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Najat Vallaud-Belkacem, figure du Parti Socialiste français, ancienne porte-parole du gouvernement sous François Hollande, ancienne ministre des Droits des Femmes puis de l’Education nationale est désormais présidente de France Terre d’Asile, une structure qui accompagne les demandeurs d’asile en France. À l’occasion de la publication de son livre Réfugiés. Ce qu’on ne nous dit pas, Najat Vallaud-Belkacem revient dans cet entretien sur la nécessité de reprendre le contrôle des débats publics concernant ces thématiques. Des débats trop souvent pollués par des discours identitaires qui déshumanisent les demandeurs d’asile et créent du désintérêt voire de la méfiance dans l’opinion publique française, et pas que.
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Transcription
00:00Najat Vallaud-Belkacem, bonjour.
00:01Bonjour.
00:05Ces personnes qui demandent l'asile sont malheureusement, comme vous l'avez dit, stigmatisées.
00:10Le cadre est peu connu ou mal connu par les citoyens, par l'opinion publique.
00:15Y a-t-il également une forme de désintérêt de la part des citoyens
00:19qui considèrent peut-être la problématique comme trop vaste, trop complexe, voire trop européenne ?
00:25Oui, c'est vrai. Alors ça, c'est clair.
00:26Je pense que ce dont souffre le droit d'asile et donc la protection des personnes concernées,
00:33c'est que depuis quelques années, sans doute dizaines, quinzaines d'années maintenant,
00:38ce sujet a été laissé en gros entre les mains soit des populistes, des hostiles, des manipulateurs,
00:45soit des technocrates en quelque sorte.
00:48Et donc le citoyen en a été un peu désaisi.
00:51Mais c'est même son intelligence qui a été désaisie.
00:54Et ce qu'essaye de faire ce livre qu'on a écrit avec l'économiste Benjamin Michalet,
00:58c'est vraiment de redonner aux citoyens de quoi juger par lui-même.
01:03En fait, ce n'est pas possible de ne pas se sentir concerné par ce dont il est question-là.
01:09Peut-être qu'on ne se sent pas concerné parce qu'on se dit « moi, je ne serai jamais demandeur d'asile ».
01:12D'abord, on se tromperait en disant ça.
01:14Deuxièmement, on doit se sentir concerné parce qu'en fait, c'est des droits fondamentaux dont il s'agit.
01:20Et donc c'est pour ça que je vous dis, nous autres citoyens, on ne peut pas se laisser désaisir comme ça
01:23par des manipulateurs, des populistes ou des technocrates.
01:26Mais alors justement, comment réinventer le narratif ? Est-ce encore possible et comment faire ?
01:31Je pense qu'il faut se faire caisse de résonance, de cette solidarité, de cette hospitalité qui existe chez les citoyens
01:38pour dessiner le contre-récit qui sera opposable au récit qui s'est imposé ces dernières années de la part des populistes.
01:46Et s'inspirer de la société civile finalement.
01:48Et donc s'inspirer de la société civile.
01:50Je pense qu'en fait, les citoyens valent mieux que leurs caricatures.
01:53Vous savez, à un moment dans le livre, on fait un parallèle avec ce qui s'est passé avec le changement climatique.
01:58Parce que c'est vraiment très intéressant et le parallèle a vraiment beaucoup de sens.
02:02Dans la mesure où, pendant très longtemps, les politiques en fait ont été aussi assez indifférents à la question du changement climatique.
02:09Et c'est plutôt de la société civile que c'est venu.
02:12Et des scientifiques d'ailleurs, c'est très intéressant le parallèle.
02:15Et il a fallu une mobilisation énorme de la part de cette société civile
02:20pour réussir à faire pression suffisamment sur les politiques
02:24pour qu'ils deviennent enfin caisse de résonance.
02:27et qu'on engrange petit à petit finalement des politiques publiques,
02:30même si ce n'est pas encore tout à fait idéal et le bout du chemin.
02:34Mais enfin quand même, on est mieux que ce qu'on était dans les années 70
02:38quand les premiers de la société civile prêchaient dans le vide et dans le désert.
02:42Oui, la croissance zéro, la décroissance.
02:44Exactement.
02:44Et bien à l'égard des politiques migratoires, c'est un peu pareil.
02:48Parce que finalement, à force de discours hostiles ces dernières années,
02:53s'est installée chez nombre de gens une espèce de migration-scepticisme,
02:58un peu comme on a un climato-scepticisme.
03:00Et en réalité, il faut absolument refaire la place au récit des gens
03:05qui, en se confrontant à ce que sont ces nouveaux venus sur notre territoire
03:10et ce qu'ils apportent sont les mieux à même de dire.
03:14Finalement, en fait, c'est quand même très utile et très positif.
03:18Et puis franchement, accueillir dignement quelqu'un qui a fui
03:23les salles de détention et de torture de Bachar el-Assad,
03:27vous savez quoi, je me sens plus humain en fait en l'ayant fait.
03:31Je me sens même moi-même mieux, même à titre, j'allais dire, égoïste.
03:35Racontez tout ça, voyez, c'est tellement absent du débat public
03:39et c'est ça qui permettra de lutter contre ce migration-scepticisme.

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