
23:35Art,
23:36littérature,
23:37histoire d'amour,
23:38voilà à quoi se résume
23:39la vie pour Keynes.
23:41Mais contrairement
23:42à ses amis
23:42du Bloomsbury Group,
23:44qui ont tous
23:44hérité de leur fortune,
23:46il est bien conscient
23:47qu'un tel train de vie
23:48a un prix.
23:50Une société civilisée
23:51ne peut exister
23:52sans une économie
23:53en bonne santé.
23:53Et le lundi matin,
23:55lorsqu'il retourne
23:56à la réalité,
23:57Keynes voit bien
23:58que l'économie du pays
23:59est au plus mal.
24:02Le Royaume-Uni
24:03est en récession
24:04depuis plusieurs années.
24:06Les économistes classiques
24:07affirment que
24:08si les ouvriers
24:09acceptaient de réduire
24:10leur salaire,
24:11les hommes d'affaires
24:11pourraient investir à nouveau,
24:13créer de l'emploi
24:14et relancer l'économie.
24:16Mais Keynes n'est pas d'accord.
24:18Selon lui,
24:18ce qui empêche
24:19le pays de guérir,
24:20c'est le pessimisme
24:21ou comme il le dit,
24:23le manque d'esprit animal.
24:25La théorie de Keynes,
24:26c'est qu'une économie
24:27de marché
24:28n'est pas capable
24:29de se stabiliser
24:30toute seule.
24:31Et en ce sens,
24:31une bonne disposition
24:32d'esprit
24:32est absolument primordiale.
24:34Car si les gens
24:35commencent soudainement
24:36à avoir peur
24:36de ne pas pouvoir
24:37vendre leurs produits
24:38dans le futur,
24:39faute de demande,
24:40et qu'ils décident
24:41par conséquent
24:41de stopper la production,
24:43on risque de tomber
24:44dans un piège
24:45dont il est extrêmement
24:46difficile de sortir.
24:47En réalisant
24:51que la récession
24:52pourrait durer
24:53indéfiniment,
24:54Keynes marque
24:55une rupture radicale
24:56avec la pensée conventionnelle.
25:01D'après l'approche classique,
25:03l'économie va finir
25:04par se rétablir.
25:05Ce n'est qu'une question
25:06de temps.
25:07Mais pour Keynes,
25:08il suffit de regarder
25:09autour de soi
25:09pour s'apercevoir
25:10que la situation
25:10n'est pas près
25:11de s'améliorer.
25:12Et ce,
25:13pour une raison évidente.
25:14À chaque fois
25:15que quelqu'un perd son travail,
25:16il se retrouve
25:17avec moins d'argent
25:18à dépenser
25:19et réduit au chômage
25:20ceux qui produisaient
25:21ce qu'il ne peut plus acheter.
25:23C'est un véritable
25:23cercle vicieux.
25:29Keynes pense
25:30que le manque
25:31d'esprit animal
25:31du monde des affaires
25:32est en train
25:33de toucher
25:33l'ensemble
25:34de la population.
25:39En 1931,
25:40lors d'une allocution
25:41à la radio,
25:42il lance un appel urgent.
25:46Keynes nous a quittés
26:08il y a près de 70 ans.
26:10Mais ses théories
26:11sur la relance économique
26:12perdurent dans le désert
26:13d'Arizona.
26:21À Hillabend,
26:23on construit
26:24la plus grande centrale
26:25solaire thermodynamique
26:26du monde.
26:32Le chantier s'étend
26:33sur plus de 9 km².
26:35avec près d'un million
26:38de miroirs,
26:39la centrale va emmagasiner
26:41assez d'énergie
26:41pour alimenter
26:4270 000 foyers américains
26:44en énergie propre.
26:46Mais pour les habitants
26:47de cette région reculée
26:48et pour John Maynard Keynes,
26:50la chose la plus importante
26:51que cette centrale crée,
26:53c'est de l'emploi.
26:54ma femme et moi
26:56avons bien été
26:57deux ans au chômage.
27:00Heureusement,
27:01jamais en même temps.
27:03Mais ça a été
27:05une très mauvaise passe.
27:11L'agence qui nous fournit
27:13la main d'œuvre
27:14m'a dit qu'il recevait
27:16au moins 300 CV par jour.
27:17Il y a énormément
27:19de gens
27:19à la recherche
27:20d'un emploi
27:21et ceux qui en ont un
27:23ont vraiment
27:23beaucoup de chance.
27:26En réalité,
27:27cette centrale
27:28fait partie
27:28d'une gigantesque
27:29expérience keynésienne.
27:31Après la crise,
27:32le gouvernement américain
27:33a mis 750 milliards
27:35de dollars sur la table
27:36pour financer
27:36des projets
27:37comme celui-ci
27:37afin de créer
27:39de l'emploi
27:39et relancer
27:40la croissance.
27:43En temps normal,
27:45les responsables
27:45du site
27:46auraient dû emprunter
27:47eux-mêmes
27:47les 1,5 milliards
27:48de dollars
27:49à la banque.
27:50Mais nous ne sommes
27:51pas en temps normal.
27:54À cause de la crise,
27:57nous avons dû
27:57nous tourner
27:58vers des sources
27:58de financement
27:59alternatives.
28:02Et bien sûr,
28:02étant donné le contexte,
28:04le programme fédéral
28:05de garantie de prêts
28:06mis en place
28:06par le gouvernement
28:07américain
28:08nous a beaucoup aidés.
28:10En fait,
28:10sans ce genre
28:11d'aide publique,
28:13cette centrale
28:13n'aurait jamais pu
28:14voir le jour.
28:17aujourd'hui,
28:20nous sommes
28:21habitués
28:21à voir
28:21les gouvernements
28:22puisés dans
28:23leurs réserves
28:23d'argent
28:24pour relancer
28:25l'économie
28:25dans des environnements
28:26inhospitaliers
28:27où les institutions
28:28bancaires privées
28:29font grise mine.
28:30Mais du temps
28:31de Keynes,
28:32cette idée
28:32était bien plus
28:33controversée.
28:37Dans les années
28:381930,
28:39Keynes
28:40passe ses semaines
28:41à Londres
28:41dans le quartier
28:42de Bloomsbury.
28:42Il écrit
28:44d'innombrables
28:45articles
28:45et pamphlets
28:46expliquant
28:47que quelque chose
28:47peut et doit
28:48être fait
28:49pour mettre
28:49un terme
28:49à la Grande
28:50Dépression.
28:52Keynes
28:52pense qu'en temps
28:53normal,
28:54le meilleur moyen
28:54d'aider l'économie
28:55est de mettre
28:56en place
28:56une politique
28:57monétaire
28:57adéquate
28:58et de réduire
28:59les taux d'intérêt
28:59de façon à encourager
29:00les ménages
29:01à emprunter
29:01et dépenser
29:02et les entreprises
29:03à investir.
29:05Mais dans un climat
29:06de grande morosité,
29:07cela ne suffit pas
29:07car les entreprises
29:09ne voient pas
29:09l'intérêt
29:09de faire
29:10de nouveaux investissements
29:11et les ménages
29:12sont réticents
29:13à emprunter,
29:13quel que soit
29:14le niveau
29:14des taux d'intérêt.
29:16C'est pour cette raison
29:16que Keynes
29:17pense que le gouvernement
29:18doit mettre
29:18la machine en route
29:19en augmentant
29:20les dépenses publiques.
29:23Keynes suggère
29:24au gouvernement
29:25d'engager
29:25de la main-d'œuvre
29:26pour démolir
29:27South London
29:27et le reconstruire.
29:30Bien qu'il plaisante,
29:31il soulève
29:31un point important.
29:33Si l'État
29:33empruntait
29:34pour créer
29:34de l'emploi,
29:35les gens
29:35dépenseraient plus.
29:37La confiance
29:37serait restaurée
29:38et l'économie
29:39se rétablirait.
29:40Il ajoute
29:41qu'en choisissant
29:42le bon moment,
29:43les dépenses
29:43du gouvernement
29:44pourraient s'accompagner
29:45d'une hausse
29:45des recettes fiscales
29:46et donc s'équilibrer.
29:49Évidemment,
29:49il n'est pas facile
29:50de convaincre
29:50le trésor
29:51d'emprunter
29:51lorsqu'on est
29:52en bas
29:52d'un cycle économique.
29:53Néanmoins,
29:58ils ont besoin
29:59d'augmenter la demande
30:00et ce n'est qu'en suivant
30:01le conseil de Keynes
30:02qu'ils pourront y arriver.
30:04Il s'agit d'une vision
30:05un peu naïve.
30:07Je pense qu'il est très
30:07dangereux de tenter
30:08de sortir de la dépression
30:10en creusant encore plus
30:11le déficit budgétaire
30:13et en faisant comme si
30:14ça n'avait aucun effet
30:15indésirable
30:16sur d'autres variables
30:17économiques.
30:17Dans les années 30,
30:22la plupart des politiciens
30:23britanniques
30:24tournent le dos
30:24aux théories de Keynes.
30:26Pour eux,
30:26il est dangereux
30:27de trop emprunter.
30:29Keynes espère avoir
30:30plus de chance
30:30aux Etats-Unis.
30:31Après tout,
30:32il est célèbre
30:33des deux côtés
30:33de l'Atlantique
30:34et la situation
30:35en Amérique
30:35est désastreuse.
30:39Le produit national brut
30:40avait chuté
30:41de près de 70%.
30:43Le chômage atteignait
30:4425%,
30:45voire 50%
30:46dans des villes
30:47comme Chicago
30:47et Detroit.
30:49Près de la moitié
30:49de la population
30:50était sans emploi.
30:56Pour faire face
30:57à la Grande Dépression,
30:59le président Hoover
31:00décide de réduire
31:01les dépenses
31:01et d'augmenter
31:02les taxes.
31:03Il espère qu'en
31:03équilibrant
31:04les comptes du pays,
31:05la confiance sera rétablie
31:06et les investissements
31:07reprendront.
31:09Argument repris
31:09par plusieurs hommes
31:10politiques aujourd'hui.
31:13Ça n'a pas marché.
31:14Jamais.
31:16Quand on réduit
31:16les dépenses
31:17du gouvernement
31:18pendant une récession
31:19ou une dépression,
31:21la demande diminue
31:22et le chômage augmente.
31:25C'est un cercle vicieux.
31:28Comment restaurer
31:29la confiance
31:30lorsque les entreprises
31:31vont mal
31:31et que le chômage augmente ?
31:33C'est impossible.
31:36Le successeur
31:37de Hoover,
31:38Franklin Delano Roosevelt,
31:39a une approche différente.
31:40Encore une fois,
31:43ses arguments
31:44trouvent un écho
31:44aujourd'hui.
31:46Selon lui,
31:46c'est en augmentant
31:47les dépenses de l'État
31:47que le pays
31:48pourra sortir de la crise.
31:49Lorsque Keynes arrive aux États-Unis
32:07en 1934,
32:08il ignore s'il a réussi
32:10à convaincre le gouvernement américain
32:11avec ses idées.
32:12Mais le keynesianisme
32:13est déjà en marche.
32:14Le New Deal
32:22est un vaste programme
32:24de projets financés
32:24par le gouvernement
32:25visant à redonner
32:27du travail aux chômeurs
32:28du pays.
32:29C'est resté le programme
32:30de relance économique
32:31keynesien par excellence.
32:38Et à l'époque,
32:39il n'y a pas de projet
32:40plus emblématique
32:41que celui-là.
32:44Le barrage Hoover
32:46Construit sur le fleuve Colorado
32:51à la frontière
32:51entre le Nevada
32:52et l'Arizona,
32:53c'est à l'époque
32:54le plus grand projet
32:55de construction du monde.
33:00C'est un projet
33:02résolument keynesien.
33:03Le gouvernement
33:04a creusé le déficit
33:05pour financer
33:06la construction
33:07du barrage Hoover.
33:09Ce qui a donné
33:10à une dizaine
33:11de milliers de personnes
33:12un emploi,
33:13une nouvelle vie
33:13et de l'argent
33:14à dépenser.
33:23Des milliers
33:24d'ouvriers affluent
33:25des quatre coins
33:25des États-Unis.
33:27Pendant cinq ans,
33:28ils creusent des kilomètres
33:29et des kilomètres
33:29de montagne
33:30pour donner naissance
33:31à un gigantesque générateur
33:33qui fournit l'électricité
33:34à une bonne partie
33:35du pays.
33:38Ça a relancé
33:40l'économie.
33:40Les 165 millions
33:42de dollars
33:42d'investissement
33:43ont engendré
33:44une croissance
33:45de plusieurs milliards.
33:56À tout juste
33:57une dizaine de kilomètres,
33:59Boulder City,
34:00construite pour loger
34:00les ouvriers
34:01travaillant sur le barrage.
34:02Vous voyez toutes les maisons
34:10le long de ces avenues.
34:12Aujourd'hui,
34:12on appelle ça
34:13des dingbats.
34:14Ce sont des logements
34:15bâtis à la hâte
34:16pour accueillir les ouvriers
34:17pendant la construction
34:18du barrage.
34:20Mais comme ils sont restés ici
34:21après la fin des travaux,
34:23ce à quoi personne
34:23ne s'attendait,
34:24ces dingbats
34:25sont toujours habités.
34:26Roger Schauff
34:29est le directeur
34:29de l'hôtel de la ville.
34:31Pour lui,
34:32Boulder City est la preuve
34:33qu'en période de dépression,
34:34les dépenses de l'État
34:35peuvent relancer
34:36la consommation
34:37et les investissements
34:38et ainsi avoir
34:39un effet positif
34:40sur l'économie.
34:41C'est ce que Keynes
34:42appelle
34:42l'effet multiplicateur.
34:45À la fin de la deuxième année,
34:47ils vivaient dans une ville,
34:49une vraie ville
34:50avec tout ce qu'il faut,
34:52des magasins,
34:53des restaurants,
34:53des infrastructures médicales,
34:55des lieux de loisirs
34:56et tout ça
34:57en moins de deux ans.
35:02Les opposants
35:03aux théories de Keynes
35:04sur les dépenses publiques
35:05disent souvent
35:06que les bénéfices
35:07sont brefs
35:07et les coûts permanents.
35:09Mais Boulder City
35:10a réussi à s'implanter
35:11et à prospérer.
35:15Ceux qui y habitent encore
35:16affirment que
35:17sans le New Deal,
35:18l'endroit serait resté
35:19un désert.
35:25Si le barrage Hoover
35:26a profité de la région,
35:28il serait illusoire
35:29de croire que le New Deal
35:30a mis fin
35:30à la Grande Dépression.
35:35Il faudra
35:36une guerre mondiale
35:37et toutes les dépenses
35:38de l'État
35:39qui vont avec
35:39pour finalement sortir
35:41l'économie du marasme.
35:46On peut se demander
35:47si une guerre
35:48était vraiment
35:48le meilleur moyen
35:49de mettre
35:49les arguments
35:50de Keynes
35:50à l'épreuve.
35:51Mais il se trouve
35:52que depuis,
35:53dès qu'ils sont confrontés
35:54à une urgence,
35:55les gouvernements
35:56se tournent
35:56vers le keynésianisme.
35:58Et la crise de 2008
36:00est la plus grande urgence
36:01à laquelle nous ayons
36:02eu à faire face
36:03depuis longtemps.
36:06Quand le système
36:07financier mondial
36:08s'est effondré,
36:09tout le monde
36:10a craint l'arrivée
36:10d'une nouvelle
36:11Grande Dépression.
36:13Les gouvernements
36:14prenaient le libre marché
36:15depuis des années.
36:16Mais face à ce désastre
36:17économique,
36:18ils décident
36:18de se tourner
36:19à nouveau
36:20vers le keynésianisme.
36:21C'est une réponse
36:24dans la pure tradition
36:25keynésienne.
36:27Lorsque les particuliers
36:28et les entreprises
36:28arrêtent de dépenser
36:29de l'argent,
36:30si le gouvernement
36:31se met lui aussi
36:31à réduire ses dépenses,
36:32l'économie s'effondre.
36:35Le but de la manœuvre
36:36est de restaurer
36:37la confiance
36:38ou l'esprit animal
36:39en facilitant l'emprunt
36:41et en encourageant
36:42les investissements
36:42et la consommation.
36:44En 2009,
36:45alors que l'économie mondiale
36:46est toujours chancelante,
36:47les grands dirigeants
36:48se réunissent à Londres
36:49pour mettre au point
36:50un plan de sauvetage
36:51keynésien
36:51à l'échelle planétaire.
37:00Au moins,
37:01l'effondrement
37:01du commerce mondial
37:02dont le volume
37:03a chuté
37:03de plus de 15%
37:04en six mois
37:05entre fin 2008
37:06et le printemps 2009
37:07est difficilement imputable
37:09à autre chose
37:10qu'à un incroyable pessimisme
37:11et une perte totale
37:12de confiance.
37:14Le climat
37:14s'est un peu amélioré
37:15en 2009,
37:16mais il y a encore
37:17beaucoup de chemin
37:18à faire.
37:22Même ce gigantesque
37:23plan de sauvetage
37:24de 2009
37:25n'est pas tout à fait
37:26ce qu'il semble être.
37:28Quoi qu'en dise
37:28Gordon Brown,
37:30le plan de relance
37:30du Royaume-Uni
37:31est l'un des plus faibles
37:32car le pays emprunte
37:34déjà plus qu'aucune autre
37:35économie avancée.
37:36Donc même un premier ministre
37:38keynésien
37:38comme Gordon Brown
37:39ne pense pas
37:40que le pays
37:41puisse emprunter
37:41plus d'argent.
37:43Son successeur,
37:44lui,
37:44pense qu'il faut
37:45réduire les emprunts.
37:47Après Brown,
37:48le Royaume-Uni
37:49élit un premier ministre
37:50qui est en désaccord
37:51avec Keynes
37:52sur un point fondamental.
38:03Ces choses ne fonctionnent
38:04parce qu'elles
38:05ledent à plus d'argent
38:06ce qui ferait
38:07la crise worse.
38:08Le seul moyen
38:09de sortir
38:09d'une crise
38:10c'est de s'arrêter
38:11avec vos dettes.
38:13A mon avis,
38:15Keynes aurait formulé
38:16les choses un peu différemment.
38:18Je pense qu'à un certain point,
38:20il aurait accepté
38:20de revenir
38:21à un budget plus équilibré.
38:23Surtout si on ne veut pas
38:24que les générations futures
38:25croulent sous nos dettes.
38:28Ce que je trouve incroyable,
38:32c'est que des pays
38:33qui ont le choix,
38:34comme le Royaume-Uni,
38:35décident volontairement
38:37d'adopter une politique
38:38d'austérité.
38:40Alors qu'on sait très bien
38:42ce qui va arriver.
38:45Affaiblissement de l'économie,
38:48hausse du chômage
38:49et énormément de souffrances inutiles.
38:57Ce débat fait rage
38:59des deux côtés de l'Atlantique.
39:00En Arizona,
39:02le vaste programme
39:03de dépenses publiques
39:04qui a donné naissance
39:05à cette centrale solaire
39:06et créé des milliers d'emplois
39:08n'a pas suffi
39:09à guérir l'économie américaine.
39:11Peut-être que le remède
39:13n'a pas fonctionné
39:13parce que la dose
39:14était trop faible.
39:16Ou peut-être
39:16que la montagne de dettes
39:17sous laquelle croule
39:18la plupart des pays occidentaux
39:20tente à prouver
39:21que les politiques
39:22keynesiennes
39:22de relance économique
39:23mènent à l'impasse.
39:26La situation actuelle
39:28est absolument inédite.
39:30Peut-être que nous allons
39:31nous en sortir,
39:32mais très peu de pays
39:34ont déjà connu
39:34un déficit aussi élevé.
39:36Toutes les mesures,
39:37qu'elles soient publiques
39:38ou privées,
39:38comportent des risques.
39:43Vers la fin des années 40,
39:45Keynes a le vent en poupe.
39:46Son théâtre de Cambridge
39:48marche bien.
39:49Il réintègre le Trésor
39:50où il participe à la réflexion
39:52sur le financement
39:52de la Seconde Guerre mondiale
39:53et ses livres sont salués
39:55comme de véritables
39:56chefs-d'œuvre.
39:57Mais il lui reste
39:58une dernière théorie
39:59à explorer
40:00qui aura un impact
40:01profond sur le monde.
40:07Les idées de Keynes
40:08pour relancer l'économie
40:09ont fait leur preuve.
40:11Mais vers la fin
40:11de la Seconde Guerre mondiale,
40:13il a l'occasion
40:14de laisser son empreinte
40:15sur la planète entière.
40:17Dans un monde
40:17de plus en plus intégré,
40:19il est plus convaincu
40:19que jamais
40:20que les pays ont besoin
40:21d'institutions
40:22pour assurer leur unité
40:23et promouvoir
40:24leur coopération.
40:25Le désastre
40:26d'après 14-18
40:27ne doit jamais
40:28se reproduire.
40:36En 1944,
40:38Keynes entreprend
40:39son plus important voyage
40:40aux Etats-Unis.
40:41Sa destination ?
40:43Bretton Woods,
40:44dans le New Hampshire.
40:47Il rejoint des délégués
40:48venant de plus de 40 pays différents,
40:50afin de poser les jalons
40:51d'une nouvelle économie mondiale
40:52d'après-guerre.
40:56Ils voulaient reconstruire
40:57le système financier
40:58qui avait été détruit,
40:59pas uniquement par la guerre,
41:01mais également
41:02par la Grande Dépression.
41:07Keynes pense que le chaos économique
41:09des années 1920 et 1930
41:11est largement responsable
41:12de la guerre.
41:13Les pays s'étaient focalisés
41:16sur leur propre sort,
41:17sans vraiment prêter attention
41:18à ce qui se passait
41:19autour d'eux.
41:21Le monde a payé
41:21un lourd tribut
41:22à ce manque de coopération.
41:26Les dirigeants britanniques
41:28et américains
41:28étaient résolus
41:29à tout faire
41:30pour que ça ne se reproduise
41:31jamais
41:31et pour rétablir
41:33l'économie mondiale.
41:34Ils ne pouvaient pas
41:35se permettre
41:36de revivre
41:37le genre de crise économique
41:38qu'ils avaient traversée
41:39parce qu'ils savaient
41:40qu'une nouvelle guerre mondiale
41:41serait au-dessus
41:42de leurs moyens.
41:50Des délégués
41:51du monde entier
41:52se réunissent ici,
41:53au Mount Washington Hotel.
41:56Partout ailleurs,
41:57les combats
41:57font encore rage.
41:59Une fois la guerre terminée,
42:00Keynes sait que
42:01pour que l'économie mondiale
42:02prospère,
42:03les pays doivent commencer
42:04à collaborer
42:05plus étroitement.
42:07Lors de la conférence,
42:08seules deux délégations
42:09comptent vraiment,
42:10l'équipe britannique
42:11de Keynes
42:12et les américains.
42:14Toutes deux s'accordent
42:15sur la nécessité
42:16d'un contrôle des devises
42:17visant à empêcher
42:19les trop grands écarts
42:20de fluctuation
42:20entre les pays.
42:22Elles décident également
42:23de créer des institutions
42:24qui deviendront plus tard
42:25la Banque mondiale
42:26et le Fonds monétaire
42:27international
42:27afin d'encourager
42:29le commerce
42:29et la croissance
42:30des économies
42:31les plus pauvres.
42:32A l'issue de cette conférence,
42:34les États ont reconnu
42:35que le seul moyen
42:35de résoudre
42:36leurs problèmes macroéconomiques
42:37c'était de collaborer.
42:39On ne peut plus faire
42:39cavalier seul.
42:41On a beau être une île
42:42d'un point de vue géographique,
42:44économiquement,
42:45ce n'est pas le cas.
42:49Mais Keynes échoue
42:50sur un point crucial.
42:52Les États-Unis maintiennent
42:53que les riches pays
42:54exportateurs comme eux
42:55ne devraient pas être obligés
42:57de dépenser plus
42:58et de moins exporter
42:59pour équilibrer
43:00la balance commerciale
43:01internationale.
43:02Selon eux,
43:03c'est aux pays faibles
43:04avec un fort déficit commercial
43:05de se serrer la ceinture.
43:08Keynes, lui,
43:09pense que l'effort
43:09doit venir des deux côtés.
43:11Et si tout le monde
43:12l'avait écouté
43:12lors de cette conférence
43:13de Bretton Woods,
43:14le monde serait
43:15en bien meilleur état
43:16aujourd'hui.
43:22Cette vieille tour
43:22de télévision
43:23est-allemande
43:24est un symbole
43:25de la réunification.
43:27Mais ces derniers temps,
43:28le sentiment
43:28d'unité européenne
43:30fait défaut.
43:30Le gouvernement allemand
43:36veut imposer
43:36aux pays
43:36de la zone euro
43:37en difficulté
43:38des mesures
43:38très strictes
43:40afin de rétablir
43:41leur économie.
43:43Les pays plus riches
43:44ont accepté
43:44de leur venir en aide
43:45en leur octroyant
43:46des prêts considérables.
43:48Mais pour Keynes,
43:49ça n'aurait sûrement
43:50pas suffi.
43:51Keynes pensait
43:52que pour que
43:52l'économie mondiale
43:53fonctionne,
43:54l'effort
43:55devait venir
43:55des deux côtés.
43:56Les pays faibles
43:57qui ont accumulé
43:58de grosses dettes
43:59auprès du reste du monde
44:00doivent devenir
44:00plus compétitifs
44:01et trouver un moyen
44:02de combler leurs déficits.
44:05Mais les riches exportateurs
44:06doivent eux aussi
44:07retrousser leurs manches
44:08en acceptant
44:09d'importer davantage
44:10et de réduire
44:11leurs exportations
44:12afin de devenir
44:13un peu moins compétitifs.
44:15En Allemagne,
44:16cette idée
44:16ne passe pas du tout.
44:20La plupart des gens
44:21trouveraient insensé
44:22de demander à l'Allemagne
44:23de réduire
44:24ses exportations
44:25pour devenir
44:25moins compétitives.
44:27Ils ne verraient pas
44:27l'intérêt d'affaiblir
44:28le pays
44:29alors que d'autres
44:30le sont déjà bien assés.
44:31Eh bien,
44:31ces gens-là
44:32ont tort.
44:36En Allemagne,
44:37il y a du mouvement
44:38dans les rues.
44:44Les ventes nationales
44:45de voitures
44:46sont en hausse.
44:49Mais les exportations
44:51sont toujours
44:51au cœur
44:52de la politique économique
44:53du pays.
44:56Et les exportations
44:57de voitures
44:57ont augmenté
44:58de près d'un tiers
44:59au cours
44:59des deux dernières années.
45:03Les consommateurs
45:04allemands
45:04ont dépensé plus,
45:06mais pas assez
45:07pour permettre
45:07aux pays en difficulté
45:08comme la Grèce
45:09d'exporter
45:10de manière significative.
45:11Demander aux ménages
45:16allemands
45:16de mettre
45:16la main
45:17à la poche,
45:17d'arrêter
45:18de jouer
45:18les grippes
45:19sous
45:19est une approche
45:20très populaire.
45:21Mais elle est vouée
45:23à l'échec
45:24parce que les gens
45:25diront qu'avec
45:25le revenu,
45:26ils n'en ont pas
45:27les moyens.
45:28Et c'est vrai,
45:29au cours des dernières
45:30années,
45:30les salaires ont
45:31très peu augmenté.
45:32C'est pour ça
45:33qu'il faut augmenter
45:34les salaires.
45:35Plus ils sont élevés,
45:36plus les gens sont
45:36enclins à dépenser.
45:37La consommation allemande
45:39serait bien plus forte
45:39que dans le passé
45:40et ça nous aiderait.
45:44Les souvenirs
45:45de l'hyperinflation
45:46sont encore très présents
45:47en Allemagne.
45:48Peu nombreux sont
45:49ceux qui veulent risquer
45:50de mettre en péril
45:50leur stabilité économique
45:52durement gagnée
45:52pour venir en aide
45:54à un voisin européen
45:54plus faible.
45:56A l'échelle mondiale,
45:57les clivages entre pays
45:58sont encore plus visibles.
46:00Les dirigeants
46:01prétendent adhérer
46:01à la vision keynésienne
46:02d'une économie mondiale
46:03véritablement coordonnée
46:04où l'effort travaille
46:06main dans la main
46:06avec les faibles
46:07dans l'intérêt de tous.
46:08Mais de là à mettre
46:10les conseils de Keynes
46:11en application,
46:12il y a tout un monde.
46:15Évidemment,
46:15ce serait formidable
46:16d'avoir de meilleures
46:17institutions transnationales
46:19et Keynes était un précurseur
46:20dans le domaine.
46:21Il y croyait beaucoup.
46:23Par ailleurs,
46:23je pense que pour rétablir
46:25le système financier
46:26international,
46:27ce serait très utile.
46:28Peut-être que quelqu'un
46:29avec le même magnétisme
46:30et la même carrure
46:31que Keynes
46:32pourrait réussir
46:33à faire bouger les choses.
46:33mais les hommes
46:35comme lui
46:35se font rare.
46:39Keynes a laissé
46:40un incroyable héritage.
46:42Il n'a pas uniquement
46:42révolutionné l'économie,
46:44il a changé la vie
46:45de milliards de personnes
46:46aux quatre coins
46:47de la planète.
46:51La ville de Cambridge
46:53doit beaucoup à Keynes.
46:55Grâce à l'intervention
46:56du gouvernement,
46:57la fabrique de pneus
46:58va pouvoir rester ouverte
47:00et continuer à créer
47:01de nombreux emplois.
47:01Sur la scène politique,
47:04peu nombreux sont ceux
47:05qui remettent en question
47:05le message principal
47:06de Keynes
47:07qui dit que l'économie
47:09ne peut pas se réguler
47:10toute seule.
47:11Keynes fut un élément
47:14dominant du 20e siècle
47:15et à mon avis,
47:16il le restera
47:17au 21e siècle.
47:18Je pense qu'on se souviendra
47:19de lui comme l'un des plus
47:21grands économistes
47:22que le monde ait jamais connu.
47:25Il y a 80 ans,
47:26la construction de ce barrage
47:28a atténué
47:28la Grande Dépression.
47:30Aujourd'hui,
47:31puisque les gouvernements
47:31empruntent à des taux
47:32défiant toute concurrence,
47:34on pourrait penser
47:34que les investissements
47:35du type New Deal
47:36sont aussi importants
47:37que dans les années 30.
47:38Mais étant donné
47:39l'ampleur de la dette publique,
47:41de nouveaux emprunts
47:41ne sont peut-être pas
47:42la solution miracle.
47:43« La solution keynesienne
47:46par excellence,
47:47creuser le déficit,
47:49emprunter de l'argent
47:50et dépenser,
47:50dépenser, dépenser,
47:51doit être manipulée
47:53avec précaution
47:54parce qu'il ne faut pas
47:55perdre de vue
47:56que le but de la manœuvre
47:57c'est se débarrasser
47:59de sa dette.
48:00C'est un travail
48:01de longue haleine.
48:02On ne peut pas régler
48:03le problème
48:03juste en claquant des doigts.
48:05Il n'y a pas
48:05de remède miracle.
48:06Et qu'en est-il
48:11de la dernière grande idée
48:12de Keynes
48:13qui dit que nous sommes
48:14tous dans le même bateau ?
48:16Depuis Bretton Woods,
48:17le monde a accepté
48:18à contre-coeur
48:19de coopérer
48:19pour prospérer.
48:21Mais nous avons bien du mal
48:22à tenir nos bonnes résolutions.
48:24Il serait inquiet.
48:27Il serait très inquiet
48:29de l'augmentation
48:30des inégalités
48:31dans le monde.
48:32Il aurait peur
48:33qu'on en revienne
48:34à la politique
48:34du chacun pour soi.
48:36Il nous mettrait
48:38sans nul doute
48:39en garde
48:39contre une éventuelle
48:41guerre régionale
48:41et ses dangers.
48:45Il aurait très peur
48:46que les circonstances
48:47qui ont conduit
48:47à la première guerre
48:48puis à la deuxième guerre mondiale
48:50ne soient lentement
48:52en train
48:52de se dessiner
48:53devant nous à nouveau.
48:56Peut-être que la meilleure chose
48:58que Keynes puisse faire
48:59pour nous aujourd'hui,
49:00comme le pensent
49:01ses partisans,
49:02c'est de nous transmettre
49:03les deux traits de caractère
49:04qui lui ont servi
49:04de moteur toute sa vie.
49:06L'imagination
49:07et l'optimisme.
49:08Il a accepté
49:11d'examiner
49:12ses problèmes de fond
49:13comme personne
49:13ne l'avait jamais fait
49:14auparavant.
49:17Le grand héritage
49:18qu'il nous ait laissé,
49:19c'est sa foi inébranlable
49:20en l'humanité,
49:21sa conviction profonde
49:22que le gouvernement
49:23et la société
49:24peuvent se consacrer
49:25et venir en aide
49:26aux moins fortunés
49:27et à ceux
49:28qui ont besoin d'eux.
49:28en 1946,
49:42Keynes succombe
49:43à une crise cardiaque
49:44dans son cher Sussex.
49:45A tout juste 62 ans,
49:50il a laissé
49:50un héritage
49:51qui a changé le monde.
49:53Mais une énigme
49:54subsiste.
49:56Il pensait
49:56que nous devions
49:57essayer de dompter
49:58le pouvoir de l'argent
49:58pour l'utiliser
49:59à notre avantage.
50:01Mais nous a également
50:02enseigné que l'économie
50:03était fondamentalement
50:04imprévisible.
50:05C'est une contradiction
50:07à laquelle nous
50:09ne heurtons encore
50:09aujourd'hui.

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