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Art et designTranscription
00:00Bonjour à tous. Plus les années passent, plus la salle est remplie.
00:05Bientôt c'est Bercy qu'il faudra louer.
00:09On est ravis en tout cas de vous retrouver cette année encore
00:13pour vous présenter notre entrée littéraire 2025.
00:18On a quatre titres cette année.
00:21Je vais laisser Jean-Luc Barré prendre la parole
00:23pour présenter les éditeurs qui l'entourent.
00:30Ça ne marche pas. Oui, ça marche.
00:35Bonjour à toutes et à tous.
00:36Je vais être en effet bref.
00:38Je voulais simplement vous dire qu'on s'était vus il y a un an.
00:40Il y a un an, je prenais la direction de Plon
00:43et je vous avais dit que nous étions en train de remettre en marche complètement cette maison.
00:48Je crois que c'est tout nettement fait désormais.
00:51Vous avez vu un certain nombre de livres qui ont été des vrais beaux succès
00:54et les bonnes orientations, je crois, ont été prises dans tous les domaines,
00:58notamment dans la littérature.
01:00Et un de mes premiers soucis a été de m'entourer
01:03parce que je ne prétends pas pouvoir, loin de là, tout faire dans cette maison.
01:08Et j'ai voulu qu'il y ait une véritable équipe,
01:10même qu'il y ait une très belle équipe commerciale,
01:12qu'il y ait une belle équipe littéraire.
01:14C'est pour ça que j'ai confié deux secteurs importants à deux éditeurs.
01:18L'un est Aurélien Masson qui est à côté de moi.
01:20Vous connaissez Aurélien qui a dirigé pendant toute une période
01:23la série Noir chez Ganimard
01:25et qui est un éditeur tout à fait reconnu.
01:27Et je suis très, très heureux qu'il ait accepté de nous rejoindre
01:30pour prendre en main tout l'aspect de la littérature française,
01:33voire des titres étrangers.
01:36Et par ailleurs, j'ai demandé à Loris Perret
01:39de prendre la responsabilité de la collection Feu croisé,
01:42qui est une très belle collection de plomb,
01:45qui est centenaire, qui sera centenaire l'année prochaine.
01:47Donc ça veut dire qu'elle a à son palmarès
01:49quantité d'auteurs de très grand renom
01:52et nous allons renouveler ce patrimoine,
01:56d'une part l'entretenir, mais aussi accueillir de nouveaux auteurs.
01:58Voilà, Loris est un jeune éditeur en qui j'ai grande confiance
02:02et je suis sûr que dans ce domaine-là,
02:04il va pouvoir développer toute une série d'auteurs nouveaux
02:07et de titres nouveaux.
02:09Voilà, donc je laisse la parole tout de suite à Aurélien
02:12pour nous parler des deux titres de littérature française.
02:17Bonjour à tous.
02:18Alors on va commencer par le livre de Salim Bashi
02:20qui s'appelle Le Rocher des proscrits.
02:26Salim écrit depuis une vingtaine d'années.
02:29On avait d'ailleurs tous les deux un peu commencé
02:31au même moment chez Gallimard.
02:32Je suis très heureux de l'avoir retrouvé,
02:34qu'on inaugure cette aventure ensemble.
02:37Donc Le Rocher des proscrits, c'est l'histoire de...
02:39C'est un roman centré autour de Victor Hugo
02:41qui se déroule en 1853.
02:44Et Hugo est installé sur l'île de Gergé depuis quelques mois
02:48suite au coup d'état de 1951
02:51où Napoléon le petit a pris le pouvoir.
02:55Donc sur cette île, Hugo vit avec à la fois sa femme,
03:01ses enfants, et puis dans le village à côté,
03:02il y a Jouette Rouée.
03:04Et en fait, il va et vient un peu entre les deux sphères
03:07entre les deux pôles de sa sphère intime.
03:11Et il est un peu hors sol dans cette île,
03:13c'est-à-dire qu'il est entouré de proscrits républicains
03:16extrêmement à gauche, extrêmement engagés,
03:20et qui lui reprochent un peu son...
03:21J'allais dire son engagement lors des journées de 48.
03:26Donc il est à la fois vénéré,
03:28à la fois tenu à distance, un peu moqué.
03:31Lui a tout juste 50 ans,
03:35donc il est vraiment au mi-temps de sa vie,
03:36et il est dans une période assez difficile.
03:40Il est en pleine, on pourrait dire,
03:41en pleine crise existentielle.
03:42Et il se replonge un peu sur ses années de jeunesse,
03:47sur notamment aussi la disparition de sa fille,
03:50qui est morte 10 ans plus tôt,
03:52alors que lui-même vivait le grand amour
03:54avec Juliette Rouée en Espagne.
03:56Donc c'est un livre qui est pétri de...
03:58Comment dire ?
03:59De doutes, de contritions.
04:03C'est un livre sur l'exil,
04:04parce qu'il se sent complètement à la fois perdu
04:08face à cet océan impétueux,
04:13et il est en pleine réinvention de lui-même.
04:15C'est-à-dire qu'il est à la fois perdu,
04:17mais il continue à écrire,
04:18il va recommencer à sortir ses manuscrits
04:20qui seront plus tard les misérables.
04:22Et donc on est vraiment dans une période de transformation.
04:27On pressent déjà aussi ce qui sera après,
04:31cette problématique autour des tables tournantes.
04:35C'est-à-dire que c'est là qu'il commence vraiment
04:37à découvrir le spiritisme.
04:41Et donc il y a aussi des grandes séances de dialogue,
04:43parce qu'évidemment, quand Hugo parle aux esprits,
04:46ce n'est pas pour parler à sa mère ou à sa cousine,
04:48mais c'est à peu près des grands grands esprits.
04:49Donc il parle avec Shakespeare, avec Cicéron,
04:52avec des grands créateurs.
04:53Donc on est vraiment dans un roman extrêmement atmosphérique,
04:57servi par une langue.
04:58Salim a extrêmement travaillé sa langue.
05:01On a l'impression d'être comme dans une sorte de capsule spatio-temporelle.
05:04On a l'impression qu'il est écrit comme au XIXe siècle.
05:08C'est un récit assez court qui se lit vite,
05:10mais qui est vraiment très dense
05:12dans ce portrait dressé de Victor Hugo.
05:16Donc ensuite, je vais vous parler du deuxième livre
05:19qui s'appelle Grand Poisson.
05:21Alors ça, c'est un premier roman
05:23d'un homme qui s'appelle Fabrice Sanchez,
05:26qui est né en 1985, donc il a 40 ans.
05:28Il est professeur.
05:30Et c'est un livre qui parle justement de l'école.
05:33Le Grand Poisson, c'est le lycée,
05:37car en fait, le héros de ce livre
05:40est un primo-professeur de français
05:43qui sort tout juste de ses études,
05:45qui a été brillamment reçu.
05:48Donc vraiment un très, très, très bon élément
05:50et qui est totalement passionné par la littérature,
05:53par l'idée de transmettre.
05:55Enfin, vraiment, c'est son sacerdoce.
05:57Il est extrêmement heureux de devenir enfin professeur.
06:01Et donc, il arrive dans son lycée,
06:03ce lycée qui s'appelle le lycée Célestin Faramont,
06:06qui est un grand, grand lycée
06:07avec des milliers d'élèves,
06:09qui a une allure gothique,
06:10on dirait un peu un lycée anglais,
06:13au-dessus d'une colline qui domine la ville.
06:15Et en fait, on va comprendre très vite
06:17qu'on va déchanter avec le professeur
06:20parce que ce lycée vit sur sa légende.
06:24C'est-à-dire qu'un siècle plus tôt,
06:25c'était un grand, grand lycée.
06:27Maintenant, il est tout décrépit.
06:29Une école privée, un lycée privé,
06:31c'est ouvert dans la ville
06:32où tous les bons éléments vont.
06:34Et en fait, ce lycée devient un peu le,
06:35entre guillemets, quand je dis déversoir,
06:37c'est rien de péjoratif,
06:38mais c'est l'effet, le déversoir de la cité voisine.
06:42Donc il arrive dans un lycée
06:43qui n'est pas à la hauteur de ses attentes.
06:46Il se retrouve confronté à des professeurs
06:48qui sont complètement épuisés
06:49dès la première semaine de la rentrée.
06:52Et il comprend très vite
06:53que son métier va être moins
06:56de transmettre son amour de la littérature
06:58que d'essayer de tenir une classe
06:59parce qu'en plus, il hérite de la seconde 13,
07:04qui est la pire seconde de l'année.
07:05Donc il va très vite comprendre
07:07que son métier est plus de tenir ses élèves
07:09que d'essayer de transmettre quoi que ce soit.
07:12Il est accompagné pendant cette première année,
07:15comme tous les primo-professeurs,
07:17par une tutrice.
07:18Et cette tutrice, c'est elle qui dirige le livre.
07:20C'est-à-dire que c'est un livre qui est écrit au tu
07:22sur plus de 350 pages.
07:24Et ce tu, en fait, c'est la tutrice
07:27qui s'adresse à ce professeur.
07:30Et cette tutrice est absolument redoutable,
07:32redoutable, totalement réactionnaire.
07:35On pourrait dire une sorte de Finkelkraut en jupon
07:38et qui lui tient des discours
07:40de plus en plus, j'allais dire, violents
07:43au fur et à mesure qu'on progresse dans le livre.
07:46Et au début,
07:49on a tendance un peu à adhérer au discours
07:52parce que c'est vrai que le tableau
07:53que fait le jeune professeur de sa classe
07:56est assez, plus que perturbant.
07:59Mais progressivement, on va comprendre
08:01qu'en adhérant à ces discours-là,
08:03la situation empire.
08:04Et en fait, le professeur, progressivement,
08:06va se libérer de ces discours.
08:10Donc ce livre est extrêmement caustique et féroce.
08:14C'est-à-dire que c'est vraiment une critique
08:15du « c'était mieux avant ».
08:18Mais encore une fois, il vous manipule.
08:20C'est-à-dire que c'est un peu comme si
08:21vous tendez une pomme
08:23pour vous faire croquer dedans
08:25et que le lecteur a tendance à résister
08:27comme le professeur.
08:29Et donc, il y a un côté pavé dans la mare,
08:33assumé.
08:34Et puis, c'est en même temps servi,
08:35parce que là, je vous parle de choses
08:36très, très actuelles,
08:37très, très contemporaines.
08:40Mais c'est servi par une langue
08:41qui a l'air d'être sortie
08:42de la fin du 19e siècle.
08:44Enfin, Sanchez est un grand admirateur
08:47de peau, de lovecraft,
08:49de toute une littérature gothique.
08:51Donc, on est aussi dans cette atmosphère-là.
08:54C'est-à-dire que ce lycée,
08:55qui est le grand poisson,
08:57ce grand lycée,
08:58est un lycée labyrinthique.
09:00On se perd des couloirs,
09:01des portes qui ne se referment jamais.
09:03Enfin, il y a un côté très, très étrange
09:04qui contrebalance un peu
09:06le discours extrêmement actuel
09:08sur l'éducation,
09:12sur l'état de l'école.
09:14Donc, c'est un doux mélange.
09:15Et c'est vraiment une nouvelle voie.
09:18Ok, je passe la parole à Loris.
09:24Oui.
09:25Donc, je vais vous présenter
09:26nos deux titres de Feux croisés cette année,
09:29nos deux titres étrangers.
09:30On est extrêmement fiers
09:31d'accueillir ces deux nouvelles autrices
09:34dans notre catalogue.
09:35On va essayer de redonner un peu
09:37de force et d'ampleur à cette collection
09:40dans la veine de ce qui avait pu exister
09:42dans le patrimoine avant.
09:44Donc, ces deux titres qui se répondent
09:46et qui sont très différents,
09:48les deux.
09:49Donc, je commence par Alexandra Fuller
09:50qui est peut-être le titre principal
09:53de cette rentrée.
09:54Alexandra Fuller, c'est une autrice
09:56qui avait publié chez Lattes
09:57qui avait surtout proposé des récits
10:00sur son enfance sud-africaine,
10:03au Zimbabwe précisément.
10:05Une enfance dans un environnement colonial
10:06très brutal où elle parle du deuil
10:08de sa sœur,
10:09où elle parle d'une éducation
10:11où les enfants sont très, très peu considérés,
10:15où finalement, ils doivent faire face
10:18à des événements comme la guerre,
10:21guerre de décolonisation aussi,
10:23et on ne leur apprend pas du tout
10:24la gestion de leurs émotions
10:25et à faire face aux épreuves
10:27qui leur font face.
10:30Et dans ce contexte,
10:31après l'arme de pierre
10:32qu'elle avait proposée il y a quelques années,
10:34elle écrit, comme on fixe le soleil,
10:36le titre américain et fille,
10:38elle évoque le deuil de son fils
10:40de 21 ans,
10:41alors qu'elle a une cinquantaine d'années.
10:43Et c'est un texte qui est très, très étonnant
10:46parce qu'il n'est pas emprunt
10:47de la tristesse à laquelle on peut s'apprendre,
10:49à s'attendre.
10:51C'est une écriture reportage
10:52dans le style de ce qu'elle avait pu proposer avant
10:54où, par moment,
10:57on a l'impression qu'elle se décrit presque
10:58comme le personnage de sa propre histoire.
11:01Elle a cette distance vis-à-vis de ses émotions
11:03qui lui permet même
11:04de témoigner d'un certain humour.
11:06Et ce titre qu'on a choisi avec elle,
11:10comme on fixe le soleil,
11:11c'est son attitude face à la perte.
11:12Une attitude qu'elle invente
11:13au fur et à mesure des pages
11:15puisqu'en fait,
11:16elle trouve qu'il n'y a pas de recette,
11:17qu'il n'y a pas de façon
11:18de surmonter ce plan dans sa vie.
11:21Et elle cherche.
11:22Donc elle va avoir recours
11:23à la médecine alternative.
11:25Elle va faire une retraite de méditation
11:26en silence pendant deux semaines.
11:28Elle va partir s'isoler
11:29pendant deux, trois semaines
11:30au milieu de la forêt
11:31dans une roulotte à moutons
11:32en cherchant des échos
11:37à la sauvagerie intérieure
11:38qu'elle connaît
11:38et en essayant de trouver un moyen
11:41de surmonter ça pour ses filles,
11:43surtout ses deux filles
11:43qui ont besoin d'elle
11:45et qui ont besoin
11:46de continuer à vivre avec une mère.
11:48J'insiste un peu sur l'humour quand même
11:50parce qu'il me semble que
11:51c'est un texte
11:52où on ne s'attend pas du tout
11:54à rencontrer cette plume
11:56très ironique, très acerme.
11:58Elle se dépeint elle-même
11:59vraiment en lien
12:01avec un personnage
12:02qui s'appelle Till
12:03qui est son ex-compagne
12:05et elle n'a pas de problème
12:06à faire de Till
12:07un personnage presque insupportable
12:10au milieu de ce deuil
12:10et elle-même
12:11à se dépeindre
12:13dans ses propres défauts.
12:14C'est un livre
12:15qui a eu beaucoup de presse
12:16aux Etats-Unis,
12:17très impertinent,
12:18très fort
12:19et qui a été sélectionné
12:21pour le prix Pulitzer,
12:23qui a été sélectionné
12:24dans la liste
12:25des titres
12:26les plus importants
12:27de l'année
12:28du New York Times.
12:29Donc ça rappelle un peu
12:31Johan Didion
12:32et l'année de la pensée magique
12:33pour le style
12:34et pour l'originalité
12:36du traitement.
12:37Le deuxième titre
12:41qu'on vous propose,
12:42celui-ci
12:43est dans une veine
12:45qui est complètement différente.
12:47Le premier,
12:47ça se passe en extérieur.
12:49C'est un périple
12:49à travers les Etats-Unis.
12:51Celui-ci,
12:51c'est 24 heures
12:52dans la vie
12:53d'une jeune étudiante
12:54à Oxford.
12:55C'est un peu
12:56une sorte de huis clos
12:57et c'est un texte
12:58qui est emprunt
12:59d'académisme
13:00et de rapport
13:02à la littérature
13:03et à la lecture.
13:03C'est pour ça
13:04qu'on a voulu
13:05le positionner
13:05dans cette rentrée littéraire.
13:07C'est pendant 200 pages
13:08une méditation
13:09sur le rapport aux mots,
13:10sur le rapport
13:11à la littérature
13:11et spécifiquement
13:13sur les sonnets de Shakespeare
13:14puisque le personnage principal,
13:17Annabelle,
13:18est étudiante en lettres
13:19et elle doit rendre
13:20pour le lendemain
13:21une dissertation
13:22sur les sonnets de Shakespeare
13:23en essayant
13:24de trouver un angle,
13:25de trouver une aspérité
13:26qui lui permette
13:27d'approcher
13:27cette oeuvre intimidante.
13:30C'est une écriture
13:31à la troisième personne
13:32qui permet au narrateur
13:34de jouer avec la distance
13:35avec ce personnage,
13:38de questionner l'érudition
13:40et de regarder
13:43la pensée à l'oeuvre
13:45pendant 24 heures
13:46entre les textes,
13:48les digressions,
13:50tous les fantasmes,
13:51toutes les divagations mentales.
13:53On est un peu
13:53dans du Virginia Woolf
13:54si vous voulez.
13:55Il y a cette espèce
13:56de flux de conscience
13:57mais traité
13:58par la troisième personne
13:59ce qui est très intéressant.
14:00avec l'intrication
14:02puisqu'on retrouve
14:02certains vers de Shakespeare
14:03au sein même du récit
14:05comme des échos
14:07à ses propres tourments intérieurs
14:08et pendant toute la journée
14:10le personnage se demande
14:11si elle doit ou non
14:13partir en week-end
14:14avec son compagnon plus âgé
14:16qui est un ami de sa mère.
14:18C'est aussi une réflexion
14:19sur le désir
14:19qui naît
14:20dans l'esprit
14:20d'une jeune femme
14:22sur le rapport au corps,
14:24sur les dialogues
14:25entre le corps et l'esprit
14:26tout au long
14:27de ces 24 heures.
14:33Vous voulez ajouter un mot ?
14:35Je voulais vous remercier.
14:37J'espère que ça vous donnera envie
14:38de découvrir
14:40et de défendre ces textes.
14:41J'en profite aussi
14:42pour vous présenter
14:44Lise Rosé
14:44qui est arrivée
14:46chez Plon
14:47en tant que relation libraire
14:49et que vous pouvez contacter
14:50bien sûr
14:50pour vos événements
14:51ou pour des demandes
14:53de lecture.
14:53Merci.
14:56Merci.
14:56Applaudissements
14:57Sous-titrage Société Radio-Canada