Interview ou reportage d'une émission cinéma produite par CANAL+ autour d'un film disponible sur CANAL+ ou sortant en salles, un événement ou une actualité du 7ème Art
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00:00Bonjour Denis Podalides, je suis ravie de vous recevoir pour parler du Répondeur.
00:04Est-ce que vous avez éteint votre portable déjà ?
00:06Il est là-bas, il est en mode silencieux toujours, de toute façon.
00:10Je vous dis ça parce que c'est cet objet qui est quand même presque le personnage principal du film finalement.
00:16En tout cas l'objet de tous vos problèmes, puisque vous incarnez un écrivain qui n'en peut plus de cette sur-sollicitation,
00:23avec cette dépendance, son téléphone, et qui va engager un imitateur pour gérer son téléphone et répondre à sa place.
00:32Qu'est-ce qui vous a plu dans ce film ?
00:35Ce petit résumé là, ça va être quelqu'un qui délègue toute sa vie à un imitateur pour répondre à sa place,
00:45pour vivre et exister à sa place, pour que lui puisse se mettre au verre pour finir un roman.
00:52J'étais extrêmement séduit par ça, parce que je me suis dit, est-ce que ça pourrait m'arriver ?
00:57Je ne pense pas, mais c'est un rêve aussi.
01:00Parce que vous êtes écrivain aussi dans la vie.
01:03Oui, oui, je publie des livres.
01:06Je vois toute la distance qui me sépare d'un grand écrivain comme je les aime, de l'écrivain que je suis.
01:12Mais oui, je passe pas mal de temps à écrire et j'aimerais parfois trouver du temps
01:16où toute la vie soit comme suspendue pour terminer un livre.
01:20Je comprends très bien ce désir là.
01:22Vous vous entretenez quel genre de relation avec votre portable dans la vie ?
01:26Vous voyez, le mien est en silencieux tout le temps.
01:28C'est-à-dire que les appels toute la journée.
01:30Sauf si on me dit, on va t'appeler entre telle heure et telle heure et il faut vraiment que tu répondes.
01:35Alors là, je fais l'effort de clic, de mettre sur le côté le clic.
01:40Oui, c'est ça.
01:41Oui, mais si vous êtes en silencieux, ça veut dire qu'à la fin de la journée,
01:43vous avez énormément de messages à écouter sur votre répondu.
01:45Vous savez pas tant que ça.
01:47C'est qu'aujourd'hui, on envoie les SMS.
01:49Beaucoup de SMS.
01:51Allô ?
01:51Je ne compte plus les appels.
01:54Et les jours, je deviens fous.
01:55Bonjour, Pierre.
01:57Où tu en es concernant ton prochain livre ?
01:59Allô, papa ?
02:01Papa.
02:02Allô ?
02:03Alors en tout cas, dans le film, c'est cette rencontre entre deux personnages que tout oppose.
02:07Il y a Baptiste l'imitateur, qui est un artiste en mal de reconnaissance,
02:11alors que vous, à l'opposé, votre personnage, Pierre, est un écrivain célèbre qui, lui, aspire au silence, à l'isolement.
02:17Comment est-ce que vous l'avez abordé, ce personnage ?
02:20Alors vraiment, de manière très proche de moi, enfin, je...
02:24Vous reconnaissez en lui ?
02:26Oui, pas dans sa solitude et son alcoolisme, parce que c'était un alcoolique repenti, enfin, pas si repenti que ça.
02:34Mais ce désir, parfois, le désir d'isolement, le désir de...
02:39Moi, par exemple, je ne suis pas sur les réseaux sociaux et j'ai une sorte de phobie, a priori, de tout ce qui est réseaux sociaux.
02:45TikTok, c'est un mot qui m'angoisserait à la limite, donc je suis tout à fait à l'écart de ça.
02:52Donc, je me suis reconnu vraiment dans cette volonté d'écart, de pouvoir être à distance de toutes ces fréquences.
03:00J'écoute assez peu la radio, hormis des anciennes émissions.
03:04Je lis les livres, pas forcément ceux qui viennent de paraître.
03:09Enfin, je me mets en décalage avec le temps, très souvent.
03:12Et je n'en suis pas fier.
03:15Mais c'est un besoin.
03:16C'est un besoin, c'est parfois peut-être un peu maladif.
03:20C'est les temps présents, je me sens très, très inquiétant.
03:25Donc, c'est une façon de me rassurer moi-même en me mettant un peu à l'écart comme ça.
03:30Alors, il propose à Baptiste de prendre son téléphone, mais de prendre sa vie en quelque sorte,
03:34parce que lui, il est loin de s'imaginer aussi tout ce que cela entraîne, en fait,
03:37de confier toute sa vie entre les mains d'un inconnu qui va répondre et penser à sa place, surtout.
03:42Ah oui.
03:43D'ailleurs, moi, je ne le ferai jamais.
03:44Je ne pourrai jamais faire ce que fait ce personnage.
03:46C'est là où on est dans le domaine de fiction, parce que je pense que ni vous, ni personne
03:50ne donnerait son téléphone comme ça pour parler à sa fille, sa femme, son ex-femme, sa maîtresse, etc.
04:00Vous imaginez, s'il pensait, alors c'est un homme qui est censé être intelligent,
04:05s'il imaginait tout ce qui allait arriver, il n'y aurait pas de film.
04:08Alors, Salif Sissé, il est remarquable dans le film.
04:10Il y a un travail que vous avez fait tous les deux, finalement, sur la voix.
04:14Est-ce que vous pouvez nous expliquer ?
04:15Michael Gregorio, qu'on connaît tous, ce célèbre imitateur, consultant sur le film,
04:19qui vous a tous beaucoup aidé.
04:21Mais il y a quelque chose de fascinant, en fait, sur la voix.
04:23Alors, je dois dire que ça, ça a été pour moi la chose qui m'attirait presque inconsciemment.
04:29Le challenge ?
04:30Ça, la voix, le transfert de voix, rencontrer un imitateur comme Michael Gregorio,
04:36quand on a fait une séance de lecture avec lui, qui était très, très passionnante,
04:39où on sentait qu'il analysait parfaitement, il analysait les données de ma voix
04:43pour que Salif apprenne ce jeu de l'imitation.
04:49Mon invitation doit vous paraître étrange.
04:53Étrange.
04:54Vous devez vous dire que je suis complètement cinglé.
04:57Et vous auriez raison de le penser.
04:59Moi, j'ai toujours aimé ça, les imitateurs et l'imitation.
05:02Moi-même, je me rappelle que je me faisais mourir derrière ma mère en imitant des voisins de palier.
05:07Vous avez imité Sarkozy aussi.
05:09Oui, j'ai joué comme ça des rôles.
05:12D'ailleurs, je vais faire Mitterrand.
05:13J'appelle ça de l'imitation sérieuse.
05:15Je ne fais pas de l'imitation en vue de faire rire,
05:18en vue de faire dire des blagues ou des bêtises à la personne que j'imite,
05:22mais en vue, au contraire, d'être totalement au plus près, dans le sérieux de la voix, si je peux dire.
05:26Et puis avec la voix, il y a la gestuelle, en fait.
05:28On rentre dans le corps.
05:29En fait, la voix, j'ai même fait un livre là-dessus qui s'appelle Voix Off.
05:33La voix, c'est le corps.
05:34Tout le corps, je pense, tout le corps est dans la voix.
05:37Et vous analysez une voix et ça vous donne toute l'existence de la personne.
05:41C'est comme le code complet qui est là, plus que le code ADN.
05:44Il y a tous les codes possibles.
05:46Et donc ça, ça m'a passionné dans le film.
05:48Et avec Salif, on s'est rencontrés entre ma voix et la sienne,
05:54parce qu'on a tout refait en synchro.
05:57Moi, je retranscris tout le dialogue dans lequel il parlait par ma voix.
06:02Mais je devais le faire dans les inflexions que Salif a faites au tournage.
06:07Donc c'était un travail de chien.
06:09Parce qu'on reprenait chaque mot, seconde par seconde.
06:12Parce qu'on me disait, non, on la regarde, Salif a respiré.
06:15Donc pas forcément comme moi j'aurais respiré.
06:17Mais pour que ce soit ma voix qui joue dans la sienne,
06:21il fallait que je reprenne presque des intonations très très légères,
06:24des inflexions, des respirations, des temps à telle ou telle mesure.
06:29C'était une sorte de portée musicale.
06:31C'est un travail d'orfèvre.
06:32Et c'est ce qui fait aussi toute la réussite du film.
06:34On est complètement cueillis par...
06:36Tant mieux, parce qu'à un moment,
06:38on voyait quand je faisais le doublage de Salif
06:43que c'était moi qui parlais dans la voix de Salif.
06:45Donc c'était un doublage tout bête.
06:48Et on se disait, il ne faut pas que le spectateur pense à doublage.
06:51Il faut qu'il pense vraiment à imitation.
06:53Donc ils ont...
06:55Et je crois que Salif a aussi redoublé sa propre voix.
06:58Et ensuite, c'est une combinatoire des deux voix
07:00où il dose entre la mienne, celle de Salif,
07:03pour atteindre cette troisième voix
07:06qui est la voix de Salif et la mienne.
07:08Je suis désolé de ne pas t'avoir répondu tout à l'heure, ma chérie,
07:18mais je travaillais.
07:20C'est pas grave.
07:21T'avances bien ?
07:22Pas trop mal.
07:24Et toi ?
07:26J'espère que tu trouves le temps de peindre.
07:28Non, pas vraiment.
07:29Tu sais que je connais deux, trois galeristes
07:31qui t'exposent quand tu veux.
07:32Ouais, ouais, tu me l'as déjà dit 25 000 fois.
07:34Faut que je te laisse, j'ai en retard.
07:35Je te rappelle ce soir en freestyle ?
07:37Ah non, non, non, non.
07:39Non, tu sais bien que j'aime pas ça.
07:43On se rappelle plus tard.
07:45Tac.
07:45Bisous, ciao.
07:48Qu'est-ce que vous avez ressenti
07:49lorsque vous avez vu pour la première fois
07:51Salif avec votre voix ?
07:53En fait, beaucoup de plaisir
07:54parce que soudain, je trouvais que ça marchait.
07:57On y croyait, tout simplement.
07:59Et donc, on était prêts à suivre cette histoire
08:01sans plus poser la question.
08:02Salif, si c'est, c'est une vraie rencontre,
08:04j'imagine, sur ce film.
08:05En tout cas, ce qui marche, c'est votre duo.
08:07Il dit de vous, avec Denis Podalides en face de moi,
08:10j'ai essayé de savourer chaque seconde.
08:12J'ai vécu l'expérience d'un immense acteur
08:15qui donne tout à la fois dans le champ et hors champ.
08:17C'est hyper sympa, évidemment.
08:21Mais moi, j'en ai autant pour lui.
08:23Quel acteur ?
08:24C'est vraiment un comédien.
08:27Moi, je l'avais remarqué
08:28dès le premier film que j'ai vu de lui,
08:30qui était le film de Guillaume Braque à l'abordage.
08:34Je me suis dit, qui c'est ce gars-là ?
08:36Il est incroyable.
08:37Je trouvais qu'il avait une sensibilité,
08:41une présence, aussi une beauté vocale.
08:45Et j'adore la souplesse vocale
08:47chez les comédiens, les comédiennes.
08:49Et je trouvais qu'il avait cette douceur-là
08:51et qui faisait passer tant de choses
08:54dans un regard, dans une inflexion.
08:56Et voilà, j'ai envie de suivre tout ce qu'il fait.
08:59J'ai envie de rejouer avec lui
09:01parce qu'on se sent bien
09:02avec des comédiens comme ça.
09:03Vous avez confié, Denis,
09:05« Je rêvais d'être humoriste
09:06et j'ai découvert que j'étais acteur ».
09:08Quel a été le défi ?
09:08J'ai dit ça, moi.
09:11Oui, c'est vrai.
09:12J'aurais aimé faire ça.
09:13Et de temps en temps,
09:14dans des lectures publiques
09:15où je lis mes propres textes,
09:17je peux me transformer un peu.
09:19Je sens ce qu'est un peu le stand-up,
09:21ce qu'est le...
09:22Mais je ne fais que l'effleurer.
09:24Je ne me sentais vraiment
09:26à l'aise qu'à partir du moment
09:27où j'étais un autre,
09:28où j'étais un personnage,
09:29où il y avait quand même
09:31un masque intérieur important
09:33qui me permettait de...
09:35Le fait d'être moi, seul, en scène,
09:38en portant mon nom
09:39et en disant « Je suis moi »
09:40et écouter ce que j'ai à dire,
09:42là, j'étais plutôt mal à l'aise.
09:43À partir du moment
09:44où j'entre en scène
09:45et je suis à bled,
09:47je me sens beaucoup mieux.
09:48Et le rire est quand même
09:49resté une constante dans votre parcours.
09:51Oui, ça fait partie
09:53de notre enfance aussi.
09:55et mon frère Bruno et moi,
09:57on a partagé très tôt
09:59un goût de la comédie
10:00et du rire.
10:01Alors évidemment,
10:02vous avez tourné
10:02dans tous les films de votre frère.
10:0312 films au total.
10:05Ce goût pour la poésie,
10:07l'humour, le burlesque,
10:08ça remonte à l'enfance ?
10:09Je pense que très tôt,
10:11notre père et notre mère aussi,
10:14mais peut-être plus notre père
10:15avait un goût du spectacle,
10:17un goût du cirque,
10:19du cinéma, du théâtre,
10:21des acteurs, de la scène,
10:23qui étaient,
10:23quand je vois des films super-huites
10:25que mon père faisait
10:26dans les années 60,
10:28il faisait le clown
10:29et il cadrait,
10:30il donnait au spectacle
10:32une importance
10:33qu'on ne donnait pas forcément
10:34dans des familles
10:34bourgeoises catholiques
10:36de cette époque-là
10:37où le théâtre ou le cinéma
10:38s'était vu
10:39comme un petit divertissement,
10:40mais pour le week-end.
10:43Là, c'était presque,
10:44ça a transformé
10:45la vie quotidienne.
10:46Mon père nous aidait
10:48à construire des guignols,
10:50favorisait tout ce qui était jeu
10:52de personnages, d'acteurs.
10:54L'imaginaire, la fantaisie,
10:56c'était...
10:56Ah oui, il pouvait passer du temps
10:58à regarder un spectacle
10:59de marionnettes,
10:59alors que vous savez,
11:00un spectacle de marionnettes
11:01d'un enfant de 4-5 ans,
11:02bon, c'est pas forcément...
11:04Parfois mieux à faire.
11:07Mais lui, non, non,
11:08il donnait, je me rappelle,
11:08il payait,
11:09il nous donnait un franc
11:10quand il venait voir
11:12dans la chambre
11:13quand on avait installé
11:14un guignol
11:15qui nous avait aidé
11:15parfois à construire.
11:17Et à partir de là,
11:18lui comme moi,
11:20on a le goût du jeu.
11:22Et depuis plus de 100 films,
11:23autant de pièces de théâtre,
11:24enfin, je ne compte plus
11:24tout ce que vous avez fait
11:25dans votre immense carrière.
11:26Merci beaucoup.