- il y a 6 mois
Le 11 novembre 2000, sur le plateau de Tout le monde en parle sur France 2, Jean Rochefort évoque Johnny Hallyday avec humour, respect et une touche d’émotion. Une séquence rare et précieuse entre deux icônes françaises, à ne pas manquer pour les fans de Johnny comme pour les amateurs de belles paroles.
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Court métrageTranscription
00:00Jean Rochefort, bonsoir !
00:07Bonsoir !
00:08Très heureux de vous avoir sur le plateau de Tout le monde en parle !
00:11Laurent, tu connais Jean Rochefort ?
00:14Jean Rochefort !
00:15Ça me dit quelque chose !
00:17Vous avez un loup d'enfer, non ? Ça va, la pêche ?
00:19Écoutez, ça va pas mal !
00:21Alors la moustache, au départ, vous aviez laissé pousser la moustache
00:24pour jouer Alceste dans le misanthrope,
00:26et puis vous l'avez gardé,
00:28parce que vous dites que, comme vous n'avez pas beaucoup de lèvres supérieures,
00:31quand vous n'avez pas la moustache,
00:33ça vous donne un air un peu hypocrite !
00:35Oui, un air de traître !
00:37Alors ça me limitait dans les contacts féminins dans la fiction !
00:41Alors vous avez la forme, comme votre ami Johnny Hallyday,
00:44vous avez vu, on ne parle que de Johnny Hallyday, c'est incroyable quand même !
00:47La France se donne à Johnny Hallyday,
00:49comme elle s'est donnée à Jacques Chirac il y a un an,
00:52ou au Maréchal Pétain à l'époque, c'est fou, non ?
00:55Le troisième âge triomphe !
00:56Oui, c'est assez incroyable !
00:59Alors vous, vous êtes devenu un fan de Johnny Hallyday,
01:01quand vous avez fait le film de Patrice Lecomte,
01:03l'homme du train, ça s'est bien passé ?
01:06Très bien !
01:08J'ai rencontré un homme modeste et timide,
01:11qui était inquiète de tourner avec nous !
01:15C'est vrai qu'avant de commencer le tournage avec Johnny,
01:17vous aviez des préjugés, un petit peu comme tout le monde sur lui, non ?
01:20Vous pensiez qu'il était un peu demeuré ou non ?
01:22Pas demeuré, je ne le connaissais que par les premières pages des journaux,
01:29où je le voyais sortir bourré d'une boîte de nuit,
01:32des choses comme ça, pendues au bras d'une jeune femme.
01:35Léonard ?
01:37C'est excellent !
01:38Non mais c'est votre, c'est excellent !
01:40C'est excellent !
01:41Vous voulez une anecdote ?
01:42Bochefort !
01:43Rochefort !
01:44Rochefort !
01:45Dire à un acteur !
01:50Dire à un acteur !
01:53Jean Rochefort !
01:54Il est avant la gueule !
01:56Mais si !
01:57Bochefort !
01:58Rochefort !
01:59Ou c'est courageux !
02:00Ou c'est grottier quoi !
02:01Oui, Jean !
02:02Mais enfin, Jean Rochefort !
02:03Je ne connais pas les espoirs moi !
02:05Vous voulez une anecdote sur Johnny ?
02:08Oui !
02:09Voilà !
02:10Alors, écoutez bien ça !
02:11Nous sommes dans une salle à manger !
02:14C'est une salle à manger néo-rustique
02:16à 10 km de la belle ville d'Anonais
02:19en train de dîner.
02:21Nous sommes quatre !
02:23Il est 10 heures du soir, banlieue d'Anonais.
02:25Il y a son préparateur physique,
02:27son photographe souffre douleur,
02:30et moi-même !
02:33La salle est déserte !
02:37Et tout à coup, une vingtaine de jeunes gens éclectiques
02:40avec attaché case,
02:42faisant un séminaire,
02:44entre dans le brouhaha !
02:46Parfait !
02:47Et tout à coup,
02:48à cette table,
02:49où il y a tous ces jeunes gens,
02:50un silence total.
02:51Et,
02:52ce silence est total,
02:53parce que l'un d'eux vient de s'apercevoir
02:55qu'en banlieue d'Anonais,
02:57à la table occupée,
02:58il y a Johnny Hallyday.
03:00Ces jeunes gens continuent à dîner
03:02en se plantant la fourchette dans la joue
03:03parce qu'ils fixent Johnny Hallyday.
03:05et au dessert,
03:07Johnny ayant bu deux ou trois verres de Bordeaux
03:09parle un peu plus fort,
03:11et ces jeunes gens entendent Johnny dire
03:14« Dis donc,
03:15Jean,
03:16Laetitia
03:17descend vendredi,
03:19elle m'a fait un potage au potiron,
03:23tu veux qu'elle t'en descende un thermos ? »
03:26Et j'ai vu vingt types brogués.
03:31Le mythe,
03:32le mythe parfait.
03:33C'est un garçon simple,
03:35ben oui mais,
03:36qui cherche pas à être autre chose
03:38que cette merveilleuse authenticité
03:40qui fait son triomphe.
03:41Tout à fait.
03:42Jean,
03:43vous avez vu aussi des mecs
03:44qui marchaient à quatre pattes
03:46pour ramasser les mégots
03:47qui avaient été pris.
03:48Pour ramasser un mégot
03:49qu'il avait fait tomber,
03:51et il y a un type qui l'a ramassé
03:53et mis dans sa bouche.
03:55J'étais au bord des larmes.
03:57Vous le vouliez ?
03:59C'est pas que je le voulais,
04:00j'ai arrêté de fumer il y a longtemps,
04:01mais ça fait de la peine quand même.
04:03Ce qui est très marrant,
04:04c'est qu'il y a longtemps,
04:05à l'époque où vous picoliez un peu,
04:07vous passiez,
04:08vous dites des soirées en pleurs
04:10en vous disant
04:11« Mais que va faire Johnny
04:12quand il sera vieux ? »
04:13Je prenais de temps en temps
04:15des cuites phénoménales en Bretagne.
04:17Pléonasme.
04:18Aussi, aussi.
04:25Et mon angoisse,
04:27mon angoisse,
04:29c'était « Mon Dieu,
04:30que fera Johnny
04:31quand il sera vieux ? »
04:33Et je ne savais pas imaginer.
04:35Bah oui, apparemment,
04:36il est toujours là,
04:37il prend pas sa retraite,
04:38il a 43 ans de cotisation,
04:39et c'est vrai que par rapport
04:40au reste de la France aujourd'hui,
04:41ça fait un peu tâche.
04:43Alors, vous, en parlant de ça,
04:46vous avez jamais été très engagé politiquement,
04:48on n'a jamais su très bien
04:49de quel bord vous étiez.
04:50Alors attendez,
04:51oui, alors c'est ça.
04:52Je ne suis pas d'un bord précis,
04:54je ne suis pas un homme de groupe,
04:57je suis profondément individualiste,
04:59mais avec une profonde tendresse
05:01pour mon espèce,
05:03qui me fait beaucoup de peine,
05:05et de plus en plus de peine.
05:06L'homme est un loup pour l'homme.
05:08L'homme est un prédateur,
05:09oui, c'est le sol pratiquement
05:10sur la planète
05:11avec quelques insectes.
05:12Et les chimpanzés,
05:14on sait maintenant
05:15que 3 ou 4 mâles chimpanzés
05:17peuvent parcourir des centaines
05:19et des centaines de kilomètres,
05:20arriver sur un territoire
05:21qui n'est pas le territoire
05:23de leurs voisins,
05:24assassiner un mâle et partir.
05:26C'est les chimpanzés américains, ça, non ?
05:28Mais non !
05:29Ils sont partout !
05:30À Cannes, vous avez beaucoup vu d'américains
05:32quand vous étiez jury du festival ?
05:34Non, j'en ai vu un
05:36qui était dans le jour avec moi,
05:38Soderbergh,
05:39avec lequel je me suis bien entendu.
05:40Ouais.
05:41Je n'ai jamais passé par ça.
05:42Jean Rochefort.
05:43Sexe, amour et vidéo.
05:45Jean Rochefort.
05:47Je ne sais pas ce qu'il est en ce moment.
05:48C'est poignon, non ?
05:49Il est dans son vide.
05:50Je connais cette moustache,
05:51mais derrière...
05:52Il y en a un qui garde un.
05:53Un bon souvenir de vous à Cannes,
05:54c'est votre chauffeur,
05:55Christian Kalf.
05:56Ah !
05:57Je le connais très bien.
05:58Très sympa, lui.
06:01Christian.
06:02Nous, on l'appelle Cricri, mais bon.
06:04Cricri, Cricri.
06:05Ah, Cricri.
06:06Christian Kalf, très sympa.
06:07Hyper sympa.
06:08C'est une histoire de Jean à Cannes.
06:09Et alors, il a déclaré dans l'Ice Matin,
06:11la semaine dernière,
06:12« Après notre histoire,
06:13Jean ne m'a plus jamais rappelé. »
06:14Alors, je ne sais pas,
06:15vous l'avez complètement séduit et abandonné ?
06:16Qu'est-ce qui s'est passé ?
06:17C'est vrai ?
06:18Ah bon ?
06:19Je vais l'appeler.
06:20Il était très amoureux de vous.
06:21Ça, c'était un homme tout à fait délicieux.
06:23Plus de nouvelles.
06:24Plus de nouvelles.
06:25Très bien, mais je vais faire attention,
06:26je vais l'appeler.
06:27D'ailleurs, je suis venu ici
06:28avec quelqu'un de chez vous,
06:29Momo.
06:30Momo.
06:31Et vous avez eu un moment absolument effatant.
06:32Charmant.
06:33On a parlé de plein de choses fondamentales.
06:35Le palmarès, la canne,
06:36c'est quand même un peu bizarre,
06:37mais vous l'avez fait exprès ou quoi ?
06:38Écoutez, l'affaire est délicate.
06:40Oui.
06:41L'affaire est délicate.
06:42On n'avait pas grand choix.
06:44Enfin, il y avait Karine Viard quand même.
06:45Très sympa, Karine Viard.
06:46Très.
06:47Très, très sympa.
06:48Extrêmement brillant.
06:49Très, très sympa.
06:50Vous savez qu'elle est venue ici, Karine Viard.
06:51Ça ne m'étonne pas.
06:52Et je lui ai demandé un jour,
06:53je lui ai dit,
06:54« Karine, qu'est-ce que vous préférez dans le sexe ? »
06:55Elle m'a répondu la bite.
06:57C'est bien.
06:58Remarquez.
06:59C'est assez juste.
07:01Oui, c'est assez juste.
07:02En même temps,
07:03quand on réfléchit,
07:04ce n'est pas idiot.
07:08Et c'était avant ou après le festival ?
07:10C'était bien avant.
07:11C'était bien avant.
07:12Pendant le festival de Cannes,
07:13nous avons quand même subi une fellation
07:15de huit minutes et demie.
07:17C'est quand même long,
07:18huit minutes et demie.
07:19Et ça m'a fait raser les murs pendant des semaines
07:21parce que l'homme avait un sexe immense.
07:24Et j'ai appris récemment que c'était une prothèse.
07:28Oh !
07:29Alors j'ai retrouvé le sort de morale.
07:30Ça va mieux.
07:31Et dites-moi, Jean,
07:32Meg Ryan, vous l'avez branché un peu ?
07:34Meg Ryan, je l'ai branché.
07:36Ça s'est bien passé ?
07:37Ah oui, oui.
07:38Mais ça s'est passé divinement bien
07:40avec Miss Universe, la cruse indienne.
07:43Ah oui, qu'est-ce qu'elle est belle.
07:45Elle est magnifique.
07:46Et elle m'a laissé un petit papier
07:49avec des petits bijoux incrustés dans le carton,
07:53des petits, de pacotilles,
07:55doux quoi, exotiques.
07:57Mais avec love.
07:59C'est ce que j'aime chez vous.
08:00En fait, ce que je préfère chez vous, Jean,
08:02c'est votre timidité.
08:03C'est-à-dire que dans les films
08:05dont on parle toujours,
08:06l'éléphant se trompe énormément,
08:07nous irons tous au paradis,
08:08cette espèce de timidité que vous avez comme ça,
08:11je trouve ça touchant,
08:12je trouve ça très craquant.
08:14Je me merveille encore qu'une jeune femme comme ça,
08:18Ophélie Winter,
08:20a voulu m'embrasser dans le couloir.
08:22Et alors ?
08:23Elle était trop maquillée.
08:24C'est le prétexte qu'il a donné
08:25de s'approcher pas trop près de moi,
08:27mais enfin, ça bouleverse.
08:28Vous avez toujours été comme ça un petit peu
08:30avec les filles à l'âge de 22 ans,
08:32vous fumez la pipe dans votre coin,
08:33et puis on vous appelait le philosophe,
08:35vous aviez du mal à...
08:36J'étais très timide,
08:37j'entrais pas dans le jeu,
08:38j'en ai beaucoup souffert,
08:39et puis c'est venu petit à petit.
08:41Ouais.
08:42Et l'acquisition de la moustache aussi.
08:45C'est ça, je pense que ça a tout fait.
08:46Ça m'a beaucoup libéré,
08:47et ça s'est passé comme ça.
08:49C'est vrai que vous,
08:50vous étiez plutôt partisan de choses comme ça,
08:53on se faisait un petit baiser le soir
08:55quand les parents étaient partis,
08:56enfin c'était...
08:57Vous deviez être effondré
08:58quand vous voyez les films porno aujourd'hui à la télé,
09:00ou même les émissions de télévision d'ailleurs.
09:02En tout cas,
09:03ne pensez pas que je sois un homme
09:05austère et embêtant.
09:07Oui.
09:08Je passe pour un amant exceptionnel.
09:10Vous avez beaucoup de femmes d'ailleurs.
09:11Je tiens.
09:12Ça va.
09:17Mais c'est vrai,
09:18il est vrai que l'hypocrisie dans la sexualité
09:22est restée pour moi un stimuli, un fantasme.
09:25Oui.
09:26Et il est vrai que le sexe exposé
09:29esquinte profondément ma libido.
09:32Ben oui, parce qu'il n'y a plus de transgression.
09:34Voilà.
09:35Moi j'ai besoin de transgression,
09:36je suis baudelairien.
09:37C'est connaître la sexualité dans les toilettes
09:41d'une école communale.
09:42C'est là que tout vient.
09:45Tout.
09:46Arrête Jean.
09:47Mais oui.
09:48Alors c'est tout un monde que je découvre maintenant.
09:51Et c'est vrai que cet affichage permanent
09:53m'esquinte beaucoup sexuellement.
09:55Oui.
09:56Alors, vous êtes devenu culte maintenant parce que c'est vrai que bon,
09:58bon voisin a fait le film blanche avec vous.
10:01Chabal et Robin Desbois, ça y est quoi je veux dire là.
10:03Vous êtes dans une autre dimension.
10:04C'est encore ailleurs là, non ?
10:06Oui, oui, c'est vrai.
10:07Je suis en train de vivre un hommage posthume de mon vivant.
10:10Oui.
10:11Ce qui est mieux, non ?
10:12Oui.
10:13On en profite.
10:14Ça a failli y arriver parce qu'il y a eu déjà deux Césars.
10:16Il y a eu que la fête commence.
10:17Il y a eu le crape tambour.
10:18Et en 99, un César d'honneur.
10:21Ça sent le sapin.
10:22Mais ça voulait dire, allez hop.
10:23Là, on a cru qu'il allait mourir.
10:25On a cru qu'il allait mourir.
10:27Et puis voilà.
10:28Et puis finalement, vous êtes toujours là,
10:29malgré votre César d'honneur.
10:30Vous êtes survécu au César d'honneur.
10:31Il m'a porté la poisse, un César d'honneur.
10:33Ils ont bien failli avoir raison.
10:36On y arrive, on y arrive.
10:40Un film qui ne sortira jamais, mesdames, messieurs.
10:43L'homme qui tua Don Quichotte de Terry Gillian
10:46avec Johnny Depp, Vanessa Paradis
10:49et notre ami Jean Rochefort.
10:51Ça a très mal commencé.
10:52D'abord, il y avait...
10:53Le titre déjà.
10:54Déjà le titre.
10:55Puis ensuite, il y avait...
10:56Dès le début du tournage, il y avait des avions.
10:58Vous tourniez juste en dessous des avions de chasse
11:01qui faisaient un bruit infernal toute la journée.
11:03Il y a eu un orage qui a emporté...
11:05Une tempête, une tempête.
11:06Voilà, tout le décor.
11:07C'était déjà terrible.
11:09Et alors, huit jours après le début du tournage,
11:11vous, Jean Rochefort, vous êtes victime d'une hernie inguinal.
11:15Oui, entre autres.
11:16Ça a été plus compliqué que ça.
11:18Enfin, je ne vais pas me répandre sur mes petits malheurs,
11:20mais enfin, il y a eu un vrai désastre physiologique.
11:22Tout a craqué.
11:24Donc, le dos, la hernie inguinal, un air...
11:27Un air dans le périnée.
11:28Un air dans le périnée.
11:29Et alors, un air placé affreusement mal.
11:31C'est que le périnée, ça fait mal quand tu es à chaleur.
11:33Le périnée, ça fait très mal.
11:35Voilà.
11:36Et obligé d'arrêter le tournage.
11:37Et ce qui est extraordinaire, c'est que vous, dans votre carrière,
11:39vous avez fait quoi ? 150 films au moins.
11:40Vous n'avez jamais arrêté un jour, même au théâtre.
11:42Non, jamais.
11:43Jamais manqué un jour.
11:44Jamais.
11:4520 ans de théâtre tous les soirs et 130 et quelques films.
11:48Donc, j'étais vraiment broyé par cette chose-là.
11:52D'autant que c'était, parlons un peu sérieusement,
11:55c'était un peu un rêve.
11:56Pour moi, Terry Gilliam était un rêve.
11:58Johnny Depp était un fan parce que j'adorais ses films
12:01qu'il y avait fait avec Jarmuche.
12:03Et là, vous dites Johnny Depp qui a un petit peu de sang indien.
12:07Il a ce respect des personnages et il a cette espèce de...
12:11Il est venu vers vous avec beaucoup d'attention, beaucoup de chaleur.
12:14C'était un homme épatant.
12:16Ça a été comme une espèce de fils artistique comme ça.
12:20Ils ont été épatants tous les deux avec Vanessa.
12:24Comme deux enfants s'apercevant que papa va mourir.
12:27Tout le monde espérait que vous alliez vous remettre.
12:30Tout le monde a tout fait, mais en fait pas du tout.
12:32C'est-à-dire que d'abord, on a cru un moment où vous aviez le cancer,
12:34il faut dire la vérité.
12:35Oui.
12:36Voilà quoi, ce qui n'était pas le cas malgré le César d'honneur.
12:39Et vous êtes resté sept mois au lit.
12:40Et là, votre Françoise a été formidable d'optimiser.
12:43Il faut bien le dire.
12:44Moi, je suis rentré chez moi, donc la douleur.
12:46J'ai demandé à ma femme, c'est bizarre, comme le psychisme et le physiologique,
12:51mais enfin, c'est pareil, j'ai appris tout ça maintenant.
12:54J'ai voulu faire des photos que ma femme me prenne en photo avec une fourchette,
12:59une râpe à gruyère et une espèce de timbale en métal
13:06pour qu'elle prenne des photos de moi totalement dérisoires en guichotte.
13:09Et on a fait cette série de photos que je n'ai toujours pas regardées.
13:14Et je suis monté dans ma chambre et je suis resté couché sept mois.
13:17Mais j'ai voulu, avant de me coucher, faire ces photos pour me piétiner la gueule.
13:22Comme une dernière pitrerie, quoi.
13:25Alors bon, au départ, tout le monde espère que vous allez vous remettre,
13:28puis un jour, voilà, ils réalisent que le film ne se fera jamais.
13:32Vous avez beaucoup de mal à en parler jusqu'au jour où, à Londres,
13:36vous assistez à la projection du making-of du film parce qu'il y avait une équipe
13:39qui tournait et qui a filmé cette espèce de désastre gigantesque que ça a été.
13:44L'équipe, c'est Keith Fulton et Louis Pépé, donc, qui ont fait ce making-of.
13:49Et le making-of s'appelle Lost in la Mancha, Perdu dans la Mancha.
13:53Donc, évidemment, c'est bien l'histoire.
13:54Et je trouve, moi, que le fait finalement que le film ne soit pas fait
13:58et qu'il y ait ce making-of sur le fait que le film était un échec,
14:02c'est beaucoup plus quichotien.
14:04Tout à fait.
14:05C'est pire en des liens.
14:07C'est très élégant en même temps.
14:08C'est génial.
14:09C'est délicieusement absurde.
14:10Oui.
14:11Making-of, mais il n'y a pas de off.
14:12Voilà, c'est le seul film qui n'existe pas et qu'on voit à travers un making-of.
14:19Alors Woody Allen a déclaré au sujet de ce making-of,
14:22c'est le pire cauchemar qu'un réalisateur puisse vivre, mais c'est tellement réjouissant.
14:27Encore une toute petite chose minuscule.
14:29Je ne voudrais pas qu'on me croit que je suis incapable de faire marcher un cheval au pas
14:33puisque j'ai consacré la moitié de ma vie à ça.
14:36Oui.
14:37Et dans les catastrophes supplémentaires, ce cheval est mort le lendemain.
14:40Mon Dieu.
14:41Tout simplement parce qu'on avait décidé, pour qu'il ait l'air de Rocinante, de ne pas lui donner à bouffer pendant trois mois.
14:48Ah !
14:49Bonjour la SPA.
14:50Oui, oui.
14:51Et bonjour le spleen de Rochefort.
14:53Parce que ça, ça m'en a foutu un coup.
14:55Mais vous n'avez pas gueulé vous ?
14:57Hein ?
14:58Je ne sais pas si vous avez vu ma tête, mais je n'avais déjà plus la force de rire.
15:01Alors...
15:02J'étais complètement...
15:03Non, non, je ne peux plus monter.
15:04C'est terrible parce que vous avez un rapport au cheval qui est très intéressant.
15:08C'est-à-dire que vous avez été mêlé très tôt au monde du cheval puisque votre grand-père avait une compagnie de fiacres à 10 ans.
15:15Et vous n'êtes pas...
15:16En fait, vous ne montiez pas malgré ça.
15:18Et à l'âge de 30 ans, ce qui n'est pas non plus tout jeune, vous faites cartouche, vous montez à ce moment-là sur un cheval et vous n'en descendrez jamais.
15:25C'est-à-dire que...
15:26Oui, j'arrête la compétition à 48 ans.
15:28Bah oui !
15:29Alors pourquoi vous ne vouliez pas monter sur un cheval ?
15:31Je crois que c'est parce que vous aviez peur d'avilir la plus noble conquête de l'homme.
15:35Vous pensez que...
15:36C'est vrai que j'ai assez le respect des êtres.
15:40Pas des choses, mais des êtres.
15:42Et je pensais qu'on n'avait pas le droit de monter sur le dos d'un animal ou d'un homme.
15:46Ça me gênait beaucoup.
15:48Je voulais courir à côté.
15:49Ça énervait mon père.
15:51Mais alors, c'est pour ça que j'ai réussi très tard à monter un cheval, à 30 ans.
15:57Ce qui est incroyable, c'est que quand vous montez sur un cheval à l'âge de 30 ans, il y a quelque chose qui se réveille en vous au niveau génétique.
16:04Parce que c'est vrai que tous les familles étaient là-dedans.
16:06Donc là, vous devenez complètement fou de cheval.
16:08Et ça devient pour vous une passion pratiquement à 50-50 avec le cinéma.
16:12Un métier, un métier.
16:14Alors, il y a une histoire extraordinaire.
16:16Jean est à Saint-Lô dans une foire.
16:19Et puis, il y a un type qui s'approche.
16:21Un vieil éleveur normand.
16:23Huit cheveux comme ça, agresseux, sous la casquette en twin.
16:26Un gros pif tout rouge.
16:28C'était à Saint-Lô.
16:30C'était la vente des étalons de l'année.
16:32Il s'approche de moi.
16:34Il me dit, dis-donc, je t'ai vu à la télé.
16:36Je ne savais pas que tu faisais du cinéma.
16:38C'était le plus beau jour de ma vie.
16:56Alors, Jean Rochefort, comme vous êtes en très bonne santé,
16:59tout le monde peut le constater,
17:01c'est le moment de vous faire une interview jugement dernier.
17:08C'est l'heure du jugement dernier.
17:12Jean, es-tu prêt ?
17:15Pas encore, mais bon.
17:17Jean, as-tu cru en moi ?
17:22À une époque, oui.
17:24Pourquoi as-tu cessé de croire en moi, Jean ?
17:29Parce que j'ai cessé, parce que j'ai cru en vous par trouille de la mort.
17:35Et je sais que vous n'arrangerez rien là-haut.
17:38Tu fais chier, Jean.
17:40Jean, as-tu déjà péché par pensée, par action, par omission ou à la mouche ?
17:50Jamais.
17:52Pêché à la mouche ? Jamais.
17:56Par omission, jamais.
17:57Et par pensée, tout le temps.
18:00Jean, as-tu foutu en l'air un tournage en prétextant un quelconque mal au dos ?
18:09Non, j'ai foutu en l'air un tournage en prétextant une douleur dans le périnée qui est situé entre l'anus et les testicules.
18:22Jean, tu blasphèmes.
18:25Jean, as-tu déjà participé à des émissions de télévision sous l'emprise de substances illicites ?
18:34Non, mais ce soir, j'aurais dû.
18:44Jean, as-tu déjà regardé TF1 le samedi soir en deuxième partie de soirée ?
18:51Non, non, jamais. Pourvu que ça dure.
18:54Jean, as-tu déjà commis l'acte de chair sans volonté reproductrice ?
19:05Oui, de nombreuses fois.
19:08Les gens gardent un souvenir épatant.
19:10On l'appelait Jean de Sailly à une époque.
19:11Ça, tu connais Jean de Sailly ?
19:17Très bien.
19:18C'est très bon.
19:19Jean, as-tu déjà trompé ta maîtresse ?
19:24Non, je ne suis pas un trompeur. J'ai eu de grandes passions, mais je ne trompais pas, je partais.
19:31Est-ce que tu te repends de tous tes péchés, Jean ?
19:36Non, c'était le plus agréable.
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