L'interview d'actualité - Bruno Rebeuh

Télématin

29/05/2025

Pour son interview d’actualité, Télématin reçoit Bruno Rebeuh, ancien arbitre de tennis français.

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00:01Il n'y a pas que la Ligue des Champions dont on a parlé il y a quelques instants, il y a aussi Roland Garros.

00:05Évidemment, ça ne vous a pas échappé, on est même déjà au deuxième tour et on va partir avec notre grand témoin dans les coulisses de ce tournoi

00:11parce qu'il a côtoyé les plus grandes stars des cours.

00:15Je suis ravie de vous rencontrer et on l'est tous. Bonjour Bruno Rebeu.

00:18Bonjour.

00:18Merci d'être avec nous ce matin. Vous êtes un ancien arbitre international. Votre livre, il est super.

00:23Vous publiez Retour Pleine Ligne chez Albain Michel et même ceux qui, comme moi, ne s'y connaissent pas si bien en tennis,

00:30apprennent plein de choses sur l'envers du décor et notamment de Roland Garros.

00:35Quand on est arbitre, on gagne un plateau, c'est ça ?

00:38À Roland Garros, on a un beau plateau pour l'arbitre de la finale.

00:41Donc vous en avez dix ?

00:42J'en ai dix.

00:42Voilà, il a dix plateaux parce qu'il a arbitré dix finales de Roland Garros. La première, c'était en 1989.

00:48Qu'est-ce qu'on ressent quand on monte là sur son perchoir, qu'on a ce public qui est chauffé au max, on vous voit là,

00:54ce public est chauffé au max et ces joueurs aussi qui rentrent sur le cours avec autant d'enjeux ?

01:00Il y a beaucoup de pression quand même et beaucoup de tensions. Il m'est arrivé, j'ai arbitré des milliers de matchs,

01:08mais toujours avant le match, je vais faire la petite pause pipi pour rien d'ailleurs.

01:12Ah, vous aussi ?

01:13Oui, parce qu'on est toujours tendu et les choses deviennent mieux et beaucoup plus agréables quand la partie commence

01:20et quand les premières annonces arrivent. Mais c'est vrai qu'avant chaque match, on est toujours un peu tendu.

01:24Mais vous le dites, vous arrivez quand même à être spectateur de ce que vous voyez ?

01:28Oui, parce qu'au bout de quelques années, comme vous, comme chacun dans son métier, on a des automatismes,

01:36on a des attitudes qui sont beaucoup plus décontractées et on peut vivre le match, on peut être spectateur absolument.

01:42Vous avez eu un attachement particulier à certains joueurs, à certaines techniques ?

01:47Vous avez eu des chouchous aussi ? Parce que ce n'est pas évident d'arbitrer un match où on a son chouchou.

01:51Oui, je vous dirais, pour être honnête, j'ai eu quelques joueurs avec qui j'avais beaucoup plus d'atomes crochus

01:59et parce que j'aimais ce genre de joueurs, j'ai eu beaucoup de rapports et j'aimais beaucoup Jimmy Connors,

02:03par exemple, parce que c'était un véritable battant, il a joué jusqu'à 40 ans.

02:08Et puis, il y avait d'autres joueurs qui étaient des joueurs exceptionnels, avec beaucoup de charisme,

02:13les Boris Becker ou les John McEnroe, bien évidemment, même s'ils n'étaient pas faciles à arbitrer.

02:18Mais je pense que tous les arbitres ont quand même leurs joueurs préférés,

02:21même si sur le cours, on doit être neutre et professionnel.

02:25On est quand même humain et on a un cœur et on a aussi des penchants.

02:29Et en même temps, il faut prendre la bonne décision et ça, ça n'est jamais simple.

02:33Vous êtes d'un temps, vous n'en prendrez pas Ombrage, nous aussi,

02:36où l'arbitrage ne se faisait pas avec l'image, ce n'était pas un arbitrage électronique non plus.

02:43Vous êtes d'un temps où en fait, tout reposait sur vos épaules finalement, ces décisions.

02:47Qu'est-ce que vous en pensez, vous, de l'arbitrage électronique ?

02:50Je pense que c'est une bonne chose parce qu'il faut vivre avec son temps.

02:53Mais je pense qu'on est allé un petit peu trop loin.

02:56Je pense que l'arbitrage électronique doit aider les arbitres, mais certainement pas les remplacer.

03:01C'est ça.

03:02Roland-Garros, c'est le dernier bastion qui tient encore aujourd'hui tous les tournois du monde entier.

03:07À l'exception de Roland-Garros, on supprimait les juges de ligne.

03:10Vous trouvez que c'est bien que ça reste à Roland-Garros, ça ?

03:12J'espère que ça va rester parce que ça fait partie du décor, les juges de ligne.

03:17Et puis la partie humaine est quand même très très importante.

03:21Le président de la fédération a dit que ce seront les joueurs qui vont décider de l'avenir de l'arbitrage non électronique à Roland-Garros.

03:29On attend de voir quelle sera la décision, mais ce ne sera pas facile parce que tous les autres tournois ont supprimé l'arbitrage.

03:34Samuel, vous nous aviez fait découvrir l'image de Zverev en train de photographier lui-même.

03:39On va la voir peut-être cette image.

03:40Oui, parce que les joueurs en viennent à contester les décisions arbitrales en prenant certaines photos

03:45parce qu'il y a semble-t-il parfois un décalage entre la décision pas tellement de l'arbitre, mais la décision électronique et la réalité.

03:52Donc on est sur un système qui, contrairement à ce qu'on pourrait croire, n'est pas infaillible, le système électronique.

03:57Surtout sur terre battue, qui est une surface vivante.

04:00On a encore la possibilité d'aller voir les traces et de pouvoir vérifier.

04:04Donc pour moi, ce n'est pas nécessaire d'avoir un arbitrage électronique sur terre battue.

04:08Vous auriez déjugé la machine dans le cas de Zverev ou pas ?

04:11On ne peut pas la déjuger.

04:12Les armines ne peuvent pas la déjuger parce qu'ils sont obligés d'aller à 100% avec la machine.

04:17Mais c'est vrai qu'il y a eu quelques défaillances.

04:19On l'a vu avec certaines zones d'ombre au tournoi de Rome récemment,

04:23où la machine a été assez plantée.

04:28C'est ça, on peut le dire comme ça.

04:30Je pense que ça, ça peut être réglé.

04:31Mais encore une fois, supprimer les juges de ligne serait pour moi une grosse erreur.

04:37Parce qu'il y a tout l'écosystème de l'arbitrage.

04:39Aujourd'hui, les juges de ligne qui sont à Roland-Garros,

04:41donc arbitrent toute l'année dans leur ligue, dans leur région.

04:44Ils ont la carotte de Roland-Garros.

04:46Si demain, on leur supprime Roland-Garros,

04:48que va devenir l'arbitrage dans les clubs ?

04:49C'est un métier qui sont peut-être naïfs, mais ce sont des arbitres professionnels ?

04:53C'est des gens qui risquent de perdre leur boulot ?

04:55Ou c'est du bénévolat ?

04:56Non, il y a aujourd'hui une dizaine d'arbitres professionnels dans le monde.

04:59Et tous les autres arbitres qui sont là sont des arbitres bénévoles

05:03qui ont travaillé toute l'année, comme je le disais, dans leur ligue

05:05et qui viennent arbitrer pour le plaisir à Roland-Garros.

05:08Bruno Rebeu, un mot et une anecdote rapide sur chacun des joueurs qu'on voit là.

05:13McEnroe, André Agassi, Yannick Noah.

05:16McEnroe ?

05:16Alors McEnroe, je me souviens, sur un tournoi aux Etats-Unis,

05:21il s'entraînait la veille de son match avec Mats Villander

05:23et je ne sais pas pourquoi, il a voulu apprendre certaines grossièretés en suédois.

05:29Le lendemain, je l'arbitre et puis il savait bien évidemment que j'étais français,

05:33il savait que je parlais anglais et il a dit quelques gros mots en suédois

05:38et je l'ai sanctionné.

05:39Alors il était très en colère, non pas que je le sanctionne,

05:42mais il me dit pourquoi toi tu parles suédois ?

05:44Et j'avais appris, nous donc les arbitres, on apprenait à l'époque quelques gros mots

05:48dans toutes les langues pour pouvoir sanctionner.

05:50Et c'est très drôle ce que vous êtes l'arbitre qui l'a le moins détesté,

05:53vous a-t-il écrit quand il vous a dédicacé un livre ?

05:55André Agassi, là on le voit sans sa perruque.

05:57André Agassi, la fameuse histoire de la perruque,

05:59la veille de Roland-Garros 90, il a des soucis avec sa perruque dans sa chambre d'hôtel

06:06et il est complètement paniqué, il ne sait pas comment la refixer au mieux

06:09et le lendemain, il perd cette fameuse finale contre Andrés Gomez

06:12où il est perturbé parce qu'il avait une peur terrible de perdre sa perruque devant tout le monde.

06:18Yannick Noah, lui ça a été votre pote à l'école ?

06:21Mon pote à l'école, même lycée à Nice, c'était un joueur extraordinaire comme tout le monde sait,

06:28mais Yannick pouvait être très sympa deux minutes avant le match

06:32et puis quand il rentrait sur le cours, il était déjà dans sa bulle,

06:34ça devenait le guerrier et souvent il ne nous adressait même pas la parole pendant ses matchs.

06:39Vous avez des entrées gratos vous pour Roland-Garros ?

06:42A vie !

06:43Vous distribuez un ici, on en veut.

06:46Merci infiniment d'avoir répondu à nos questions Bruno Rebeur.

06:49On fera, s'il vous plaît, les joueurs sont prêts.

06:51Silence, s'il vous plaît, les joueurs sont prêts.

06:53Sont prêts, ils sont prêts !

06:55Retour, pleine ligne, c'est aux éditions Albin Michel.

06:58Merci infiniment.

06:59Merci.

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